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Avant-propos
L’ignorance porte à croire et à prier,
la connaissance à prier de croire.


L'enfer de la guerre enseigne
que le pire est endémique.
Tout comme l'hypocrisie, que je m'évertue
à banir de mes considérations.

Définitions
L'Hominisation
  • Étape fort mal connue et indatable de l'évolution humaine qui voit Homo se transformer en Être Humain par l'acquisition de la conscience.
  • Comment l’Homme a-t-il basculé dans le bassin de science que nous représentons aujourd’hui et pourquoi seule l’espèce humaine en a-t-elle bénéficié? L’hypothèse la plus vraisemblable à ce jour est que nous le devons à la bipédie. Selon cette thèse, la position verticale aurait favorisé le raccourcissement du canal pelvien de la femme et donc diminué l’espace réservé aux bébés Hominidés. Lorsque ce dernier dépassa le volume du canal pelvien, l’accouchement prématuré devint inévitable et ce avant la maturité complète de son cerveau. C’est en complétant, de son vivant, cette maturité de seulement 25%, que bébé Homme amplifia progressivement sa capacité d’apprentissage. Maturité qui, chez les autres primates, est au minimum de 40%. Cette hypothèse corrobore le sentiment déjà acquis sur la très longue durée du processus et éclaircit logiquement et intelligiblement cette hominisation ou 'conscientisation', le passage le plus mystérieux et significatif de l’évolution.
La Conscience
  • La conscience est une faculté cognitive qui permit à l'Humain, suite à l'hominisation, de se différencier de l'animal. La perception de la matière, de l'espace et du temps est le signe majeur de l'acquisition de la conscience [propre de l’homme] [homo conscius].
  • Sans elle, l'Homme ne serait donc pas ce qu’il est. Il aurait continué son errance insouciante, sa chasse instinctive, sa vie sans mémoire. Il se serait contenté, comme avant, de naitre et de mourir. Mais entre ces deux étapes qui sertissent la vie, il apprit à penser, dessiner, parler, écrire, construire ou juger, conscient mais souvent inconscient d’être le seul à avoir fait sortir l’univers de son anonymat, le transformant pour la première fois, en une relative réalité pour une espèce vivante. Les lions, les singes ou les serpents vivent, chassent, s’accouplent mais ne savent pas ou ils sont, ni ne perçoivent qu’ils appartiennent à un tout. L'Homme lui, compris que les dinosaures l’avaient précédé, nomma les planètes du système solaire, voyagea dans l’espace et sais désormais, non seulement que sa Terre ou sa propre vie ne lui appartiennent pas, mais aussi qu’elles ne sont pas éternelles.
  • La conscience, dès son indatable apparition, devient aussi la place-forte de la croyance, ce réservoir de credo protecteurs ou conquéreurs dont la Nature n'omit pas, dans son réflexe protecteur, de doter le cerveau humain en guise de système immunitaire psychique.
Acceptationniste
  • Les acceptationnistes sont les Humains qui acceptent l’Univers tel qu’il est. La question du credo ne se posant pas, ils accumulent les caractéristiques des athées et des fatalistes. En fait, à l'inverse des récusationnistes, ils ne font qu'accepter la vie et le monde qui leur sont proposés sans en refaçonner mentalement la réalité.
Récusationniste
  • Les récusationnistes sont les Humains qui récusent ce que leur offre l'univers, ne le concevant que par le biais de credo variés comme les cultes, les religions... Ce credo est superposé à l'univers qui, comme on le sait, ne répond pas aux questionnements. Mais comme ces credo sont subjectifs et créés de toute pièce puisque générés par l'esprit humain, les réponses qu'ils proposent, bien que souvent apaisantes, le sont aussi.
  • Les récusationnistes sont encore majoritaires dans le monde, mais l’écart se resserre. Selon les dernières estimations, environ 2,3 milliards de personnes se déclarent chrétiennes, 2 milliards sont musulmanes, 1,2 milliard hindoues, et plusieurs centaines de millions adhèrent à d’autres religions comme le bouddhisme ou le judaïsme. Cela représente plus de la moitié de la population mondiale.
  • En parallèle, les acceptationnistes - incluant les athées, agnostiques et ceux qui se disent sans religion — sont environ 1,9 milliard, soit près d’un quart de la population mondiale. Leur nombre est en forte croissance, notamment en Europe, en Amérique du Nord et en Océanie, où ils représentent parfois plus de la moitié de la population.
  • Donc, pour l’instant, les récusationnistes sont plus nombreux, mais la tendance mondiale montre une montée significative de l’acceptationnisme.
Schizophrène
  • Les schizophrène sont généralement des Humains dont l’esprit est fractionné, comme l’indique si précisément le sens grec de ce mot (schizein: fractionnement, phrèn: esprit). Dans le cadre de cet ouvrage, c'est le nom que j'attribue à ceux qui, à l'instar des agnostiques, ne savent pas s'ils sont acceptationnistes ou récusationnistes.
La Matière
  • La matière désigne l’ensemble des composants et objets, naturels ou synthétiques, qui compose notre environnement. Elle est, au sens classique du terme, caractérisée par une masse et un volume.
  • La matière est constituée d’atomes ou de molécules (assemblage d’atomes). Les atomes sont entre cent mille et un million de fois plus petits que le diamètre d’un cheveu (10-10m) et constituent les briques élémentaires qui permettent de différencier un élément chimique d’un autre. Au total, il existe actuellement 118 éléments regroupés dans un tableau périodique des éléments, aussi appelé tableau de Mendeleïev
  • Un atome est composé d’un noyau, situé en son centre, et d’un nuage d’électrons en mouvement autour. Il est essentiellement composé de vide. En effet, si le noyau était une balle de tennis, le nuage électronique s’étendrait à environ 6 kilomètres de la balle.
  • Le noyau d'un atome est composé de protons et de neutrons qui tiennent ensemble grâce à la force nucléaire forte. Protons et neutrons sont eux-mêmes composés de grains de matière encore plus petits, les quarks. Ces derniers sont maintenus ensemble grâce à des échanges continus de gluons, des particules élémentaires qui appartiennent à la famille des bosons.
Les Dimensions
  • les petites dimensions
  • Le millimètre mm (millième de mètre, 10-3m). Il est difficile de manipuler avec ses doigts un objet plus petit que 1mm.
  • Le micromètre ou micron µm (millième de mm, 10-6m) : l’épaisseur des bulles de savon, quand elles font de jolies couleurs, est de quelques microns.
  • Le nanomètre nm (millième de µm, 10-9m) : c’est la taille d’une petite molécule comme la molecule d’octane.
  • Le picomètre pm (millième de nm, 10-12m) : Une dizaine de pm c’est l’amplitude de vibration typique du tympan de l’oreille humaine pour un son à la limite d’audibilité (c’est beaucoup plus petit que la taille de l’atome d’hydrogène, pourtant le plus petit des atomes !).
  • Le femtomètre fm (millième de pm, 10-15m) : l’échelle de taille des noyaux atomiques. On dit aussi "1 fermi", du nom du physicien italien.
  • L’attomètre am (millième de fm, 10-18m) : Il n’y pas d’ "échelle naturelle" au niveau de l’attomètre. La matière n’a pas de structure avérée à cette échelle ou à des échelles plus petites, on ne considère plus que des particules élémentaires, (électrons, quarks, neutrinos...) sans structure et sans taille.
  • les grandes dimensions
  • Le kilomètre km (mille m, 103m) : à partir de quelques km on hésite à faire un trajet à pied...
  • Mille km (103 km ; on devrait écrire Mm, mais l’usage est de dire 1000 km plutôt que 1Mégamètre...) : C’est la dimension d’un pays comme la France. Le diamètre de la terre est d’environ 13 000 km.
  • Million de km (106 km ; on devrait écrire Gm, pour gigamètre) ; typiquement un aller-retour terre-lune.
  • Milliard de km (109 km ; on devrait écrire Tm, pour Téramètre) ; typiquement la distance soleil-jupiter, ou encore la distance que parcourt la terre en une année sur sa trajectoire autour du soleil.
  • En astronomie, des unités spécifiques ont été introduites, afin d’éviter de manipuler des nombres toujours plus grands.
  • L’unité astronomique (UA) est par définition la distance moyenne terre-soleil : 0,15 milliard de km ; utile pour exprimer les distances à l’intérieur du système solaire. Attention :"ua" (en minuscules !) désigne également l’unité atomique (le "rayon de Bohr" de l’atome d’hydrogène), qui donne l’échelle naturelle des distances pour les atomes, molécules, arrangements cristallins. L’unité atomique valant 53 picomètres, il y a peu de risques de confusion avec une unité astronomique, 3000 milliards de milliards de fois plus grande !
  • L’année-lumière: (AL) la distance que parcourt la lumière en une année. Par comparaison, 1UA vaut à peine 8 minutes-lumière...
  • Le parsec (pc): par définition, c’est la distance d’où un observateur verrait la trajectoire de la terre autour du soleil comme ayant une demi-ouverture d’une seconde d’arc : 1pc vaut donc environ 200 000 UA. Ou encore 3,26 AL. La distance moyenne entre galaxies est typiquement d’un mégaparsec (1 Mpc).
La Flèche du Temps
  • La flèche du temps est une expression introduite en 1928 par Arthur Eddington pour décrire le phénomène selon lequel le temps semble s'écouler toujours dans la même direction. Cette expression recouvre un ensemble de théories qui explique pourquoi le temps s'écoule de manière unidirectionnelle.
  • La flèche du temps fait partie des problèmes non résolus de la physique ehref=t elle suscite plusieurs controverses. Ces dernières apparaissent en raison de l'invariance dimensionnelle des équations fondamentales de la physique, alors que, contrairement aux autres dimensions, le temps semble avoir une direction irréversible.
  • La flèche du temps peut être appliquée à plusieurs domaines, notamment dans ceux de la physique, des statistiques et de la cosmologie. Elle possède également un lien très fort avec la philosophie et la psychologie car elle est indissociable des perceptions humaines. Ne relevant que de théories, plusieurs hypothèses alternatives existent, telles que la flèche gravitationnelle du temps ainsi que le temps en tant qu'illusion.
Le Principe
  • Tel qu'il apparaît, avec ses dimensions à nos yeux infinies, son vide glacial autant qu'irrespirable et ses milliards d'objets en tout genre, l'Univers semble répondre à un Principe dont le code illisible et interdit aux humains, cette fameuse mécanique quantique, cache bien le secret du Quoi, du Comment et peut-être même du Pourquoi.
  • Pain bénit pour les récusationnistes de tout bord: le flou et l'impénétrabilité du Principe permettent les scénarios les plus improbables alors qu'il se contente de régir l'Univers dans le silence le plus assourdissant possible. Silence inconfortable certes, mais tellement imposant et indéterministe que nul autre scénario, axiome ou dogme ne saurait s'en affranchir ou ne serait-ce que le déranger.
PhiloScience
La Croyance
  • L’hominisation fut une métamorphose profonde et sans précédent, qui contraignit Homo à troquer une part de son instinct insouciant contre la pleine conscience de sa vie. Il découvrit qu’il devait mourir, qu’il pouvait souffrir — physiquement, certes, mais aussi à cause de ses pensées. Le deuil, jadis balayé d’un coup de griffe, devint douleur partagée. La perte d’un proche ne se limitait plus à un cri ou un abandon : elle devenait un gouffre d’empathie.
    Réfléchie. Inévitable.
    Il était désormais informé de la nouvelle infirmité que sa reflexion lui inflige et rien ni personne ne pouvait l’en soulager, une espèce de pic, en somme, en travers de la cuisse d’un manchot, incapable, seul, de s’en séparer. C'est cette douleur lancinante et persécutante qui poussa la nature à réagir comme elle le fait pour toutes ses créatures.
  • A l'instar du système immunitaire duquel elle avait doté le vivant, elle dut aussi s’investir pour protéger le "pensant", ces êtres victimes de leur nouvelle conscience, exposée elle aussi à moult périls abstraits, soit, mais tout aussi néfastes. La croyance, fut ce bouclier. Elle n’est donc pas le fait de croire en quelque chose, mais plutôt une propriété humaine naturelle, au même titre que l’intelligence, la parole ou l’empathie, dont le but ne serait autre que mettre la conscience à l'abri de ses propres démons, des fruits de sa fonction.
  • La croyance endigue les idées noires, les déceptions, la tristesse, tous ces poisons que la conscience fabrique à son insu, et contre lesquels nul n’est à l’abri. Des poisons silencieux qui, sans l’ombre d’un doute, entraîneraient vers le fond quiconque n’aurait de havre auquel se raccrocher: une âme bienveillante, un proche... ou un credo capable de projeter l’esprit hors de la réalité. Même passagère. Même crue. Même insupportable.
    Et pourtant, parfois, nécessaire à affronter.
  • La croyance n’est donc pas une option philosophique ou un choix personnel, mais bien une condition sine qua non de notre santé spirituelle. Et comme pour toutes les choses de la nature, elle n’est pas sans lacunes, loin de là, car c’est bien trop souvent à coup de n’importe quoi qu’elle calme nos pourquoi, nous racontant tout et rien, nous mentant, nous berçant de fables souvent aussi néfastes que séduisantes. Autant nos anticorps sont efficaces et perfectionnistes dans leurs combats biologiques, autant notre croyance, sensée nous protéger du blues, est perméable et infidèle. Elle a plus de la mare stagnante et microbienne que du lac bleu azure. Tout et tous peuvent la pénétrer, l’influencer, la manipuler. Elle ne demande qu’à croire et c’est bien là son principal défaut. Elle servira donc de réservoir aux religions, sectes, chamans, astrologues ou voyantes qui, tout au long de l’histoire humaine, y ont déversé leurs rituels, leurs prières, leurs totems, leurs icônes et autres amulettes. Ersatz de la faiblesse psychologique de l’Homme, la croyance, dont la porte béante accueille tout bon augure, toute manne, toute bonne parole ou toute consolation, est donc particulièrement perméable.
  • C'est pourquoi, d’Attila à Hitler, en passant par Staline, Napoléon et tant d’autres, l’histoire n’a jamais manqué de combats idéalistes issus de cette perméabilité qui autorise les bon et le mauvais credo. En matière de credo justement, les terriens vont faire preuve d’une grande fertilité et les inventer en quantité industrielle; cultes et religions qui identifieront chaque peuple, chaque tribu, chaque clan, ou qu’il soit sur la planète et quelque soit son origine. Presqu'indénombrables, ils vont du totémisme aux cultes animaliers ou théistes... Certain, peu conventionnels comme la rencontre avec un extraterrestre chez les raeliens. La sacro-sainte B.A. de fumer de la marijuana parce qu'elle pousse sur la tombe du roi Salomon pour les rastafariens. Le suicide collectif pour les adeptes du «Temple Solaire» ou l’escroquerie en bande organisée dont la « Scientologie » est accusée en France mais toute ont un mode opératoire commun, l’exploitation à outrance de la croyance individuelle, ce système malheureusement aussi défaillant qu’immunitaire. Cette liste, bien sûr non exhaustive, en donne un aperçu:
  • Christianisme, islam, judaïsme, bahaïsme, hindouisme, bouddhisme, religion populaire chinoise, taoïsme, confucianisme, dieu chinois, Yin-Yang, courant syncrétiste, jainisme, sikhisme, bouddhisme Nichiren, bouddhisme Shingon, bouddhisme Tendai,· bouddhisme de la Terre Pure, bouddhisme Zen, shintoïsme, Shugendō, Bön, caodaïsme, Hòa Hảo, javanisme, zoroastrisme, Bwiti, Candomblé, Macumba, Quimbanda, Kenbwa, rastafarisme, Santeria, Sérère, Umbanda, Vaudou Ásatrú, Cananéisme, Ellinais, Hellénisme, Kémitisme, Néo-druidisme, Nova Roma, Wicca, Aladura, Alliance universelle, Amish, Amis de l'homme, Antoinisme, Assemblées de Dieu, Communauté des chrétiens, Église de l'unification (Moon), Églises du Christ internationales, Église néo-apostolique, Église universelle du royaume de Dieu, Famille (ex-Enfants de Dieu), Jakob Lorber, Mouvements issus du mormonisme, Église kimbanguiste, Legio Maria, Mouvement des Focolari, Mukyōkai, Science chrétienne, Société religieuse des Amis (quakers), Spiritisme (Allan Kardec), Témoins de Jéhovah, Universalisme unitarien, Ahmadisme, Nation of Islam, Moorish Science Temple of America, United Submitters International, Aum Shinrikyō, Mukyōkai, Ōmoto, Reiyukai, Sōka Gakkai, Tenrikyō, Kryeon, Enfants indigo, Horus, Urantia, Alice Bailey, Jane Roberts, Lobsang Rampa, Neale Donald Walsch, Églises gnostiques, Kabbalisme chrétien, AMORC, Ordre Martiniste Traditionnel, Ordre du Temple Solaire, Société théosophique, Anthroposophie, Association rosicrucienne, Rose-croix d'or, Fraternité Blanche Universelle, Energo Chromo Kinèse, Nouvelle Acropole, Église de Satan, Luciférisme, Satanisme LaVeyen, Satanisme théiste, Dianova (ex-Patriarche), École de l'essentialisme, Église positiviste, Mouvement raëlien, Pèlerins d'Arès, Scientologie, Ahmadisme, Nation of Islam, Moorish Science Temple of America, United Submitters International.
  • Certains de ces credo incluent, en outre, des sous-courants: Le christianisme, par exemple, qui en comporte une dizaine, tout comme l’islam et l’israélitisme. La longueur absurde de cette liste dispense de commentaires quant à la pertinence de chacun qui, comme il se doit, affirme détenir la vérité et, pour certains, y tiennent tant, que les moyens les plus incitatifs sont employés: prosélytisme, Inquisition, question, guerres de religions, missions, massacres, holocaustes, génocides... De quoi verser assez de sang, au cours des millénaires, pour remplacer les océans.
  • On l'aura compris, la croyance n’est donc pas un contenu, mais bien un contenant. Même un athée qui croit qu’il ne croit en rien, croit en sa non-croyance, pas moins protectrice et réconfortante pour lui que son contraire. Une valve de sécurité, en somme, pour faire baisser la pression, pour éviter le pire, là où une seule idée noire suffirait à le faire sombrer. Une chose est sûre, sans cette main tendue que la croyance incarne, qui pardonne les erreurs et nourrit les espoirs, la vie ne serait pas imaginable. Avec elle, l’Homme pourra s’en donner à cœur joie, s’investir dans l'apaisement de cette conscience trop sollicitée, mettre sa vie en scène, transformer le quotidien en un théâtre de marionnettes pour exorciser la douleur et l'épouvante qui le séquestrent. Il va se construire un monde imaginaire, à mesure de ses connaissances afin d'adoucir la nuit de cette inévitable crépuscule, y faisant même luire, au bout du tunnel, une autre lumière

    ...la lueur d’une autre vie.
Le Propre de l’Homme
  • L'expression Propre de l’Homme est un aphorisme que François RabelaisRabelais, F. (1997b). Le cinquième livre. Seuil.). utilisa dans l’Avis aux lecteurs ouvrant Gargantua (1534).
  • Puis, au fil du temps, échappant aux érudits pour s’infiltrer dans la langue courante, tantôt définition sérieuse, tantôt fourre-tout philosophique, il devint un épuisoir à convictions, où chacun projette ce qu’il veut croire de l’humain ou ce qu'il inspire, proposant termes et formules improbables... mais probables:
  • des spécificités en tout genre
  • Parole, raison, expérience de la mort, deuil, culture, institution, technique, vêtement, mensonge, feinte de la feinte, effacement de la trace, don, rire, pleur, respect, etc. – L’humain y devient un millefeuille moral à la carte et la liste est nécessairement infinie... [Derrida, J. (2006). L’animal que donc je suis. Editions Galilée]
  • des histoires tendres
  • Il n'y a pas de comique en dehors de ce qui est humain. Un paysage pourra être beau, gracieux, sublime, insignifiant ou laid ; il ne sera jamais risible. On rira d'un animal, mais parce qu'on aura surpris chez lui une attitude d'homme ou une expression humaine. On rira d'un chapeau mais ce qu'on raille alors, ce n'est pas le morceau de feutre ou de paille, c'est la forme que les hommes lui ont donnée, c'est le caprice humain dont il a pris le moule. Comment un fait aussi important, dans sa simplicité, n'a-t-il pas fixé davantage l'attention des philosophes ? Plusieurs ont défini l'homme comme un animal qui sait rire. Ils auraient aussi bien pu le définir «un animal qui fait rire», car si quelque animal y parvient, ou quelque objet inanimé, c’est par une ressemblance avec l'homme, par la marque que l'homme y imprime ou par l'usage que l'homme en fait. [Bergson, H., Ferenczi, S., & De Baecque, B. (2012). Le rire: essai sur la signification du comique. Éditions Payot & Rivages, Paris.]
  • des commentaires de Hegel
  • qui tend à vouloir oublier ou faire oublier le passé animal de l'Homme au profit d’une identité à l’aura plus prononcée: « Ce qui élève l’homme par rapport à l’animal, c’est la conscience qu’il a d’être un animal... Du fait qu’il sait qu’il est un animal, il cesse de l’être. » Ou de Boris Cyrulnik Cyrulnik, B., & Morin, E. (2021). Dialogue sur notre nature humaine : L’unité dans la diversité., plus modérés, mais aussi plus contemporains et impartiaux: « L’homme prend place dans la nature, il n’est pas contre la nature, ni surnaturel, ni antinaturel, mais il garde sa place d’homme. » [Hegel, G. W. F., Jarczyk, G., & Labarrière, P. (1993b). Phénoménologie de l’esprit. Editions Gallimard]
  • des jugements malveillants
  • inhérents aux aléas de son intelligence comme la stupidité, la cupidité, la vanité, la haine, l’inhumanité, l’égocentrisme... qui évidemment débouchent sur l'usage des stupéfiants, le génocide ou l'extermination en masse [Charmetant, E. (2008). Le propre de l’homme et l’évolution. Études, Tome 409(7), 51–60] alimentant ainsi le fonds de commerce de ses détracteurs [Pépin, C. (2024, 30 mars). L’homme est-il un animal comme les autres ? France Inter] tout en étant hors-sujet vu que l’intelligence d’une espèce ne saurait être sous-évaluée en raison de sa malsanité: certains bouchers, Hitler, Attila, Napoléon ou Staline... Ce ne sont pas l’intelligence ni la conscience qui prémunissent de l’abomination. L’histoire regorge d’esprits brillants appliqués au crime. 
  • des affirmations sans appel
  • «Le propre de l’Homme est...» ou «Le propre de l’Homme n’est pas...»
  • Ce qu’il faut retenir, c’est que malgré son air bon enfant, Propre de l’Homme désigne bel et bien une comparaison qui nous susurre que ce qui est propre à l’Homme n’est pas propre à la bête. D’accord, mais c’est très risqué. La recherche évoluant à grands pas, on n'est pas à l'abri de surprises, surtout lorsqu’il s'agit de spécificités structurelles telles que le rire que Rabelais désignait comme humain et qui, finalement, fut découvert aussi chez les singes.
  • Alors en quoi la comparaison directe avec l’Homme est-elle utile si, à l’œil nu, on voit bien que les chimpanzés ne sont pas férus de physique nucléaire? En rien effectivement, sinon à chercher maladroitement à distinguer l’Homme, ou pour certains, depuis l'existence du zoocentrisme, à le désavouer. Résultat des courses, l’actuel propre de l’homme accumule des comparaisons sans limites et surtout sans réel intérêt, comme s’il existait juste pour le plaisir de parler comme on le fait un soir sombre et pluvieux, au coin du feu, une fine à la main.
  • Quant au réel Propre de l’Homme, celui que pourrait nous révéler son cerveau, terrain d’investigation certes très peu propice aux confidences quoique grand architecte de sa suprématie intellectuelle, il est traversé par des idées encore bien trop quantiques pour être déchiffrées, mais... peut-être plus pour très longtemps, nous affirme Cécile Charrier, chercheuse à l’Inserm, pour qui le cerveau humain serait physiologiquement unique dans la faune terrestre:
  • Depuis sa découverte, il a été montré que la plasticité synaptique sous-tend nos capacités adaptatives et contribue aux processus de mémoire et d’apprentissage. La plasticité synaptique est altérée dans un grand nombre de pathologies du cerveau. Or, elle présente des spécificités chez l’humain que l’on ne retrouve ni chez les autres mammifères, ni chez les primates non-humains. Décrypter les bases moléculaires de ces spécificités est utile pour mieux comprendre en quoi le cerveau humain est unique.
  • Je suis d'avis que plus les définitions sont courtes, élégantes et esthétiques, plus elles sont aussi efficaces et pertinentes. Les interminables listes que nous propose la littérature sur Le Propre de l’Homme ne sont donc certainement pas la solution idéale pour le définir. Plutôt que de chercher ce qui distingue l’Homme de l’animal dans ses grimaces ou ses rites funéraires, pourquoi ne pas observer ce qu’il fait — concrètement — du monde qui l’entoure ? Il existe bien un moyen de le faire dans les règles de l’art en évaluant le niveau d’adaptation des espèces vivantes à leur habitat, soit à l'univers et surtout à ses paramètres, la matière-Energie, l'espace et le temps.
  • Car quoi qu'on veuille décrire ou entreprendre dans l'Univers passe inconditionnellement par une ou plusieurs de ses notions fondamentales. Les ratifications de cette affirmation ne manquent ni en nombre ni en qualité, à commencer par celle d'Albert Einstein qui, en 1905, dans sa première Théorie de la Relativité, revisite ces mêmes paramètres pour redéfinir l’essence de l’Univers donnant ainsi naissance à la plus célèbre des formules qui couronne aussi ses travaux: e=mc2 et qui, elle-même, contient justement ces dits paramètres, l’énergie (e), la matière (m) et la vitesse de la lumière (c) expression qui réunit la notion d’espace et de temps. Sa formule n’est pas qu’un calcul, c’est un manifeste. Un pacte d’interdépendance entre les briques mêmes du réel.  Cela laissait présager, déjà à l'époque, que ces paramètres se garantissaient un futur éloquent.
  • Ou encore cet article Reisse, J.(2015b). La longue histoire de la matière: Une complexité croissante depuis des milliards d’années. p 7-8. [Https : //www.cairn.info/la-longue-histoire-de-la-matiere--9782130589051.htm]. Presses Universitaires de France - PUF. https://doi.org/10.3917/puf.reiss.2011.01. de Jacques Reisse, dont voici un passage qui entérine le bien-fondé de cette analyse:
  • Le temps, l’espace et le couple énergie-matière constituent les seuls composants de notre Univers en ce sens que toute description de cet Univers, à quelque niveau que ce soit, fait appel explicitement ou implicitement à ces notions. Cette affirmation pourrait sembler exagérément matérialiste et réductionniste et ne convenir, au mieux, qu’aux physiciens, chimistes ou géologues. Qu’en est-il de la vie, de la conscience, de la pensée, de la communication ? Il est aisé de se convaincre qu’il ne peut y avoir de vie sans matière et énergie et qu’il ne peut y avoir de conscience et de pensée sans support matériel, sans neurones, sans synapses, sans neurotransmetteurs, sans ions et la liste est loin d’être exhaustive.
  • Pour en revenir au Propre de l’Homme, tous les êtres vivants sont logés à la même enseigne mais certains, comme principalement les Hommes, sont nettement plus performants. Les paramètres de l’Univers étant identiques pour tous, force est de constater que l’Homme est celui qui les manipule avec la plus grande habileté. Ce qu'il fait de la matière, la transformant à l’aide de l’énergie qu’il en extrait, n’a aucun équivalent chez les autres espèces. Idem pour l’espace qu’il parcourt physiquement avec ses véhicules terrestres, ses avions, ses sondes et ses navettes ou encore virtuellement pas ses moyens de communications. Idem pour le temps qu’il sait calculer très précisément et qui régule ou cadence l’activité humaine.
  • Le Propre de l’Homme n’étant autre que cette faculté très singulière d'exploiter avec tant de brio ce que l'Univers met à sa disposition, il ne reste donc plus qu’à statuer définitivement et sans autre condition car c’est en domptant les dieux de l’univers que l’Homme s’arrache à sa condition. Il n’est pas ce qu’il ressent — il est ce qu’il transforme et par conséquent: 
  • quiconque maîtrise la matière-énergie, l’espace et le temps autant que l'Homme, n'est plus un animal.
  • C.Q.F.D
Le Déni de Parenthèse
  • D’une falaise qui surplombe la mer, on aperçoit à l’horizon les miniatures d’énormes navires funambules sombrer dans la rougeur du soleil couchant — boule de feu pourtant si familière qui s'efface lentement sous la courbure du monde comme pour cacher sa honte de devoir mourir un jour, emmenant avec elle tout ce qu’elle a fait vivre.
  • Ce n’est pas pour demain certes, mais ne vaudrait-il pas mieux l’ignorer? La conscience de ce destin n’est-elle pas plus douloureuse que le destin lui-même qui, somme toute, aujourd'hui, ne nous affecte guère? C’est vrai, le credo a quelque peu étouffé ce vertige, mais il a aussi éloigné les Hommes, les enfermant dans des différences qu’ils cultivent à coups de différends. Rien n’est jamais totalement gratuit et si cette infime parenthèse de vie imposée par l'Univers, aussi merveilleuse et bizarre soit-elle, ne fut ouverte, rien n'aurait changé. Nul n'était censé savoir que l'Univers existe et notre fragile témoignage humain, aussi ému soit-il, n’altérera ni sa course, ni son sens, ni sa durée.
  • Peut-être avait-il lui-même besoin de témoins, qui sait, mais on peut en douter tant son indifférence chronique au sort de ses objets semble totale: pour lui, tout n’est que matière, sans destin. Et pourtant, elle intrigue cette parenthèse. Un peu comme la lampe désuète que les détectives pointaient sur le visage de leurs suspects dans les films américains des années soixante, on a envie de sortir du champ de sa lumière pour en savoir plus sur celui qui la tient et qui, dans la vraie vie, est à l’origine de NOUS, les Hommes, de notre vie et de notre habitat. Ça crève les yeux, l'humanité ne se plaît pas. Tourmentée par sa tournure de farce divine, d’erreur de programmation ou de dérapage incontrôlé, sa perplexité reste intacte, à tous ses niveaux: est-elle vraiment utile?
  • Alors elle se ment, l'humanité, se la raconte, se fait passer pour ce qu'elle n'est pas, elle se cherche et n'hésite pas à tuer en risquant de mourir, car, pour elle, mieux vaut ne plus être que n'être qu’ignorée, ou asservie. Les Hommes, menteurs par prudence ou par réflexe, s’habillent de mots volés, de gestes appris, de couleurs d’emprunt. Ce qu’ils fuient, surtout, c’est d’avoir à vivre ce qui leur est donné, de passer pour faible, d'être démasqué, de ne pas sembler respirer l'air d'un autre part. Comme ces convives qui salent avant de goûter, l’Homme imite avant de comprendre. Et parfois, il finit par mourir sans jamais avoir su si la vie — la vraie — valait la peine d'être vécue. Pourquoi faire simple lorsqu'il est si simple de faire compliqué.
  • De ce vertige naît un clivage fondamental — presque plus profond que celui du genre, qui pourtant divise l’espèce en deux moitiés inséparables. D’un côté les acceptationnistes comme Macchiavelli, Da Vinci, Freud ou Oscar Wilde, quelques rares figures prêtes à regarder l’absurde en face et à embrasser l’inconfort et de l’autre, les récusationnistes qui n’avancent que sur des rails sans failles de peur de s’égarer dans l’immensité du monde, sa mixité, son infinitude. Ils dessinent eux-mêmes les barreaux de leur cage, par prudence ou par foi, et la défendent bec et ongles — au nom d’une descendance qu’ils croient, à tort ou à raison, pouvoir prémunir du chaos.
  • Pléthore de philosophes se sont penchés sur le sort de l’humanité. De Platon à Foucault en passant par Nietzsche et son "surhomme", ou encore Cioran qui la traitait d’erreur tragique de la nature. Moi, je pencherais plutôt pour un dérapage. L’Univers, lui, ne se trompe pas. Mais parfois il produit des à-côtés qui n’étaient pas prévus. L’humanité pourrait bien être cela : un effet secondaire, un sixième doigt inutile, mal soudé à une main cosmique. Si rare, d’ailleurs, que nulle autre planète voisine ne semble l’avoir hérité.
  • Alors peut-être est-ce mieux ainsi, faire semblant qu'elle n'existe pas ou qu'elle ne se refermera jamais. Tant qu'on peut la nier, l'inanité de cette cette parenthèse... autant ne pas s'en priver.
Le Système Existentiel
  • Dans ma vision du monde, le Système Existentiel est tout ce dont la vie a besoin pour éclore et se matérialiser en un être pensant. En gros, il faut un univers, une planète encline à accueillir la vie et, évidemment, la magie du Principe. Quelques exigences fondamentales régissent ce système: l'Homme n'est pas à l'origine de sa vie bien qu'il puisse en décider la fin sans toutefois la maitrîser sous toutes ses coutures. De plus, les Hommes naissent parfaitement inégaux physiquement, psychologiquement et socialement.
  • Les dimensions de l’Univers sont tellement démesurées qu’il est insondable. Même exprimées en années-lumière, en pétamètres ou en parsecs, elles n'ont aucun sens. Lorsque je lis Une année-lumière est égale à la distance parcourue par la lumière dans le vide pendant une année julienne, soit environ 9461 milliards de kilomètres, soit encore, en ordre de grandeur, environ 10.000 milliards de kilomètres (1013 kilomètres), 10 pétamètres ou environ 0,30659 parsec, eh bien je me demande si cela veut effectivement dire quelque chose. Ces distances ne sont parcourables ni en navette, ni même par la pensée et quand bien même elles le fussent, nous serions bien trop morts depuis des lustres, pour profiter du petit déjeuner offert à l’arrivée.
  • Nonobstant, certains enseignants désabusés, parlent de notre planète avec une certaine désinvolture comme si tout était normal. Ils ne s’ébahissent plus, devant ces chers élèves, de ce monde qui ne correspond à rien de tangible. Il est notre habitat mais, curieusement, ne respecte pas les règles qu’il impose aux immeubles, construits eux, sur un solide socle en béton, profondément enfoui et consolidé dans le sol. L’immeuble se doit d'être ancré mais notre planète, elle, se balade dans le vide astral sans que cela ne perturbe l’ordre public. Pas même les enfants qui, assommés par les jeux vidéo, ne le raconteront peut-être même pas au dîner le soir de la leçon sur le sujet. Les enseignants le répètent chaque année, depuis des générations et la Terre continue de tourner. Mais si, par mégarde, d’aucuns imaginaient la quitter, cette bonne Terre, pour mieux connaître l'Univers et profiter de l'espace qui l'enveloppe, ils se sentiraient un peu comme... emprisonnés.
  • Vue d'une falaise, l'immensité de la mer dépasse l'entendement. Le regard se perd dans cette tache bleue presque infinie où l’horizon exalte la courbure du globe et le seuil de l’espace qui nous est concédé lorsqu’il rejoint l’azur d’un ciel serein et trompeur. Plus que trompeur, sournois, malin, aguichant tant il fait miroiter cet excès de liberté. Cette envie de voler toujours plus haut, toujours plus loin, pour satisfaire ce sens inné de la découverte. Celui qui, depuis la nuit des temps, emmène les Hommes vers de nouvelles terres, de nouveaux espaces et qui, un jour du vingtième siècle, les déposa sur la Lune. Mais dans le cas du ciel, ce sens de la découverte est quelque peu berné. Il est bleu, certes, beau, très beau parfois, mais aussi impraticable que spectaculaire. De jour, et par temps clément, sa couleur nous enivre et de nuit, sur son trente-et-un, avec son smoking plein de strass et de paillettes, c’est la danseuse du Crazy Horse qui nous en met plein la vue, nous épate et nous flatte. On ne sait plus quelle Ourse regarder, quelle Lune chevaucher, quelle étoile surprendre filer comme une donzelle effrayée, alors qu’elle n’est autre qu’un gros caillou qui pousse sa dernière course. Un festival démesuré, en somme, la revue hollywoodienne des soirs d’été, de quoi éblouir les yeux des enfants et des grands. Mais lorsqu’on passe à l’acte, qu’on s’envole pour conquérir sa grandeur, pour s'évader et se nourrir de son espace infini, l’air commence à manquer, on suffoque. Avec l’altitude, l’oxygène se fait rare, l’apesanteur s’empare du corps et, faute d’un matériel respiratoire très sophistiqué, la vie s’éteindrait comme une bougie en fin de cire, rappelant les téméraires, ceux qui rêvent de braver son hostilité, à la réalité par cette bonne vieille atmosphère de laquelle nul ne peut s'échapper.
  • L’Univers est donc bien le geôlier de la vie et l'air, le formol de sa conservation. On enlève le formol, et la vie disparaît à jamais.
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    Un peu comme dans ce dessin de l’illustrateur italien Osvaldo Cavandoli, sur lequel je suis tombé par hasard en surfant. Une éloquente schématisation du vivant et de son “extraction” à partir du néant. Certes, je ne connais pas le but originel de ce dessin, mais il illustre parfaitement, par un simple trait qui fait corps avec l’espace, le concept du Système Existentiel. Le vie a besoin de l’univers, mais ce n’est pas réciproque.
  • Même si Uri et Miller, et d’autres par la suite, obtiennent en laboratoire, dès 1953, quelques-unes de ces briques élémentaires de la vie que sont les acides aminés, cela n’indique ni comment ils deviennent une molécule d’ADN, ni comment la vie prend forme. Le seul fait d’avoir une intention, de préméditer un geste, de le réaliser et d’en imaginer le résultat, d'être un Humain en somme, est une extraordinaire première terrestre qui, à notre connaissance, n’eut jamais son égal.
  • Dans ce dessin, l’animation apparaît comme une déformation de la déjà existante réalité, aussi dénuée qu’elle puisse paraître. Et c’est effectivement le cas. À part le côté abstrait de la vie dont on ignore tout et qui fait que le vivant est vivant, tout le reste, le corps et sa matière, ou même le cerveau et ses pensées sont formés d'amas de particules élémentaires déjà disponibles dans la nature, apparues avec la création de l'univers. “Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme”” disait le célèbre chimiste et philosophe Lavoisier, avant d'en perdre la tête (au sens propre)... C’est valable en chimie mais aussi pour la Nature toute entière. Un peu à l’idée de la création de l’Homme à partir de l’argile dans les cosmogonies anciennes. Et puis, il suffit de tirer sur la ligne de part et d’autre du dessin pour faire disparaître la vie sans pour cela modifier d’un cheveu la composition de l’Univers. La vie quitte le corps mais les particules qui y étaient affectées sont entièrement et éternellement recyclées. Pas étrange, donc, que le banal verre d’eau, dont chacun se désaltère quotidiennement, contienne des particules vieilles de plusieurs milliards d’années.
  • Alors c’est vrai, on pourrait se demander ce qui est plus impressionnant: Une planète sphérique et flottante au beau milieu de l’espace qui fait croire à tous ses habitants qu’ils ont la tête en haut et les pieds en bas, ou la vie qui anime des êtres à sa surface? En bref, une planète ou la vie? Qui pourrait jamais y répondre? Les deux sont insolites et inattendus bien qu’ils ne soient qu’une infime conséquence du géant cosmique qui les abrite. La vie n’est pas universelle mais subjectivement planétaire et peut-être même seulement terrestre. Et dans le cas où l’on se tromperait, c’est à dire qu’elle existe bel et bien dans quelque lointaine galaxie, cela ne ferait aucune différence. Aucune incidence ne serait à noter sur notre réalité vu la démesure des distances galactiques et l’impossibilité de rencontrer ces heureux élus. Démesure qui d’ailleurs sert aussi d’indice pour prendre acte de son inutilité. La vie a beau être capitale et unique pour chaque individu sur Terre, elle n’en est pas moins dérisoire, improductive et superflue au niveau universel. L'Homme s'y attache égocentriquement, comme d'habitude, mais l'univers n'en a que faire. Il la dédaigne même, vu qu'il a bien d'autres astres à fouetter.
  • Elle apparaît sur Terre, sans raison, comme si à travers elle, l’Univers avait besoin de dévoiler sa beauté ténébreuse. Comme s’il cherchait un témoin de son infinité pour s’extirper de son secret. Mais il n’en est rien. Le passé nous raconte que les vies, qui elles, ne sont pas éternelles, vont et viennent comme dans un moulin sans laisser de souvenir. Le contraire éviterait aux archéologues de reconstruire le passé de l’humanité grâce aux seuls fragments d’os découverts çà et là dans l’immensité des continents. Les vies passent, les espèces naissent et meurent sans que la machine géante ne s’en aperçoive.
  • Prison bleu et verte à défaut d'être dorée, l’univers semble ne pas être exactement ce qu’on veut nous faire croire. On voudrait inventer une raison à sa présence, une origine, comme à un bébé trouvé sur le perron, qu’on porte sur son cœur et qu’on promet de chérir. On le sonde, l’observe et l’écoute jour et nuit. On le voudrait multivers depuis que, dans le cerveau aiguisé ou tourmenté d’astrophysiciens audacieux, d'autres univers s’invitent à la fête. Il faut croire que le nôtre ne suffisait pas à nourrir les neurones de nos savants, et leurs espoirs. Dans la littérature, il est tantôt simple, tantôt complexe, tantôt début et tantôt suite d’un monde qu’on ne sait pas. On le tâte sans grands résultats, sinon quelques constatations qui n’ont rien à voir avec une réelle interprétation de son essence. La vérité, c’est que pour les Hommes, il n’en a pas. De sens. Quant à son essence, elle ne nous est pas vraiment destinée. L’univers nous héberge, nous nourrit, nous extermine et personne ne sait pourquoi. Lui non plus.
  • Par conséquent, le Système Existentiel est franc, honnête et non malléable, donc, il ne déçoit jamais. Muet, sourd et aveugle, il ne perçoit ni ne promet quoique ce soit, ni en deçà ni au-delà de la mort. Avec lui, la vie dure ce qu’elle dure et la mort est sans retour. On l’aura compris, le Système Existentiel n’est pas une option et ne dépend surtout pas de ce que chacun pense, croit ou nie. Selon les rites, les cultes, les religions de tout bord, les récusationnistes y ajouteront la vie après la mort, une promesse d’éternité, et pléthore d'artifices comme les textes sacrés, les temples ou les sacrifices... Mais aucun ne saurait l’émouvoir ou le mouvoir, modifier son cours, chatouiller la causalité de l’existence qu’il improvise pour l’humanité en général ou pour chaque individu. Pas déterministe pour deux sous, le Système ne décide de rien, ne fait qu’exister et faire exister temporairement ses créations. Ainsi, on peut préférer un rabbin pour se marier, un curé pour mourir, un coran pour s’endormir, le rythme des offices en guise de tic-tac ou les prières pour s’exprimer, le Système Existentiel demeure toujours et dans tous les cas, la pierre angulaire et inamovible de tout édifice, substance ou idée. Quoique l’on fasse, la vie n’a que ce seul et unique schéma et le credo ne pourra qu'en accabler l'image, sans jamais l’altérer.
l'Uniformité Genrée
  • L'uniformité genrée est un phénomène qui n'apparaît bizarrement pas dans les livres d'école. Soit on le trouve trop banal pour le remarquer, soit on l’a gentiment enterré sous des silos disciplinaires, ou aussi plus sûrement sacrifié sur l’autel des cloisonnements académiques. Bien que la conscience de son existence ne change rien à l'évolution de la science, il est cependant déterminant dans l'analyse de notre réalité.
  • Cette uniformité caractérise les éléments, vers le bas, à partir de l'échelle des molécules [matière]: ainsi, une molécule d'eau (H2O), donc composée de 3 atomes, ressemble parfaitement à une autre molécule d'eau alors que, dans notre quotidien, une pomme Golden n'a pas son identique. Rien en fait, à notre échelle, n'est parfaitement identique à un "jumeau" du même genre. Là où l’humain s’échine à reproduire, l’univers lui, copie-colle sans trembler. Même les chaînes de production industrielles ne reproduisent jamais d'objets si identiques que deux atomes d'oxygène ou deux molécules de n'importe quoi d'ailleurs. (Le système périodique, est le tableau qui énumère les 118 éléments de base de tout ce qui existe dans l'univers (à ce jour), un élément chimique résultant de l'assemblage naturel (...ou pas) d'atomes de matière.)
  • L'uniformité genrée est donc une propriété typique des éléments de la matière et de ses composants. Mais plutôt que disserter, laissons la parole aux éléments eux-mêmes. Voici comment, dans la fable du célèbre La Bohaine, un "vulgaire" Cil se targue justement d'être du même rang qu'un Grain de Sel...
  • Le Grain de Sel et le Cil
  • par Wilhelm de La Bohaine :)
    • .
    • "Qui es-tu, toi, le noiraud?
    • — Un genre de poil mon brave, ne vous déplaise.
    • — Et que fais-tu par ici de si tôt?"
    • — Je me pose ou m'envole, à mon aise.
    • Un cil ne saurait rien faire d'autre
    • Une fois détaché par disgrâce
    • Des touffes poilues de cet autre
    • Qui, par ce fait, se trouveront moins grasses.
    • — Quelle vie pleine de vide as-tu là,
    • Puisqu'ainsi condamné à suivre le destin
    • Peu commun d'aller dans l'au-delà
    • Sans connaître, hélas, d'autres matins.
    • — Point de pitié mon bon ami
    • Vous n'êtes pas mieux logé, que je sache.
    • Une fois englouti, qui garantit
    • Que votre destin revête majeur panache?
    • — Eh bien, le fait d'être goûté me paraît honorable!
    • — Que nenni mon ami, ce qui importe est la lignée.
    • — Soit alors, la tienne est détestable,
    • Me comparer à un poil, tu m'en vois indigné.
    • — Vous vous trompez le grain.
    • Quoi que vous en pensiez
    • Nous sommes du même bain!
    • Laissez-moi donc vous le prouver..."
  • Au fond, ce dialogue absurde illustre une vérité implacable: l’essence de la matière ne connaît ni hiérarchie ni mépris.
  • Ce phénomène, l'uniformité genrée — le fait que deux objets soient parfaitement identiques — n'est pas si anodin puisqu'il n'apparaît que dans les niveaux où nous, les Hommes, ne sommes pas particulièrement les bienvenus. En effet, La science peut soulager, bâtir, propulser des avions dans le ciel... mais elle est incapable de fabriquer un atome. L’atome reste une exclusivité de l’univers, une prouesse originelle que nous ne faisons qu’observer ou manipuler, sans jamais la reproduire. Et c’est là que l’humilité s’impose: tout ce qui relève de la création primaire — matière brute, particules, éléments — est frappé d’uniformité, tandis que tout ce qui en découle — faune, flore, humains, artefacts — est condamné à l’unicité, à l’imperfection. L’univers se moquerait-il de qui veut l'imiter en imposant les températures infernales des premiers instants cosmiques ou cache-t-il simplement son jeu?
  • le monde du minuscule
  • La matière, aujourd’hui, appartient au royaume quantique — cet univers souterrain où les particules, comme possédées, gesticulent sans répit. L’univers tout entier, du neutron au superamas galactique, est en apesanteur: tout y est suspendu, tourbillonne, expire, meurt. Le cosmos est un manège, mais sans bouton d’arrêt. À force de descendre les étages de la matière, on finit par passer sous le seuil du visible. Au-dessous du femto, il ne reste que des signatures fantômes, des traces, des modélisations mathématiques. Le microscope, naguère orgueil du savoir, y devient aveugle, remplacé par des détecteurs, des algorithmes et de l’art numérique. C’est par images de synthèse, aussi esthétiques que mensongères, que nous accédons à ce monde quantique promis à une éternité opaque — dont personne, jamais, ne saura s’il est vraiment réel ou simplement pratique.
  • Il n’a pas d’origine lisible, pas d’intention décodable. Il bruisse sans cause, échappe sans fin. Certains diront de moi: “Pour qui il se prend, celui-là, alors que des bataillons de physiciens s’échinent sur le sujet?” C’est vrai: je ne suis ni Einstein, ni Haroche — je me contente d’observer ce que la science ne peut pas digérer. On tire des électrons de leurs tanières, on fait danser des photons, on brevète des puces quantiques... Mais est-ce que ça veut dire qu’on comprend? "Non". La science observe, modélise, prédit. Mais elle n’explique pas. Croire que les Hommes découvriront l’origine de l’univers, c’est croire qu’un nourrisson pourra accoucher de sa propre mère. La phrase pique, mais elle est juste: On n'accouche pas de la cause dont on est l’effet! Nous sommes faits de cet univers, porter sa marque et prétendre le décoder de l’extérieur, c’est s’arroger une impossible transcendance. Et, dans un monde régi par la flèche du temps où la cause précède toujours l’effet, une telle idée relève du paradoxe absolu.
  • la pyramide de Maslow
  • Comment ne pas se sentir frustré devant une équation irrésolue ou irresolvable? Et aussi, comment ignorer cette ignorance lorsqu'elle affecte les Hommes au point de les faire croire en Dieu. Car ce vide chronique, cette incapacité à comprendre notre propre essence est bien à l'origine des credo. A quoi diantre serviraient les dieux ou les religions et qui aurait besoin d’eux si les Hommes avaient toutes les réponses?
  • Réfléchir à l’univers est un luxe de nanti. Beaucoup n’en ont ni le temps, ni le loisir, ni l’énergie. Il faut manger, payer, survivre. C’est la logique froide de la pyramide de Maslow. À sa base, large et lourde, s'empilent les besoins vitaux. Plus on grimpe — vers le sommet effilé où planent culture, spiritualité, métaphysique — plus il faut avoir rempli les étages d'en bas. Autrement dit: on ne pense au sens de l’univers qu’une fois la carte vitale à jour, le frigo plein et les vacances réservées (pour les chanceux). Raison pour laquelle les grands philosophes, à commencer par ceux de la Grèce Antique, venaient tous de familles très aisées.
    Eh oui, il faut de quoi exister pour méditer sur l'existence.
  • folles propriétés
  • Omerta du Principe donc, dont la science, en fouillant le monde quantique, semble toucher le bout, mais comment ne pas admettre son "illétrisme" lorsque, obstinément, depuis cent ans, ces particules font passer les savants pour des demeurés. Ils se targuent, très justement, de leurs découvertes successives, mais comble de l'absurde, plus ils découvrent, plus ils sont largués. On le serait à moins, me direz-vous, vue l'ampleur des illogismes - pour notre cerveau - que ces particules élémentaires affichent:
    • superposition quantique
    • La superposition, c’est le premier claquement de porte que la physique quantique inflige à notre raison. Une particule peut être ici, là-bas et entre les deux — en même temps. Pas “soit l’un, soit l’autre”. Les deux. Tant qu’on ne la regarde pas, elle s’autorise tous les possibles. Le réel, à ce niveau, n’est pas un état. C’est un nuage de probabilités en attente de décision. Et la décision? On la prend en observant. Déroutant non?
    • propriété onde-particule
    • Tel un chat qu'on voudrait caresser et qui permute en hologramme laissant ainsi notre main le traverser au lieu de le toucher, les particules se transforment en onde dès qu'on les approche pour les observer ou les mesurer. Elles ne sont, à ce moment précis, plus des objets/particules mais bien des ondes qui reprennent leur forme de particule massive dès qu'on les laisse tranquilles. Perturbant ou pas?
    • intrication quantique
    • Deux particules s’effleurent dans un coin d’univers, puis repartent chacune de leur côté. L’une fonce vers Andromède, l’autre reste flâner dans un labo. Et pourtant — des années-lumière plus loin — elles continuent de se répondre comme deux jumeaux fusionnels. Une action sur l’une, et l’autre réagit instantanément. Pas après un délai, pas après avoir “reçu” une info. Non : tout de suite. Si l’information devait voyager, il lui faudrait dépasser la lumière — et sa vitesse, calculée par Einstein, serait remise en question. Mais voilà, c'est un coup de théâtre: aucune information ne voyage. Rien. Juste un effet sans cause visible. La science en reste là, embarrassée, ravale sa logique et baptise le phénomène: intrication. L’univers, lui, sourit — satisfait d’avoir démontré aux petits Hommes prétentieux qu'ils sont loin, à des années lumières justement, de comprendre ce qu'il EST.
    Si ces propriétés bizarres ne sont pas autant de râteaux dans la conquête de la compréhension...
  • Usant la sémantique entre savoir et connaitre, les scientifiques pourraient dire: Je connais la chose mais ne la sais point afin de résumer le mystère qui règne dans l’univers. Quoiqu'il en soit, il semble bien que le Cil ait bien compris que dans les profondeurs de la matière qui le constitue, il est identique au Grain de Sel. C'est déjà ça.
  • Et boooooooum!
  • Donc voilà: au commencement, lors de la brutale expansion de la Singularité nommée Big-Bang, l’énergie compressée, chauffée à des niveaux de température qu’aucun cerveau ne peut formuler sans attraper une migraine (indice: "33 zéros" derrière le chiffre) devint en partie matière, le reste servant à la cohésion de l'Univers. C’est dans cette forge dantesque que la matière est née. Et aujourd’hui, nos savants modernes, tout contents de l’avoir compris à posteriori, se disent qu'ils pourraient récupérer l’énergie qui, au commencement, fut enfermée dans la matière.
  • C'est ce que fait la bombe atomique en cassant les atome — en les brisant comme une vulgaire noix nucléaire — et en libèrant l’énergie qu’il contient depuis 13,8 milliards d’années. La réaction en chaîne s’enclenche: un atome brisé en deux en entraîne un autre, puis un autre, jusqu’à ce que la matière rende tout ce qu’elle avait emprunté à l’univers dans cett rèaction en chaine. Résultat? Une explosion capable de réduire un quartier en cendres.
    Ou une ville. Ou deux...
  • La formule magique? E = mc². Une ligne, trois lettres, un petit miracle d’élégance qui dit ceci: L’énergie contenue dans une masse est égale à sa masse multipliée par la vitesse de la lumière au carré. Autrement dit, dans chaque grain de matière sommeille un petit Hiroshima potentiel. Merci piur l'info, Albert.
    énergie = masse du corps x vitesse de la lumière2
  • Qu'on se rassure, toutes les matières ne sont pas fissiles. Toutes les boules de métal ne chantent pas "boooom". Mais en principe, n’importe quel fragment de matière — un Cil, un Grain de Sel, un bouchon de bouteille — renferme cette énergie primordiale. Il suffirait de le briser de la “bonne” façon. Ce que, fort heureusement, l’univers ne nous facilite pas trop.
  • Moralité? Quand on commence à bricoler les briques fondamentales de l’univers, il arrive qu’il réponde en japonais.
    — Hiroshima, Nagasaki!
    Ce qui signifie: “Tous ce que vous gagnez en touchant à mes atomes ne sont que des champignons.”
    Ahhh, je comprends votre étonnement, vous ne saviez pas que l'Univers parle japonais!
Homo Conscius
  • Ce matin-là, Homo cesse de réagir en animal et devient définitivement un Homme. Dans sa pensée qui commence à filtrer ses instincts et à les transformer, son avenir lui apparaît, chargé d’appréhensions et de projets. Son interprétation du monde s’imbibe de sentiments jusque-là ignorés. Il ne maîtrise pas encore sa pensée et pourtant, l’étrange lucidité qui désormais s’empare de son esprit augure de la plus inimaginable, la plus fascinante et peut-être la plus cruelle des mutations que l’Univers ait opérées. Le jour commençait à éclairer la colline. Homo lève les yeux au ciel, flaire l’orage et s’abrite. Il sait qu’il est resté le seul mâle du clan et que l’attaque d’un fauve lui serait fatale. Il a déjà vu ses aînés combattre. Lorsque l’eau tombe du ciel, il s’abrite, lorsqu’il a froid il se couvre, lorsqu’il est attaqué il se défend et lorsqu’il a faim il traque tout ce qui bouge s’il en sent la relative faiblesse. Il vit instinctivement, perpétuant les gestes de ses ancêtres et, dans cet immense désert céleste clairsemé de lueurs lointaines, il reconnaît sa solitude mais elle ne lui pose aucun problème. Le jour se couche, le jour se lève, c’est tout ce qu’il sait des siècles qui passent. Puis un soir, éreinté par une harassante journée de chasse comme il en a déjà connues, il s’allonge pour la petite mort jusqu’au jour nouveau mais ne trouve pas le sommeil. Pour la première fois sa poitrine bat et résonne dans ses oreilles. Dans sa tête il revoit des images et son estomac se serre comme la gueule de ce fauve sur le cou de son frère, avant de s’enfuir. Il n’est pas à côté de lui ce soir pour la petite mort de la nuit tombée. Il gît encore quelque part sous les arbres. La grande mort l’a frappé et, le jour venu, il ne se lèvera plus. Mais cette fois c’est différent, Homo ne peut pas le laisser en proie aux charognards. Malgré le danger de la nuit, il se lève et sort de la grotte à sa recherche. Puis le ramène sur son dos, creuse un énorme trou non loin de sa couche et l’y dépose avant de le recouvrir de terre. Là les fauves ne le trouveront pas, sa grande mort sera paisible. Homo retourne s’allonger auprès de son clan et, finalement, s’endort.
  • Cet extraordinaire passage inéluctable et très méconnu, communément nommé hominisation , ne s'est probablement pas passé comme dans ma petite escapade romanesque mais est, à lui seul, responsable de l'apparition d'Homo Conscius, ce maillon jusqu'à aujourd'hui complètement éludé par la paléoanthropologie. Les premières manifestations de cette néo-conscience sont certainement les plus vieilles sépultures connues à ce jour, découvertes en Israël, dans la Grotte de Qafzeh et âgées de 92 000 ans environ.
  • Les sépultures indiquent que l’Homme avait pris conscience de sa particularité par rapport à l’animal et confirmeraient qu’Homo Conscius existait déjà il y a cent mille ans mais pas que cette date soit celle de son apparition sur Terre. En fait on ne saura certainement jamais quand Homo Conscius est réellement apparu. Ce qu’on appelle l’hominisation a dû être un processus très long et laborieux. Inimaginable. Elle comprend la mutation physique, que la paléoanthropologie peut aisément situer grâce aux vestiges des ancêtres et aux technologies de pointe, mais aussi la 'Conscientisation', qu’il est impossible de dater du fait de la disparition totale de la matière cérébrale qui, même physiquement conservée, ne laisserait rien de très significatif à se mettre sous les microscopes. Raison pour laquelle les schémas largement diffusés de l'évolution qui n'évoquent que les mensurations des ossements ne tiennent pas compte - à tort - de cet individu.
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  • L'homme ne progresse qu'en élaborant lentement, d'âge en âge, l'essence et la totalité d'un univers déposé en lui. C'est à ce grand processus de sublimation qu'il convient d'appliquer, avec toute sa force, le terme d'hominisation. L'hominisation, qui est d'abord, si l'on veut, la saute individuelle, instantanée, de l'instinct à la pensée. Mais l'hominisation qui est aussi, en un sens plus large, la spiritualisation phylétique, progressive, en la civilisation humaine, de toutes les forces contenues dans l'animalité. (Pierre Teilhard de Chardin)
  • Sans Homo Conscius, la Lune serait restée anonyme et vierge de tout drapeau. Nul ne pourrait témoigner de l’existence de l'Univers. Nous ne serions que des 'beaux gosses bipèdes' avec un Q.I. de singe, incapables de laisser quoi que ce soit à la postérité.
  • Prise de conscience qui, toute proportion gardée, reste circonscrite à la Terre et à ses habitants et ne change en rien le cours de l’Univers. Mais pour l’humanité et pour Homo Conscius en particulier, elle revêt un caractère cataclysmique tant ce changement va bouleverser sa vie.
  • Premier interprète du savoir, premier penseur conscient de penser, aurait dit Descartes, il incarne à lui seul une parenthèse évolutive au cœur de laquelle son cerveau, fraîchement mature, l’a téléporté. Une véritable plaie, en fait, dont l’univers vient de le frapper. Il est désormais condamné à perdre son insouciance et à assister au spectacle de son existence. Les angoisses du lendemain seront son quotidien, toujours à son chevet pour lui rappeler le prix exorbitant de sa santé, de sa liberté et de son indépendance. Une plaie dont il est la seule espèce à souffrir et qu’il devra traîner comme un boulet jusqu’à son dernier soupir. Pour le reste du vivant, les laissés pour compte de la conscience, ceux qui ont eu la chance d'échapper à ce destin, pas de chagrin, pas de pleurs, pas de pierre sur le cœur et dans le ventre, pas cette envie de mourir à leur tour lorsque le souffle cesse d’animer le sourire de ceux qu’ils aiment, lorsque l’univers reprend ce qu’il n’a que prêté. Là où l'on observe chez l'animal certains comportements dépressifs instinctifs dus à des changements importants dans leur quotidien, la conscience des Hommes, elle, agit aussi sur des perceptions réfléchies et conscientes, les torturant ainsi bien plus profondément et parfois, comme on le sait, sans remède.
  • L’histoire des acceptationnistes et des récusationnistes est donc très ancienne, autant que la conscience qui, lorsqu'elle naît, impose de choisir comment affronter le monde que son éveil découvre. Elle peut accueillir le destin tel qu'il est ou tout aussi bien passer sa vie à l'esquiver en se jouant la pièce d'une autre réalité construite à sa mesure sur la croyance, arrondissant ainsi les angles trop obtus, se convainquant que la vie dure au-delà de la vie et que par conséquent la mort est obligatoirement le début d’autre chose, en feuilletant les livres sacrés dont les contes célestes ne disent jamais que les dieux qu'ils encensent ne sont pas toujours au rendez-vous.
  • La jeune conscience d’Homo Conscius a du pain sur la planche.
Le Décalage Evolutif
  • L'hominisation, la conscience, la croyance, le décor est planté. Le cerveau a pris ses marques et va balayer nombre des instincts qui, jusqu’alors, dirigeaient la vie de l’animal désormais enfoui. Pas que. Il va malmener son corps en lui imposant de nouvelles contraintes. Des changements alimentaires dûs au sédentarisme ou à l’abstinence de telle ou telle nourriture pour respecter ses credo. Des contraintes comportementales ou idéologiques souvent opposées aux bribes rémanentes de ses instincts primitifs... Et, petit à petit, la distance va se creuser. Ce n’est plus qu’une question de temps. Et de technologie. Et d’informatique. Trois facteurs qui vont transformer le léger décalage évolutif entre corps et esprit, amorcé par la conscience, en un abîme démesuré.
  • Lorsque le cerveau invente la mondialisation, il expose ce corps déjà bien malmené aux traumatismes qui affectent tous les corps étrangers, de quelque nature qu’ils soient. Le rejet et la contamination. Même tarif lorsque des civilisations étrangères ou étranges délocalisées se rencontrent et se fréquentent, le temps d'un voyage d'affaires ou d'agrément. Le décalage évolutif, ce gap, diraient les amants des anglicismes, devient donc un insoupçonnable bourreau des corps. Bien qu’entrainé à peser le pour et le contre, le cerveau n'est pas toujours à la hauteur des ses ambitions, n'est pas le garant du succès de ses idées, n'est pas une assurance vie, en fait. Chacun son métier.
  • Jadis donc, le phénomène était imperceptible. Le cerveau n’avait pas encore pris son véritable envol. Certes les penseurs ont toujours existé, les mathématiciens talentueux ou les physiciens de génie aussi mais jamais on pouvait imaginer que l’un pouvait vivre sans l’autre. Que le cerveau pouvait faire abstraction du corps qui le porte. Que leur différence évolutive et fonctionnelle pouvait être aussi disloquée que chez Stephen Hawking par exemple, cet éminent astrophysicien cloué dans un fauteuil roulant par une maladie paralysante et déformante. Star du ciel et des Trous Noirs, son état ne l'empêcha pas, comme bien d’autres d’ailleurs, d'être abondamment contesté sur quelques-unes de ses visions et donc d'être considéré un personnage à part entière de la scène scientifique internationale. Comme si, à un certain stade, son cerveau pouvait se débrouiller tout seul. L’infirmité de Hawking n’était pas nouvelle mais auparavant, le cerveau de ces handicapés, enfoui et tu par l'akinésie, n’avait jamais vécu si indépendamment la liberté d’expression offerte par les nouvelles technologies.
  • C'est elle, La technologie, qui participe activement à l'amplification de ce phénomène qui, dorénavant, ne fera que s’accentuer jusqu’aux limites de l’humain. Ce n’était pas prévisible. Ni pendant la plongée des premières sociétés modernes dans l’ère industrielle, ni par la suite. Naguère le progrès était assez lent pour que le physique et le mental conservassent un certain parallélisme évolutif. Pour qu’aucun des deux ne se sentit lésé ou même lâché. Avec l'avènement de l’informatique, de ses voyages virtuels, de ses algorithmes de plus en plus rapides et performants, la donne a carrément changé. Le cerveau peut vivre sa vie, s’envoler vers des sphères où le corps est encombrant, superflu, voire inutile.
  • Cette mutation a un prix, bien sûr. D’une part, elle statufie l’Homme devant son écran, le plongeant ainsi dans un état presque léthargique aux conséquences physiologiques, motrices et mentales notoires, et d’autre part, elle démultiplie la puissance intellectuelle de l’individu, laissant le corps multimillénaire de Sapiens loin, très loin derrière. Là où ce dernier rêve encore de sérénité, de santé, de nature ou de mouvement, l'intellect et son compère calculateur concoctent déjà l’intelligence artificielle qui, à son tour et de plus belle, accroîtra l'abîme devenu incolmatable entre ces organes siamois mais de moins en moins frères. Donc, à l’heure de ce que les geeks dénomment 'Industrie 4.0', c'est-à-dire l’actuelle ère industrielle, le décor à une toute autre allure. Un enfant qui naît avec un smartphone entre les mains développe un potentiel intellectuel et technique bien plus élevé que celui qui, il y a encore vingt ans, jouait avec des camions ou des poupées. En outre, plus le cerveau s’acclimate à une technicité galopante, plus ses prouesses s’accroissent elles-mêmes proportionnellement. (Dans un rapport de l’Unicef de 2017 intitulé 'Les enfants dans un monde numérique' en 2017, les conclusions tendent à considérer que l’utilisation des technologies numériques par les enfants a essentiellement des effets positifs)
  • Ce qui, tous en conviendront, n’est pas du tout le cas du physique, dont la structure n’est pas aussi modulable. Dont les horizons et les marges d’expansion ne sont pas aussi élastiques que celles du cerveau. Même dopés, les athlètes de haut niveau ne parviennent à modifier leurs performances que très limitativement. Le corps humain, figé dans sa carcasse restreignante, n’est pas vraiment l’outil idéal des miracles. Ainsi les records de vitesse, comme celui du 'cent mètres' ou du 'saut à la perche', pour ne citer que ceux-ci, stagnent parfois pendant des décennies avant de bouger d’un dixième de seconde ou de quelques centimètres. L’histoire de l’Homme n’est pas exclusivement une affaire d’os. Elle est surtout imprimée dans les neurones bouillonnants des circuits cervicaux, là ou le quantique supplante le physique à la vitesse de la lumière pour produire les idées, les pensées et inventer sa vie. Il semble bien que l'anthropologie et ses morceaux de squelette soit bien passée à côté du chapitre majeur du développement humain, Homo Conscius et son hominisation .
  • Passage qu’il faut pourtant tenir responsable du bonheur mitigé des terriens. Car la race humaine est la seule et unique espèce terrestre à avoir modifié le cours de la nature et la durée originelle de sa vie. Chez les mammifères du monde animal, en effet, les ados quittent le clan dès qu’ils savent chasser sans devoir se soucier de leurs géniteurs et encore moins de leurs grands ou arrières grand-parents. Le cerveau humain lui, dans son indiscutable excellence, a développé la médecine, cette énorme machine à 'fabriquer des vieux'. Moins forts et moins résistants que leurs progénitures, ceux-ci représentent non seulement le talon d'Achille de la race mais aussi une menace pour les autres.
  • En effet, d’un côté cette science qui, par l’intermédiaire du cerveau humain, offre une appréciable longévité sursitaire, l’apaisement de nombreuses souffrances physiques, l’exploration du monde à portée de tous grâce aux avions, l’information et le loisir amplifiés par la radio et la télévision... Et de l’autre, un vieillissement disproportionné qui accroît la surpopulation de la planète, des incidents de parcours comme celui du Covid, des contaminations massives en tous genres dues aux mouvements de masses et des surcoûts pour soigner et maintenir en vie cette marée humaine qui serait bien moins onéreuse si elle n'était que trentenaire. De quoi plomber une espèce, il faut croire. Surpopulation qui consomme les fruits de la Terre avant même qu’ils ne soient mûrs, qui déracine les arbres de contrées encore vierges, qui détruit tout ce qu’elle touche et qui s’imagine que cela durera, sans accroc, ad vitam aeternam.
  • Le Covid n’est autre qu’une rébellion contre un cerveau gourmand qui a cessé d’attendre son vieux corps. Un cerveau sorti des rangs qu’on a laissé faire, créer, produire, étendre, se répandre, commander, contrôler sans jamais se retourner. Sans penser aux conséquences. Sans se demander, à aucune étape, où et quand cette course devait ou pouvait s'arrêter. Le Covid est un grain de sable dans un énorme rouage aussi fragile qu’un vieil Homme, mais qu’on pensait aussi indestructible que le Titanic. Une sorte de claque à l’impertinence d’un ado ou d'uppercut à un boxeur novice sur le ring d'un grand. En purifiant le monde de ses seniors, on dirait que le Covid s’en prend justement à la science et aux cerveaux qui la manipulent. Comme si la nature refusait ce décalage évolutif, comme si elle écartait la possibilité de voir une humanité se défaire de son corps pour se soustraire à son sort.
  • Car c’est bien ce que prévoient les transhumanistes, ces espèces de futurologues du vivant qui prônent l'usage des sciences et des techniques afin d'améliorer la condition humaine. C’est bien ce qu’ils veulent. Modifier l’humain pour faire passer la pilule du décalage. Pour les accompagner dans cette inévitable mutation et les transformer en... je ne sais pas en quoi en fait. Selon eux, les Hommes devraient subir des aménagements comme des implants de puces dans la boîte crânienne, par exemple, reliés physiquement aux circuits neuronaux pour permettre un accès permanent à des bases de données et ainsi les 'savantiser' au-delà de leurs capacités naturelles. Tout un programme donc, pour creuser cet écart déjà coupable de tant de maux. Ce nouvel Homme aura-t-il encore droit à l’appellation contrôlée de 'Sapiens'? Autant de sujets de discorde qui ne peuvent qu’embraser les foules, déplaire à tant pour ravir quelques uns, allumer les rancœur et les agitations civiles qui, peu s’en faut, dégénèrent souvent en conflits plus profonds.
  • En revanche, loin de moi de croire que le cerveau ne devrait pas penser! Les faibles d’esprit ou les moyenâgeux sont assez mal lotis dans une société comme la nôtre. Il suffit de se souvenir, lors du Covid, l'ampleur des contaminations provoquées par les orthodoxes Israéliens (Haredim) avec leurs idées rétrogrades et paralysantes dans leurs communautés. Force est de constater que lorsque l'éventail des livres parcourus se limite aux écrits religieux faisant fi des milliards d’ouvrages dont le monde dispose, c’est qu’on est empreint d’une volonté pressante et persistante de patauger dans l’ignorance. Les extrêmes sont donc rarement les meilleures solutions. Le cerveau doit évoluer, bien sûr, mais qui pouvait prévoir ou imaginer que les humains deviendraient plus intelligents que nécessaire et qu'ils entameraient une échappée intellectuelle telle qu'elle laisserait leur propre corps bien loin derrière, aggravant progressivement de décalage évolutif?
Société
Vivre et Laisser Mourir
  • Live and Let Die — en anglais, est le titre d'un film dont le héros, James Bond, règle ses problèmes, comme à l'accoutumée, avec beaucoup de brio. Le titre m'a paru approprié pour ce texte dans lequel je me penche plus sérieusement sur la seconde partie du titre: laisser mourir. C'est le débat à la mode ces jours-ci, nommé aussi l'aide à mourir ou encore la fin de vie. Le sujet qui envahit les médias, fait couler beaucoup d'encre et dont le compteur des heures de travail des fonctionnaires passées sur cette réflexion ne cesse de tourner à vide, allongeant ainsi l'ardoise des contribuables... A vide, car il semble que l'hypocrisie des uns cache le credo des autres et que ce cafouillage régalien en soit le polluant qui empêche d'aboutir à des solutions claires, courageuses et franches. Car tout le monde sait pertinemment que l'euthanasie clandestine fut, est et restera couramment pratiquée.
  • Ce qui est sûr, c'est que ce n'est pas parce qu'on vient au monde, qu'on doit aimer la vie. Pour certains, comme les 9000 suicidés par an en France , le suicide est à la vie ce qu'une aspirine est au rhume, pourrait-on dire, il apaise la douleur. Mais les autres, ceux qui voient tout en rose, qui n'ont pas à supporter de grandes souffrances et pensent sincèrement que la vie est belle, n'arrivent pas toujours à comprendre qu'on puisse avoir envie de mourir. Ils pensent que tout peut s'arranger et, pouvoir ou influence permettant, mais sans raison particulière sinon l'invocation des dieux, se dressent égoïstement contre cette pratique. Dans certains cas, ils peuvent avoir raison sur l'existence de solutions au désarroi de tel ou tel suicidaire, mais qui sont-ils pour imposer leur vision et intolérance sur le pessimisme de ces derniers. Autant le contexte sociologique peut être modifié par la force de caractère d'un individu, autant ses propriétés psychologiques innées sont invariables et modifient sensiblement la vision des choses d'un individu à l'autre. C'est l'infini débat entre l'acquis et l'inné (nature and nurture en anglais). Chacun voit midi à sa porte dit le proverbe pour exprimer l'égocentrisme qui régit l'empathie envers ceux qui méritent un peu plus d'attention. De plus, la valeur de la vie variant selon les us et coutumes, le diapason ne donne pas le même LA sur toutes les terres. Les samouraïs en savent quelque chose. Au Japon, le seppuku (nom littéraire du Hara Kiri) était traditionnellement utilisé en dernier recours, lorsqu'un guerrier estimait immoral un ordre de son maître et refusait de l'exécuter. C'était aussi une façon de se repentir d'un péché impardonnable, commis volontairement ou par accident. Plus près de nous, le seppuku subsiste encore comme une manière exceptionnelle de racheter ses fautes, mais aussi pour se laver d'un échec personnel. Certaines civilisations ne supportent pas le choix de vivre dans l'incomplétude, compromis par lequel on pourrait lire du dédain dans le regard de l'autre. Certaines autres ne supportent pas qu'on veuille mourir. Comme la nôtre par exemple, dans laquelle, bien que la mort soit la seule fin possible de la vie, elle n'est décemment acceptée que lorsqu'un tiers ou une cause inéluctable en est responsable. Le suicide n'a pas bonne réputation, et si on le choisit, on peut se brosser, on ne sera pas aidé à mourir dignement. Du moins pas tous, car d'aucuns, nous le verrons par la suite, jouissent de certains privilèges.
  • Le suicide — du latin suicidium, terme composé du préfixe sui 'soi' et du verbe caedere 'tuer', l’acte délibéré de mettre fin à sa propre vie, de se donner volontairement la mort — était relativement toléré dans la Rome antique, mais va faire l’objet d’une condamnation radicale de la part de l’Église. En effet, le suicide demeure un acte traditionnellement condamné par les grandes religions monothéistes. Si le fait de se suicider reste d’abord un acte contre sa propre personne, le fait de s’ôter la vie crée une rupture entre la relation privilégiée que l’Homme a avec Dieu, en décidant de mettre fin à ses jours, la personne va à l’encontre de la souveraineté divine. Au Moyen-âge, le corps d’une personne qui s’était suicidée pouvait même faire l’objet d’un procès et être privé de sépulture ecclésiastique.
  • La Révolution française opère un tournant avec la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. En effet, l’article 4 de la déclaration énonce que la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui: ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de limites que celles qui assurent aux autres membres de la Société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la Loi. Ensuite à la promulgation de ce texte, l’interdit du suicide et son incrimination ne sont pas inclus dans le Code pénal de 1791 et dans le Code des délits et des peines du trois brumaire an IV. Le Code pénal de 1810 et le Code pénal actuel n’en font pas non plus mention. Le suicide, sans être un droit, ne constitue donc plus un acte contraire à l’ordre public et n’est plus pénalement répréhensible.
  • Nonobstant, jusqu’au milieu du XIXᵉ siècle, la mort demeure omniprésente et frappe à tout moment. Comme l’espérance de vie était très courte à l’époque, la mort n’était que très rarement considérée pour une échéance lointaine. L’espérance de vie au XVIIᵉ siècle était juste de 25 ans à la naissance. Un enfant sur quatre décédait avant l’âge d’un an et seulement une personne sur deux atteignait ses 20 ans. Le risque de mortalité était encore plus accru chez les femmes du fait des risques liés à l’accouchement. La question de se donner volontairement la mort ne se posait donc que très rarement au vu des circonstances de l’époque dans la mesure où les gens décédaient avant même de pouvoir se poser la question de savoir si elles souhaitaient en finir.
  • Mais aujourd'hui, on en parle, la vie est plus longue et a largement le temps, même sans attendre le nombre des années, de devenir insupportable. Cependant, comme on préfère tout de même éviter les sujets brûlants, on s'occupe des problèmes consensuels comme la fin de vie des malades très malades en omettant soigneusement de parler de celle des suicidaires, ceux qui veulent mourir sans raison physiquement apparente. Comme si la souffrance visible à l'œil nu — ce bon gros cancer qui rend chauve, amaigri et affaibli sans répit, cette sclérose en plaques qui éteint le corps et l'âme à très petit feu avec tout le mépris pour la dignité qui va avec — était la cause unique de l'envie de mourir. Comme si certains vieux n'y pensaient pas tous les jours. Comme si aucun de mes amis ne m'avait déjà demandé comment se donner la mort sans trop souffrir le jour où la santé les trahirait. Comme si moi-même n'y avais jamais pensé.
  • Pourtant, il suffirait de régler le problème du suicide volontaire, assisté ou non, pour en finir avec la question et ce, pour tout le monde, malades, très malades et simplement las de vivre. L'euthanasie, en somme. Ce qu'il manque, en fait, c'est exclusivement des dispositifs pour l'administration des produits létaux qui permettraient de s'éteindre sans souffrance et sans traumatismes supplémentaires à celui déjà très lourd de se donner la mort. Les progrès de la science et en particulier de la médecine le permettent et ces produits sont utilisés dans les euthanasies exceptionnelles autorisées par la loi ou pour certaines peines de mort encore pratiquées. C'est assez saugrenu, mais, grâce à ces progrès, l'État permet de tuer les tiers en douceur, laissant pour compte ceux qui implorent la mort et dont la condition psychique mériterait quelque égard. Cette France soi-disant républicaine et laïque, ne permet donc pas, pour des raisons, semble-t-il, plus divines que logiques, de se suicider sans mise en scène tragique.
    • Souvenons-nous du manque d'humanité du président Sarkozy qui refusa l'euthanasie à Chantal Sébire dont, par respect pour elle, je ne publierai pas ici la photo de sa souffrance .
    • Souvenons-nous de son manque d'humanité pour Rémy Salvat, 23 ans
    • et souvenons-nous aussi, que ce manque de compassion est ce qui résulte d'une totale soumission à la religion, terrain bien connu de l'égocentrisme et de la haine de l'autre, donc incompatible avec le pouvoir dans une république séparée de l'Eglise, puisqu'il déclare aussi, entre tant d'autres, que les prêtres valent bien mieux que les instituteurs: Dans la transmission des valeurs et dans l’apprentissage de la différence entre le bien et mal, l’instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur même s’il est important qu’il s’en rapproche, parce qu’il lui manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d’un engagement porté par l’espérance.
  • Ceci dit, il n'est certainement pas le seul puisque le législateur n'hésite jamais, lorsqu'il en a l'occasion, à restreindre la liberté de mourir humainement et à transformer le suicide, quoique non-interdit par la loi, en parcours du combattant avec, en sus, un manque total d'impartialité et un troublant illogisme:
    • Illogisme, car il y a des gens comme M. Thouvenin, bizarrement professeur de droit incapable, lui aussi, de distinguer le pieu du républicain qui, comme Sarkozy, n’hésitent pas à utiliser la fonction publique pour distiller leur vision inquisitoriale en répondant à la question 'Peut-on estimer que tout homme a le droit de se suicider?', par: 'Non, reconnaître à l’individu le droit de se suicider contribuerait à faire de lui un propriétaire libre de disposer de lui-même comme d’un bien'. Il faudrait qu'il explique, depuis son attelage céleste, en quoi les gens ne sont-ils pas propriétaires d'eux-mêmes? Il faudrait qu'il explique qui il est exactement, pour donner son avis sur la propriété des êtres vivants, sur la vie elle-même et sur la mort des autres. Car la croyance, quoi qu'il en pense, qui ne se prononce 'certitude' que dans les totalitarismes théocratiques, divise encore et toujours le monde en athées et croyants. Aurait-il oublié, ce cher professeur, que la France, depuis 1905, ne chuchote plus aux oreilles des dieux? Faire d'un droit subjectif une généralité objective n'est-il pas le fait des dictateurs, les mêmes qui interdisent aux femmes d'avorter? On construit quoi avec des gens qui se substituent à vous pour donner votre avis, un autre pays comme l'Iran, le Qatar ou certaines contrées états-uniennes? Est-ce le destin que nous promettent ces illuminés? Après les femmes, complexées et humiliées, semble-t-il, qui font tout depuis cinquante ans pour féminiser la société aux fins de mieux y fondre leur statut de femme, faut-il aussi des gouvernants et magistrats qui se mettent à lobotomiser leurs détracteurs, imitant ainsi certaines mouvances islamistes?
    • Illogisme, lorsque les juges de la Cour de Cassation répriment, le 26 avril 1988, la non-assistance à personne en péril pour un candidat volontaire au suicide. En quoi un suicidaire est-il une personne en péril qu'il faille assister lorsqu'il décide seul et en conscience de ne plus vouloir vivre? Pour le sauver de quoi et de qui, de lui-même? Serait-ce que la Cour, en le privant de son libre-arbitre, se substitue à Dieu? Si la Cour est si pieuse, pourquoi s'opposerait-elle à la sanction divine du libre-arbitre émise justement par Dieu dans le livre de la Genèse? Le libre-arbitre ne servirait-il qu'à éliminer les autres, comme Abel avec son frère Caïn?
    • Illogisme encore, car ce livre interdit: Suicide mode d’emploi vendu à 100.000 exemplaires en 9 ans avant son retrait, n'avait pas vraiment l'aura d'un best-seller dont les ventes oscillent entre 5 et 25 mille exemplaires par semaine et ne suscita, il faut croire, aucune augmentation du nombre des suicides puisque cet argument n'apparaît nulle part, laissant ainsi entendre que la rédaction de cet article se fondait sur des paramètres purement émotionnels ou religieux, privés de toute objectivité.
    • Illogisme toujours, car en quoi une arme au ceinturon d'un agent de police serait-elle moins provocatrice qu'un livre de recettes sur le suicide, sanctionné dans cet article 223-14 du Code pénal? L'agent de police, dans une situation de grand stress et dans les temps de réaction dérisoires impartis par une fusillade, jouirait-il plus de discernement qu'un candidat au suicide dont le choix n'est que très rarement impulsif?
    • Illogisme, car en toute logique, cet article a son jumeau pour les actes commis sur autrui, la provocation à l'assinat ou au délit en général (Loi du 29 juillet 1881 - Articles 23 à 24 bis) qui punit toute activité ou publication propre à mettre en péril la vie des gens mais qui, avec les deux poids et deux mesures dont abuse le législateur, ne punit ni les fabricants de motos qui provoquent environ 700 morts par an, ni les producteurs de voitures responsables de 3.500 morts par an, ni les vendeurs d'alcool qui tuent environ 49.000 personnes par an, ni les vendeurs de cigarettes dont le palmarès frôle les 80.000 morts par an. Sans parler des assassins de pacotille comme les boxes variées, les diverses disciplines de ski et autres sports extrêmes... On interdit un livre alors que les délinquants de cette liste se la coulent douce? Ah si, mais non, suis-je bête... l'ARGENT. Désolé cher lecteur, j'ai failli passer à côté. Eh oui, ces activités et divers outils de mort rapportent beaucoup d'argent. Tellement d'argent que la loi devient aussi aveugle que Justice, cette beauté armée d'une balance et d'un glaive. (photo)
      Allégorie de la Justice avec le bandeau, le glaive et la balance
      Ben oui, ils n'ont qu'à se démerder tous seuls après tout, pour se foutre en l'air, ces pauvres bougres de suicidaires.
    • Illogisme enfin, de par l'élusion systématique du fait que la vie soit une obligation aussi imprévue qu'inconditionnelle pour chaque être humain. En d'autres termes, de par le fait que personne n'a demandé à naître. Il n'y a donc aucune raison valable d'obliger à vivre ou à ne mourir que comme des hors-la-loi.
    • Partialité, car ceux qui détiennent les recettes des produits 'doucement létaux' et y ont accès, en général les personnels de santé, ne sont pas du même côté de la barricade, contraints au 'suicide artistique'. Ils peuvent profiter de leur profession pour en finir dignement et ont même le loisir, à la barbe des citoyens lambdas, d'en faire profiter leurs proches.
  • Résultat des courses, on ne sait ni pourquoi, ni comment, ON a décidé de faire des suicidaires des parias de la société, gentaille ne méritant pas de mourir 'humainement'.
    2018 - Les statistiques de l'horreur causée par la lâcheté des autorités qui n'autorisent pas le suicide volontaire médicamenteux.
    ON a donc décidé qu'il fallait sauter du haut d’un immeuble comme Gilles Deleuze, plonger sous un train, se remplir les poches en entrant dans l’eau glacée comme Virginia Woolf, s’enfoncer un pistolet dans la bouche comme Montherlant ou Romain Gary, s’étouffer sous un sac en plastique comme Bruno Bettelheim. Et si le courage manquait pour toutes ces atrocités de sociétés aussi bêtes qu'inhumaines, ON a décidé qu'il fallait continuer de vivre à contre-courant, le mal dans la tête et le ventre, le désespoir comme réveil et les larmes comme liant pour des paupières en quête de sommeil.
  • Voilà, il est là le vrai problème. Elle est là l'hypocrisie. Il est là le silence de l'État, des juges, des politiques. Le tribunal républicain permet de se suicider puis, juste après l'avoir statué, court comme un lapin effrayé se cacher dans les vestiaires pour ne pas penser, répondre, examiner, étudier et prononcer la suite tellement normale de cette décision: comment aider les gens qui le désirent à en finir en douceur, histoire de leur confirmer qu'ils sont bien des humains et pas des animaux. Ça manque de panache, tout ça, de courage, de droiture, d'orgueil. Ça manque d'humanité, car elle est là la non-assistance à personne en péril: pas parce que cette personne à envie de mourir, mais parce qu'on la laisse crever comme une chienne sur les rails d'un train, la tête dans un sac en plastique ou noyée au fond d'une rivière. Comme si cette féminisation de la société, citée plus haut, avait émasculé aussi le bon sens, l'amour du prochain, le respect de l'être, jusque dans sa mort. Honte à cette société qui pousse ses cadavres, comme une vulgaire poussière, sous un parquet de codes pénaux.
  • Il serait compréhensible que les personnes trop jeunes en soient empêchées pour leur éviter des erreurs de jeunesse. Il serait compréhensible d'imposer un test de discernement pour s'assurer de la maturité et la personnalité du demandeur... Mais dans ces conditions humaines, sécuritaires et protectrices, est-il normal d'interdire une mort légère à qui n'a jamais demandé la vie ou à qui estime, qu'une fois goûtée, elle ne vaut pas la peine d'être vécue? De toute manière, le suicidé ne pourra jamais se repentir de son geste. Et la société, qui prétend avec tant d'hypocrisie avoir des scrupules à donner la mort, qu'elle se regarde au miroir de l'histoire, qu'elle compte les têtes tombées au gré de ses révolutions, démocraties, dictatures, empires, au gré de ses combats et de ses paix, au gré de ses tribulations pour devenir ce qu'elle est.
  • Dans le film culte d'anticipation Soleil Vert l'euthanasie assistée est chose courante et parfaitement organisée, car la vie proposée par les événements climatiques et l'épuisement des ressources naturelles est devenue insupportable. Faut-il attendre ce destin de fin du monde pour que les Hommes respectent les Hommes?
MeToo? Pas sûr
  • Il n’est pas question ici de violences conjugales ou de violences faites aux femmes en général, mais seulement du vulgaire harcèlement sexuel des lourdauds, mis en cause par des femmes victimes de longues amnésies.
  • Les statistiques
  • Inutile d’etre diplômé du M.I.T pour constater que, dans l’humanité tout entière, la demande de sexe de la part des hommes est nettement supérieure à l’offre de la part des femmes. Selon les 217.000 violences sexuelles perpétrées sur les femmes en France en 2022, il faut croire que la prostitution et la pornographie ne suffisent pas à combler le gap entre l’offre et la demande. Pourtant, les commercants du sexe font vraiment tout ce qu’ils peuvent, là-dessus, aucun doute!
  • Les hommes
  • Créatures, donc, pour la plupart naturellement affamées de sexe, même si, par défaut, les hommes ne sont pas tous des prédateurs.
  • Les lourdauds
  • Hommes particulièrement bête qui abusent de la relative faiblesse des femmes pour les provoquer sensuellement par des paroles déplacées ou des "toucheries" variées et multiples, nommées aussi drague lourde ou harcèlement sexuel, sans pour autant passer obligatoirement à l’acte.
  • Comment le prouver? Simple! Certaines femmes s'en plaignent et on les croit sur paroles parce que même un juge non-lourdeau, malgré la robe rouge qui couvre son pantalon qui couvre son slip qui couvre son sexe, pourrait penser tout bas d’une témoin à la barre, dotée d’une poitrine charnue et invitante: 'j’aimerais bien me la taper'. Et cela pourrait arriver même si le juge est LA juge. L'humanité est ainsi faite, on n'y coupe pas et c’est la faute à personne.
  • Les Femmes
  • Objets naturels et permanents du désir masculin (relire éventuellement le paragraphe 'les statistiques') avec, pour la plupart, des besoins moins importants que celui des hommes et dont les performances sexuelles sont plus guidées par l’utilité que par la vile pulsion. Attention d’ailleurs, car la préméditation ou l’espérance de procréation et de maternage pour laquelle la nature les a programmées et qui représente une des causes majeures de leurs dispositions à copuler, pourrait passer, dans un moment d’égarement du cerveau masculin, pour de réelles pulsions érotiques.
  • En fait, la sexualité des femmes est très différente de celle des hommes et par conséquent, les deux ne sont pas particulièrement compatibles. Les femmes peuvent, par exemple, rester de très longues périodes sans activité sexuelle ce qui, pour l’homme, relève plus du miracle que de sa configuration biologique.
  • Relativement moins fortes physiquement que les hommes et donc moins aptes à se défendre ou se procurer ce qu’elles convoitent, les femmes ont souvent tendance, pour combler ce déficit, à profiter de ladite très pertinente loi économique de l’offre et de la demande, et ainsi faire de la coucherie utile, la seconde grande cause de leur disposition à copuler.
  • Comment le prouver? Là non plus, pas besoin de longues études dans une des mythiques universités de la planète, il suffit de vérifier de quoi vivent, sans longues études ou particulières qualités professionnelles, de très nombreuses femmes dans le monde, sauf celles, bien sûr, qui n’ont plus besoin de travailler par suite d'un mariage et un divorce bien orchestrés. Ces métiers, par exemples sont tous fondés sur la féminité, la beauté, le sex-appeal, les formes abondantes etc.… : On trouve donc des mannequins, des serveuses aux seins nus, des égéries de sites de rencontre ou de marques diverse de cosmétiques, santé, dessous..., des prostituées et des call-girls, des hôtesses de l’air ou de salons d’exposition, des soubrettes d’émissions télévisées, des danseuses ou chanteuses sexy... et toutes les autres, évidemment. CQFD.
  • Cela dit, il n'est pas exclu que ces activités soient pratiquées aussi par des personnes d'autres genres, mais il est indéniable qu’elles restent majoritairement féminines. N’oublions pas que ces métiers, à la portée du plus grand nombre, permirent à moult femmes de sortir de chez elles, de s’émanciper et qu’elles ont naturellement profité de l'aubaine. Toutes n'ont pas vocation à devenir Marie Curie, c’est clair, et nombreuses, justement, grâce à leurs attraits, réussirent à gagner bien plus d’argent que de prestigieuses scientifiques ou autres érudites et ce, de leur propre chef, sans coercition aucune.
  • Mais un beau jour...
  • Donc, la planète tout entière tourne, depuis des millénaires, autour de femmes et d’images de femmes qui n'hésitent pas à se faire passer, dans l'imaginaire collectif, pour la sirène de service que tout homme aimerait avoir dans son lit. Puis, il y a peu, un certain mouvement MeToo sort de l’ombre, succédant au MLF des années 70, à cause d’un violeur en série nommé Weinstein et, dans cet élan, pléthore de femmes, restées jusque-là très longtemps amnésiques, commencent à se plaindre d’avoir, elles aussi, été vulgairement tâtées par des lourdauds. Mais comme tâtée n’est pas violée, le rapprochement avec MeToo reste du domaine idéologique. De quoi viennent se plaindre exactement ces actrices, par exemple, qui accusent Depardieu, plusieurs années après les faits, de ces “toucheries", puisque les femmes, comme nous venons de le voir, ont jusque-là toujours tout fait pour que les hommes aient envie d’elles? Mais soit, ce n'est pas super élégant de peloter les filles sans autorisation, nous sommes d’accord, alors pourquoi sont-elles restées bosser avec lui? Pourquoi ne lui ont-elles pas filé une baffe en hurlant 'gros porc' avant de claquer la porte? Qui les a obligées à supporter ce calvaire, si elles jugeaient que c'en était un?
  • La psychologie
  • Certains répondront que les faits n'apparaissent pas toujours très clairement à la victime lors d'une “toucherie". L’acte pourrait aussi être inconsciemment pardonné par la victime à cause d'un sentiment de culpabilité. Sa trop grande jeunesse, le cas échéant, pourrait jouer un rôle important dans la confusion mentale et fausser l'interprétation des mots et des gestes du lourdaud. La subjectivité, donc, peut donc être invoquée, c'est vrai et, à supposer que certains de ces arguments soient acceptables, ils le seront, en revanche, dans des cas bien déterminés. C'est pourquoi, en ce qui concerne les actrices en question, ça ne marche pas. Actrices professionnelles, elles ne sont pas si jeunes au moment des faits et selon leur témoignage, les “toucheries” se sont reproduites régulièrement sur de longues périodes, le temps, évidemment, de bien les comprendre et les analyser.
  • La loi
  • Raison pour laquelle, la loi, citée ci-dessous, tient compte majoritairement du témoignage de la victime et non de celui de l’agresseur, ce qui signifie que le tribunal ne retient pas le manque de conscience ou d'appréciation des faits de la part de la victime dont le témoignage va bel et bien déterminer l’accusation:
  • Un arrêt de la chambre criminelle de la cour de cassation du 18 novembre 2020 (n° pourvoi 19-81790) vient rappeler fort à propos que c’est bien à partir du point de vue de la victime des agissements de harcèlement sexuel, dans ce qu’elle a subi et dans l’impact qui en est résulté pour elle, que se positionnera le juge pour la qualification de l’infraction, et pas à partir de celui de l’auteur de ces agissements, qui prétend et allègue de la gentillesse de son comportement.
  • Les Traitresses
  • Pour en revenir à nos actrices, si leur préoccupation était de ne pas perdre leur job, elles sont, logiquement et éthiquement dans de bien sales draps: en effet, se laisser toucher pour de l'argent, ça porte un nom: la prostitution. Alors d'abord elles se laissent tripoter sans réagir, profitant ainsi de l'aubaine de travailler avec une star qui les met bien en lumière et, des années plus tard, parce que d'autres se plaignent de faits sans aucun rapport, décident de se venger? Mais de quoi? De leur propre lâcheté? de leur appât du gain? Si, depuis la nuit des temps, les femmes se servent du sexe sans vergogne pour manipuler les hommes, pour leur soutirer de l'argent, pour s'attirer des faveurs, pour monter les échelons... ces actrices pensent-elles vraiment avoir le droit moral de clouer ce Gérard, ou d’autres, au pilori pour une main aux fesses? Elles ne doutent de rien, alors, amnésiques et aussi traîtresses? Comme si elles ne connaissaient pas les aléas de ce métier, les risques encourus, car combien, avant et après elles, profitèrent de cet ascenseur social qui, au su de tous, était légion dans la profession.
  • Les chauffards
  • Et puis quoi, ne se méfient-elles pas des chauffards, ces dames, en regardant attentivement à gauche puis à droite avant de traverser? Pourquoi alors, ne pas adopter le même comportement avec les lourdauds? La raison se cacherait-elle dans le désir inné et irresponsable de plaire et de séduire à tout prix? Le problème est que lorsqu'on se fait aguichante pour les uns, on l'est aussi pour les autres. Et là, plutôt que de changer d'attitude ou de mode vestimentaire en général, elles préfèrent accuser aux lourdaud, alors que les cibles visées par les attraits mis en œuvre, elles, sont les bienvenues. Et elles, dans ce cas, savent-elles se retenir de séduire. Sont-elles si innocentes qu'elles le prétendent? Les chauffards, dont elles ont vraiment peur, sont la preuve vivante qu'elles savent parfaitement être vigilantes. Facile de jouer les sexes faibles tout en manipulant l'opinion publique tout entière, à commencer par ses propres collègues de travail.
  • Pas corps, pas fortes
  • Un autre problème des femmes, est qu’elles ne sont pas exactement une secte. Elles ne font pas corps, ne sont pas unanimes et certaines, moins gâtées par le destin, aimeraient bien être à la place de ces actrices par trop sollicitées. Qui, penserait que se faire casuellement tripoter les seins pour un court instant est plus dur que de travailler à la mine? Qui oserait dire qu'être au front, baïonnette au canon et prêt à se faire embrocher comme un vulgaire sanglier, est plus facile que de subir une main aux fesses? Qui, pense qu'être seulement éboueur, soit ramasser les ordures des gens en travaillant dans la puanteur, est plus facile que de se faire serrer langoureusement et stupidement contre un lourdaud? Ou qui oserait comparer la prostitution professionnelle avec une caresse aussi déplacée et indésirée qu’elle soit? Pourtant, des femmes et des hommes font ces métiers, chaque jour de leur triste existence, pour vivre ou pour survivre. Et vous, les actrices, non seulement votre métier est mille fois plus agréable, mais en plus, je le répète, vous n'êtes absolument pas obligées de l'exercer en compagnie de ces lourdauds. Si vous l’acceptez, c’est donc votre problème, par le leur. Car eux, il faut croire, la trouveront toujours la femme prête à se faire tripoter pour gravir les étapes.
  • L’ombre des hommes
  • Ce qui est troublant aussi, dans le comportement féminin, c'est le sentiment de frustration, de haine, de malveillance et surtout de jalousie qui s'exprime dans leurs vengeances, quel qu'en soit le type. Sénèque n'a-t-il pas dit: 'toute méchanceté émane de la faiblesse'? Car de faiblesse il s’agit, lorsqu’on lève le doigt, telle une enfant gâtée, en criant 'moi aussi m’dame' après s'être volontairement jetée dans l’arène. Ces actrices ne sont ni victimes ni à plaindre et leur indignation sonne aussi faux que celle d'un mercenaire devant un cadavre.
  • Je l'ai dit plus haut, les femmes sont bien pires que les hommes dans l'usage du sexe comme arme et malgré cela, elles sont capables du pire aussi dans la destruction des hommes qu'elles ont dans le pif. A croire que leur rêve de vengeance - on ne saurait pourquoi - demeure intarissable. Sans cette jalousie maladive, comment expliquer celles qui passent leur vie à vouloir égaler les hommes jusque dans les activités typiquement masculines et/ou violentes: les joueuses de rugby, de foot, les boxeuses ou les gonflées des salles de gym qui se déforment en Schwarzenegger au point de se déchoir totalement de toute féminité. Et d’ailleurs, y a-t-il un seul sport que les femmes aient inventé par elles-mêmes, un sport qui serait majoritairement pour les femmes? Si je n’en ai pas trouvé, seraient-ce qu’elles sont démunies de toute imagination lorsqu'il ne s'agit pas de nuire aux hommes? Comment expliquer que même les femmes d'affaires, les ministres, les hautes fonctionnaires prennent des allures de mecs avec leur mallette et leur tailleur Chanel. Comme si Coco avait inventé MeToo avant l'heure ou exprimait simplement ce désir de ressemblance profondément ancré dans l'inconscient des femmes. Comment expliquer, encore, le discours ou l’écriture inclusive, sinon pour obliger chaque francophone, où qu’il soit, d’où qu’il soit et quoi qu’il ait envie de dire, de spécifier que les femmes aussi existent en imposant le: 'celles et ceux' ou 'l'écrivaine' ou la 'lieutenante‘. N'y a-t-il pas là-dessous un problème prononcé d'identité? Craignent-elles à ce point qu’ils oublient leur propre mère, leur mamie, leur sœur, leur épouse ou leurs filles? Sans ces bouleversements de la langue, insinuent-elles que les noms de Jeanne d’Arc, de Marie Antoinette ou de la reine Elisabeth s'évaporeraient des cerveaux masculin? Le symbole de la France, pays donc présumé macho et misogyne par ces femmes frustrées, n’est-il pas une Marianne? A force de tout faire pour qu’on les regarde et les admire, elles me font penser à Mélenchon, ce politicien qui râle par défaut, même quand y'a rien à dire.
  • Femmes d'honneur
  • Heureusement qu'elles viennent, ces femmes d'honneur, enrichir ce triste panorama. Pensez-vous, lecteurs (je reste d’avis que 'lecteurs' comprend aussi les femmes), que ces femmes-là seraient enclines à déballer leurs déboires sexuels au grand jour? Les croyez-vous capables d’accusation promotrice? Peut-on imaginer une Simone Weil, une Bernadette Chirac, une Élisabeth Badinter, une Christine Ockrent, une Carla Bruni, une Catherine Deneuve et toutes les autres femmes qui ont su exister, s’humilier à raconter qu'un tel leur a touché les seins? Ben non, elles disent, au contraire, que le 'viol est un crime, certes, mais que la drague insistante ou maladroite n’est pas un délit, ni la galanterie une agression machiste.'
  • Dans une tribune au « Monde », un collectif de 100 femmes, dont Catherine Millet, Ingrid Caven et Catherine Deneuve, affirme son rejet d’un certain féminisme qui exprime une 'haine des hommes'.
  • Donc, les femmes se connaissent et savent de quoi elles sont capables. Et certaines savent aussi se défaire de ce complexe d’infériorité qui les tire vers le bas.
  • Tant qu'il y aura des hommes
  • En résumé, je ne dis surtout pas que les “toucheries" sont élégantes ou utiles. Je dis que si Gégé a agi comme un porc, c’est que, sans aucun doute, c’est un porc mais que l'hypocrisie n'a rien à faire dans l'analyse de ces gestes. Pour conclure ce 'J'accuse' mon souhait sera que tant qu'il y aura des hommes, il y ait aussi des mains aux fesses des actrices qui préfèrent se faire tripoter plutôt que de changer de plateau. Vu que pour elles, l'argent, la gloire et leur carrière passe bien avant l'amour propre, la fierté et la grandeur d'âme, il n'est pas impossible qu'au fond, elles ne méritent pas mieux.
Le Tropique du Cancer
  • Lorsque l’on construit sa maison au bord de la mer, il se peut qu’un jour, elle se retrouve entourée d’eau, voire submergée. Les Hollandais connaissent bien le problème. Ils avaient deux solutions: soit s’éloigner de la mer si l’espace le permettait, soit s’adapter. C’est ce qu’ils ont choisi de faire en construisant des maisons flottantes afin de concilier la présence de l’eau avec leur quotidien citadin. S’ils n’avaient pas choisi cette solution, ils seraient certainement en train de se quereller, se reprocher leur inaction et finir par se noyer.
  • Les populistes d’Europe, naguère désignés par les termes "nationalistes, fascistes, xénophobes ou racistes", ont le même problème que les Hollandais, sauf que dans leur cas, l’eau est remplacée par le migrant. Bien que l’appellation diffère, la haine et la peur sont intactes et, se sentant inondés et menacés par ces vagues migratoires, ils surgissent du cœur des peuples comme des tigresses protégeant leur portée, fermant les frontières et renvoyant chacun chez soi. Ils optent donc pour la fermeture des frontières et le renvoi de chacun chez soi. C’est une solution, en effet, et le syndrome n’est pas nouveau. Solution populaire même, puisqu’elle plaît au plus grand nombre dans plein de pays désormais. L'égoïsme, dicté par l'instinct de survie, fait effectivement partie du génome humain, mais combien de temps ces pays résisteront-ils aux vagues humaines vu que la population mondiale ne fait que croitre et avec elle l'ampleur du phénomène migratoire.
  • L’Europe, installée sous la bonne latitude — au nord du Tropique du Cancer — s’est trouvée privilégiée par le sort, là où encore aujourd'hui il fait bon vivre. Les hollandais, au lieu de s’adapter, auraient pu s'entêter et colmater toutes les ouvertures de leurs maisons pour empêcher l’eau de s'infiltrer. Mais il est clair que ça n'aurait duré qu’un temps. Qu’un jour ou l'autre l'eau aurait tout submergé et que la rouille et la moisissure auraient fini par tout ronger. Car l’eau n’a pas le choix. Elle va où elle peut, tant qu’elle le peut. Et ce que les populistes n’ont pas compris, c’est que les migrants aussi, vont là où la vie est encore possible.
  • Tropic du Cancer
    La fuite hors des zones de conflits, le manque de travail et les persécutions, causes déclarées par les migrants lors des demandes d'asile, ne sont souvent qu’une conséquence de la raison première: celle de vivre dans une zone subtropicale, où le climat est moins tempéré, où la chaleur tape sans mesure, où le manque d'eau paralyse et où l’aridité redessine les paysages laissant disparaître toute forme d'activité. Nombre des fuyants sont donc, en premier lieu, victimes de leur lieu de naissance qui, de par sa nature, engendre toutes les autres situations aggravantes. Lieux où souvent, la religion endoctrine les plus faibles et convainc de ses desseins, où les plus vaillants préfèrent s’enrôler dans quelque milice pour un repas par jour, et où Ils préfèrent parfois la noyade à l’immobilité plutôt que de perdre tout espoir de se projeter.
  • Au sud du Tropique du Cancer, c’est ce qui se passe et se passera tant que le climat le décidera. Il n'est d'ailleurs pas dit que les pays du nord soient épargnés, mais relativement, leur situation devrait être toujours meilleure. Des milliers voudront et devront, sous peine d’agonie trop lente, rejoindre les zones vivables de la planète. A moins de trouver une solution miracle, toujours souhaitable certes, les conflits et la pauvreté augmenteront proportionnellement à la sécheresse, les pays les mieux géopositionnés demeurant les destinations les plus prisées. S’ils ne choisissent pas la solution de l’adaptation, comme les hollandais avec les maisons flottantes, les populistes n’auront plus qu’à tirer sur tout ce qui s'approche de leurs frontières car de toute manière, ceux qui ont quitté le néant n'y retourneront pas.
La Science
  • Un avion ne peut décoller que grâce à l'interaction d'une myriade d'exactitudes scientifiques, savamment empilées, croisées et orchestrées par des esprits dont le génie ne laisse place à aucune erreur. Tout ce qui implique un savoir précis mais n’émerge pas de ces vérités scientifiques ne participe pas directement à la préservation de l’humanité, à sa santé ou à son progrès concret. Il va de soi que l’art, la philosophie, les valeurs morales… sont libres d’exister.
  • Les récusationnistes, souvent contestataires de la science, s’en remettent paradoxalement à ses fruits en utilisant des smartphones et des avions ou en diffusant leur propagande sur le net, un des reflets les plus ambivalents de notre époque. Mais quoi qu'ils en disent ou en pensent, c'est bien elle seule qui les nourrit et porte l'humanité à bout de bras.
  • Ceci étant, l’intuition, la métaphysique et les rêveries ont elles aussi leur place. Leur simple existence témoigne de leur légitimité. Le cerveau humain ne saurait être bridé dans ses élans créatifs – mais dès qu'une vérité scientifique est en mesure de les éclairer ou de les dépasser, il devient raisonnable de lui laisser la main. Ainsi, il ne sert à rien de s'obstiner à nier l'existence des dinosaures, de croire à la platitude de la Terre ou qu’on n’utilise que 10 % de son cerveau. Ces credo, érodées par des décennies de découvertes, appartiennent à l’histoire.
  • La science, bien qu’imparfaite, peut engendrer des outils redoutables – de la bombe atomique aux armes chimiques. Mais, à l’image d’un boxeur qui choisit de ne pas frapper, c’est à l’Homme seul qu’incombe la décision de la diriger vers le bien ou le mal.
Une vie pour une âme
  • Troublants, ces sempiternels cycles de la nature humaine qui avance en trébuchant sur ses illusions, persuadée de progresser alors qu’elle passe ses siècles à recycler les mêmes travers. Toujours ces guerres, ces tensions et surtout, ces scénarios de dominaiton animale des uns sur les autres. Dans ce décor infernal plus que divin, un nouveau clergé émerge. Il troque ses robes pour des lignes de code, son au-delà censé structurer la réalité par du binaire qui la fabrique, même si, au fond, le geste reste figé: croire sans comprendre, suivre sans voir, obéir à ce qu’on ne maîtrise pas.
  • Nées de la pulsion humaine à combler l’inconnu par le sens, les religions saisirent bien vite la force des dogmes et commencèrent à mener l'humanité par le bout de la foi, érigeant cette dernière en institution et structurant ainsi non seulement les rapports à l’invisible, mais aussi les mécanismes de pouvoir au sein des sociétés. Les interrogations fondamentales de l’existence — la vie, la mort, l’identité humaine — longtemps monopolisées par les discours religieux pour en faire les piliers de leur légitimité devinrent le clou d'une dépendance intellectuelle, voire émotionnelle, qui rend toute contestation difficile, sinon impossible. Il ne s’agissait pas seulement de croire, mais de soumettre le doute à une autorité supérieure, parfois plus politique que spirituelle.
  • Face à la complexité des textes anciens, rédigés dans des langues parfois obscures et dans un style éloigné du langage courant, la majorité des fidèles se retrouva dans l’incapacité d’en saisir le sens profond. C’est dans cette faille que s'installa une nouvelle fonction: l’interprétation. D’abord passerelle entre le sacré et le commun, elle devint peu à peu un levier d’influence pour ceux qui prétendaient en détenir les clefs. Armés d’un lexique simplifié et d’une autorité auto-proclamée, ces "interprètes" — VRP des dieux aux figures de pouvoir religieux ou politique — redéfinirent les textes à la lumière de leur propre vision du monde. En maquillant l’explication en vérité, ils orientèrent les consciences sur ce qu’ils présentaient comme le seul chemin valable, instaurant une forme subtile mais redoutablement efficace de contrôle des esprits.
  • Ce chemin d’endoctrinement, si élimé qu’il en paraît naturel, conduisit l’humanité vers les pentes escarpées de l’intolérance, des guerres de religion, des discriminations, des apartheid, des nettoyages ethniques... L’histoire est remplie des fruits amers de croyances sanctifiées. Derrière l’ambiguïté des dogmes prospèrent les dérives, protégées par le flou et l’immunité morale que confèrent les discours spirituels, l’effervescence juridique se dissolvant dans l’encens.
  • Les humains, au fond, sont friands de credo. La combinaison "je nais, je vis, je meurs", trop plate, trop nue, trop crue pour représenter, à leurs yeux, un quelconque intérêt ne comble pas cette absence de sens, de substance et surtout de logique dans le dénouement inéluctable de la vie qui, finalement, heurte trop brutalement leur besoin de cohérence. La vie ne peut pas s’éteindre avant d’avoir prouvé son utilité ou sa raison. Comme si un caillou qui tombe à terre ou une planète suspendue dans le vide étaient plus simples à comprendre. Comme si la mécanique quantique, bien moins digeste que l’hostie, ne prouvait pas que le monde est bien plus étrange que la vie des petits organismes que nous sommes. Alors ils sautent à pieds joints, les Hommes, dans ce souffle retrouvé de certaines religions qui exploitent les fissures, les craintes, les fatigues, pour rallier de nouveaux fidèles. La conquête reprend de plus belle, non plus dans les steppes, mais dans les cœurs déroutés d’une humanité débordée.
  • Sauf que cette fois, un rival inattendu s’avance.
  • Il opère dans la même langue obscure, se glisse dans les recoins de la pensée, infiltre les pratiques quotidiennes avec la même insistance rituelle. Comme les anciens cultes, il impose ses gestes, ses mots, ses prescriptions. À l'instar des religions, il s'installe dans les mœurs, les conversations et les rites. Il divulgue ses idées, il escroque, espionne, ruse et use de sa puissance silencieuse pour régner en maître. Mais sa liturgie est numérique, invisible: ses prières s’écrivent en codes, ses sacrements passent par des câbles. Il invite l’humain à livrer son intimité, ses envies, ses faiblesses, et promet en retour une présence constante, un monde sur mesure. Comme hier avec Dieu, la foi redevient dépendance, elle va régner pour un temps, peut-être pour toujours.
  • Et comme autrefois, l’interprétation devient indispensable — et suspecte. Car les outils numériques, encore plus impénétrables que les vieux manuscrits à connotation sacrée, exigent leurs médiateurs, experts, youtubeurs, vulgarisateurs, auto-proclamés "éveilleurs de conscience". Ils décrivent, simplifient, prescrivent. Mais orientent, aussi. Non plus vers le bien ou le salut, mais dans les couloirs étroits d’une vérité algorithmique où la servitude semble plus douce quoique plus totale. Ils éclaircissent le chemin des brebis égarées ou plutôt... inaptes, drainent les fidèles, non plus sur le chemin du "bien", mais vers l'enfer des signes, où, esclaves soumis, les pauvres et les pauvres d'esprits seront, cette fois, bien plus mal-logés qu'au temps des bonnes vieilles religions. A défaut d’esprit brillants, ils pouvaient jadis utiliser leur mains et leur savoir faire. Avec les langages algorithmiques, ils seront réduits au silence et à la lie, comme dans "1984" .
  • L’histoire bégaie, inexorable retour des gourous, des langages savants et des foules en quête de sens qui troquent leurs galimatias pour des bits. Elle imagine s’être émancipée, avoir grandi. Un cerveau brillant dans un corps désuet et fatigué, l'Homme n'a besoin, pour vivre, que de satisfaire ses quelques instincts primaires et pourtant monnaye sa vie au prix de son âme pour mourir chez un autre dieu, pour un autre mieux.
  • Elle va les chercher loin, l'Humanité, l'amour qui devraient être sont but.
Le péril n’est plus jaune
  • Ce titre fait référence au "péril jaune", pour ceux qui ne l'ont pas connu, le danger qui devait venir de la Chine à l'époque ou sa transformation et sa domination commerciale étaient encore à venir. Sans la quantité incalculable d’échanges, de voyages d’affaires et de mouvements en tous genres qu’occasionne la mondialisation, Corona ne se serait jamais propagé à cette vitesse, entraînant les dégâts que l’on connait et ceux qui peut-être suivront. Cet épanchement si rapide du mal comme du bien est donc l’un des aspects les plus évidents et contraignants de cette nouvelle posture que le monde n’a pu éviter et que les hommes ont délibérément acceptée... à tort ou à raison.
  • Mais plus à tort qu'à raison, nous répond la planète, dont les habitants et leur économie semblent terrassés par un objet quasi virtuel de quelques 300 nanomètres (1nm =1 milliardième de mètre) qui lui, n’a que faire du gel commercial, du chômage, de la souffrance ou de l’angoisse qu’il propage en même temps que la mort.
  • Les Hommes devaient-ils se haïr à ce point? La globalisation naît aussi de la nécessité de se rassembler pour se protéger. Les pays européens ne supportaient plus leur petitesse et leur faiblesse face aux géants américains, chinois, russes ou indiens qu’ils soient. Sans cette menace, eut-il été indispensable de former des groupes d’états aussi gigantesques, de perdre partie de son hégémonie au profit de nations étrangères, de s’affaiblir donc, au point de ne plus maîtriser quoi que ce soit. Était-il si nécessaire de détruire le tissu artisanal et industriel local et de vouloir à tout prix apprendre le chinois ou le russe pour parler avec des gens que nous ne comprendrons jamais?
  • On est pas obligé d’imiter les autres, de singer tout ceux que l’on croise, de désirer tout ce que l'on voit, de convoiter sans relâche l'apparent bien-être de nos semblables pour se sentir épanoui. On est pas tenu aux contorsions infligées par les complexes, imaginant que tout et tous valent mieux que nous. Platon avait bien distingué la différence des Hommes dans l'amalgame de cette humanité . Les Hommes sont en effets tous des humains, disait-il, mais aucun d’eux n’est égal à l’autre. Et dans ce tourbillon de diversité, est-il bien venu de se considérer meilleur ou pire? Ces différences ne sont-elles pas la richesse du monde et vouloir les limer ne constitue-t-il pas en soi un crime de lèse-majesté?
  • J’ai l’impression que cet épisode, cette frousse que nous colle Corona, à supposer qu’elle en reste effectivement à un mauvais souvenir, sonne comme le glas du “trop-lointisme”. Les Hommes ne sont pas construits pour le gigantisme, le continentalisme, le mondialisme, l’universalisme... Ils ont encore besoin de leur petit chez soi, de leurs habitudes, de leur coquille, de la sécurité d'un foyer accueillant après une journée de travail, de parler dans leur langue avec leurs enfants, petits enfants et arrière petits enfants puisque désormais l’âge s’étire, de s’aimer et de vivre au rythme de leur cœur. Celui de la fibre optique, le rythme j'entends, qui transmet les données à une vitesse proche de celle de la lumière, n’est pas praticable pour les vivants d’os et de chaire. Même les physiciens qui inventent ces technologies ne sauraient vivre en harmonie avec leurs découvertes. Alors encore moins les quidams ou les politiciens qui, comme les autres, ne cherchent qu’à se nourrir. La fuite en avant n'a jamais sauvé personne, elle ne sera donc pas notre salut. La réflexion, le dialogue et la précaution de ne pas faire d'erreurs sont les clés de l'avenir. La mondialisation ne peut pas sauver 7.5 milliards d’êtres humains alors que chaque état souverain, pour sa part, saura toujours faire mieux pour prendre soin de ses sujets. La fermeture des frontières, geste presque instinctif dans cette situation de crise, en est la preuve. Il ne s'agit plus de "diviser pour mieux régner" comme à l'époque de la Macédoine, mais de compartimenter pour mieux se protéger. Et c'est valable aussi en temps normal.
  • Corona, sans le vouloir, pourrait nous rappeler que le "chacun chez soi" vaut mieux que le "tous chez un seul". Il pourrait remettre les pendules à l’heure des humains et nous rendre ce que nous avons sottement dédaigné: Les artisans, les paysans, les particularités, les anciennes monnaies et l'indépendance idéologique, productive ou financière qui identifiait chaque état. Le cas échéant, il s’agirait ensuite de se souvenir de tout ce qu'il y a à perdre à vouloir trop en faire.
  • Mais les Hommes sont ainsi faits, il ne comprennent que lorsqu’il est trop tard.
Hypocrisie séculière
  • Les sociétés séculières deviennent elles-mêmes Schizophrènes lorsque leurs écoles enseignent aux bambins l’évolution darwinienne puis, laissent les enfants issus de familles pratiquantes apprendre, dans leurs communautés religieuses respectives, que l’Homme fut créé par un dieu. Alors, liberté de culte, d’accord, mais faut-il absolument éduquer ces chers bambins dans cette absolue confusion mentale? Un débat, je suppose, apte à faire trembler, une fois de plus, les mythiques murs de Jéricho.
  • Ce tiraillement n’est pas nouveau. Dès la publication de L’Origine des espèces en 1859, les autorités religieuses – toutes confessions confondues – se sont trouvées confrontées à une remise en cause fondamentale de leurs récits de création. L’Église catholique, longtemps hostile, a fini par adopter une position plus nuancée: La théorie de l’évolution n’est pas incompatible avec la foi, affirmait Jean-Paul II en 1996. Pourtant, dans bien des foyers croyants, la vision d’un Dieu façonnant l’Homme à partir d’argile reste transmise comme un fait immuable.
  • Pendant ce temps, les académiciens, rédacteurs de dictionnaires et encyclopédies, enfoncent le clou de l’enseignement laïque dans leurs définitions: claires, rigoureuses, souvent reléguant les croyances religieuses au rang de faits culturels relevant de la mythologie ou du patrimoine symbolique. Ainsi, science et foi vivent côte à côte, mais rarement main dans la main comme le démontrent ces quelques définitions encyclopédiques relatives aux termes religieux:
  • Dieu
  • La conception exacte de Dieu varie en fonction des philosophies et des religions. Dieu désigne généralement un "être suprême" dont les qualités sont illimitées, l'individuation personnelle ou impersonnelle du Le principe de l'univers, c'est-à-dire sa raison première en tant qu'essence primordiale — Dieu est alors souvent considéré comme le démiurge ou créateur — et sa raison dernière en tant que finalité et sens de la vie, dans les religions monothéistes.
  • Selon certains courants religieux et philosophiques, l’âme est le principe vital, immanent ou transcendant, de toute entité douée de vie, pour autant que ce principe puisse être distingué de la vie-même.
  • Dogme:
  • Du grec δόγμα (dogma), opinion , un dogme est une affirmation considérée comme fondamentale, incontestable et intangible par une autorité politique, philosophique ou religieuse qui emploiera dans certains cas la force pour l'imposer.
  • Abraham:
  • Abraham est considéré dans la bible, comme le père du monothéisme. Son histoire est racontée dans la Genèse, chapitres 11 à 25. Quand la Bible était encore vue comme un récit historique précis, les spécialistes dataient cette épopée des environs de 1800 ans avant notre ère. Aujourd'hui, elle est considérée comme largement mythique, même si la mémoire d'un ou plusieurs personnages fondateurs a pu servir de modèle à Abraham.
  • Bible:
  • La Bible est le nom français donné au regroupement de textes sacrés du judaïsme, ou du judaïsme et du christianisme, en un seul Livre, bien que chacune de ces religions, voire chaque courant en son sein respectif, ait un rapport différent à ces textes fondamentaux.
  • Évolution:
  • Les théories de l'évolution sont un ensemble de théories scientifiques décrivant le processus biologique par lequel les populations d'êtres vivants se modifient au cours du temps et donnent naissance à de nouvelles espèces... La théorie de l'évolution se heurte également à une vive opposition de la part de certains milieux religieux fondamentalistes, notamment pour son incompatibilité avec une interprétation littérale de la Bible.
  • Aux États-Unis, le débat est vif depuis des décennies. Des procès célèbres comme Kitzmiller v. Dover Area School District ont interdit l’enseignement du créationnisme en tant que science. Pourtant, la pression religieuse reste forte, et certains États tentent régulièrement d’imposer des versions édulcorées dans les programmes scolaires.
  • Que devient un enfant écartelé entre ces deux discours ? Que se passe-t-il dans l’esprit d’un élève à qui l’on enseigne la sélection naturelle à 10 heures, et à qui l’on raconte, à 17 heures, qu’un dieu omnipotent a tout orchestré dans un dessein intelligible? Cette dichotomie, ce tiraillement non résolu, n’engendre-t-il pas une perte de repères, voire une méfiance envers toute forme de savoir?
  • Si les fidèles, s'ouvrant ainsi au monde, prenaient la peine de lire autre chose que des missels pour découvrir ce qu'ils bannissent avant de le connaître, peut-être n’auraient-ils plus besoin de s’entasser dans des temples, ni de rejeter ceux qui n’y sont pas, juste histoire d’accepter, humblement, le monde tel qu’il est: complexe, mouvant, parfois déconcertant, mais accessible à la raison dont il nous a doté. On n'est pas obligé de cultiver cette hypocrisie séculière. Les Scandinaves ou les Britanniques l'ont bien compris et le mettent en pratique. La France, en revanche, revendique là encore sa place de cancre au bonnet d'âne. D'abord révolutionnaire avec sa loi de 1905 qui impose une laïcité rigoureuse, qui ne subventionne aucun culte et où l’école publique est censée être un espace neutre dans lequel la religion n’a pas sa place. Et ensuite, ces familles, notamment des milieux très croyants (catholiques, musulmans, juifs ou évangéliques) qui peuvent transmettre à leurs enfants des récits de création incompatibles avec la théorie de l’évolution et le darwinisme enseigné au sein de son école. Liberté, Égalité, Fraternité, d'accord mais alors liberté de créer une dissonance cognitive chez les élèves? Une égalité ou les croyants ne se trouvent pas assez égaux? Quant à la fraternité, on sait bien ce que la religion en fait en bannissant les impies. Charles Darwin lui-même, dans une forme de lucidité empreinte d’humilité, n'écrivait-il pas après avoir renoncé à sa ferveur religieuse:
  • Le mystère du commencement de toutes choses est insoluble pour nous; et je dois me contenter de rester agnostique.
Le Biais de Confirmation
  • Il est fort probable que ceux qui croient que la Terre est plate, ne croiront pas un mot de textes qui décrivent le contraire. Ou plutôt feront tout, inconsciemment, pour éviter d'y croire et ce, quelle que soit l’authenticité de ses propos. C'est ce que l'on nomme le biais de confirmation. De fait, le biais de confirmation consiste à chercher constamment à confirmer sa façon de penser plutôt qu’à la remettre en cause. En d’autres termes, c’est ce qui nous incite à continuer de croire ce que nous croyons déjà.
  • Tout ce qui pourrait mettre en péril l’édifice des certitudes sera rapidement et catégoriquement écarté à jamais de leur raisonnement et de leur vie. Il en sera de même pour l’explication rationnelle et empirique de ce phénomène qui risque de remettre en cause le bien-fondé de leur credo ou, dans des cas extrêmes, de nuire à un équilibre psychique trop fragile. Ainsi, lorsqu’une hypothèse est démontrée comme fausse, on a tendance à continuer à croire qu’elle est vraie en tentant, par tous les moyens possibles, de la confirmer avec d’autres arguments, même dépourvus de légitimité.
  • Le biais de confirmation est d’une importance capitale pour comprendre la persistance de credo divers et variés malgré l’évolution du savoir. Si, pour une raison ou pour une autre, un sujet voulait abandonner une pratique cultu(r)elle, le biais rendrait la démarche particulièrement difficile, voire impossible pour certains. Retrouver une interprétation logique du monde qui permettrait de se défaire de ce carcan ou de la crainte qu'il évoque, relève d'un effort mental qui va bien au-delà des capacités régulières des personnes.
  • Le fait d'être conscient du problème, en revanche, de savoir que l’on cherche toujours à confirmer sa façon de penser, pourrait, si on le désire, aider à penser plus clairement et plus logiquement. On est capable de reconnaître ce biais lorsque sa propre pensée est illogique par rapport à la réalité. Dans la pratique religieuse, par exemple, la majeure partie des croyants ne sont pas convaincus que la Mer Rouge s'ouvrît réellement pour sauver les Israélites de la poursuite des Égyptiens. Cet épisode semble illogique. Néanmoins, ce passage n’est pas mis en doute puisque conté dans une Bible qui, pour eux, représente une vérité absolue inculquée dès le plus jeune âge. Il est aussi beaucoup plus facile de reconnaître un biais de confirmation chez les autres que chez soi-même. C’est d’ailleurs une des raisons principales de conflit entre individus, lorsque l’un pense avoir raison alors que l’autre a déjà démontré les erreurs du raisonnement.
  • C’est un certain Peter Wason (1924-2003), psychologue de profession, qui mis à jour le biais de confirmation. Une expérience probante sur un groupe de sujets fut publiée en 1960. Elle demandait de trouver des triplets de nombres qui pouvaient correspondre à une série comme 2-4-6. Bien que la règle réelle fût simplement une séquence ascendante comme 5-6-7 ou 11-13-21, les sujets s'efforçaient bizarrement de trouver des séries qui répondaient à des critères beaucoup plus spécifiques tels que le chiffre du milieu est la moyenne des deux autres ou il s’agit d’une progression de deux comme 12-14-16 et avaient beaucoup de mal à sortir du schéma de leur credo. Wason interpréta ces résultats comme l'illustration d'une nette préférence pour la confirmation vis-à-vis de l'infirmation, d'où son terme choisi de biais de confirmation ou biais de vérification.
  • Un trait distinctif de la pensée scientifique est la recherche de preuves infirmantes ou confirmantes. Cependant, à de nombreuses reprises dans l'histoire de la science, les scientifiques ont résisté à de nouvelles découvertes par l'interprétation sélective d'informations ou en ignorant les données défavorables. Des recherches ont montré que l'évaluation de la qualité des travaux scientifiques semble être particulièrement vulnérable au biais de confirmation. Il a été constaté à plusieurs reprises que les scientifiques évaluent plus favorablement les études qui rapportent des résultats conformes à leurs credo, et moins favorablement les études dont les conclusions y sont en contradiction.
  • Le biais de confirmation est donc bien le garant de l’attachement inconditionnel aux credo. La subjectivité de celles-ci est aussi la raison de leur multiplicité et de la variété de leurs interprétations. Chaque récusationniste, en effet, a sa façon de croire et de pratiquer son propre culte. Par conséquent, le contenu est bien moins important que le contenant ou encore, le credo est bien moins pertinent que ce qu’on en fait. Nietzsche l'affirmait déjà: ce qui importe n’est pas qu’une chose soit vraie, mais que l’opinion pense qu’elle est vraie.
  • Il est fort probable que ceux qui croient que la Terre est plate, ne croiront pas un mot de textes qui décrivent le contraire. Ou plutôt feront tout, inconsciemment, pour éviter d'y croire et ce, quelle que soit l’authenticité de ses propos. C'est ce que l'on nomme le biais de confirmation. De fait, le biais de confirmation consiste à chercher constamment à confirmer sa façon de penser plutôt qu’à la remettre en cause. En d’autres termes, c’est ce qui nous incite à continuer de croire ce que nous croyons déjà.
  • Tout ce qui pourrait mettre en péril l’édifice des certitudes sera rapidement et catégoriquement écarté à jamais de leur raisonnement et de leur vie. Il en sera de même pour l’explication rationnelle et empirique de ce phénomène qui risque de remettre en cause le bien-fondé de leur credo ou, dans des cas extrêmes, de nuire à un équilibre psychique trop fragile. Ainsi, lorsqu’une hypothèse est démontrée comme fausse, on a tendance à continuer à croire qu’elle est vraie en tentant, par tous les moyens possibles, de la confirmer avec d’autres arguments, même dépourvus de légitimité.
  • Le biais de confirmation est d’une importance capitale pour comprendre la persistance de credo divers et variés malgré l’évolution du savoir. Si, pour une raison ou pour une autre, un sujet voulait abandonner une pratique cultu(r)elle, le biais rendrait la démarche particulièrement difficile, voire impossible pour certains. Retrouver une interprétation logique du monde qui permettrait de se défaire de ce carcan ou de la crainte qu'il évoque, relève d'un effort mental qui va bien au-delà des capacités régulières des personnes.
  • Le fait d'être conscient du problème, en revanche, de savoir que l’on cherche toujours à confirmer sa façon de penser, pourrait, si on le désire, aider à penser plus clairement et plus logiquement. On est capable de reconnaître ce biais lorsque sa propre pensée est illogique par rapport à la réalité. Dans la pratique religieuse, par exemple, la majeure partie des croyants ne sont pas convaincus que la Mer Rouge s'ouvrît réellement pour sauver les Israélites de la poursuite des Égyptiens. Cet épisode semble illogique. Néanmoins, ce passage n’est pas mis en doute puisque conté dans une Bible qui, pour eux, représente une vérité absolue inculquée dès le plus jeune âge. Il est aussi beaucoup plus facile de reconnaître un biais de confirmation chez les autres que chez soi-même. C’est d’ailleurs une des raisons principales de conflit entre individus, lorsque l’un pense avoir raison alors que l’autre a déjà démontré les erreurs du raisonnement.
  • C’est un certain Peter Wason (1924-2003), psychologue de profession, qui mis à jour le biais de confirmation. Une expérience probante sur un groupe de sujets fut publiée en 1960. Elle demandait de trouver des triplets de nombres qui pouvaient correspondre à une série comme 2-4-6. Bien que la règle réelle fût simplement une séquence ascendante comme 5-6-7 ou 11-13-21, les sujets s'efforçaient bizarrement de trouver des séries qui répondaient à des critères beaucoup plus spécifiques tels que le chiffre du milieu est la moyenne des deux autres ou il s’agit d’une progression de deux comme 12-14-16 et avaient beaucoup de mal à sortir du schéma de leur credo. Wason interpréta ces résultats comme l'illustration d'une nette préférence pour la confirmation vis-à-vis de l'infirmation, d'où son terme choisi de biais de confirmation ou biais de vérification.
  • Un trait distinctif de la pensée scientifique est la recherche de preuves infirmantes ou confirmantes. Cependant, à de nombreuses reprises dans l'histoire de la science, les scientifiques ont résisté à de nouvelles découvertes par l'interprétation sélective d'informations ou en ignorant les données défavorables. Des recherches ont montré que l'évaluation de la qualité des travaux scientifiques semble être particulièrement vulnérable au biais de confirmation. Il a été constaté à plusieurs reprises que les scientifiques évaluent plus favorablement les études qui rapportent des résultats conformes à leurs credo, et moins favorablement les études dont les conclusions y sont en contradiction.
  • Le biais de confirmation est donc bien le garant de l’attachement inconditionnel aux credo. La subjectivité de celles-ci est aussi la raison de leur multiplicité et de la variété de leurs interprétations. Chaque récusationniste, en effet, a sa façon de croire et de pratiquer son propre culte. Par conséquent, le contenu est bien moins important que le contenant ou encore, le credo est bien moins pertinent que ce qu’on en fait. Nietzsche l'affirmait déjà: ce qui importe n’est pas qu’une chose soit vraie, mais que l’opinion pense qu’elle est vraie.
Les Nobel
  • Bien qu'elle représente environ 0,17 % de la population mondiale, la population juive a reçu, en 2010, près de 21,5 % des prix Nobel. Ces chiffres sont extraits d'une étude publiée dans Le Monde le 07 avril 2011 par deux scientifiques, Jan C. Biro, professeur honoraire à l'Institut Karolinska de Stockholm, et Kevin B. MacDonald, professeur de psychologie à l'Université d'Etat de Californie. L'étude se nomme: The Jewish bias of the Nobel Prize (Parti pris juif du prix Nobel).
  • Le problème, c'est que l’étude ne tient pas compte du fait que le comité Nobel des 100 dernières années a subi de multiples variations et que par conséquent, les prix attribués aux Juifs au cours de ces années ne sauraient s’expliquer par un facteur unique ou un parti pris structurel. En ouverture de l'étude, les auteurs déclarent qu'aucun d'eux, bien sûr, n'est antisémite, mais qu'il est toutefois nécessaire d'analyser et de corriger le biais des prix Nobel et, pour ce faire, demandent même la collaboration de leurs collègues juifs hautement respectables.
  • Leur longue analyse rappelle le règlement établi par Alfred Nobel stipulant que les prix doivent être distribués aux plus méritants sans considération de la nationalité des lauréats. Selon eux, en effet, la Fondation Nobel aurait ignoré ce principe fondateur. De 1901 à 2010, soit en 110 ans selon leur calcul, 543 prix Nobel ont été attribués à 817 lauréats et 23 organisations. 181 récipiendaires, soit 21,5 %, étaient juifs alors que 659 ne l'étaient pas. Les auteurs entrent ensuite dans des calculs savants et méthodologiquement discutables de rapports à la population mondiale et affirment enfin, qu'il y aurait 137 fois plus de Juifs que de non-Juifs récompensés au niveau mondial par le Nobel.
  • C’est un fait, cette anomalie statistique indique que la réflexion de certains Juifs est plus performante que la moyenne et à ce propos, plusieurs théories, plus ou moins douteuses, sont élaborées. La première, sur laquelle je n’ai aucune référence sinon la vox populi qui berça mon enfance, consiste à penser que ce phénomène trouve peut-être son origine dans l’étude obligatoire de la Torah dès le plus jeune âge, permettant ainsi un épanouissement précoce de l’esprit. Étude qui, par ailleurs, ouvrit aussi la voie à des courants contestataires et dissidents tels que la Kabbale, considérée par certains, comme le nec plus ultra de la réflexion philosophique et mystique. À l’époque où la lecture et l’écriture étaient l’apanage des nobles et bourgeois de tous bords, les enfants juifs, pauvres ou riches, devaient savoir lire avant leur 13eme année afin de célébrer leur Bar Mitsvah (maturité religieuse) , dont le terme et la pratique sont déjà présents dans le Talmud, la Mishna et le Midrash. Ils étaient aussi entraînés à la contestation par le seul fait que, dans le judaïsme, elle est permise et même recommandée. L'étude et la réflexion faisaient donc partie de leur éducation et de leur quotidien. Plus tard, ces mêmes sujets devaient aussi affronter les vicissitudes d’une judéité qui les empêchait, au cours des siècles, de posséder des biens immobiliers, terres ou maisons, les contraignant à exercer des professions ou activités propices à la fuite rapide que pouvaient occasionner les persécutions. Le savoir, la science, les lettres, les arts, l’argent ou les pierres précieuses se prêtaient donc parfaitement aux circonstances que l’histoire leur imposait. Il est fort probable que ce traitement de faveur et les interdictions en tout genre furent celles qui, justement, renforcèrent leur pugnacité, les poussant ainsi à se surpasser et, le moment venu, à être intellectuellement mieux armés. Petit bémol pour cette hypothèse, les lauréats du prix Nobel sont plutôt des athées non pratiquants, donc pas nécessairement portés sur les études relatives à la Torah bien que peut-être élevés dans cette atmosphère.
  • Une deuxième hypothèse proposée par certains chercheurs comme Charles Murray, suggère que serait que les Juifs porteraient le gène de l’excellence. Charles Murray, chercheur à l’American Enterprise Institute et coauteur de The Bell Curve (1994), a défendu cette théorie il y a quelques années dans un article intitulé Le génie juif paru dans la revue Commentary, où il écrit carrément que quelque chose dans les gènes explique le Q.I. élevé des juifs. Cette thèse a cependant été largement contestée pour ses fondements scientifiques discutables et ses implications éthiques sensibles.
  • Une troisième théorie serait que les juifs aiment les études, comme l’Israélien Robert Aumann, lauréat du prix Nobel d’économie, l'expliqua sur Galei Tsahal, la radio de l’armée israélienne: les maisons juives sont remplies de livres. Nous accordons une grande importance aux activités intellectuelles depuis des générations.
  • Il y a tout lieu de douter de ces théories (Haaretz by Noah Efron) pour la simple raison que les performances des Juifs en sciences sont relativement nouvelles. Quand le grand folkloriste juif Joseph Jacobs entreprit en 1886 de comparer les talents des juifs à ceux d’autres Occidentaux, il constata que leurs résultats étaient médiocres dans toutes les disciplines scientifiques à l’exception de la médecine. Par ailleurs, durant les premières décennies du XXe siècle, le psychologue de Princeton, Carl Brigham, testa l’intelligence des Juifs aux Etats-Unis et conclut qu’ils avaient une intelligence moyenne-inférieure à celle relevée dans tous les autres pays en dehors de la Pologne et de l’Italie.
  • L’excellence juive en sciences est un phénomène qu’on a observé seulement durant les décennies qui ont précédé et surtout suivi la Seconde Guerre mondiale. Il est donc bien trop récent pour qu’on puisse l’expliquer par la sélection naturelle ou même par d’anciennes traditions culturelles. Non, la véritable explication de la réussite juive en sciences réside ailleurs. Le début du XXe siècle fut marqué par des migrations massives de Juifs aux Etats-Unis, dans les villes russes (puis soviétiques) et en Palestine. Dans chacune de ces terres d’accueil, un grand nombre de Juifs se tournèrent vers les sciences car elles incarnaient l’espoir de transcender le vieil ordre mondial qui, depuis si longtemps, les avait tenus à l’écart du pouvoir, de la société et des richesses. Les sciences, fondées sur des valeurs d’universalité, d’impartialité et de méritocratie, attiraient les Juifs qui cherchaient à réussir dans leur pays d’adoption. Leur excellence dans ce domaine ne s’explique pas tant parce qu’ils étaient intelligents ou studieux que parce qu’ils désiraient être égaux, acceptés, estimés et qu-ils voulaient vivre dans une société libérale et méritocratique.
  • Les prix Nobel sont, par définition, un indicateur rétrospectif. Décernés des années après les découvertes qu’ils récompensent, souvent à des scientifiques retraités depuis longtemps, ils reflètent un état de choses qui a existé trente, quarante, voire cinquante ans plus tôt. Ils sont comme une photo jaunie du passé et cette réussite ne devrait pas se poursuivre. Les pourcentages de Juifs parmi les titulaires américains d’un doctorat en science ont fortement décliné depuis la dernière génération. Durant la même période, les dépenses investies dans des études supérieures en Israël ont elles aussi continué de baisser. Parmi le nombre croissant d’Israéliens qui se tournent vers la religion, l’attrait des sciences a pratiquement disparu. La passion qu’elles suscitaient chez bon nombre d’entre eux s’est volatilisée.
Les mères toxiques


'Rédigé par Stéphanie Armangau, Analyste Comportementale'
  • Ils ou elles ne sont pas exactement sûrs que leur maman soit vraiment vicieuse... Ils s'interrogent... Car dans ce non-amour, il n'y a pas de violence avérée, pas de bleus, parfois même pas de larmes (ce qui fait bondir certains enfants maltraités qui n'ont pas connu la violence psychologique 'simple'). Car les attaques de la mère (ou du père) pervers envers son enfant ne sont jamais franches !
  • Cet enfant a bien conscience (généralement une fois adulte) que quelque chose ne tourne pas rond dans sa famille. Son instinct lui dit, ses angoisses lui crient, mais il mettra des années, des décennies à ouvrir les yeux. Les pics qui n'ont l'air de rien, les sabotages qui ressemblent à des maladresses, l'absence d'émotions/réactions maternelles à laquelle il s'est habituée...
  • Pourquoi ? Pourquoi ce vide ? Pourquoi ce dysfonctionnement ? Pourquoi cette intuition que ce n'est pas normal sans pouvoir le justifier ? Et bien justement ! Elle est là, la piste de violence morale... Elle est injustifiable, inexplicable car c'est une guerre émotionnelle. Et vous raconteriez votre sordide histoire à n'importe qui, qu'il/elle ne trouverait rien à dire ou rien de très significatif dans votre témoignage... Double peine : vous êtes seul(e) au monde !
  • Les attaques sont juste parfaitement à la limite de l'acceptable pour ne pas vous faire entrer dans des soupçons évidents. Le vice est fin au point que cela ne se joue quasiment que sur des sensations, des regards, des non-comportements entre le bourreau et sa victime. Bref, on pourrait presque appeler ça : une guerre des nerfs. Repensez à Hervé Bazin et sa mère !
  • Heureusement, l'être humain est conçu pour faire perdurer l'espèce et le cerveau, le corps, savent analyser la toxicité et nous renvoyer des signaux d'alerte. Seulement avant d'avoir une intelligence émotionnelle ultra développée, il faut parfois apprendre à les (ré)entendre et les comprendre.
  • Il n'y a pas de gens toxiques, mais des personnes animées par des sentiments négatifs contagieux
  • Chez les américains, on parle de 'Dark Triade' : les personnalités narcissiques, les personnalités machiavéliques (comprenez PN pour nous les européens) et les personnalités psychopathiques. Devinez ce que ces 3 profils ont en commun? Une incapacité à ressentir de l'empathie pour leur prochain. Et cela implique aussi les mamans avec leurs enfants ! Dans certaines familles, les mères sont maltraitantes de part leur absence d'intelligence émotionnelle.
  • L'autre point commun entre ces 3 types de personnalités est l'absence du sentiment d'une réelle inquiétude. Ces personnes, et là ces mères donc, sont dépourvues de réflexe de protection. Vous imaginez l'immense détresse et solitude larvées de leurs enfants qui, sans pouvoir comprendre et mettre des mots sur leurs maux, ont une mère à l'affection dysfonctionnante du point de vue des normes de notre espèce.
  • Les caractéristiques communes à la 'dark triade'
  • Pour aller un peu plus loin, tout en restant très simple, voici (toujours selon les études de Goleman) les caractéristiques communes et spécifiques de la 'dark triade' :Les 2 points communs :
    1. Sont dépourvues d'empathie (cad la capacité à ressentir l'expérience intérieure de leur interlocuteur) - et aussi (c'est lié, mais en plus) de remords ! Attention, il faut bien faire la différence entre l'empathie et les compétences sociales. Ces 3 types de personnes sont capables de lire les émotions et de les mimer. Elle font même preuve d'aisance sociale.
    2. N'ont, comme expliqué ci-dessus, aucune capacité à s'inquiéter ! Elles peuvent feindre l'inquiétude, voire manipuler leurs petits en prenant une position de Victime et jouer sur le levier de la culpabilisation pour les garder à leur botte, mais en 'vrai', dans leurs tripes, ces mamans n'ont pas peur pour leurs enfants.
  • Les 3 types de maman physiquement incapables d'empathie pour leurs enfants
  • La mère narcissique
  • est égo-centrée - tout simplement. Ses intérêts, ses soucis, ses motivations, ses intentions sont systématiquement tournées vers SA personne. Ce n'est pas toujours évident du premier coup. Et Goleman recommande de rechercher “l'intention des intentions”, ce qu'il est facile de faire avec des techniques d'analyse comportementale. Bref, ne vous laissez pas berner par le discours de surface (jamais avec personne d'ailleurs), il faut remonter à la motivation source/profonde par des questions spécifiques. Elle peut, par exemple, jouer la Sauveuse sans y être invitée pour instaurer un sentiment de loyauté indéfectible chez ses enfants.
  • La mère perverse narcissique
  • présente exactement les mêmes symptômes et les mêmes schémas comportementaux que la mère narcissique, avec ce petit quelque chose en plus qui s'appelle le machiavélisme ! Comprenez qu'en plus d'être égo-centrée, sa motivation profonde est basée sur le sentiment d'envie. Elle est envieuse de ses propres enfants ! Et comme tout PN, quelle stratégie lui reste-il pour asseoir sa dominance ébranlée par l’émancipation de ses enfants ? La vengeance. Mais pas la vengeance avec les gros sabots comme on voit dans les films dramatiques. Non, des petites piqûres (quasiment de rappel) ici et là pour bien mettre à terre ses enfants dès qu'ils essaient de fonctionner sans elle et bien rappeler (à leur inconscient) qui est le chef (et le maître à ne jamais dépasser).
  • La mère psychopathe
  • Je ne m'étendrai pas trop sur le sujet car là on entre dans la délinquance, la maltraitance physique sans remord aucun. Donc gardez juste à l'esprit que ces mères là ont un fonctionnement cruel, psychologiquement et physiquement cruels avec leurs enfants. Sachez aussi que les autres mamans 'à problèmes' sont les mamans autistes, asperger et dépressives : du fait de leur 'trouble', elles ne comprennent pas, plutôt ne lisent pas/plus les micro-expressions faciales et donc l'empathie ne peut pas se faire.
Solitude intellectuelle
  • Pour ma part, aucune intention de refaire le monde ou de lui enseigner à vivre. Il m’a déjà clairement signifié qu’il n’était ni docile, ni obéissant. Seulement cette nouvelle impression de vivre autre part et que, de là-bas, certains trous de serrure ne s’offrent qu’à mon regard ébahi, me dévoilant des aspects troublants de l’humanité et de ses mœurs. Des perceptions qui me sont propres et demeurent incomprises pour les autres, à chaque tentative de les expliquer. Et donc, cette solitude intellectuelle, livrée en prime, qui souvent affecte certaines amitiés, là où les liens sincères font défaut. Les gens s’éloignent de ceux qui lisent le monde différemment. Des égarés, des rêveurs ou des libre-penseurs qui osent prononcer des mots interdits et exprimer des idées non reçues. Cette solitude, qui pousse à réfléchir, à se démarquer encore, une fois dissous les derniers doutes. Une conviction d’en avoir appris assez pour se passer de l’avis général, de la bien-pensance, du politiquement correct, lorsqu’il vaut mieux penser seul que mal accompagné. Elle est aussi là, la solitude intellectuelle. Dans la réflexion non guidée, la lecture pure et simple d’évidences naturelles que l'on pousse sous le tapis pour ne froisser ni l’éducation, ni le credo, ni les habitudes. Elle est dans le courage d’affronter ces vérités, sans la crainte de les avoir découvertes, de finir chez le diable, ou, avec moins de brio, seulement dans ses geôles. Nelson Mandela en est un bel exemple avec ses vingt-sept années de prison, enfermé parce qu’il avait raison de se battre, parce qu'on violait la Nature, parce que l'Homme oubliait de respecter l'Homme. C'était sans compter que la Nature ne supporte pas les imperfections et se refait tôt ou tard. Quant aux religions et leurs mésactions, irrespectueuses du naturel humain, ce n’est qu’une question de temps. C’est le credo qui est indispensable à l’Homme, pas ce que certains désirent en faire. La pensée singulière éloigne parce que la planète n’est pas peuplée d’amants du différent. Les gens préfèrent s’imiter, suivre les tendances, les modes, les courants, communiquer sur les réseaux sociaux pour ne jamais se sentir seuls face à leur propre vie et au vide qu’elle dévoile lorsqu’ils se posent et prennent le temps de la regarder fuir.
  • J’étais d’ailleurs surpris, en retournant en Israël au bout de trente années d’absence, de ce rite qu’avaient adopté les soldats récemment démobilisés. Ils partent pour un long périple de trois à six mois en Asie ou en Amérique du Sud ou ailleurs, mais toujours vers ce genre de destinations où règne une certaine pauvreté et peut être à leur sens, une sorte de vérité élémentaire et de retour à la terre. Avec les sous de la prime, encaissés à la quille et ajoutés à ceux de leur labeur juvénile, ils partent, un sac sur le dos, seuls ou à plusieurs et se mettent à errer dans les pays qu’ils traversent, dormant où ils peuvent et reniflant surtout la vie des peuples. Ont-ils espoir de rencontrer un meilleur avenir ou de s’assurer de celui qui les attend? Ils se lient d’amitié avec des locaux ou des compatriotes qui, comme eux, étaient paumés dans quelque recoin éloigné d’une civilisation qui les contraignit à marcher, ramper, courir, combattre et tuer. Certains commencent à se demander, comme les vétérans du Vietnam, si le casse-pipe était indispensable, s'ils sont vraiment des assassins et s'ils ont été suffisamment remerciés. D’autres, très patriotes ou trop fachos ou simplement baroudeurs, ne voient rien de mal à avoir été armés et autorisés à défendre la cause. Il fallait le faire pour que le Juif ne ressemble plus à cet être misérable amassé dans des trains à bétail avant de brûler dans l'enfer des fours. Et c’est vrai, grâce à eux, son profil a beaucoup changé. Maintenant, le Juif est haï avec respect parce qu’il s’en est sorti. Ils fument de l’herbe, ces ex-combattants, achetée bon marché dans les rues populaires et colorées de ces pays décomplexés et refont le monde, une canette de bière à la main en attendant un lendemain incertain et plein d’autres questions. Tout ce qu’ils aiment quoi. Ou tout ce qu’il faut aimer pour ne pas avoir l’air trop ringard en rentrant au bercail ou avant d’en partir.
  • Je n’ai pas fait ce tour du monde, mon époque n'a pas connu cette tendance, mais à entendre ces baroudeurs, on ne pourrait affronter la suite de la vie sans ce voyage purifiant et formateur. Comme si l’armée n’avait pas existé pendant des siècles durant sans cette mode israélienne incontournable. C’est un exemple de comportement grégaire et mimétique propre à l’Homme, qui isole un peu plus ceux qui ne le suivent pas et conforte cette solitude intellectuelle. Plus on la fuit, plus elle persécute, comme un ennemi qu’il vaudrait mieux heurter de plein fouet pour s’en défaire ou au contraire, un adversaire à satisfaire en se fondant dans la masse. Mais on disparaît dans les deux cas. Dans la masse, on passe inaperçu et en marge, on n’est pas bien perçu. Cependant, il reste le bonheur de se sentir intègre, heureux, de savoir voir, entrevoir et disséquer le monde à sa manière, sans influence aucune, pour le meilleur et pour le pire. Une façon de ne pas se mélanger avec ceux qui n’osent pas penser par eux-mêmes, ceux qui gardent toujours une porte ouverte pour manger à tous les râteliers. Un compromis alléchant auquel je ne saurais me soumettre. Le monde tourne pareil pour tous, et faire partie de la bien-pensance ne garantit pas d'être dans le vrai.
Histoire
d'Israël à l'Etat d'Israël
  • Il s'avère que les Juifs connaissent assez mal leur histoire. Ils sont un peu perdus dans les méandres d'une Torah trop serinée et d'un manque réel d'information sur les âges qui voient apparaître leurs ancêtres sur la planète. Un exemple parmi tant d'autres: le peuple d'Israël n'existe plus depuis -586, soit 2610 ans, mais nombre de Juifs pensent encore en faire partie.
  • J'ai donc trouvé utile de créer ce recueil chronologique d'informations archéologiques, scientifiques ou scripturaires pour que le fil de cette saga ait, dans les esprits, un début intelligible ainsi qu'une suite pas trop discontinue. L'article est long, donc s'armer de patience car, bien que largement résumé, il s'agit quand même de plus de 2000 ans d'histoire.
  • Ce texte, particuièrement long, a été composé aussi pour qu'il soit clair qu'aucune sorte de souveraineté israélite ne fut historiquement relevée en Palestine. Pour une synthèse des conflits et tumultes inhérents à cette assertion il est aussi possible de lire un texte qui en débat: [mea culpa]
  • les prémices
  • Il semblerait, que la communauté israélite antique n'ait jamais fui l'Egypte, mais que l'Egypte elle-même, se soit dérobée sous ses pieds en perdant, au profit des Assyriens, les terres qui la portaient et qu'elle cultivait. Et comme les Égyptiens ne pratiquaient pas l'esclavage, les Israélites ne furent asservis ni là-bas, ni ailleurs. C'est la version que propose Israël Finkelstein, un archéologue de l'Université de Tel Aviv et l'historien Neil Asher Silberman dans leur immense rapport archéologique La Bible dévoilée. Comme tout ce qui heurte les sensibilités culturelles, leur thèse, bien que merveilleusement documentée, est controversée et accusée de révisionnisme.
  • La présence humaine dans la région du Levant (ou Canaan) est attestée depuis l'âge de la pierre. Les paléoanthropologues pensent que la région était sur la route des grandes migrations des Homo sapiens, il y a 100 000 ans. L'archéologie a révélé que la ville de Jéricho existe depuis plus de 11 000 ans.
  • empire égyptien
  • ± -1500
  • Les premiers israélites étaient finalement des villageois et indigènes de la région de Canaan, située alors sous l'empire égyptien. Ils se regroupèrent et constituèrent une nouvelle communauté ethnique appelée "Israël" alors que, jusqu’à récemment et pour tout le monde, les Israélites étaient des immigrants. Ce qui est certain, c’est qu’aux alentours de -1200, une transformation sociale eut lieu dans la région montagneuse du centre de Canaan. Cette transformation s’accompagna d’une modification radicale du mode de vie qui porta les archéologues à considérer qu'il s'agissait des premiers Israélites. Cette vague d’occupation fut soudaine et les villages éparpillés qui la constituaient ne possédaient ni temple, ni palais, ni activité scripturaire. Ainsi, leurs credo sont inconnus, bien qu’il soit probable que ce peuple ait gardé certaines idoles cananéennes pour culte. De plus, aucune fortification ne fut découverte. Cela remet en cause le récit biblique selon lequel les Israélites étaient en guerre avec leurs voisins. Les premiers Israélites ne combattaient pas d’autres peuples mais essayaient tant bien que mal de survivre à un environnement souvent imprévisible. Ils vivaient dans les collines, où ils menaient une existence d’éleveurs et de fermiers. C’est pourquoi Finkelstein et Silberman ont écrit que ce processus "est à l’opposé de celui que décrit la Bible: l’émergence d’Israël fut le résultat, non la cause, de l’effondrement de la culture cananéenne". L’Exode raconté par la Torah est par conséquent totalement remis en cause par les découvertes archéologiques de la fin du XXe siècle. De fait, les premiers Israélites apparaissent dans le pays de Canaan (aussi nommé: Levant) et plus exactement sur les hauteurs de Judée et Samarie (en territoire occupé) de l'actuel État d'Israël.
  • Les fouilles de Finkelstein révélèrent encore l'absence totale d'os de porc dans les villages israélites. Cela implique que ce peuple avait décidé de ne plus manger de viande de porc afin, sans doute, d’affirmer son identité. Cette coutume alimentaire a, par conséquent, émergé plus d'un demi-millénaire avant la rédaction de la Torah et remet en cause ses enseignements soi-disant originaux. Ils furent par conséquent plagiés à partir de mœurs déjà largement pratiquées depuis plusieurs générations.
  • ± -1207
  • image indisponible La stèle de Mérenptah, découverte en 1896, mentionne un peuple appelé Israël. Cette stèle est une preuve de la présence de cette communauté vers -1207 dans les hautes collines de Judée. Néanmoins, elle ne renseigne pas exactement sur l’emplacement ni sur la taille de la communauté.
  • ± -920
  • La communauté israélite se développe de façon graduelle et atteint son apogée au VIIIe siècle avant Jésus-Christ, période à laquelle, les Royaumes de Juda et d’Israël étaient déjà fondés:

    Le Royaume d'Israël au Nord est un royaume établi par les Israélites à l'âge du fer. Il subsiste environ 200 ans (-930 à -720). Les historiens le nomment souvent royaume de Samarie ou royaume du Nord pour le différencier du royaume de Juda, au sud.
  • La communauté des Israélites comprenait alors plus de cinq cents sites et comptait environ 60.000 habitants.
  • Le royaume de Juda, au Sud, est aussi établi par les Israélites à l'âge du fer. L'archéologie permet de tracer l'existence de Juda en tant que royaume à partir du VIIIe siècle av. J.-C car Avant cette date, l'histoire de ce royaume est mal connue. Après une période d'essor sous la domination de l'empire néo-assyrien, il est détruit par les Babyloniens sous le règne de Nabuchodonosor II dans un contexte de guerre entre Égyptiens et Babyloniens. image indisponible
  • D'après l'archéologue Israël Finkelstein, les premiers dirigeants israélites n'étaient à la tête que de chefferies sans administration avancée ni architecture monumentale. David était une sorte de chef tribal et Salomon, le roi d'une petite cité en marge du reste de la région. Cependant, pour l'archéologue Amihai Mazar, il est difficile de distinguer les niveaux archéologiques appartenant au Xe siècle av. J.-C. de ceux du IXe siècle av. J.-C., ce qui laisse la possibilité d'attribuer aux premiers rois israélites une certaine importance. Ni l'existence de Salomon ni celle de Saül ne sont attestées par l'archéologie. L'existence de David n'est pas attestée de son vivant, mais il est cité comme fondateur de la "maison de David", sur la stèle de Tel Dan (IXe ou VIIIe siècle av. J.-C.).
  • À la fin du VIIIe siècle av. J.-C., Jérusalem devient un centre urbain majeur. Sa population est estimée entre 6.000 et 20.000 habitants.
  • empire assyrien
  • ± -720
  • Population israélite estimée en Canaan (Levant): 60.000
  • Le Royaume d'Israël est conquis et anéanti par l'Empire assyrien qui contrôle alors le territoire et seul le royaume de Juda subsiste comme enclave israélite et sa population augmente d'environ 10.000 âmes avec les réfugiés du royaume d'Israël.
  • ± -600
  • Début de la composition de la Torah, à partir d'une collection de textes mis en commun par des scribes.
  • empire babylonien
  • ± -586 Destruction du Premier Temple
  • Après avoir abattu l'Empire assyrien entre -612 et -609, le roi de Babylone détruit, en -586, Jérusalem et son premier temple, provoquant la dispersion de sa population et donc l'extinction du "Peuple Juif" en tant que tel au profit de la religion juive, nommée par la suite: le judaïsme. [faux peuple]
    (l’exil de Babel n’est pas confirmé par tous les historiens). image indisponible
  • empire perse
  • ± -559
  • L’empire perse, également appelé empire achéménide, est établi dans la foulée des conquêtes du roi Cyrus le Grand [559–530], qui vainc le roi des Mèdes à Ecbatane en 550, puis s’empare de Babylone en 539 avant notre ère, mettant ainsi fin à la dynastie néo-babylonienne.
  • L’expansion territoriale de l’empire se poursuit avec le fils de Cyrus, Cambyse II, qui étend la domination perse jusqu’à l’Egypte. Et c’est sous son successeur, Darius Ier, que l’empire atteint sa taille maximale, jusqu’à la Lybie et la mer Egée.
  • -534
  • En -534 Cyrus II libère les Judéens. La Judée n’est alors plus qu’une toute petite province. Ses frontières se limitent à la région des hautes terres autour de Jérusalem. Les Israélites restaurent Jérusalem (reconstruite à partir de 445 av. J.-C.) et son temple (reconstruit dès 516 av. J.-C.). Le grand-prêtre de Jérusalem, redevenue une ville-temple, est nommé administrateur de la province perse de Judée, ce qui fait d’elle une théocratie, mais sans le lustre de l’époque royale. À Jérusalem même, on estime la population de cette époque, avant le retour de l'exil, à seulement 1.500 habitants.
  • Toutefois, l'hostilité s’installe entre la population locale de Judée et les Judéens revenus d’exil pour lesquels des changements religieux profonds étaient survenus. On peut ainsi supposer que leur farouche pureté religieuse ne pouvait admettre la foi approximative du groupe des survivants israélites restés au pays et mélangés, en outre, par les mariages mixtes, avec les populations installées par les Assyriens.
  • Des archives administratives constituées d’environ 200 tablettes découvertes lors de fouilles archéologiques dans l’Irak actuel montrent que tous les Judéens exilés ne sont pas retournés au pays, loin de là. Ces documents nous révèlent le dynamisme économique d’une communauté judéenne aux VIe et Ve siècles avant notre ère, à Al-Yahudu "la cité de Juda" en Babylonie.
  • Contrairement aux Assyriens, les Babyloniens ne pratiquaient pas le mélange forcé des populations, ce qui explique la persistance de villages judéens plus ou moins homogènes. Des communautés juives demeureront en Babylonie jusqu’au XXe siècle.
  • L’empire achéménide et la "Pax persica" offrent par ailleurs de nouvelles possibilités aux Judéens. Certains vont s’enrôler dans les armées perses qui défendent les frontières de l’empire. Au milieu du Ve siècle, on trouve ainsi une garnison judéenne à Eléphantine [Yeb en égyptien], à la limite entre l’Egypte et le Soudan. Ces soldats judéens, qui vivent là avec femmes et enfants, sont peut-être les descendants de ceux qui étaient partis de Juda au moment des représailles babyloniennes. Quoi qu’il en soit, le contexte achéménide a, semble-t-il, favorisé le développement de la diaspora, depuis la Babylonie et la Perse jusqu’à l’Egypte.
  • empire grec
  • ± -333 Judaïsme hellénistique
  • C'est en l'an 333 av. J.-C. que Yehuda passe sous la domination des Grecs. Cette année-là, Alexandre affronte victorieusement les Perses et s'empare de la région palestinienne. À sa mort, en 323, ses généraux se partagent son empire. La Judée revient aux Lagides ou Ptolémées, également souverains d'Egypte. Ils se montrent respectueux envers les traditions juives et accordent un statut d'autonomie culturelle et religieuse au pays. Peu à peu, la culture hellénistique submerge tout le Proche-Orient, et séduit bien des Israélites.
  • Au IIIe siècle fleurissent deux nouveaux centres du judaïsme: Babylone et Alexandrie. Dans cette dernière ville, les Israélites s'accommodent fort bien de la culture hellénistique. image indisponible Ils traduisent la Bible en grec, lui incorporent de nouveaux textes, composent des œuvres de sagesse. L'ensemble formera “la Septante” ou "LXX", c'est-à-dire la Bible des Israélites de la diaspora. La Septante sera abandonnée lors de la fixation du canon israélite au Ier siècle ap. J.-C. Mais elle deviendra la version de référence des chrétiens, surtout des catholiques. En effet, les protestants adopteront le canon de la Bible hébraïque pour ce qui concerne l'Ancien Testament.
  • séleucides
  • ± -200 Révolte des Maccabées
  • En Judée, certains s'inquiètent de l'hellénisation intensive des traditions juives. Une littérature anti-hellénistique fait son apparition. En l'an 200, Yehuda passe sous la domination des Séleucides de Syrie. Contrairement aux Lagides, ils veulent imposer la culture grecque par la force. En -167, Antiochus IV de Syrie interdit la pratique du judaïsme et, suprême outrage, installe une statue de Zeus dans le Temple. Les martyrs sont nombreux. Alors éclate la révolte des Maccabées sous la conduite d'une famille juive – celle de Mattathias, un prêtre d'une lignée sacerdotale – avec ses cinq fils, dont Judas, surnommé "Maccabée". C'est le début de la dynastie des Hasmonéens.
  • Dans les livres qui n'ont été conservés que par les israélites, cette dynastie est aussi appelée Maccabées. Mattathias meurt un an après le déclenchement de la révolte. Son fils Judas Maccabée, qui n'est pas l'aîné, lui succède. Après plusieurs batailles, il parvient à s'emparer de Jérusalem et rétablit le culte israélite au Temple (en -164). Le premier à régner avec le titre de Grand-prêtre est son successeur Jonathan (-152 à -142).
  • Le nouveau royaume de Judée maintient son indépendance jusqu'en -63.
  • empire romain
  • ± -63
  • L'implication de Rome dans les affaires de la Judée, avec le général romain Pompée qui y impose le protectorat, commence en -63 lorsque la Syrie devient une province romaine. Les Hasmonéens puis les Hérodiens continuent à régner sur la Judée jusqu'en l'an 6.
  • ± -40
  • À la suite de l'invasion de la Syrie par les Parthes, Hérode est proclamé roi de Judée par le Sénat romain.
  • an 0
  • naissance de Jésus ??
  • ± 4
  • À la mort d’Hérode en 4 av. J.-C., son royaume est divisé en trois tétrarchies entre sa sœur Salomé et ses fils. Des troubles éclatent contre Rome, réprimés par le gouverneur de Syrie. 2000 Israélites sont crucifiés à Jérusalem. Judas, fils du "brigand" Ézéchias qu’Hérode le Grand avait fait exécuter, prend la tête de la révolte armée en Galilée après s’être emparé des armes du palais royal de Sepphoris.
  • ± 6 Les Zélotes
  • Un recensement, ordonné par le gouverneur de Syrie pour la récolte des impots, provoque une révolte durement réprimée. Les rebelles sont crucifiés. Cette révolte est à l'origine du mouvement des zélotes, qui considèrent Dieu comme leur seul chef et maître.
  • ± 41
  • Hérode Agrippa Ier devient roi de Judée qui, elle, redevient un royaume jusqu'à sa mort en 44.
  • ± 46
  • En 46, Tiberius Julius Alexander, un Israélite apostat d’Alexandrie, devient procurateur jusqu'en 48. Il fait face à une famine et fait exécuter les chefs du parti zélote (Extrémistes religieux, somme toute ancêtres des Haredim).
  • De 46 à 70 la Judée est le théâtre de nombreuses émeutes et conflits, au cours desquels les zélotes font aussi appel aux sicaires, espèce de tueurs à gage dont le nom est emprunté au Latin "sicarius" dérivé de "sica" (poignard) pour se débarrasser des Juifs dérangeants.
  • ± 70 Destruction du Second Temple
  • Le siège de Jérusalem en 70 est l'événement décisif de la première guerre judéo-romaine, la chute de Massada en 73 ou 74 y mettant un terme. Le Temple, puis toute la ville de Jérusalem sont pris et détruits par les Romains suite aux émeutes et conflits dérivant des divergences idéologiques et culturelles entre Israélites, Grecs, zélotes, Samaritains, Romains et autres sicaires.
  • Après la prise de Jérusalem, Rome fait de la Judée une province impériale proprétorienne. À la suite de la destruction du Temple, il institue le Fiscus judaicus: Les Israélites sont assujettis à un impôt spécial dans tout l'Empire romain et la Judée devient une propriété de Rome. En 72, toutes les terres des Israélites sont affermées et affectées comme domaine particulier de l'empereur. Les paysans qui ne sont pas expulsés peuvent les exploiter sans jouir de leur propriété.
  • Au cours des campagnes menées par Rome contre l’empire Parthe, la diaspora juive se soulève à Cyrène (actuelle Lybie), en Égypte, à Chypre et en Mésopotamie (actuelles Irak et Syrie). C'est la guerre de Kitos (115-117), réprimée dans le sang par Rome, notamment en Judée.
  • 132 La révolte de Bar Kokhba
  • L’intention probable de l'empereur romain Hadrien de faire de Jérusalem une cité dédiée au dieu Jupiter provoque une révolte en Judée dirigée par Simon dit Bar Kochba ("le fils de l'étoile"), salué comme le Messie (132-135). Celui-ci est tué en décembre 135. Les Israélites sont de nouveau dispersés dans tout l'empire romain. Jérusalem, remise à sac, est remplacée par une colonie romaine de vétérans. Un autel à Jupiter est érigé à l’emplacement du Temple.
  • Pendant la répression de la révolte juive, les Romains prennent nombre de forteresses, détruisent des centaines de villages, tuent des milliers d'Israélites en plus des victimes des famines et des épidémies. Les légions souffrent de pertes très lourdes et les deux-tiers de la population juive de Judée sont annihilés. Les Israélites sont désormais interdits de séjour, sous peine de mort, dans toute la région de Jérusalem. Ils émigrent en masse dans les villes de la côte et en Galilée, qui devient le centre des études juives.
  • 135 La Palestine
  • La Palestine (en latin : Syria Palæstina) est le nom donné à la province romaine de Judée après l'échec de la Révolte de Bar Kokhba. Le territoire n'est alors pas clairement défini. Le mot Palestine parvint aux Romains au travers du latin Palaestina, du grec παλαιστινη (palastinī) et de l'hébreu pĕlesheth, qui désignait le pays des Philistins dont le territoire (plus ou moins l'actuelle bande de Gaza) s’étendait au sud-ouest de Canaan . La Palestine conserve sa capitale Césarée et reste donc absolument distincte de la province de Syrie située plus au Nord (capitale Antioche). Il s'agissait pour Rome d'une mesure punitive envers les Judéens. Le changement de nom de cette province s'accompagne d'une répression sévère (entre autre l'interdiction de la circoncision). Les mesures de Rome étaient destinées à nier le caractère israélite de la région. Jérusalem devient une ville romaine baptisée Ælia Capitolina.
  • 193
  • L'urbanisation reprend pendant le règne des Sévères (193-235), et de nombreux empereurs renouent de bonnes relations avec les Israélites, notamment des scholarques représentant l'élite intellectuelle. L'empereur Septime Sévère (193-211 - Dynastie romaine des Sévères) autorise les Israélites à devenir décurions et à participer aux affaires municipales et l'empereur Caracalla (211-217 - Dynastie romaine des Sévères), qui accorde, en 212, la citoyenneté à tous les résidents de l'Empire romain, Isarélites y compris, entretient une relation privée avec Juda Hanassi, entre autre auteur de la Mishna, compilée vers le début du IIIe siècle. La Palestine devient plus paisible, Israélites et païens renouant des liens solides, et la région prospère. Dans son Histoire romaine rédigée en grec, l'historien et consul Dion Cassius, proche des Sévères, précise: "il y a des Israélites même parmi les Romains, souvent arrêtés dans leur développement, ils se sont néanmoins accrus au point d'obtenir la liberté de vivre selon leurs lois".
  • Dans la deuxième moitié du IIIe siècle, la Palestine semble souffrir des crises politiques et économiques qui frappent l'empire Romain. En effet, des références talmudiques attestent de la peur des villageois de rester dans leurs champs, de la construction de fortifications et de populations qui se réfugient dans les places fortifiées. L’instabilité dans l’empire - guerres civiles, raids des Germains (germanophones de l'Europe du nord), guerre contre l'empire néo-Perse - entraîne une augmentation extrêmement lourde des impôts. Les sécheresses et les famines se multiplient. De nombreux Israélites quittent la Palestine pour rejoindre les communautés éloignées.
  • 285 Dioclétien
  • Après la crise du IIIe siècle à laquelle il met fin, l'empire entre dans une période de transition radicale avec sa division en diocèses par Dioclétien. Il instaure aussi une tétrarchie de laquelle il administre lui-même les régions situées en Orient.
  • En 295, la Légion d'Ælia (ex-Jérusalem) est transférée à Aila (Aqaba, actuelle Jordanie) à la suite de l'agitation des tribus arabes. Le Néguev, jusqu'alors rattaché à l'Arabie, dépend désormais de la Palestine.
  • En 305, Dioclétien abdique.
  • empire byzantin
  • 330 Constantin Ier
  • Au terme de nombreuses luttes de pouvoir entre les prétendants, dont Constantin sort vainqueur fin 323, l'unité administrative de l'empire est temporairement rétablie.
  • Constantin peut être considéré comme le fondateur de l'Empire romain chrétien d'Orient, étant celui qui, à la fois, fit du christianisme la religion d'État impériale, et de la cité grecque Byzance une "nouvelle Rome" (Nova Roma), dès lors appelée Constantinople (Constantinou polis, "ville de Constantin", aujourd'hui Istanbul). Constantin Ier contribua aussi à la fondation de la doctrine chrétienne en convoquant le premier concile œcuménique à Ælia Capitolina (ex Jérusalem) en 325.
  • Après le déclin du judaïsme hellénistique de langue grecque, l'utilisation de ce langage et l'intégration de la culture grecque dans le judaïsme continuent à faire partie intégrante de la vie des communautés juives de l'Empire byzantin et le statut juridique des Israélites resta inchangé tout au long de son histoire: leur position juridique propre et particulière différait à la fois de la communauté chrétienne orthodoxe qui était la religion d'État, des hérétiques, et des païens. La place qu'occupent les Israélites byzantins sur l'échelle de la liberté sociale varie quelque peu avec le temps, selon trois facteurs:
    • le désir théologique des empereurs de maintenir les Israélites comme témoignage vivant des racines du christianisme et comme contrepoids économique (face à la puissance des patriarches de Constantinople),
    • leur désir politique de renforcer le contrôle impérial sur la société byzantine,
    • et la capacité de l'administration centralisée de Constantinople à appliquer sa législation.
  • Comme dit précédemment, la citoyenneté accordée aux Israélites en 212 par l'empereur Caracalla, leur confère l'égalité juridique avec tous les autres citoyens et constitue le fondement de leur statut juridique dans l'Empire d'Orient après la fondation de Constantinople en 330. En effet jusque là, les Juifs avaient le droit de pratiquer leur foi sous la domination impériale, tant qu'ils payaient le fiscus judaicus. Par exemple, la circoncision, considérée comme une mutilation et passible de la peine de mort si elle est pratiquée sur un enfant non juif et la célébration de l'exil à Babylone, sont légalement autorisés dans les pratiques religieuses juives. La loi byzantine reconnaît les synagogues comme des lieux de culte: elles ne peuvent être arbitrairement molestées, et les tribunaux israélites ont force de loi dans les affaires civiles des israélites. Les Israélites ne peuvent être contraints de violer, ni le Shabbat, ni leurs autres fêtes.
  • 390
  • Depuis l'an 390, la Palestine, (plus ou moins le territoire de l'actuel État d'Israël) se trouve sous la suzeraineté byzantine. La région est alors divisée en trois provinces:
  • 404 Code théodosien
  • Le code théodosien représente un début de limitation des droits des Israélites. En 404, les Israélites sont exclus de certains postes gouvernementaux. En 418, ils sont écartés de la fonction publique, et de toutes fonctions militaires. En 425, ils sont chassés de toutes les fonctions publiques restantes, tant civiles que militaires. Bien qu'elles donnent du pouvoir aux citoyens chrétiens de l'empire aux dépens des Israélites, toutes les lois les concernant reconnaissent implicitement l'existence continue et la légalité de la religion juive.
  • Ainsi, l'empereur Théodose II constate qu'il doit équilibrer les deux premiers des trois facteurs régissant le traitement des Juifs dans l'empire: la théologie, le pragmatisme politique et le caractère exécutoire.
    • En 438, Théodose réaffirme l'interdiction faite aux Juifs d'occuper des fonctions publiques car cette proscription avait été mal appliquée.
    • Outre la question de l'accès aux fonctions publiques, les Israélites sont également inégaux aux chrétiens en ce qui concerne la propriété des esclaves. Des restrictions sur la propriété d'esclaves chrétiens par des Israélites sont mises en place, de peur que ces derniers n'utilisent la conversion des esclaves comme moyen d'augmenter leur nombre. En vertu du code théodosien, la propriété d'esclaves chrétiens par des Israélites n'est donc pas interdite, mais leur achat l'est. Ainsi, celui qui obtient la possession d'un esclave par des moyens comme l'héritage reste son propriétaire.
    • La troisième restriction importante imposée au Israélites - en plus des limitations imposées à la fonction publique et de la possession d'esclaves - est que la religion juive, bien qu'autorisée à survivre, n'est pas autorisée à prospérer. Du point de vue théologique, la victoire du christianisme peut être affirmée avec succès en maintenant un petit contingent de d'Israélites dans l'empire, mais leur permettre de devenir une minorité trop importante menace le monopole théologique du christianisme orthodoxe dans l'empire.
    • Une ramification importante de cette politique est l'interdiction de construire de nouvelles synagogues dans l'Empire, bien que la réparation des anciennes soit autorisée. Cette interdiction est difficile à faire respecter, car des preuves archéologiques en Israël indiquent que la construction illégale de synagogues s'est poursuivie tout au long du VIe siècle. La synagogue continue à être respectée comme lieu de culte inviolable jusqu'au règne de Justinien.
  • 527 Code civil
  • Le Code civil de Justinien resserre les réglementations sur la propriété d'esclaves chrétiens par des non-chrétiens. Il abolit l'indemnisation des achats illégaux d'esclaves chrétiens et ajoute une amende de 30 livres d'or pour cette infraction. Les Israélites possédant des esclaves chrétiens à l'époque de Justinien peuvent être punis d'exécution.
  • 545
  • En 545, Justinien légifère pour que le droit d'existence de toute synagogue sur un terrain appartenant à une institution ecclésiastique soit annulé. Il est également le premier empereur à ordonner que les synagogues existantes soient converties en églises.
  • 553
  • En 553, Justinien exige que la lecture publique du Pentateuque se déroule en langue locale, plutôt qu'en hébreu, et interdit purement et simplement la lecture de la Mishna. De cette manière, Justinien restreint non seulement la liberté religieuse des Israélites, mais il étend également son propre pouvoir afin de renforcer le principe selon lequel, "en théorie, aucun domaine n'échappe au pouvoir législatif de l'Empire." Les restrictions de Justinien sont toutefois à peine appliquées et contribuent, au contraire, à une croissance notable de la culture et de la liturgie israélites. Par exemple, l'interdiction de la lecture de la Mishna incite les érudits israélites à écrire les piyutim, d'importants ouvrages de poésie qui se réfèrent fortement à la Mishna. Comme ceux-ci ne sont pas interdits par le Code civil, ils donnent aux Israélites la possibilité de le contourner.
  • 565
  • Bien que le Code Justinien reste en vigueur dans l'Empire d'Orient (Empire byzantin) jusqu'au IXe siècle, la période qui suit le règne de Justinien est généralement caractérisée par la tolérance des non-chrétiens, en particulier les Israélites.
  • 602 Guerre perso-byzantine
  • Cependant, pendant la Guerre perso-byzantine de 602-628, de nombreux Israélites prennent le parti de l'empire perse et aident, avec succès, les envahisseurs perses sassanides à conquérir toute l'Égypte romaine et la Syrie. En réaction, des mesures anti-israélites sont décrétées dans tout le royaume byzantin et jusqu'en France mérovingienne.
  • les califats
  • 630 conquêtes musulmanes
  • Au cours du conflit perso-byzantin les deux empires épuisèrent leurs ressources tant humaines que matérielles. Ils se trouvaient ainsi en position de faiblesse face au califat musulman naissant dont les armées envahirent les deux empires quelques années à peine après la fin de la guerre. image indisponible
  • Les Arabes conquirent rapidement l’ensemble de l’empire sassanide (perse) et firent perdre à l’Empire romain d’Orient (ou empire byzantin), en 636 la Palestine et la Syrie, en 640/642 l'Égypte et en 698 l'Afrique du Nord. Au cours des siècles qui suivirent, la totalité de l’empire sassanide (perse) et la plus grande partie de l’empire byzantin tombèrent sous leur domination.
  • Jérusalem est donc conquise par les musulmans. Bien qu’elle demeure une petite cité de province dans l’immense empire d’Orient, la Ville sainte va connaître, sous l’impulsion des califes, un rayonnement intellectuel et religieux sans précédent. Elle devient la troisième "Ville Sainte" de l'Islam. Les Arabes abbassides s'y installent. Ils laissent les chrétiens faire leur pèlerinage.
  • 638
  • En 638, le calife Omar, deuxième successeur de Mahomet, vient en personne, si l’on en croit la tradition musulmane, recevoir leur reddition. "Une pieuse légende", selon l’historien Vincent Lemire qui a dirigé l’édition du livre collectif Jérusalem, histoire d’une ville-monde (éd. Flammarion, 2006), mais une légende indispensable à "la sacralisation de Jérusalem comme troisième ville sainte de l’islam", après La Mecque et Médine.Omar se fait conduire sur l’esplanade du Temple, là où se trouve la "Pierre de la fondation" du monde, le rocher sur lequel, selon la Bible, Abraham (Ibrahim en arabe) était prêt à sacrifier son fils Isaac (Ismaël), le lieu mythique où le roi Salomon avait bâti le fameux Temple abritant l’Arche d’alliance, reconstruit par Hérode avant d’être rasé par les Romains en 70 après J.-C. Abraham, dans le Coran, sert de trait d’union entre la tradition biblique et la nouvelle religion révélée à Mahomet par l’archange Gabriel.
  • 644
  • Omar ne profite pas longtemps de son succès militaire. En 644 – l’an 22 du calendrier musulman – il est assassiné à Médine. L’accession au califat d’Ali, l’époux de Fatima, une autre fille du Prophète, provoque un schisme entre ses partisans, les chiites, et les musulmans orthodoxes, les sunnites. La première fitna (guerre civile), appelée la "Grande discorde", va durer cinq ans.
  • Surnommé "le César arabe", le premier calife de la dynastie omeyyade installe sa capitale à Damas dont il rêve de faire une nouvelle Rome. Ce souverain cultivé et raffiné préfère pourtant séjourner avec sa cour à Jérusalem. Depuis qu’Hélène, la mère de Constantin, le premier empereur romain d’Orient converti au christianisme, a fait construire dans les années 320 l’église du Saint-Sépulcre (la basilique de l’Anastasis pour les orthodoxes) sur l’emplacement du tombeau de Jésus, les chrétiens dominent la ville, devenue un grand centre de pèlerinage. Ils bénéficient de la tolérance du nouveau calife qui laisse les monothéistes (juifs, zoroastriens, chrétiens), considérés comme faisant partie des peuples du Livre (les dhimmi), pratiquer librement leur culte.
  • 685 Le Dôme du Rocher
  • Après deux brefs inter-règnes, Abd al-Malik, un proche parent de Mouawiya, est proclamé calife à Jérusalem en 685. image indisponible Il va couronner la Ville sainte de ce joyau qu’est le Dôme du Rocher, le plus ancien et le plus spectaculaire monument architectural de l’islam. Pourquoi a-t-il choisi de bâtir ce bâtiment insolite, d’inspiration byzantine? "Ni mosquée, ni mausolée, sa signification échappait le plus souvent aux pèlerins. Elle nous échappe encore aujourd’hui en partie", note Vincent Lemire. En fait, le Dôme du Rocher semble répondre à un double objectif, religieux et politique. De par sa taille imposante et la richesse de sa décoration, il affirme la puissance de la nouvelle religion face au Saint-Sépulcre de la Ville sainte et à l’empire byzantin. Et il déplace le centre de gravité du pouvoir musulman de La Mecque à Jérusalem.
  • 692
  • Achevé en 692, l’édifice, avec son assise octogonale et son déambulatoire intérieur de douze colonnes entourant le sommet du célèbre rocher d’Abraham, est coiffé d’un dôme de 21 mètres de diamètre dont le revêtement d’or illumine les murailles ocre et les ruelles poussiéreuses de la ville. "Son dôme rappelle ceux du Saint-Sépulcre et de Sainte-Sophie à Constantinople" tandis que "son déambulatoire fait penser à la Kaaba de La Mecque", note l'historien Simon Sebag Montefiore. Abraham, Jésus et Mahomet: c’est la synthèse des trois monothéismes dont l’islam se veut l’aboutissement. L’intérieur de l’édifice est recouvert de riches mosaïques mélangeant les styles perse, byzantin et arabe.
  • La dynastie des omeyyades
  • Sous leur dynastie les califes omeyyades mettent en place une administration centrale dont la langue est l’arabe, la monnaie unique le dinar, et dont les différents bureaux (les diwans) sont chargés de contrôler les affaires religieuses, la politique, l’armée et les finances. Le califat se veut toujours tolérant avec les "Gens du Livre". Mais si Chrétiens, Juifs et Zoroastriens peuvent devenir fonctionnaires de l’empire tout en continuant de pratiquer librement leur culte, ils n’en sont pas moins des sujets de deuxième classe, astreints à un impôt particulier.
  • 750 Le Massacreur
  • En 750, le fondateur de la dynastie des Abbassides (750-969), surnommé le "Massacreur", extermine les Omeyyades dont le seul survivant se réfugiera en Espagne où il créera l’émirat de Cordoue. Ses descendants installent leur capitale à Bagdad, non loin de l’antique Babylone, négligeant ainsi Jérusalem qui n’est plus qu’une petite ville de province réputée pour sa douceur de vivre.
  • 800 Charlemagne
  • Dès la fin du VIIIe siècle, l’Occident chrétien s’inquiète de l’occupation de la Ville sainte par les "Sarrazins", comme on les appelle. En l’an 800, Charlemagne, qui vient d’être sacré empereur, sollicite du calife Haroun al-Rachid, le héros des Mille et Une Nuits, l’autorisation de construire près du Saint-Sépulcre une auberge destinée à accueillir et protéger les pèlerins venus d’Europe. Le maître de Bagdad, qui y voit l’occasion d’affaiblir l’influence de son rival byzantin, ne s’y oppose pas. Cela ne suffira pas à consolider la dynastie abbasside qui voit se succéder à sa tête, entre autres, un prince turc et un eunuque éthiopien. "L’instabilité politique favorisait la concurrence entre les religions", remarque Simon Sebag Montefiore. Des heurts fréquents opposent les chrétiens aux Musulmans et aux Juifs. En 966, ces derniers s’allient aux Arabes pour attaquer le Saint-Sépulcre et brûler le patriarche Jean sur un bûcher.
  • 969 le Caligula arabe
  • Trois ans plus tard, en 969, les Fatimides, des chiites ismaéliens venus d’Afrique du Nord, envahissent l’Egypte puis s’emparent de Jérusalem. Ils installent leur capitale au Caire. La Ville sainte connaît une brève période de tolérance. Mais en l’an 1000, le nouveau calife, al-Hakim, le "Caligula arabe", persécute avec une rare cruauté les chrétiens et les juifs. Il fait raser le Saint-Sépulcre et démolir les synagogues. Douze ans après son assassinat, en 1021, un tremblement de terre achève de dévaster la ville, détruisant la Grande Mosquée. Les deux édifices seront reconstruits, mais l’Empire fatimide continue de se déliter.
  • Turcs seldjoukides
  • 1070
  • Au Caire, les Turcs seldjoukides délogent les arabes et prennent le pouvoir. Ils défont l’empereur byzantin à la bataille de Mantzikert et ravagent Jérusalem. Puis leurs généraux dépècent l’empire pour s’y tailler des fiefs personnels, précipitant sa désintégration. L’époque glorieuse des premiers califats est révolue. "Les monstruosités d’Hakim, la défaite de l’empereur byzantin, la prise de Jérusalem par les Turcomans [Turkmènes] et le massacre des pèlerins ébranlèrent la chrétienté", résume Simon Sebag Montefiore. Le 27 novembre 1095, à Clermont (Auvergne), le pape français Urbain II appelle tous les chrétiens à délivrer la Terre sainte et le tombeau du Christ. La ville est devenue un enjeu stratégique entre l’Orient et l’Occident.
  • Royaume franc
  • 1095
  • Les croisades débuteront en 1095. Au moment de prendre la Ville sainte, le chevalier Godefroy de Bouillon joue un rôle décisif. A la mi-juillet, les dizaines de milliers de croisés se lancent à l'assaut des remparts. Godefroy repère une faille sur la partie nord de l'enceinte. La défense des Seldjoukides cède aussitôt et les assaillants pénètrent dans la ville. La conquête se finit en bain de sang: au cours des jours suivants, Juifs et Musulmans de la cité sont massacrés par milliers tandis que les Chrétiens d'Orient, qui avaient été expulsés par les Musulmans, reviennent après la victoire des croisés. En juin 1099, les Francs, comme on appelle indistinctement les chevaliers venus d’Europe, font le siège de Jérusalem. Après le rayonnement du califat, une nouvelle ère va s’ouvrir, celle des croisades. Plusieurs royaumes chrétiens latins seront fondés dans la région, dont le Royaume de Jérusalem, ayant pour épicentre Jérusalem et la Judée.
  • Ayyoubides
  • 1170
  • C'est le tour des Ayyoubides de prendre le pouvoir des mains des Francs (appellation des Européens pendant les croisades), à commencer par l'Égypte en 1170, puis la Syrie avant de conquérir la plus grande partie des États latins d'Orient. Au cours de ce règne, les croisades se succèdent. Frédéric II vient en Orient à la tête de la sixième croisade et obtient la rétrocession de Jérusalem. Une période d’anarchie au sein de l’Empire ayyoubide dont la croisade de 1239 ne parviendra pas à tirer profit. Sachant qu'il tient son pouvoir des Mamelouks, Ayyub les favorise et, avec l'aide d'autres alliances, il reprend Jérusalem aux Francs et la pille.
  • Mamelouks
  • 1250
  • Les Mamelouks égyptiens prennent le pouvoir en Egypte et contrôlent la Palestine. Durant cette période, la Palestine accueille des réfugiés arabes chassés par l’avancée des Mongols sur l’Irak et la Syrie, et vers la fin du xve siècle, elle accueille les réfugiés juifs chassés d’Espagne par l'inquisition. Bien que nombre d’entre eux s’installent en Afrique du nord et en Galilée, ces juifs de Palestine seront à l’origine du rayonnement intellectuel et religieux de la ville de Safed.
  • L'empire ottoman
  • ± 1300
  • Naissance de l'empire ottomanl’Empire ottoman (1300-1922)
  • 1324
  • Le premier réel contact historique relaté entre une communauté juive et l’Empire ottoman (1300-1922) naissant consiste en la prise de contrôle, par les Ottomans, d’une synagogue à Bursa en 1324. La ville est en effet prise aux Byzantins cette année par le sultan Orhan (1281-1362), qui y installe alors la capitale du nouvel empire. Cette synagogue, surnommée "l’Arbre de Vie", sert aujourd’hui encore de lieu de culte à la petite communauté juive subsistant dans la ville – une grosse centaine de personnes tout au plus.
  • 1492
  • Population israélite estimée Palestine: 5.000 soit 3.21%
  • Le sultan Bayezid II (1447-1512), réagissant au décret d’Alhambra (31 mars 1492) expulsant les juifs d’Espagne, décidera-t-il le 31 juillet de la même année, d’envoyer la flotte de guerre ottomane afin de sauver et de ramener les juifs expulsés, les invitants à s’installer dans l’Empire. Parmi eux se trouve le rabbin Yitzhak Sarfati, juif allemand aux origines françaises - "Sarfati" signifiant "français" en hébreu - qui deviendra Grand Rabbin d’Edirne au cours de la seconde moitié du XVème siècle. Dans une lettre devenue depuis célèbre, il invite la communauté juive européenne à s’installer en territoire ottoman, affirmant que "La Turquie est une terre où rien ne manque et où, si vous le souhaitiez, tout serait bon pour vous", demandant: "Ne serait-il pas mieux pour vous de vivre sous les musulmans que sous les chrétiens?"
  • 1516
  • Population israélite estimée en Palestine: 7.000 soit 3.43%
  • En 1516, le sultan turc Sélim Ier d'Istanbul dit Soliman Ier le Magnifique conquiert la Palestine qui va devenir durant 4 siècles, jusqu'en 1917, une des provinces arabes de l’Empire ottoman, mais il laisse aux milices mamelouks le pouvoir au niveau local. Les Mamelouks conservent un rôle important dans la province, jusqu'au massacre de leurs chefs par Méhémet Ali en 1811. Intégrée dans l’empire Ottoman, la Palestine du XVIe siècle connaît, contrairement à l’Égypte,un bon développement économique. Les cités et lieux de cultes sont rénovés, y compris la façade extérieure du Dôme du Rocher, toutes les communautés voient leurs populations croître.
  • Quoi qu'il en soit, Le statut des minorités non-musulmanes de l’Empire Ottoman s’inscrit tout à fait dans la tradition établie dans les premiers siècles de l'Islam. Les "gens du Livre", Juifs et Chrétiens, sont toujours soumis au statut de Dhimmi. Les sultans assurent officiellement la protection de leurs sujets non-musulmans, mais ces derniers restent l’objet de discriminations qui sont maintenues ou remises en vigueur.

    Un "firman" (acte du sultan) ottoman de 1602 montre très bien les obligations de l'Etat ottoman envers les dhimmi:

    "Attendu qu'en accord avec ce que le Dieu Tout-Puissant, Maître de l'Univers, a ordonné dans son Livre révélé concernant les communautés juives et chrétiennes qui sont des peuples de la dhimma, leur protection, leur sécurité ainsi que le respect de leur vie et de leurs biens sont un devoir collectif et permanent pour l'ensemble des musulmans et une obligation impérative qui incombe à tous les glorieux souverains et chefs de l'Islam".

    "Il est donc nécessaire et important que ma haute sollicitude inspirée par la foi veille à ce que, en conformité avec la noble shari'a, tous les membres de ces communautés qui s'acquittent envers moi de l'impôt, en ces jours de mon règne impérial et de mon bienheureux califat, vivent dans la tranquillité d'esprit et vaquent paisiblement à leurs affaires, que personne ne les en empêche ou porte atteinte à leur vie ou à leurs biens, en contravention avec la loi sacrée du Prophète".
    Source: Juifs en terre d'islam, B. Lewis. Champs/Flammarion, p. 61.
  • 1695
  • Population israélite estimée en Palestine: 2.000 soit 0.87%
  • En 1695, le très érudit géographe et philologue hollandais Hadrian Reland effectue une visite d'étude en Palestine. Il en rapporte le constat dans son ouvrage illustré "Palestina ex monumentis veteribus illustrata" publié en 1714 qu'Avi Goldreich résume ainsi: "un pays quasiment dépeuplé où la population, en majorité juive avec une minorité chrétienne, habite les villes de Jérusalem, Akko (Acre), Safed, Jaffa, Tibériade et Gaza, les Musulmans constituant une infime minorité, pour la plupart des bédouins nomades".
  • Cet ouvrage confirme la période de la Palestine ottomane du XVe/XVIe siècle comme propice aux Juifs et à leur culture, mais déjà à cette époque, comme pour celle causées par les pogromes successifs du XVIIe, les vagues d'immigration qui permirent cet épanouissement étaient dues à leur persécution dans leurs pays respectifs. Ils ne venaient en Palestine que comme ultime recours à leurs malheurs et non par engouement pour une terre qui, 2000 ans plus tôt, vit naître leur communauté. Par chance, il trouvèrent chez les Turcs et Mamelouks musulmans qui régnaient sur la région, un accueil "providentiellement" chaleureux et pérenne.
  • 1700
  • Le début du XVIIIe est quelque peu tumultueux avec plusieurs tentatives de déstabilisation de la part de factions dissidentes du pouvoir et de 1740 à 1775 le nord de la Palestine est dominé par Dahir al-Umar, un chef arabe de la Syrie ottomane qui profite de l'affaiblissement de l'empire ottoman. Il développe l'économie de la région mais sera exécuté en 1775. Certains de ses partisans se rallieront aux Français de Bonaparte pendant sa campagne d'Egypte.


  • Bibliographie pour ce paragraphe:
    • Josephus, Flavius. The Complete Works of Flavius Josephus. T. Nelson and sons, 1860.
    • Brewer, Catherine. "The Status of the Jews in Roman Legislation : The Reign of Justinian 527–565 CE." European Judaism 38, no. 2 (2005) : 127-139.
    • Doumanis, Nicholas. Before the nation : Muslim-Christian coexistence and its destruction in late-Ottoman Anatolia. OUP Oxford, 2012.
    • Edmondson, Jonathan, Steve Mason, and James Rives, eds. Flavius Josephus and Flavian Rome. Oxford : Oxford University Press, 2005.
    • Feldman, Louis H. Jew and Gentile in the ancient world : attitudes and interactions from Alexander to Justinian. Princeton University Press, 1996.
    • İnalcık, Halil. "Foundations of Ottoman-Jewish Cooperation." Jews, Turks, Ottomans—A Shared History, Fifteenth through the Twentieth Century (2002) : 3-14.
    • Inalcik, Halil. "The policy of Mehmed II toward the Greek population of Istanbul and the Byzantine buildings of the city." Dumbarton Oaks Papers 23 (1969) : 229-249.
    • Josèphe, Flavius, Judaïques, Antiquités. "Histoire de la guerre des Juifs contre les Romains. 1." Il, c 26.
    • Josèphe, Flavius. La guerre des Juifs. les écrivains de Fondcombe, 1975.
    • Kohen, Elli. History of the Byzantine Jews : a microcosmos in the thousand year empire. University Press of america, 2007.
    • Labbé, Gilbert. L’affirmation de la puissance romaine en Judée. Paris, 2012.
    • Lagrange, Marie-Joseph. "Saint Paul, Epitre aux Galates." (1950).
    • Murphy, Stephen. "Aubigné, Josephus, and Useful Betrayal." In Itineraries in French Renaissance Literature, pp. 266-279. Brill, 2017.
    • Piovanelli, Pierluigi. "Le texte de Jérémie utilisé par Flavius Josephe dans le Xe livre des Antiquités Judaïques." Henoch 14 (1992) : 11-36.
    • Rozen, Minna. A History of the Jewish Community in Istanbul : The Formative Years, 1453-1566. Vol. 26. Brill, 2010.
    • Şenay, Bülent. "Communal Autonomy Of The Jewish" Millet" In The Ottoman-Turkish Tradition." Studia Hebraica 6 (2006) : 75-86.
    • Shmuelevitz, Aryeh. The Jews of the Ottoman Empire in the Late Fifteenth and the Sixteenth Centuries : Administrative, Economic, Legal, and Social Relations as Reflected in the Responsa. Brill Archive, 1984.
    • Toktas, Sule. "Citizenship and minorities : A historical overview of Turkey’s Jewish minority." Journal of Historical Sociology 18, no. 4 (2005) : 394-429.
    • Tsiamis, Costas, Effie Poulakou-Rebelakou, Athanassios Tsakris, and Eleni Petridou. "Epidemic waves of the Black Death in the Byzantine Empire (1347–1453 AD)." Infez Med 19, no. 3 (2011) : 194-201.
    image indisponible
  • 1800
  • Population israélite estimée en Palestine: 7.000 soit 2.55%
  • Le général Napoléon Bonaparte mène campagne en Palestine et assiège Saint-Jean-d'Acre.
  • 1831
  • Première Guerre égypto-ottomane puis révolte de la Palestine contre l'administration égyptienne. 10 ans plus tard, retour des Ottomans et Deuxième Guerre égypto-ottomane .
  • 1866
  • Le Suisse Henri Dunant (1828-1910), fondateur de la Convention de Genève et de la Croix Rouge, constitue "La société nationale universelle pour le renouvellement de l'Orient", et lance un appel suggérant que les colonies juives naissantes en Palestine soient déclarées diplomatiquement neutres, tout comme la Suisse.
  • 1881
  • Population israélite estimée en Palestine: 43.000 soit 8.08%
  • L'assassinat du tsar Alexandre II marque le début de la première vague d’immigration juive (Première Aliyah). Des Juifs venus de Russie, de Roumanie, et du Yémen viennent s’installer en Palestine. Le baron Edmond de Rothschild se met à acheter de la terre en Palestine et finance le premier établissement "sioniste" à Rishon LeZion (trad: Le Premier à Sion). Éliézer Ben-Yehoudah, le père de l'hébreu moderne, arrive à Jaffa en septembre 1881.
  • Les émigrants juifs du mouvement les "Amants de Sion" marquent le début de l'Alyah sioniste. Il s'agit d'une une nouvelle immigration: celle de Juifs à la fois laïcs et nationalistes (le terme "sioniste" apparaîtra vers 1880), dont le but est de créer à terme un État pour le peuple juif, sur les terres ancestrales du peuple juif, c'est-à-dire les anciens royaumes de Juda et d'Israël. Différente des émigrations précédentes à caractère religieux et uniquement volontaire, ces Aliah sont politiques ou économiques et constituées majoritairement de réfugiés chassés par des marques d'hostilité antijuives dans leurs pays d'origine. Cela, toutefois, reste un élément de choix puisque certains choisissent de rester envers et contre tout dans les pays d'origine alors que d'autres émigrent, mais pas vers la Palestine.
  • Les voyageurs occidentaux décrivent la Palestine comme un pays fermé et hostile aux étrangers. Sauf à Acre qui est une "échelle" commerciale, et à Jérusalem, ville de pèlerinage, ils ne peuvent circuler qu'incognito, en habit oriental: les routes sont à peine praticables aux cavaliers tandis que les habitants, qu'ils soient musulmans, druzes ou chrétiens, les soupçonnent d'espionnage ou de sorcellerie et ils s'exposent à être pillés par les Bédouins.
  • Les juifs Ashkénazes originaires d'Europe centrale et orientale, les Juifs sépharades originaires d'Espagne, d'Afrique du Nord et de Turquie et les Juifs orientaux, originaires du Moyen-Orient, sont de condition modeste et se concentrent dans des quartiers à Jérusalem, Hébron, Safed et Tibériade. Ils ne représentent au total qu'une minorité (hormis dans ces villes). La population arabe vit à 70 % dans des petits villages dans les collines, à proximité des sources et des puits, où, métayers, ils vivent d'une agriculture traditionnelle. Les grands propriétaires terriens vivent dans les villes et, pour certains, à Beyrouth, Damas et Paris. C'est à eux, principalement, que les terres seront achetées, privant ainsi les métayers, à leur insu, de leur outil de travail.
  • Le sionisme moderne s'inspire fortement des idéologies socialistes et des méthodes collectivistes soviétiques en créant des collectivités semblables aux kolkhozes russes (coopératives agricoles de production qui avait la jouissance de la terre qu'elle occupait et la propriété collective des moyens de production), où tout est mis en commun au service de la communauté. Dans les campagnes, ces collectivités appelées kvoutza (trad: groupe), modernisées ensuite par le kibboutz et le mochav (trad: colonie), coexistant avec un secteur privé.
  • 1890
  • Population israélite estimée en Palestine: 43.000 soit 8.08%
  • C'est le début de la deuxième vague de la première Aliah (immigration juive) en provenance de Russie et toujours inhérente aux pogromes comptant, en tout, environ 10.000 personnes qui créent de petites colonies agricoles, surtout dans la bande côtière. Certaines deviendront des villes israéliennes au XXe siècle. Les idées de Theodor Herzl, qui entreprit un vain périple pour convaicre les notables des communautés juives de l'aider à fonder un Etat se concrétisent involontairement puisque l'arrivée de ces Juifs pourchassés n'a rien de l'élan idéaliste qu'il essaya d'insuffler. Bien qu'en public, il prétende que l'arrivée des Juifs n'apporterait que des bienfaits matériels, il est conscient du problème que pose la présence de la population arabe en Palestine, mais se garde d'en parler.
  • 1903-1914
  • Population israélite estimée en Palestine: 94.000 soit 13.64%
  • La seconde Aliah commence après les pogroms de Kichinev et compte environ 35.000 immigrants de l'Empire Russe soit des actuelles Pologne, Ukraine et Biélorussie dont, entre autres fondateurs d'Israël, David Ben Gourion. En parallèle, ces années marquent le déclin de l'empire ottoman. Tel Aviv et le premier kibboutz, Degania, sont fondés en 1909. Plusieurs autres vagues migratoires marqueront l'histoire d'Israël, en particulier la cinquième qui précède la Seconde Guerre Mondiale en 1939 et la sixième qui lui succède ainsi qu'à la Shoah.
  • 1915
  • Population israélite estimée en Palestine: 94.000 soit 13.64%
  • En pleine guerre mondiale, le Royaume-Uni, la France et la Russie planifient dans le plus grand secret le partage du Proche-Orient et définissent les contours de leurs zones d’influence. Ils pensent que la Palestine est un cas particulier, du fait de l’enjeu symbolique que constituent les lieux saints, et doit bénéficier d’un "statut international". Ces messes basses aboutissent à l'accord Sykes-Picot qui redéfinit la nouvelle carte géopolitique du Moyen-Orient. La Palestine est définie comme zone internationale, comprenant Saint-Jean-d'Acre, Haïfa et Jérusalem.
  • 1917
  • Un an plus tard, Arthur Balfour, ministre britannique des Affaires étrangères adresse une déclaration écrite au Baron Edmond de Rothschild au Royaume-Uni dans laquelle il promet au peuple juif, mais à certaines conditions, comme le respect des populations déjà présentes dans la région, la création d’un "foyer national juif" sur la terre de Palestine, mais il ne s’agit pas encore d’un État juif.
  • Lettre qui, finalement, aura bien plus d'influence qu'imaginable sur la suite des évènements puisqu'elle sera incluse, en 1923, dans les attendus du mandat Britanique sur la Palestine que la Société des Nations approuvera deux années plus tard lors de la Conférence de San Remo et qui incitera le Royaume Uni à choisir de soutenir le sionisme plutôt que "l'arabisme" dans la gestion dudit mandat.
  • 1920 mandat britanique
  • 1920
  • A la fin de la Grande Guerre, les puissances alliées mettent en oeuvre les accords Sykes-Picot organisant le partage de l'empire Ottoman, ainsi que la Déclaration Balfour du 2 novembre 1917 en faveur de l'établissement d'un foyer national juif en Palestine. Lors de la conférence tenue à San Remo du 19 au 26 avril 1920, les puissances conviennent de l'attribution à la France d'un mandat sur la Syrie et d'un mandat à la Grande-Bretagne sur la Mésopotamie et sur la Palestine. Cette décision est reprise aux articles 94 et 95 du traité de paix avec la Turquie signé à Sèvres le 10 août 1920, confirmée par le Conseil de la Société des Nations, le 24 juillet 1922, et entre en vigueur le 29 septembre 1923.
  • Avant même l'entrée en vigueur du mandat, le gouvernement britannique demande la révision du texte pour rendre les dispositions relatives à la constitution d'un foyer pour le peuple juif inapplicables à l'est du Jourdain, c'est-à-dire au territoire qui constitue alors la Transjordanie, puis la Jordanie.
  • Dès le début, les mouvements palestiniens refusent de cautionner la construction d’un "Foyer national juif" et rejettent toute participation aux institutions politiques du mandat britannique, à l’exception de la gestion des affaires religieuses.
  • 1923
  • En 1923, lors de l’officialisation du Mandat sur la Palestine, et avec la volonté de respecter les promesses formulées envers Hussein ibn Ali et le mouvement sioniste, les Britanniques scindent la région en deux parties séparées par le Jourdain: la Palestine mandataire à l’Ouest du Jourdain incluant foyer national juif et, à l’Est du Jourdain, "l'émirat hachémite de Transjordanie" dit "la Palestine Est" (Eastern Palestine en anglais). Cette séparation exclut le territoire de Transjordanie des engagements de l'empire britannique en faveur de la création d’un foyer national juif.
  • 1928
  • La commémoration par les juifs sionistes de la destruction du Temple par les Romains se radicalise et est ressentie comme une provocation par la communauté musulmane. De nombreux incidents ont lieu près du mur des Lamentations. Des rumeurs commencent à circuler, au sujet d’un complot juif, dont le but serait de s’emparer de l'esplanade des Mosquées. Elles aboutissent à des émeutes qui prennent des allures de pogrom anti-juif dans les massacres à Hébron puis à Safed où 113 Juifs sont tués et 339 autres blessés. Pourtant, l'émigration reprend, et de nombreux Juifs d’Europe centrale continuent d’arriver en Palestine, apportant des capitaux et achetant de plus en plus de terres arabes.
  • 1929
  • En 1929, le gouvernement de Sa Majesté déclare sans équivoque qu’il n’est nullement dans ses intentions de transformer la Palestine en un État juif, mais qu'il est question de voir s’établir finalement un État de Palestine indépendant. Ce projet officiel semble entraîner la fin des espoirs sionistes, et provoque une nette dégradation des relations entre l'Agence juive (créée en 1929 comme exécutif sioniste en Palestine), et le gouvernement britannique. Commence alors, et ce, jusqu'en 1947, une longue série d'attentats, de sabotages ou d'attaques variées contre les forces britanniques mandataires de la part des organisations juives armées Irgoun, Lehi et Haganah. La guerre bat son plein en Europe et, par ailleurs, certains chefs arabes tentent, en vain, au travers de rencontres avec Hitler et ses seconds, de ramener l'Allemagne nazie à leur cause.
  • 1930
  • Population israélite estimée en Palestine: 175.000 soit 19.88%
  • Publication du second Livre Blanc britannique - recueil des lois qui régissent le mandat - prévoyant de limiter pour la première fois l’immigration des Juifs en Palestine.
  • 1933
  • Adolf Hitler accède au pouvoir en Allemagne; l'accord Haavara est mis en place entre la fédération sioniste et le gouvernement allemand du Troisième Reich pour faciliter l'émigration des Juifs allemands. Une entreprise d’immigration illégale de réfugiés juifs est mise en place alors que leur nombre dépasse les quotas imposés par les Britanniques.
  • De 1936 à 1939, 51 nouvelles localités, créées chacune en une seule nuit, voient le jour selon le programme de l'opération Homa Oumigdal (murailles et tour). En parallèle, la révolte arabe se généralise au cours de laquelle les Britanniques et les Juifs sont visés par de nombreux attentats. En réponse, les Britanniques mènent une dure répression, et, en deux années, réussissent à vaincre et à décapiter le mouvement rebelle national palestinien. Dans la foulée, l'Irgoun entreprend des représailles et commet une série d'attentats à la bombe contre les foules et les bus arabes qui feront 250 victimes.
  • 1939 Seconde Guerre Mondiale
  • Au cours de la Seconde Guerre mondiale, l'armée transjordanienne connue sous le nom de Légion arabe combat en Irak et en Syrie aux côtés des forces britanniques. En 1946, l'émirat acquiert l'indépendance totale et devient le "royaume hachémite de Transjordanie". Il est admis à l'Organisation des Nations unies en 1955 et rejoint la Ligue arabe.
  • 1947
  • Le bateau Exodus est expulsé des côtes de Palestine vers l’Europe, portant à son bord 4.500 survivants de la Shoah, suscitant un important mouvement de sympathie international. Le 18 février 1947, devant l'augmentation des attentats commis par les organisations armées sionistes, les Britanniques annoncent l'abandon de leur mandat sur la Palestine et il appartient à l'ONU, successeur de la Société des Nations qui attribua ce mandat aux Britanniques, de décider des suites à donner à cette décision.
  • La résolution 181 adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies, le 29 novembre 1947, recommande le partage de la Palestine entre un État juif et un État arabe. La Palestine, où vivent 1.300.000 Arabes et 600.000 Juifs, est divisée en trois entités qui doivent devenir indépendantes le 1er août 1948.
  • Adoptée par 33 voix (dont les États-Unis et l'URSS), contre 13 et 10 abstentions, la résolution ne sera jamais appliquée.
  • La violence éclate immédiatement entre les Juifs et les Arabes palestiniens soutenus par des volontaires armés par la Ligue arabe. Les Britanniques décident de partir en se refusant à tout transfert organisé du pouvoir. L'indépendance d'Israël est proclamée le 14 mai 1948 et, le lendemain, les États arabes voisins entrent en guerre.
  • 1948 Guerre de l'Indépendance
  • En 1948, le royaume de Transjordanie est un acteur important de la guerre israélo-arabe de 1948 à l'issue de laquelle il occupe les collines de Samarie et le désert de Judée qu'il annexe et rebaptise Cisjordanie (faisant écho à la Transjordanie), de même, il avance dans Jérusalem et prend le contrôle d'une moitié de la ville (l'Est de la ville). Cette annexion est condamnée par la communauté internationale, sauf par la Grande-Bretagne. Les pays arabes ne concèdent à la Jordanie que l'administration du territoire annexé. La Cisjordanie ainsi que la moitié de Jérusalem sont occupées par la Jordanie jusqu'en 1967, lors de la guerre des Six Jours.
  • La guerre aura pour conséquence la conquête par Israël de la moitié du territoire assigné par l'ONU à l'État arabe.
  • 1949
  • En 1949, pour marquer ses modifications territoriales, le royaume change de nom pour devenir le « royaume hachémite de Jordanie » (sans le préfixe « Trans- ») ou plus communément, la Jordanie. Il accueille également sur son territoire plusieurs centaines de milliers de Palestiniens fuyant la guerre.
  • En 1951, le roi Abdallah est tué lors d'un attentat palestinien.
  • Après la crise du canal de Suez, le royaume se rapproche du régime de Nasser. Lors de la guerre des Six Jours en 1967, son armée est vaincue en moins de 72 heures de combats contre les Israéliens, qui s'emparent de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est. Le royaume accueille 300 000 Palestiniens qui fuient les combats.
  • Face à la déstabilisation engendrée par les mouvements palestiniens et aux tentatives de putsch contre le pouvoir hachémite, le roi Hussein lance une répression massive contre les activistes palestiniens en septembre 1970 et chasse les groupes armés du pays.
  • En novembre 1971, le groupe terroriste palestinien Septembre Noir assassine le premier ministre jordanien Wasfi Tall.
  • La Jordanie ne participera pas activement à la guerre du Kippour de 1973.
  • Après la guerre des Six Jours, le pays perd beaucoup de son prestige aux yeux des Palestiniens qui développent "un État dans l'État". Ils mènent leur propre lutte contre Israël depuis le territoire jordanien et Israël y répond par des incursions, comme la bataille de Karameh en 1968.
  • En 1974, Hussein renonce à toute revendication sur la Cisjordanie et reconnait l'OLP comme seul représentant légitime du peuple palestinien, afin de calmer les revendications nationalistes palestiniennes au sein même de la Jordanie.
  • Cette longue saga tourmentée éveille immanquablement de nombreuses interrogations: Est-ce que la meilleure solution pour les Juifs, après la Shoah, fut la création de l'État d'Israël? La brutalité du fascisme [mea culpa:Arendt & Einstein] exprimée par les factions combattantes juives envers les Palestiniens au soir de la création de la nation fut-elle la juste manière d'amorcer un voisinage propice à la construction? Est-ce qu'un État fondé sur une mémoire brûlante, des récits en tension et les sables mouvants du mensonge peut un jour connaître la stabilité et la reconnaissance requise pour la paix?
  • Démographie historique
  • Année Israélites Autres % Israélites
    -800 60 000 ? ?
    1539 5 000 151 000 3.21%
    1554 7 000 197 000 3.43%
    1691 2 000 229 000 0.87%
    1800 7 000 268 000 2.55%
    1890 43 000 489 000 8.08%
    1914 94 000 595 000 13.64%
    1922 84 000 660 000 11.29%
    1931 175 000 849 000 17.09%
    1947 630 000 1 324 000 32.24%
L’Histoire en question
  • L’Histoire est souvent perçue comme une mémoire collective précieuse, un outil pour ne pas répéter les erreurs du passé. Mais ses défauts, comme ceux de devenir une arme littéraire, un outil de manipulation, de ressentiment ou d’aveuglement idéologique, sont loin d’être négligeables. Comme pour honorer un texte biblique d’une violence originelle surprenante, l'Histoire semble se délecter de l'éternelle survie des premiers pas encore animalesques de l'humanité, certes évoluée jusqu'à l'écriture, mais toujours aussi fière des dieux impitoyables et vindicatifs de son premier et plus célèbre récit. De quoi se demander si les grands de ce monde, ceux qui contribuèrent vraiment à son évolution, les Colomb, Newton, Pasteur... ont vraiment mérité de naître sur cette boule ,d'abord rouge de honte par son fer en fusion puis écarlate du sang de leurs congénères.
  • Indéniable projecteur sur les expériences du passé, il n'en demeure pas moins qu'elle jette, sans retenue, un éclairage cru et minutieux, avec force détails, sur les violences. D’une part, l'Histoire aseptise et déconcrétise la réalité, empêchant ainsi de la percevoir comme elle fut vécue et d’autre part, elle maintient en vie certains scénarios qu’il vaudrait mieux ne pas se figurer. Elle ramène de loin, de très loin parfois, telles que le feraient les chroniques de Jack l’éventreur, la laideur des humains, conservant les rancœurs, qui, des siècles durant parfois, comme ces inimitiés religieuses, savent noyauter les générations nouvelles et en tirer le plus abjecte au moment opportun.
  • Je ne suis pas le premier àm'en soucier. Paul Ricœur, dans "La mémoire, l’histoire, l’oubli", explore comment l’Histoire peut être instrumentalisée pour nourrir des conflits identitaires ou politiques. Il insiste sur la nécessité d’un travail critique de mémoire pour éviter les dérives.
    Puis Nietzsche, dans "De l’utilité et des inconvénients de l’histoire pour la vie", critique l’excès d’historicisme. Il y voit un danger pour la vitalité humaine, car trop de mémoire peut paralyser l’action et étouffer la créativité. Tzvetan Todorov, dans "Les abus de la mémoire", met en garde contre l’usage politique de l’Histoire, notamment lorsqu’elle est figée dans une posture victimaire ou utilisée pour justifier des actes présents.
    Ou encore Tzvetan Todorov qui dénonce dans "Les abus de la mémoire", les usages politiques de l’Histoire: quand les mémoires de souffrance deviennent exclusives ou hiérarchisées, elles peuvent provoquer des crispations identitaires. En figeant le passé, on empêche l’avenir de s’inventer.
  • Pourtant, toutes les cultures ne placent pas le passé au cœur de leur identité. Certaines sociétés dites «traditionnelles», comme les Aborigènes d’Australie avec leur Dreamtime, ou les Dogons du Mali, préfèrent vivre selon des récits mythiques, cycliques, réactualisés par le rituel plutôt que par la mémoire historique. Le passé y est un présent sacré, non une ligne à dérouler. Claude Lévi-Strauss nommait ces sociétés “froides”, refusant le changement, non par faiblesse, mais pour préserver l’équilibre. L’Histoire, telle que nous la concevons, n’est pas une universalité: elle est une invention culturelle, un choix parmi d’autres.
  • Oui, l’Histoire, si chérie des programmes scolaires, des historiens et des nostalgiques ne serait-elle pas notre pire ennemie, la preuve du mal, tant elle évoque un diable embusqué dans le passé et toujours prêt à surgir pour rafraîchir ou affiner la mémoire des bourreaux du présent?
  • Rien ne sert, donc, de nourrir trop de scrupules pour ce passé que parfois, il serait bon d’oublier pour mieux redémarrer. Les remords, notre mauvaise conscience ou nos peines ne les effaceront jamais. La vie ne nous est pas vendue comme sinécure et force est de savoir, un jour, passer à autre chose sans écrire autre chose et autre chose encore. Changer de cap, une fois les histoires devenues de l'Histoire, virer à bâbord ou à tribord, mais virer ces cauchemars et ces peines, sans pour autant chavirer et sombrer dans les scrupules d'avoir trop peu pensé, parlé, souffert ou payé.
  • C’est que l’Histoire ne raconte pas toujours: elle ordonne, légitime, gouverne. Comme le suggérait Michel Foucault, elle est aussi dispositif de pouvoir. Nombre d’États modernes l’ont instrumentalisée pour appuyer des récits fondateurs parfois fragiles. L’État d’Israël, par exemple, s’adosse à une mémoire biblique et diasporique plurimillénaire, recomposée dans une logique étatique. L’Ukraine, quant à elle, invoque les racines médiévales de la Rus’ de Kiev face à la narration russe. Ainsi, ces histoires lointaines, parfois disputées, deviennent enjeux de souveraineté contemporaine. L’Histoire ne dit pas seulement ce qui fut: elle façonne ce qui est.
  • Ricœur, moins catégorique, dirait: il ne s’agit pas d’amnésie, mais de juste distance.
C'était avant
  • Le Covid-19 éloigne les corps...
    Les gens s’écartent lorsqu’on les croise, comme pour les pestiférés. La suspicion s’installe et mine le “toucher”, si utile parfois pour exprimer ses sentiments ou sa proximité. En berne, les relations sexuelles deviennent, pour certains, un lointain souvenir, ou le Graal inaccessible.
  • Mais il rapproche les âmes...
    Des solidarités émergent, impromptues, des connivences se trament et des amitiés se lient, contraignant tout un chacun à réinventer sa manière d'interagir et à reclasser ses priorités. Ce qui s'impose aussi, avec une certaine évidence, sont ces professions oubliées, pas toujours suffisamment valorisées et qui, pourtant, apparaissent aujourd'hui comme les plus fondamentales et les plus vitales à la continuité existentielle. Ainsi, infirmières et infirmiers, urgentistes, chercheurs, policiers, soldats, aide-soignants en tout genre, souvent tenus à l’écart des prouesses informatiques qui désormais dominent le monde, gagnent leur part méritée de gloire malgré cette moindre complicité avec la vitesse de déroulement du film de la vie.
  • Mais surtout, de façon peut-être plus profonde, plus subreptice et plus puissante, émerge cette immense volonté politique et financière qui n'a qu'une obsession claire, définie et annoncée, de faire en sorte que très vite, très très vite, les choses redeviennent comme avant. Comme s’il était meilleur, le monde d’avant le Covid-19. Ou comme avant celui d’avant encore, des trente glorieuses, qui elles-mêmes précédèrent Mai 68. Ces années qui connurent Kennedy et De Gaulle, le respect des enfants pour leurs parents et professeurs, la sacro-sainte famille dont le chef était le père, vénéré et craint, une école d’où l’on sortait avec un bagage d’histoire et de lettres et d’où un certain savoir ruisselait tout au long des carrières et des vies...
  • Scrutons-le, ne serait-ce qu’un instant, ce monde d'avant, ce monde si désirable et si parfait, objet de nostalgie et de désir passionné de la part des leaders et opérateurs économiques. C'était le monde dans lequel 25 000 personnes mouraient de faim chaque jour, alors que 120.000 est le nombre de victimes du Corona en 4 mois. C'était Un monde où la pollution tue 25 000 personnes chaque jour et de plus 700.000 personnes mortes chaque année du paludisme. Les conséquences de l'activité anthropique sur les autres vivants avec lesquels nous partageons la planète étaient déjà tout à fait considérables. Les hommes avaient éradiqué l’essentiel de la moitié des forêts. En quatre décennies seulement, ils avaient exterminé 60% des populations animales sauvages. En une seule décennie, ils ont anéanti les deux tiers de la biomasse. (ensemble des matières organiques vivantes - bois, plantes, céréales, déchets agricoles... - pouvant être transformées en chaleur, en électricité ou en biocarburants)
  • Ces chiffres sont faramineux, voire impensables. Le monde était donc déjà dans les prémices d'une méta-crise qui, hélas, fera passer l'épisode Covid-19, pour tragique qu'il soit, comme une plaisanterie au regard de ce vers quoi notre monde s’achemine. Et soyons bien clairs, il ne s’agit pas de la trame d’un film de science-fiction, mais bien d’un état des lieux immanent de ces dernières années. Ça a déjà eu lieu, c’est acté et non annulable. Nous ne sommes plus dans ce que l’on nomme communément “la sixième extinction massive”, mais bien dans la première extermination radicale et délibérée de la vie sur Terre.
  • Depuis la Seconde Guerre Mondiale, les économistes se gargarisent du terme de “croissance” pour qualifier le changement de décor désolant et morbide dont l’Homme est l’acteur et le monde le théâtre. Il détruit jour après jour, la vivabilité de son habitat, la mise de départ qui lui fut offerte, le capital naturel dont il a naturellement hérité. S’agit-il réellement de croissance? Le CO2 émis restera là pour toujours dans l’échelle du temps pertinente pour l'humanité. On ne pourra pas faire revivre les espèces éteintes. On ne pourra pas faire revivre les morts. On ne pourra pas épurer le CO2, mais il est encore temps pour changer les règles tout à fait aberrantes, socialement injustes, écologiquement dramatiques, climatiquement suicidaires qui battent la mesure de la planète.
  • Pour ce faire, il faut du courage, de la clairvoyance et de la logique. Il faut absolument que l’humanité cesse de vivre d’idées préconçues ou de credo abêtissants qui, à l’heure du confinement, poussent certains guides religieux intouchables à encourager la prière en groupe et mettent ainsi en péril des nations entières. Personne ne les empêche de croire ce qu’ils veulent, mais qu’ils ne se mêlent surtout pas de la gestion des crises vu que les prières n’ont jamais suffi à éviter le pire.
  • Je sais, il est aisé de clamer sans les calmer les défaillances du monde. Et d’aucuns se diront que c’est exactement ce que je fais dans cet article. Alors, bien que je ne sois ni dirigeant, ni politicien, ni spécialiste, ni décideur, je vais donner mon opinion et ma solution. Ainsi je contredirai ces détracteurs tout en sachant pertinemment que ce que je vais écrire ne plaira a personne.
  • Je vais donc dire que cette vision actuelle purement gestionnaire de l'existence est une aberration ontologique. Que la situation de cette planète et de ses 7.5 milliards d'habitants en partie au chômage qui consomment chaque année les ressources annuelles de nourriture en seulement six mois, équivaut à une bombe à retardement. Je vais dire aussi que les écologistes s’égosillent en vain car même ce qu’ils proposent n’est pas à la hauteur des dégâts et de l’avancement du désastre. Et enfin, je vais dire que pour sauver la planète, il faudrait retourner presqu’au moyen âge, immobiliser les avions, interrompre la conquête de l’espace, cesser de rouler en voiture, de construire des complexes faramineux, de raser les forêts, de faire des enfants car il est indispensable de réduire la population mondiale... Il y aurait des choses à conserver, évidemment, comme la médecine et certains savoir-faire... Les indigènes, les tribus encore existantes, les primitifs, sont les seuls à ne pas avoir abîmé la Terre. Il faudrait réapprendre à vivre comme eux.
  • Voilà, c'est dit, et je savais que ça ne ferait plaisir à personne. Si quelqu’un avait une meilleure idée pour sauver à coup sûr la planète, qu’il parle maintenant ou se taise à jamais!
  • Ce qu'on te reproche, cultive le , c'est toi. Jean Cocteau.
Ça a failli
  • Imaginons les populations du premier âge du Fer (-800 à -450). Elles n’avaient jamais vu la Terre de loin, jamais volé. Elles ignoraient que l’horizon trahissait la rotondité du globe, que notre planète baignait dans un espace infini, à l’image de ces étoiles qui, la nuit, constellent le ciel. Elles ne savaient rien de la gravité, du temps non uniforme ou de la matière décomposée en particules subatomiques. Ce savoir, aujourd’hui banal, jette un doute sévère sur les croyances d’antan. Mais à l’époque, il était séduisant de déléguer à des divinités l’épineuse énigme de la création du monde. À l’instar du petit village gaulois d’Astérix et Obélix, une poignée de Grecs cultivés s’osèrent néanmoins à des hypothèses radicalement neuves, moins digestes mais fondatrices d’un savoir qui ne naîtra pleinement que vingt siècles plus tard, avec Galilée. On faillit basculer alors dans un berceau scientifique avorté, étouffé par les conflits religieux qui allaient suivre.
  • Plus de 600 ans avant J.-C. en effet, le philosophe grec Anaximandre de Milet, importante figure de la Grèce antique, considéra pour la première fois que la Terre était suspendue dans le vide et que son origine et son destin émanaient du principe de l’infinité qu’il nommait apeiron. D’éminents philosophes comme Platon, Démocrite ou Socrate, pères reconnus, entre autres, de la pensée scientifique lui succédèrent dans ce mouvement rationnel. Ces savants Grecs sont aussi considérés comme les précurseurs de l’affranchissement de la pensée des dogmes religieux. Mais la remarquable clairvoyance qui les portait à vouloir comprendre plutôt qu’à s’égarer dans des voies mystiques sans issue, ne pourra rien contre le rouleau compresseur du credo. Aucune preuve tangible ne pouvant étayer leurs théories déceptives pour le quidam, l’incohérence leur fit défaut et leur talent céda sous le poids des idées créationnistes qui se profilaient sur une autre rive de la Méditerranée, là où, contemporainement, on composait la Torah. Les doctrines qui se greffèrent à la Torah, n’eurent rien de plus brillant que les idées des Grecs sinon les fers affutés qui les imposèrent. Mais les mouches se posent plus facilement sur une assiette de miel à ciel ouvert que sur un pot de confiture fermé. Autrement dit, il était autrement plus facile de conquérir le peuple avec des armes et des dieux à l’origine du monde, que par une philosophie tout aussi incertaine mais plus ardue à comprendre et accepter pour le commun des mortels. Terrible destinée, que de perdre une telle bataille idéologique même si, il faut l’admettre, ce fut tout à fait dans l’ordre des choses. Les masses populaires finissent toujours par prendre le dessus comme en attestent les révolutions et ses têtes qui tombent, ce qui ne laisse aucun doute sur la détermination du petit peuple lorsqu’il se met martel en tête. Bien que les philosophes présocratiques fussent proches de transformer la pensée humaine en une quête intelligente et structurée, elle sombra définitivement, avec la période romaine, dans la paresse mentale suggérée par la défausse d’un joker céleste. Cultes et dieux perdurèrent jusqu’à nos jours sur presque toutes les terres habitées, chacun y allant de ses symboles, ornements, couleurs, idoles et rites.
  • Au fil des siècles suivants, les occasions de renouer avec la pensée scientifique grecque devinrent de plus en plus courantes et malgré sa puissance et ses efforts, la religion ne put empêcher le progrès dans les pays séculiers et développés. Pour les plus fanatiques, en revanche, le temps se figea et l’évolution des mœurs, de la technologie et des connaissances humaines semble ne pas avoir eu lieu. Les mains paralysées sur les livres sacrés, ils préfèrent vivre dans une bulle intemporelle qu’ils ne savent pas quitter, terrassés par le spectre des représailles divines. C’est dire l’atmosphère qu’ils y respirent, le lavage de cerveau enduré pour arriver à craindre à ce point ces doctrines qui promettent le pire à qui cesse d'y adhérer. C’est dire aussi combien le pouvoir exercé sur les fidèles est essentiel pour faire prospérer les cultes, combien ce tiroir-caisse officie comme vide-poche pour les âmes asservies par la détresse.
  • Mais comme toute flamme mal éteinte, la raison ne s’est jamais entièrement dissipée. Sous la cendre des dogmes, des esprits continuèrent d’observer, de douter, de questionner en silence. Pendant que les temples brûlaient les hérétiques, des manuscrits circulaient, recopiés, traduits, camouflés dans des monastères andalous ou byzantins. C’est ainsi que des fragments de ce que fut la lumière grecque réapparurent à travers les siècles, transfigurés par les savants arabes du Moyen Âge, puis réveillés en Europe au prix d’audaces humanistes. Averroès, Alhazen, Maïmonide: ces noms-là n’ont peut-être pas la popularité des prophètes, mais sans eux, ni Copernic, ni Galilée, ni Kepler n’auraient osé briser le plafond du ciel antique.
  • Et lorsque, après des millénaires d’obéissance, l’homme releva la tête, ce fut pour découvrir qu’il n’était ni au centre du monde, ni couronné de sens. Il était poussière, littéralement: composé d’atomes forgés au cœur des étoiles. Cette révélation, loin de l’humilier, l’éleva. Elle fit de lui un explorateur du réel, non un simple bénéficiaire de récits mystiques. Et pourtant, même aujourd’hui, cette conquête du savoir reste inachevée. Des armées d’idées reçues, de croyances résiduelles, de récits nationalistes ou religieux continuent de retenir les esprits dans les cages d’avant.
  • Le combat n’est donc pas terminé. Il se joue désormais dans les écoles, sur les réseaux, dans les livres, parfois même dans l’intimité des consciences. Il oppose la complexité du vrai à la simplicité du confort intellectuel. La nuance au manichéisme. Le doute fécond au dogme fossilisé.
Littérature
Tu n'en reviendras pas!
  • Tu sais, ici, tout le monde sourit, tout le temps. On ne peut pas s'ennuyer et c'est tant mieux car on ne dort jamais... je suppose. Tu t'imagines le temps qu'on a? En fait, le temps n'a pas vraiment d'importance vu qu’il n’est plus compté. Ben... on a pas de montres. Tout est si simple, tu n’as pas idée. Je crois que personne ne travaille et comme on ne dort pas, les logements sont inutiles. Par conséquent, on n'habite nulle part. Ça en fait des économies... En fait pas vraiment, parce qu’ici, il n’y a pas d’argent, tout est gratuit, ou offert ou... ou peut-être juste là, disponible. On n’a rien dans les poches. Pas non plus de papiers ni de clés, rien en fait. Ah oui, la journée n'a de cesse, comme cette lumière qui ne s'atténue pas, cette constante satiété qui n'impose plus de pauses, de déjeuners, ni de repas. Un peu comme une voiture lancée à l'infini, sans essence, sans chauffeur, sans but. Les délits n'existant pas, l’identité devient superflue. Les gens ne s'appellent pas ici, ils se pensent, les noms ont disparu. C’est impensable - et pourtant. Tout baigne dans une paix sans accrocs, sans surprise, sans horreur. Il me semble bien que ce mot n'existe même pas... bien sûr que non, aucun mot n'existe, ou tout du moins n'est prononcé, puisque la parole n'a pas de son. Oui, ça c'est vraiment bizarre, les gens se parlent mais on n'entend rien, comme dans un film muet, un livre qui parle à son lecteur. Et le top, c'est que, quelle que soit ta langue d'origine, tout le monde te comprend. L’inaudible est comme traduit avant de te parvenir. En fait, je ne sais même pas, car quand j'y suis, je n’y pense pas, c’est tellement naturel que cela ne me pose aucun problème. Dans la rue... non, ce n'est pas une rue, enfin pas que je me souvienne... disons... lorsqu'on se promène je ne sais où, parce que, comme il n'y a plus de maisons, les lieux ne sont ni marqués ni signalés... non en fait, il n'y a pas d'endroits, c'est vrai... si, il y a des parcs avec des bancs, des manèges, comme dans une fête foraine, les gens s'amusent, les enfants courent partout et semblent tellement heureux. Tu parles, ils ne sont jamais seuls, et jamais en classe non plus, ils s'éclatent. Ben non, je n'ai jamais vu d'écoles. Un peu d’eau? oui, tout de suite. Non, ne bouge pas, garde tes forces mon ami... Évidemment, à quoi servirait-elle, l’école, si on ne travaille pas. On n'a même pas besoin d'apprendre à parler, ou à lire en fait. Tu sais quoi, maintenant que j'y pense, il n'y a pas de naissances et les enfants ne grandissent pas, il me semble, les gens sont comme ils sont, mais je ne suis pas sûr qu'ils sachent pourquoi, ni comment. Ils sont et c'est tout. D'ailleurs, on n'y pense pas vraiment, on se contente de se promener. Il fait toujours beau, ni trop chaud, ni trop froid, ça évite aussi d'avoir une garde-robe. De toute façon, sans maison, tu les mettrais où les vêtements. Tu sais, j'aurais dû faire le contraire, te raconter tout ce qu'il y a, au lieu d’énumérer tout ce qui manque. C'aurait été plus court. En fait c'est tout, il y a nous, les gens et des espaces paisibles et accueillants qui se ressemblent tous. Pas d'ordinateurs, pas de télés, pas de cinés. On rencontre plein de monde, mais j'ai remarqué qu'on ne croise jamais les mêmes personnes. Je crois même que c'est normal puisqu'on passe sa vie à se promener et qu'en fait, on ne s'assoit jamais au même endroit. En revanche tout le monde se parle comme si tous se connaissaient. En te le racontant, là, maintenant, je me rends compte qu'on ne sait rien d'autre. Qu'on ne sait pas ce qu'on y fait, combien c'est grand, pourquoi parfois j'y suis et pourquoi parfois je suis ici, avec toi, à te raconter ma vie. C’est un pays sans nom je pense, sans odeur, sans son, ça c'est sûr. Parfois je me demande s' il existe vraiment. D'un autre côté, si je te le raconte, c'est que je le connais, et je suis même convaincu que tu t’y plairais. Tu es mon meilleur ami et j’aimerais tant... tu dis quoi? Attends, regarde-moi. Regarde-moi, je te dis, ouvre les yeux. Ouvre tes putains d’yeux, bordel! Comment ça tu y es, tu es où... Tu es où? Mais alors quoi? ça y est, tu es... Oui, je te vois. Je suis tellement heureux de te rev... D’accord, je te le promet, on ne se quittera plus. On va faire gaffe de pas se perdre à nouveau parce que tu sais, ici, c'est très grand, c'est immense. Oui, je sais, on peut toujours se retrouver par la pensée, c'est pratique. Bienvenue, alors, mon frère. Comment te sens-tu ? Mieux? Je veux bien te croire, tu en as bien bavé... cette maudite blessure, cette putain de guerre nous a tous malmenés, et pourquoi, dis-moi, pour rien, pour rien, tu sais... Total, cinquante ans après, rien n’a changé, tu vois bien, ils se mettent toujours sur la gueule... Ben voilà, ici, tu as fini de souffrir... Quoi? Tu es heureux d'être ici, avec moi... tu as rêvé que je te racontais où j’étais... Dans ce cas, j’ai dû aussi te dire que tu n'en reviendrais pas... de ce pays sans nom.
Ne changez rien
  • Faut-il ajouter mot à ce que vous m’offrez?
  • Existe-t-il femme apte à me désœuvrer
  • Comme vous savez le faire, même sans ne rien changer ?
  • À ce regard innocent, doux et engagé?
  • Sur quel nuage votre amour va-t-il me poser?
  • Vers quel autre idéal sera-t-il exposé?
  • Êtes-vous réelle ma chère, ou le fruit d’un désir
  • Secret et si profond qu'il n’oserait fleurir?
  • Êtes-vous par hasard celle que je languissais,
  • Celle qui badait, dans ce rêve que je maudissais
  • Et me suivait dans ce délire fou de tendresse
  • Inconnue, trop absente et pour moi sans adresse?
  • Est-ce vrai que ma reddition, tel un souvenir,
  • Ne pèsera plus sur ma vie, sur mon avenir?
  • Diogène et ses disciples ont ils laissé la place
  • À une fée, eux, ces maîtres de la sous-classe?
  • Auraient-ils lâché prise me voyant foudroyé,
  • Accepté de me voir tel que vous me voyez?
  • Serait-ce que Dieu lui-même tint à se déplacer
  • Pour ce laissé-pour-compte qu’on a tant effacé?
  • Ou simplement la vie, après tant de déboires
  • Qui décide de ne plus s’acharner et de croire
  • Qu’il est bon de priser ceux qui ont su se taire
  • Et prendre sur eux-mêmes, sans jamais se défaire
  • D’un feu sacré qui seul, ne désire que s’éteindre.
  • Pourquoi moi? Pourquoi maintenant? Pourquoi empreindre
  • Ce sceau sur mon chemin, le dix-sept du mois d'août
  • Faisant battre mon cœur comme au pied d’une joute
  • Le mystère est un choix qu’on ne saurait violé
  • Loin de moi de tout perdre pour le voir dévoilé
  • Alors j’accepte, coi, cette voie insensée
  • Qui dictera mes pas loin d'un triste passé
  • Et saura, je suis sûr, combler toutes vos attentes
  • D’amour, de joie, de paix et surtout sans tourmente.
  • Puisse cette digne voie devenir un destin,
  • Nous laisser profiter de chacun des matins
  • Qu’il nous sera donné de voler et de vivre.
  • C’est ma prière et telle qu’elle est, je vous la livre.
If
(de Rudyard Kipling, Adaptation française d'André Maurois}

  • Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
  • Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
  • Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties
  • Sans un geste et sans un soupir ;
  • -
  • Si tu peux être amant sans être fou d’amour,
  • Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre,
  • Et, te sentant haï, sans haïr à ton tour,
  • Pouvant lutter et te défendre ;
  • -
  • Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
  • Travesties par des gueux pour exciter des sots,
  • Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles
  • Sans mentir toi-même d’un mot ;
  • -
  • Si tu peux rester digne en étant populaire,
  • Si tu peux rester peuple en conseillant les rois,
  • Et si tu peux aimer tous tes amis en frère,
  • Sans qu’aucun d’eux soit tout pour toi ;
  • -
  • Si tu sais méditer, observer et connaître,
  • Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,
  • Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
  • Penser sans n’être qu’un penseur ;
  • -
  • Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
  • Si tu peux être brave et jamais imprudent,
  • Si tu sais être bon, si tu sais être sage,
  • Sans être moral ni pédant ;
  • -
  • Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
  • Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
  • Si tu peux conserver ton courage et ta tête
  • Quand tous les autres les perdront,
  • -
  • Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
  • Seront à tout jamais tes esclaves soumis,
  • Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire
  • Tu seras un homme, mon fils.
  • Texte Original: If
  • If you can keep your head when all about you
  • Are losing theirs and blaming it on you,
  • If you can trust yourself when all men doubt you,
  • But make allowance for their doubting too;
  • -
  • If you can wait and not be tired by waiting,
  • Or being lied about, don't deal in lies,
  • Or being hated, don't give way to hating,
  • And yet don't look too good, nor talk too wise:
  • -
  • If you can dream - and not make dreams your master;
  • If you can think - and not make thoughts your aim;
  • If you can meet with Triumph and Disaster
  • And treat those two impostors just the same;
  • -
  • If you can bear to hear the truth you've spoken
  • Twisted by knaves to make a trap for fools,
  • Or watch the things you gave your life to, broken,
  • And stoop and build 'em up with worn-out tools:
  • -
  • If you can make one heap of all your winnings
  • And risk it on one turn of pitch-and-toss,
  • And lose, and start again at your beginnings
  • And never breathe a word about your loss;
  • -
  • If you can force your heart and nerve and sinew
  • To serve your turn long after they are gone,
  • And so hold on when there is nothing in you
  • Except the Will which says to them: 'Hold on!'
  • -
  • If you can talk with crowds and keep your virtue,
  • ' Or walk with Kings - nor lose the common touch,
  • if neither foes nor loving friends can hurt you,
  • If all men count with you, but none too much;
  • -
  • If you can fill the unforgiving minute
  • With sixty seconds' worth of distance run,
  • Yours is the Earth and everything that's in it,
  • And - which is more - you'll be a Man, my son!
  • Adattamento italiano di Willy Bohane: Se
  • Se rimani sereno e ragioni
  • Quando altri perdono la testa, senza eccezioni;
  • Se, messo in dubbio, hai fiducia in te
  • Ma sai ricordare quanti diffidano di te;
  • -
  • Se sai aspettare senza mai stancarti,
  • Udire calunnie su di te e non nasconderti,
  • O, soffrendo l'odio, senz'alcun rancore
  • Dimostrarti fermo e senza timore;
  • -
  • Se puoi sognare senza che il sogno diventi padrone,
  • Se puoi pensare senza che l'idea superi lo sprone,
  • Se puoi costeggiare Trionfo e Rovina
  • E spiegare a quei impostori chi davvero domina;
  • -
  • Se puoi udire le tue parole o fatti
  • Distorti da furbi per distrarre stolti,
  • O se puoi stare calmo quando tutto crolla
  • E da capo ricostruire, senza un'altra parola,
  • -
  • Se sai meditare, osservare e conoscere
  • Senza divenire scettico o distruttore;
  • Se puoi essere duro ma mai arrabbiato,
  • Se puoi essere bravo ma non insensato,
  • -
  • Se sai essere saggio ed amicale
  • Evitando di fare troppa morale;
  • Se non ti lasci infliggere ferite,
  • Se tutti contano, ma non sono tutto per te;
  • -
  • Se riesci, di cento partite a perdere il frutto
  • Senza un gesto, senza un rimpianto;
  • Se puoi invogliare la folla restando umile,
  • Fiancheggiare i re stando affabile,
  • -
  • Allora il mondo, di più, tutto l'universo
  • Sarà tuo per sempre e te lo confesso,
  • Ciò che vale di più della gloria o di quel binomio
  • E' che sarai un Uomo, figlio mio!
La Question
  • La question vous bouscule et vous mine
  • Allons que diable, redressez cette échine,
  • Respirez, détendez vous ma douce,
  • L’envie de cette histoire vous pousse
  • Mais la raison est là pour ôter tout courage.
  • Zélée à point pour incarner son personnage
  • Elle vous arrime si fort et sans relâche
  • Qu’à s’en défaire trop de panache.
  • On ne trompe point facilement vous savez,
  • Le prix de la folie, parfois fort élevé
  • Se plaît à taquiner l’esprit, à le martyriser
  • Par les pires épilogues, les plus tristes risées.
  • Il tait volontairement les moments les plus denses
  • D’une étreinte fortuite et souvent trop intense.
  • Il dénie le plaisir que procure un baiser
  • Volé par l’imprudence mais tellement embrasé
  • Qu’il en ferait rougir ceux qui en ont le droit.
  • Que reste-t-il mon amie, sinon l’émoi.
  • Sauriez vous donner cours au bruit de votre esprit
  • Prendriez vous le risque de payer ce prix
  • Pour un homme qui n’a su que parler
  • Vous écrire, certes, et vous a affolée?
  • Un romantique malmené par la vie
  • Aimant autant que vous le bonheur assouvi
  • Il avait oublié, c'est vrai, ce qu’une grande d’âme
  • Est capable de faire, munie de ce sésame
  • Qu’est l’amour, celui de tous les jours
  • Qui caresse, et qui pour lui vaut le détour.
  • Je ne crois pas. Vous semblez si fragile
  • Si vraie, si petite, peut-être si docile
  • Que du haut de tous mes centimètres
  • J’aurais peur d'engloutir tout votre être.
  • Moi, je n’ai rien à perdre, vous tout.
  • Ce n'est pas mon affaire pensez-vous?
  • Je m’en voudrais de ne pas le dire
  • Troublé oui, pas au point de vous nuire.
  • Gardez la tête froide, doutez autant qu’il faut
  • N’écoutez du chaos que les mots
  • Et si, seulement si, ce fut insupportable
  • Montez dans un avion, voyez si c’est jouable.
  • Il sera temps, ensuite de faire le point
  • Le cœur net, l'intellect et le corps plus sereins
  • Je ne demande rien ni n’attends de prouesse
  • J’ai pour moi ma conscience et ma sagesse.
  • Prenez le temps, le recul qu'il sera nécessaire
  • Pour forger votre idée, y faire la lumière
  • Je vous salue ma chère, et au dessus de tout
  • Sachez tout le respect dont vous êtes le clou.
Voltaire
  • Voici ce que, en 1764, Voltaire écrivait sur les Juifs dans son Dictionnaire philosophique: (A noter que Voltaire n'a jamais été antisémite comme certains aiment le croire, mais anti-clérical en général)
  • Début de citation:
  • Vous m’ordonnez de vous faire un tableau fidèle de l’esprit des Juifs et de leur histoire ; et, sans entrer dans les voies ineffables de la Providence, vous cherchez dans les mœurs de ce peuple la source des événements que cette Providence a préparés.

    Il est certain que la nation juive est la plus singulière qui jamais ait été dans le monde. Quoi qu’elle soit la plus méprisable aux yeux de la politique, elle est, à bien des égards, considérable aux yeux de la philosophie.

    Les Guèbres, les Banians et les Juifs, sont les seuls peuples qui subsistent dispersés, et qui, n’ayant d’alliance avec aucune nation, se perpétuent au milieu des nations étrangères, et soient toujours à part du reste du monde.

    Les Guèbres ont été autrefois infiniment plus considérables que les Juifs, puisque ce sont des restes des anciens Perses, qui eurent les Juifs sous leur domination ; mais ils ne sont aujourd’hui répandus que dans une partie de l’Orient.

    Les Banians, qui descendent des anciens peuples chez qui Pythagore puisa sa philosophie, n’existent que dans les Indes et en Perse ; mais les Juifs sont dispersés sur la face de toute la terre, et s’ils se rassemblaient, ils composeraient une nation beaucoup plus nombreuse qu’elle ne le fut jamais dans le court espace où ils furent souverains de la Palestine. Presque tous les peuples qui ont écrit l’histoire de leur origine ont voulu la relever par des prodiges : tout est miracle chez eux ; leurs oracles ne leur ont prédit que des conquêtes ; ceux qui en effet sont devenus conquérants n’ont pas eu de peine à croire ces anciens oracles, que l’événement justifiait. Ce qui distingue les Juifs des autres nations, c’est que leurs oracles sont les seuls véritables : il ne nous est pas permis d’en douter. Ces oracles, qu’ils n’entendent que dans le sens littéral, leur ont prédit cent fois qu’ils seraient les maîtres du monde ; cependant ils n’ont jamais possédé qu’un petit coin de terre pendant quelques années ; ils n’ont pas aujourd’hui un village en propre. Ils doivent donc croire, et ils croient en effet, qu’un jour leurs prédictions s’accompliront, et qu’ils auront l’empire de la terre.

    Ils sont le dernier de tous les peuples parmi les musulmans et les chrétiens, et ils se croient le premier. Cet orgueil dans leur abaissement est justifié par une raison sans réplique : c’est qu’ils sont réellement les pères des chrétiens et des musulmans. Les religions chrétienne et musulmane reconnaissent la juive pour leur mère ; et, par une contradiction singulière, elles ont à la fois pour cette mère du respect et de l’horreur.
  • Fin de citation
Passion de citation
  • Aie le courage d'utiliser ton propre entendement. (Kant)
  • Verba volant, scripta manent.
  • L'espoir est un poison qui vous maintient en vie.
  • Toute cruauté naît de la faiblesse. {Lucio Anneo Seneca}.
  • Nous ne sommes jamais aussi mal protégés contre la souffrance que lorsque nous aimons. (Freud)
  • Ne pas reconnaître ses failles, c’est laisser aux détracteurs le loisir de le faire. (Elodie Bloch)
  • Ce qu'on te reproche, cultive le , c'est toi. (Jean Cocteau)
  • Never argue with stupid people, they will drag you down to their level and then beat you with experience. (Mark Twain)
  • Un seul être vous manque et tout est dépeuplé. (Alphonse de Lamartine)
  • Offrir l'amitié à qui veut l'amour, c'est donner du pain à qui meurt de soif. (Proverbe espagnol)
  • Aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction. (Antoine De Saint-Exupéry)
  • Il ne faut avoir aucun regret pour le passé, aucun remords pour le présent, et une confiance inébranlable pour l'avenir. (Jean Jaurès)
  • La véritable indulgence consiste à comprendre et pardonner les fautes qu'on ne serait pas capable de commettre. (Victor Hugo)
  • Il n'y a point de bonheur sans courage, ni de vertu sans combat. (Jean-Jacques Rousseau)
  • La vie est trop courte pour la passer à regretter tout ce qu'on n'a pas eu le courage de tenter. (Marie-Claude Bussières)
  • L’ignorance porte à croire et à prier, la connaissance à prier de croire. (Willy Bohane)
  • Il faut une encre pour délimiter les proporiétés, ou celle du cadastre, ou le sang. (Willy Bohane)
  • Mes opposants m'instruisent. (Montaigne)
  • Sans la liberté de blâmer, il n'est pas d'éloge flatteur. (Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais)
  • N'aie surtout besoin de personne, personne n'en a besoin. (Need nobody, nobody needs it)
  • je ne partage pas vos idées mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous puissiez les exprimer. (Evelyn Beatrice Hall)
  • Quand je me regarde je me desole, quand je me compare je me console. (Charles-Maurice de Talleyrand)
  • La seule chose qui permet au mal de triompher c'est l'inaction des hommes de bien. (Edmund burk)
  • Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. (François Rabelais)
  • La fatalité c'est l'excuse des âmes sans volonté. (Romain Roland)
Abra-ca-dabra
  • Qui l’eut cru? ce mot, exprimé en araméen et que nous côtoyons depuis l’enfance, depuis que nous jouons au magicien à Pourim, évoque la création narrée dans le tout premier verset de la Torah:

    בראשית, ברא אלוהים, את השמיים, ואת הארץ...

    (Au début, Dieu créa la terre et le ciel).
  • Pour en découvrir le lien avec l’hébreu, il faut tout d’abord en séparer les trois mots: ABRA, CA et DABRA. Et là on s'aperçoit que ABRA dérive du mot BRIA, (

    בריאה

    ), la création avec, entre autre, la conjugaison au passé BARA (

    ברא

    ). Que le mot CA (

    כ

    ) signifie, aujourd’hui encore, “comme” ou “en tant que” comme dans l’expression “CA’RAOUÏ” (dignement, littéralement: comme digne)
    Et enfin que le mot DABRA dérive de la racine DABAR (

    דב”ר

    ) qui signifie “la parole”.

    Ce qui littéralement nous donne: “La création comme la parole” mais dont le sens est “la création découle de la parole” ou “la création en tant que parole”.
  • Il s’agit là bien de magie. Prononcer cette formule, ABRA CA’DABRA pour faire apparaitre des choses comme un magicien semble fortement inspiré de ce premier verset qui, lui aussi, raconte la création du monde, en quelque mots seulement..."Au début, Dieu créa la terre et le ciel!"
  • En plus des prénoms, il existe des dizaines de mots français d'emprunt d'origine hébraïque. Ceux-ci ont été intégrés au lexique des langues d'Europe - dont le français - par l'évangélisation depuis la basse Antiquité et au Moyen-Age, à partir des différentes versions de la Bible, et en ce qui concerne les langues romanes à partir de la Vetus latina ou Vieille Latine, tirée de la Septante, traduction grecque, faite en Égypte sous les Ptolémées, et l'autre, la Vulgate, l'œuvre de Jérôme de Stridon donc bien avant la formation de ces langues, puis par le latin liturgique qui en a lexicalisé un certain nombre.
  • Les emprunts à l'arabe, langue sémitique parente de l'hébreu, ont également permis de retrouver diverses racines hébraïques. Ainsi "almanach" est proche de Mana'h, compter, "chiffre" de Sefer, livre, "mesquin" de Miskén, pauvre...
  • François Rabelais, qui était médecin, a contribué à l'emprunt de plus d'un mot hébraïque vers le français, en particulier kabbale et tohu-bohu, dans son livre Gargantua.
  • Et donc, il est possible de rencontrer de nombreux mots d'origine insoupconnablement hébraïque comme: " alleluia", de l'hébreu biblique הַלְּלוּיָהּ, “louez Dieu”, composé de HALELOU, imprératif du verbe “louer” (

    להלל

    ) et de YA, une des formes toraniques du mot dieu, souvent compris comme une invitation à chanter un hymne religieux, ou le mot "amen", de l'hébreu biblique

    אמן

    , "crois", aussi traduit parfois par "ainsi soit-il".
De l'hébreu dans l'anglais
  • À force d'enseigner l'hébreu, l'anglais, le français et l'italien, j'ai remarqué certaines similitudes orthographiques et syntaxiques surprenantes entre l'hébreu et les autres langues avec un accent particulier sur la grammaire anglaise, dont les exemples suivants ne sont pas exhaustifs:
    1. L'infinitif des verbes hébraïques commence toujours par un LAMED (ל). En outre ce LAMED sert aussi de préposition directionnelle. Il en est de même en anglais. L'infinitif anglais est précédé de la préposition TO (to go, to eat, to see...) et ce même TO sert aussi de préposition directionnelle. (I go to school, he moves to London)
    2. Il existe en hébreu, la possibilité de contracter les locutions qui s'apparentent au "complément de nom". Ainsi la locution "IRYIA SHEL TEL-AVIV" va se contracter en "IRYIAT TEL-AVIV". Cette faculté, désignée par le terme "genitive case" existe aussi en anglais et a exactement la même fonction. Ainsi, "the car of daddy" va pouvoir se contracter en "daddy's car".
    3. L'impératif de la première personne du pluriel (nous), n'existe pas en hébreu. Ainsi la locution "Allons enfants de la patrie", est indicible. Pour avoir un équivalent, il faut utiliser un subterfuge comme le mot HAVA devenu célèbre grace à la fameuse chanson hébraïque "HAVA NAGILA" qui se traduit par "réjouissons-nous". De même en anglais. Il faudra utiliser une formule similaire comme "LET US" pour conjuguer la première personne du pluriel, obtenant ainsi "LET US ENJOY" comme équivalent.
    4. Le verbe POUVOIR n'a pas d'infinitif en anglais, ainsi on ne pourra pas dire "TO CAN" mais seulement "CAN". Et il en est de même en hébreu pour l'équivalent "YAKHAL" qui est le seul verbe à ne pas avoir d'infinitif dans les 3 groupes de verbes actifs.
  • Et puis évidemment, de très nombreux exemples de "glissements" de mots insoupçonnés de l'hébreu vers les autres langues, dont voici quelques spécimens. Dans certains de ces mots, qui ont évidemment le même, ou presque le même, sens dans les deux langues, les consonnes peuvent changer de place pour s'adapter aux différents accents et défauts de prononciation comme la dyslexie (ce phénomène est appelé "metathesis") comme dans l'hébreu DaRGa qui devient GRaDe, ou encore comporter la lettre N, originellement inexistante (phénomène appelé "nasalisation") comme dans l'hébreu ATiK qui devient ANTiQue:
    • EXEMPLE

      עברית

      > français, anglais
    • ------------------------------------------
    • PARASHA (commentaire)

      פרשה

      > prêche, preaches
    • ELITE

      עלית

      > élite, elite
    • MISTORIN

      מסתורין

      > mystère, mystery
    • NIRDAM

      נרדם

      > endormi
    • SIFRA

      סיפרה

      > chiffre
    • MAGNIV

      מגניב

      > magnifique, magnificent
    • DEREG (classement)

      דרג

      > degré, degree
    • DARGA

      דרגה

      > grade, grade
    • ATIK

      עתיק

      > antique, antique
    • ARNAK (bourse)

      ארנק

      > arnaque
    • LEVALBEL (confondre)

      לבלבל

      > bouleverser
    • AVIR

      אויר

      > air, air
    • LEVARER

      לברר

      > avérer/vrai
    • GLIDA

      גלידה

      > glace
    • PEN

      פן

      > peine, penalty, sous-peine de
    • SHEIROUT (service)

      שירות

      > charité, charity
    • OURLA (prépuce)

      עורלה

      > ourlet
    • PIRESH (commenter)

      פירש

      > phrase, phrase
    • MAR

      מר

      > amer
    • LAKA

      לקה

      > ----, lack
    • KHARED

      חרד

      > craindre
    • KOROT (-HAIM)

      קורות-חיים

      > curriculum
    • TOR

      תור

      > tour (:à mon tour)
    • PARATZ

      פרץ

      > une percée
    • MASSEKHA

      מסכה

      > masque
    • PARATZ

      פרץ

      > percée
    • OUVDAH

      עובדה

      > evidence,évidence
    • Fort de ces découvertes, je me mis en quête d'origines plausibles de ces incidences et tombai rapidement sur nombre d'érudits ayant étudié et écrit sur les origines hébraïques de l'anglais. Thèses certes, pas toujours très bien acceptées dans le monde de la linguistique, mais quand même toujours solidement étayées. Il est possible que, par manque de preuves historiques, l'explication d'une telle intrication ne soit jamais mises à jour, nonobstant, sa profondeur reste troublante et dénote, quelque soit sa forme et son époque, une énorme influence de l'hébreu sur certaines langues européennes, et en particulier sur l'anglais.
    • Ils diront que cela ne peut pas être traduit dans notre langue, c'est tellement rude. Ce n'est pas si rude, car ce sont de faux menteurs. . . . Les propriétés de la langue hébraïque s'accordent mille fois plus avec l'anglais qu'avec le latin.
      William Tyndale, Preface to The Obedience of a Christian Man (1528)
    • Avec ces mots, l'érudit protestant du XVème siècle qui parlait parfaitement l'hébreu, le grec, le latin, l'espagnol et le français, William Tyndale signala le début d'une relation spéciale entre la langue hébraïque et anglaise. Sa traduction du Pentateuque en 1530, la toute première traduction anglaise de l'hébreu, constitua le tissu de la Bible du roi James (1611) et donna une qualité hébraïque à la syntaxe et à la phraséologie littéraire et religieuse anglaise sans parallèle dans toute la culture européenne.
    • A la fin du XIXème siècle, Noah Webster, lexicographe, réformateur orthographique, journaliste et écrivain américain, traça dans son dictionnaire "A Compendious Dictionary of the English Language" de nombreux mots anglais outre ceux allemands, français, latins et grecs jusqu’à leur origine sémitique sans que personne ne trouve à redire car tous les érudits de l'époque semblaient être d'accord sur le fait que l'hébreu était bien la langue maternelle.
    • Au XIXème siècle, le chanoine Samuel Lysons, antiquaire précurseur de l'Israélisme Britannique, trouva dans l'anglais plus de 5000 racines hébraïques dont la liste est exposée dans son livre : Nos ancêtres britanniques et publiquement disponible en cliquant le titre. Le WELSH (gallois) aujourd'hui la langue celtique la plus parlée, ressemble tellement à l'hébreu que la même syntaxe peut être utilisée pour les deux., explique-t-il aussi.
    • Dans le cours n° 19 du site www.british-israel j'ai trouvé une autre petite liste de concordances. Intéressante dans le point 4 en particulier, l'origine des terminaisons en "EY" de noms d'endroit, en Ecosse et Irlande, qui viendrait de

      אי

      qui signifie ÎLE en hébreu et qui suggérerait une présence relativement importante de cananéens dans les Iles Britanniques ou tout au moins une influence non indifférente de cette zone méditerranéenne. Il n'existe aucune trace concrète de ce périple mais les indices linguistiques ne peuvent laisser indifférents et leur origine à certainement une raison logique vu que L'anglais est une langue relativement jeune de seulement 1500 ans. Je les reporte ici en langue originale en y ajoutant la racine hébraïque et de façon plus ordonnée que sur le site lui-même:
      • The hebrew word for Festival is "MOED (

        מועד

        )". The annual Scottish Gaelic musical festival is known as the "MOD"
      • Another hebrew word for "Fest" is "CHAG (

        חג

        )". The Scotch and Gaelic dance is called a "JIG".
      • CAIRN is the Irish pronunciation of the hebrew QRN (

        קרן

        ), meaning a "horn" which a CAIRN resembles in appearance. From this root the name of the Irish and Scottish hand-mill, the QUERN is derived; so called because the bottom stone is, at the top, in form of a horn on which the upper stone revolves.
      • Professor Robert Graves in 1855, speaking about an island at the mouth of the Kenmare River in Ireland, said that The obvious and certain derivation of this name is Durs-ey, i.e. the 'Island of Dur', DUR meaning water. The suffix "EY (

        אי

        )" meaning "island" in hebrew is found in many names of British Islands such as Dalkey, Ireland's Eye, Lambay on the Irish coast, Anglesey, Orkney, Eday, Sanday, Bressay, Housay, Neay, Oxney (Isle of Oxen), Stokesay, Sheppey, Colonsay, Oronsay, Bardsey, Lundy, Guernsey, Jersey, Alderney, Menai and Thorney.
      • the English "Rabbit" comes from the Hebrew "ARNBiT (

        ארנבת

        )" (hare), the R and A reversed by metathesis
      • the "Adder", the snake from "ATaR (

        אתר

        )" (to encircle)
      • the "Kitten" from "QuiToN (

        קטן

        )" (a little one)
      • "Camel" from "GaMaL (

        גמך

        )" (camel)
      • "Pig" from "PiGGuL (

        פיגול

        )" (abomination, rottenness)
      • Pelican" from "PeLeG (

        פלג

        )" (a stream)
      • Raven" and "Robin" come from "OReB (

        עורב

        )" (raven)
      • "Crow" or "Rook" from "QRAW (

        קרא

        )" (to call)
      • "Egret" from "AGUR (

        עגור

        )" (a crane)
      • "Crane" from "GaRoN (

        גרון

        )" (a throat)
      • "Swallow" from "SaLO (

        שְׂלָו

        )" (quail)
      • "Eagle" from "AKuL (

        אוכל

        נבלות)" (a devourer)
      • "Fish" from "NePHeSH (

        נפש

        )" (living creature)
      • "Crab" from "AQRaB (

        עקרב

        )" (Scorpion)
      • "Crayfish" from "ECVIS (

        עכביש

        )" (spider)
      • "Moth" from "MEAT (

        מעט

        )" (little)
      • "Worm" from "ORM (

        ערום

        )" (naked)
      • "Gnat" from "NaD (

        מד

        )" (to fly)
      • "Buzz" from "ZEBUB (

        זבוב

        )" (fly)
      • "Branch" from "BRaCH (

        ברח

        )" (to reach across)
      • "Gum" from "GaM (

        גם

        )" (to join together)
      • "Ash" from "ETS (

        עץ

        )" (tree)
      • "Elm" from "ALoN (

        אלון

        )" (an oak)
      • "Cypress" from "GOPHeR (

        גופר

        )" (wood of Noah's ark)
      • "Holly" from "HoLLeL (

        הלל

        )"(pierces")
      • "Cabbage" from "QaBaZH (

        קבץ

        )" (to gather together)
    • Il s'avère qu'un nouveau mouvement appelé «Edenics» affirme que l'anglais moderne est simplement un dérivé de l'hébreu biblique. En fait, les partisans de cette théorie affirment que toutes les langues humaines sont simplement des branches de l'hébreu et prétendent avoir des milliers d'exemples pour le prouver.
    • À première vue, l’idée apparaît absurde. L'anglais et l'hébreu semblent totalement différents et presque tous les mots équivalents sont phonétiquement très éloignés. Par exemple:
      • Chien: Kelev
      • Chat: Khatul
      • Chaise: Kisseh
      • Maison: Bayit
    • En outre, comment une langue européenne moderne créée au cours des derniers millénaires pourrait-elle avoir quelque chose à voir avec une ancienne langue sémitique du Moyen-Orient, établie il y a des milliers d'années? L'anglais est une langue germanique occidentale introduite en Grande-Bretagne par les envahisseurs allemands il y a environ 1500 ans. L'allemand provient du latin, langue italique elle-même dérivée du grec et du phénicien. Ceux-ci, à leur tour, appartiennent à ce qu'on appelle la superfamille indo-européenne. L'hébreu, en revanche, est un dialecte sémitique occidental appartenant à la superfamille afro-asiatiques. En bref, l'anglais et l'hébreu proviennent, selon les schémas classiques et reconnus, de deux sources complètement différentes.
    • D'autre part, si le minuscule israélitisme, un petit culte tribal de la Méditerranée orientale à l'époque de l'Antiquité, fut suffisamment influent pour créer deux grandes religions du monde, le christianisme et l'islam, alors qui sait? Et en effet, une brève enquête sur les documents pertinents semble démontrer que des dizaines, voir des centaines de mots hébraïques partagent une étrange ressemblance.
    • Selon la Bible hébraïque, toute l'humanité parlait une seule langue, jusqu'à ce que "Dieu" confonde leur discours pour les empêcher de construire la tour de Babel. Au cours du siècle dernier, l’establishment linguistique rejeta le mythe d’une langue maternelle unique pour tous les peuples, estimant que les langues se développèrent indépendamment selon les régions du globe. Mais au cours des deux dernières décennies, les choses ont progressivement changé.
    • Le regretté Joseph Greenberg, de l'Université de Stanford, fut le premier à affirmer que des centaines langues apparemment sans rapport, étaient en réalité des dialectes de plusieurs «super-familles» linguistiques. Puis, à la fin des années 1980, le linguiste russe Vitaly V. Shevoroshkin, enseignant à l'Université de Michigan, commença à propager l’idée qu’il existait la preuve d’un seul langage primordial à partir duquel tous les autres étaient dérivés. En fin de compte, toutes les langues, à peut-être quelques exceptions près, sont liées, aurait-il déclaré. Cette pensée se propagea et devint l'école de pensée "Nostratic".
    • Une importante étude analysant plus de 500 langues a récemment été publiée dans les Proceedings of the National Academy of Sciences à l’appui de la théorie. L'étude, co-écrite par le Dr Quentin Atkinson de l'Université d'Auckland et le Dr Mark Pagel de l'Université de Reading, au Royaume-Uni, conclut qu'il existe bien des évidences d'une origine unique du langage, qu'il expose d'ailleurs amplement dans un article du New York Times.
    • Isaac E. Mozeson, conférencier en littérature et judaïque d'origine américaine, est un gourou d'Edenics et se déclare fondateur, chercheur en chef et éditeur de l'idée. Dans deux livres sur le sujet,
      • The word: (1989), dictionnaire qui révèle les racines hébraïques de l'anglais , un livre de 300 pages contenant quelque 20 000 mots liés anglais-hébreu.
      • The Origin of Speeches (2006), dans lequel des mots de plusieurs langues sont connectés à l'hébreu.
    • Il affirme, entre autre, et sans l’approbation de "l’establishment" de la linguistique, que l'hébreu est la racine de toutes les langues et réussit à rassembler une douzaine d'individus venus du monde entier, qui partagent son point de vue. Tous croient à la théorie édénique et cherchent à faire connaître ce qu’ils considèrent être les racines hébraïques de leur langue maternelle. Au total, lui et son équipe affirment avoir cartographié les racines hébraïques de plus de 60.000 mots de dizaines de langues. Le principe maître réside dans la très faible probabilité que deux mots de deux langues différentes avec le même sens comportent les mêmes trois consonnes. (pour 20 consonnes les chances sont égales à 1 sur 8 000 soit (20 x 20 x 20)
      • Eye: Ayin
      • Twin: Teum
      • Tour: Toor
      • Fruit: Feyrot
      • Cry: Kria
      • Evil: Avel
      • Lick: Likek
      • Scale: Shakel
      • Earth: Aretz
      • Wine: Yayin
      • Direction: Derech
      • Source: Shoresh
      • Idea: Yidea
      • Agony: Yagon
      • Regular: Regel
      • Ashamed: Ashem
      • Boor: Bur
      • Yell: Yilel
      • Mirror: Marah
    • Une racine hébraïque peut aussi générer une famille entière de mots, comme c'est souvent le cas en hébreu. Le mot hébreu MONEH (compter, racine MN) en est un exemple. On trouve le dérivé hébraïque maMoN pour l'anglais MoNey ou haMoN pour MaNy, le mot hébreu MiNyan ou les mots anglais MiNus, diMiNish, NuMber et MiNi.
    • La théorie est étendue à d’autres langues. Le mot hébreu DeRech (voie / route) avec sa racine DRH, se trouve également dans "daRoga" (russe), "DeRecho" (espagnol), "DuRch" (allemand) et "DoRo" (japonais). En passant, les lettres DR inversées par la metathesis, donnent le mot anglais RoaD. Ainsi on trouve aussi la racine hébraïque de ShoMeR (gardien) dans le mot japonais SaMuRai (la garde royale de l’empereur).
    • Pour un érudit à la théorie abstruse, la férocité des attaques contre Mozeson semble disproportionnée. Son travail a été qualifié dans les cercles académiques et populaires de "plaisanterie", de "pseudo-science", de "régression fictive", de "honte", de "bêtise", de "flagrante ignorance", de "ridicule" et même de "dangereux". Les critiques de lecteurs d'Amazon l'ont carrément invité à «arrêter immédiatement son travail» et à «laisser la linguistique à de vrais linguistes».
    • Je ne connais aucun universitaire respecté qui accepte la théorie de l’Edenics, écrit par email Mark Liberman, du département de linguistique de l’Université de Pennsylvanie. Liberman qualifie la théorie de Edenics d'étymologie de manivelle. Sa théorie semble être que Dieu était une sorte de pitoyable cryptographe, qui n'a créé aucune langue après Babel, mélangeant simplement les anciennes pour que Mozeson puisse les décrypter, ajoute Liberman. Mozeson n'est pas le premier à exposer des théories excentriques sur l'étymologie. Goropius Becanus, qui émit l’hypothèse que le "brabantic anversois", parlé dans la région située entre l’Escaut et la Meuse, était la langue originale parlée au paradis.
    • Pour Liberman, les connexions de mots trouvées par Mozeson sont principalement des coïncidences. Par exemple, selon le Oxford English Dictionary, le mot "eye" de l'anglais moderne provient du vieil anglais "éage", correspondant à l’âge du frison ancien, du ôga vieux saxon, de l’ouga vieux allemand, de l’auga vieux nordique et de l’augo gothique. En même temps, le "fruit" anglais est issu du l’ancien "fruit" français, et du latin "frūctus". Dans ces cas, les formes antérieures, bien documentées, sont beaucoup moins similaires aux prétendus mots apparentés à l'hébreu. En ce qui concerne ‘vin’, il peut y avoir un lien, mais même s’il existe, la direction n’est pas claire. Des preuves solides issues de l’archéologie et de la biologie ainsi que de la linguistique historique confirment que la théorie de Mozeson n’est pas étayée. En outre, M. Liberman déclare sa méthodologie peut être utilisée pour prouver que toute langue choisie au hasard est parente de toutes les autres langues.
    • Le support le plus important pour le travail de Mozeson est peut-être celui de Cyrus H. Gordon, expert mondialement reconnu en sémiotique et spécialiste des langues anciennes, de la New York University. Dans une note personnelle adressée à Mozeson en 1987, Gordon écrivait: Votre travail est rempli de comparaisons intéressantes - beaucoup d’entre elles sont nouvelles pour moi. Le sujet a une énorme bibliographie... Vous devez savoir que, jusqu'aux siècles récents, l'hébreu en tant que langue d'origine et mère de toutes les langues était un point de vue largement partagé par les intellectuels. Gordon regrettait de ne pouvoir soutenir publiquement les travaux de Mozeson, affirmant qu’une telle démarche mettrait en péril la carrière des étudiants auquels il octroya leur doctorat.
    • En parallèle, certains érudits comme Martin Bernal, professeur émérite d'études sur le Proche-Orient à l'Université Cornell, penchent pour une origine grecque de l'hébreu. Dans son célèbre ouvrage Black Athena - Les racines afro-asiatiques de la civilisation classique (1987), il écrit: J'ai trouvé ce qui me semblait présenter un certain nombre de similitudes frappantes entre l'hébreu et le grec.
    • Cinq ans plus tôt, en 1982, un linguiste autodidacte Joseph Yahuda publie un volume de 680 pages intitulé Hebrew Is Greek. Saul Levin, du Département des langues anciennes de l’Université de New York, en écrit la préface: Le livre de Yahuda fournit une preuve accablante que l’hébreu biblique est un grec camouflé
    • L'un n’empêche pas l'autre. L'Hébreu peut très bien avoir amplement participer à l'élaboration de langues européennes tout en étant d'origine grecque. La naissance de l'israélitisme sur les Hautes Terres de Canaan au beau milieu de populations cananéennes, phéniciennes, philistines et assyriennes, elles-même fortement imprégnées de la culture grecque, implique que l'hébreu ne soit pas un dialecte né de nulle part.
    • Quant à une présence cananéenne/judéenne sur les Iles Britaniques, elle n'est pas impossible. L'exil d'une partie des judéens après la chute du premier temple n'exclut aucunement la migration d'une autre partie de cette population malmenée vers des terres moins tourmentées et peut-être, qui sait, promises à une certaine quiétude. Il n'est pas non plus absurde que l'influence de l'hébreu sur l'anglais, le latin et les langues qui en dérivent soit aussi, en partie, d'ordre strictement religieux. Les églises avaient une influence notoire sur la population à l'époque et l'utilisation de certains termes hébraïques dans les prêches, les conversations ou les cours de religion on pu aussi jouer un rôle déterminant dans cette infiltration.
Israël-Palestine
Le Faux Peuple
  • Le peuple juif n'est plus un peuple depuis l’année -586, ( d'Israël à l'Etat d'Israël ) soit depuis la destruction du Premier Temple et l’exil à Babylone imposé par Nabuchodonosor, événement qui marque l'extinction de l'hébreu parlé, la cessation du culte sacrificiel, une pratique centrée sur la lecture de la Torah, l'apparition de la synagogue qui transforme les rites israélites en religion.
  • Ce n’est pas parce que ce peuple est nommé en tant que tel dans la Bible (Ancien Testament) et que celle-ci est lue quotidiennement par des millions de fidèles, que ce peuple existe encore, sauf peut-être dans les représentations ancrées, légendaires ou intéressées de certains milieux religieux, politiques ou communautaires.
  • La définition d’un peuple n’est ni unique ni simple. Là encore il faut se doter de bon sens et d'honnêteté intellectuelle pour s’accorder sur celle qui sied le mieux à l’observation. Lorsque la définition d’un concept est si largement controversée, il semble que la factualité soit le meilleur des choix. Un peuple, dans le langage et la pensée commune, semble donc être ce que l'on voit sur ces photos de supporters du Mondial de foot où l'on retrouve tous les attributs visibles de l’idée de peuple: langage commun, symboles partagés, couleurs et maquillage, territoire symbolique (le stade), et surtout un sentiment collectif incarné:
    image indisponible image indisponible image indisponible image indisponible image indisponible image indisponible image indisponible image indisponible
  • Il suffit de consulter la prestigieuse fiche du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales pour constater que la définition de ce mot est tout sauf unanime. Il n'en demeure pas moins que celle choisie par cette institution reste très proche de celle proposée par mes exemples photographiques, soit:
    Ensemble des humains vivant en société sur un territoire déterminé et qui, ayant parfois une communauté d'origine, présentent une homogénéité relative de civilisation et sont liés par un certain nombre de coutumes et d'institutions communes.
  • On pourrait disserter des heures et des pages sur le sujet sans pour autant pouvoir s'éloigner outre mesure de la logique empirique qui veut que, quelle que soit la couleur de peau ou l'origine de ses membres, le peuple est uni par une langue, un territoire, des mœurs et/ou des lois. Bien sûr, certains courants défendent l’idée d’un peuple déterritorialisé ou symbolique, mais cette logique ne s’embarrasse pas de récits fondateurs: sans sol ni langue partagée, le terme perd son ancrage.
  • L'exil des Israélites à Babylone, lui aussi contesté par certains historiens comme Shlomo Sand, historien israélien et auteur de l'ouvrage Comment le peuple juif fut inventé ou par Ben Gourion lui-même selon ce même auteur, serait éventuellement remplacé par une vague de mélanges ethniques entre les Israélites et les nombreux autres peuples présents dans la région. Mais techniquement, cela ne change absolument rien à la trace laissée par l'Histoire puisque le résultat reste le démantèlement de ce peuple, 'AM' en hébreu. Nonobstant, il faut comprendre que ce terme désignait à l'époque tout groupe de personnes, toute population d'une agglomération ou toute communauté aux moeurs définies. C'est le mot utilisé dans la Torah et qui apparaît pour la première fois dans le verset Pentateuque Genèse ch. 11, v. 6 pour désigner le peuple de Babel. L'idée de peuple est décrite dans le verset lui-même:
    Voici un peuple uni, tous ayant une même langue,
    qui implique que pour les Israélites eux-mêmes, la notion de peuple était clairement et étroitement liée à un territoire et une langue.
  • jamais souvereine
  • Bien qu'une population israélite, si restreinte soit-elle, fut toujours présente en Judée puis en Palestine, il est clair qu’elle demeura, tout au long des siècles et ce, jusqu’à la création de l’État d'Israël, une communauté soumise aux autorités régnantes, sans aucune souveraineté sur les territoires qu’elle habitait. ( d'Israël à l'Etat d'Israël )
  • À l’épreuve de la Shoah, les communautés juives diasporiques, dispersées et privées de structure unifiée, ont peiné à réagir comme un ensemble organisé. Ce manque de coordination — dû à des conditions historiques tragiques plus qu’à une carence identitaire — soulève la question : qu’est-ce qu’un peuple qui ne peut se défendre comme tel? Les Anglais, connus pour leur pragmatisme, disent: if it looks like a duck, swims like a duck, and quacks like a duck, then it probably is a duck ( S*il ressemble à un canard, nage comme un canard et cancane comme un canard, alors c*est probablement un canard ) . De même, si les Juifs ne vivent pas en peuple, ne s'organisent pas en peuple et ne réagissent pas en peuple, c'est probablement qu'ils ne sont pas un peuple ou du moins, pas selon les critères classiques qui fondent cette notion dans l’Histoire.
  • Tous ne sont pas dupes. Certains, récusent la souveraineté d'Israël sur son territoire actuel. C’est le cas, entre autres, de la Cour Pénale Internationale qui, je cite, propose de transformer le droit des Juifs de vivre en Israël biblique en crime de guerre. Malheureusement, les Israélites ignorent leur véritable histoire et défendent corps et âme ce qu’ils en connaissent. Non seulement ils l'ignorent mais lorsque des études comme la Bible dévoilée sont publiées et qu’elles devraient, tel un ras de marée, bousculer la pensée commune et réactualiser quelque concept douteux, elles se heurtent au fanatisme des uns et au laxisme des autres, qui, convaincus de la fausseté des nouveaux propos, n’hésitent pas à traiter leurs auteurs de révisionnistes. Mais dans le mauvais sens du terme en fait, car RÉ-visionner est exactement ce qu’il faut faire pour découvrir les vérités enfouies par les millénaires d’imposture.
  • Les terribles dommages de la fausse identité
  • L’ignorance, le fanatisme religieux et le biais de confirmation sont donc les boucliers sans faille qui refoulent toute tentative d’actualisation de la bien-pensance israélienne et relèguent un État relativement nouveau comme Israël aux turpitudes moyenâgeuses avec une constitution, certes démocratique, mais fondée sur des règles bibliques, soit millénaires, aux conséquences identitaires et humanitaires désastreuses. Le monde moderne et républicain cherche à se séparer de ses fantômes du passé et Israël, fondé par des laïcs et des athées, se laisse, dès sa naissance et par le biais d'une trahison imprévue, prendre au piège de l’intégrisme religieux avant même qu’il ne soit inventé.
  • la trahison de Ben Gourion
  • Ce dommage, qui préside au radicalisme religieux propre à l'Israël d'aujourd'hui, arrive directement du sommet de la pyramide. Le destin de l'État d'Israël, avant sa déclaration, était laïque. La religion étatique et administrative (respect du shabbat, nourriture casher...) fut imposée à Ben Gourion lui-même par les orthodoxes étasuniens comme condition sine qua non de l'appui qu'il leur demanda, craignant un manque de population pour la création du nouvel État. Ainsi, Ben Gourion — dans une logique de compromis stratégique et démographique — consent à inclure la loi religieuse dans les fondements du futur État, offrant aux partis religieux un pouvoir disproportionné dont l’empreinte se fait encore sentir aujourd’hui. Ce faisant, il trahit le destin laïque de cette nouvelle nation ainsi que ses collaborateurs et ses comparses, tous majoritairement athées, puisqu'à leurs yeux, Dieu ne les avait pas épargnés de la fureur nazie.
  • la déclaration de l'ONU
  • Un autre dommage lourd de conséquences, sans doute, fut-il d'accepter que l'indemnisation des populations touchées par la Seconde Guerre se transforme, pour les Juifs, en un État. Car en fait, c'est bien de cela qu'il s'agit: de Juifs confortablement installés dans leurs nations respectives depuis deux millénaires qui ne connaissent ni ne savent rien des Israélites d'antan et qui, malgré eux, reçoivent un État comme compensation de leurs souffrances. Résultat des courses, on octroie un faux pays à un faux peuple.
    • Faux pays, car la Palestine, qui sort d’une longue histoire multi-ethnique tumultueuse et d’un mandat britannique agité se voit, sans avoir fauté le moins du monde, déchus de l’exclusivité sur son territoire et soumise aux souffrances et discrimination infligées par une population juive immigrée perçue comme un fardeau, agressive et vengeresse et, c’est le cas de le dire, marquée à blanc par horreurs de la Shoah. La rencontre de ces populations ne pouvait que déboucher, malgré les recommandations de Balfour de préserver les populations autochtones, sur la suite regrettable que nous connaissons. ( Mea Culpa ).
    • Faux peuple, car la naissance du narratif national issu de la sempiternelle répétition - presque 1 million de fois - au cours des offices religieux quotidiens des 2400 années (plus de 2 millénaires) qui précédèrent la Shoah, racontait aux fidèles en qu’ils étaient un peuple. Ce serinement est à l'origine du gouffre idéologique qui, depuis, conduit l'État d'Israël dans une croisade sans précédent pour prouver au monde que les Juifs sont une nation alors que cette distinction archaïque n’est plus légalement applicable à la religion qu’est devenu le judaïsme et ce, malgré les revendications post-génocidaires sans doute légitimes quoiqu'une spiritualité transnationale n'ait rien à voir avec le patriotisme.
  • négation de la nationalité
  • Autre dommage, et pas des moindres, impliqué par la fausse identité de la communauté juive, la confusion identitaire des israéliens qui, aux yeux de la cour suprême et donc du gouvernement lui-même, n’ont pas droit à la nationalité israélienne. En effet, la nationalité, en Israël, n’est bizarrement pas déterminée par le territoire de la nation mais bien par la religion ou l'origine ethnique de chacun: les Israéliens sont considérés 'citoyens' d'Israël mais de 'nationalité' juive pour les Juifs, sinon arabes, druzes, chrétiens etc... La mention de cette 'nationalité', le’om' (לאום), désigne donc non pas une citoyenneté juridique mais une appartenance ethnoreligieuse ou nationale au sens identitaire. Elle n'apparaît plus automatiquement sur les cartes d’identité depuis 2002 mais un extrait du registre peut-être envoyé à chacun sur demande.
    ma première carte d'identité de 1969 avec la mention - Juif - en hébreu comme nationalité
  • Bref, on l’aura compris : une part de l’intelligentsia israélienne semble encore guidée par des principes d’un autre âge, imprégnés de traditions bibliques rigides et de logiques identitaires d’un autre temps. Difficile, dans ce contexte, d’accepter que les 'Israélites' d’aujourd’hui ne forment plus ce peuple-ethnie homogène que les grands empires de l’Antiquité — égyptien, assyrien, perse, romain ou ottoman — avaient asservi ou dispersé.
  • traductions normales
    Et cela transparaît jusque dans les documents officiels comme le passeport où le mot 'Nationality' (à gauche sur la photo) est volontairement mal traduit dans la partie hébraïque par 'אזרחות' qui signifie 'citoyenneté'. Choix délibéré, puisque la Nationalité est réservée à l'inexistante nation juive revendiquée par l’Etat d'Israël : la bureaucratie elle-même donc, est imprégnée de ce récit fondateur, où l’identité religieuse prévaut sur la définition civique qui, il y a deux millénaires n'était celle d’aujourd’hui.
    passeport israélien. Nationality est traduit pas Citoyenneté
    Et ce flou ne s’arrête pas à la terminologie. La démarche israélienne conserve, en filigrane, une obsession antique pour le recensement ethnique. L’'appartenance' reste un critère déclaré et structurant. Dans la plupart des démocraties modernes, le recensement ethnique est un tabou, précisément pour éviter les dérives qui, jadis, nourrirent les pires régimes. En Israël, ce tabou ne s’est jamais vraiment imposé. On connaît la répartition. On la surveille. On l’anticipe. Et cela dit tout de la tension d'une population moderne dans un État aux us et réflexes ancestraux.
  • Le 2 octobre 2013, la Cour Suprême rendit une décision à ce propos dans l’affaire civile 8573/08 Uzi Ornan/Ministère de l’Intérieur, mettant fin à une bataille juridique de dix ans. L’arrêt traite du droit des appelants à l’autodétermination et à la détermination nationale, qui s’exprime dans le changement de la nationalité dans le registre de la population de Juif à Israélien, et il réitère ce qui fut jugé dans l’arrêt précédent, pour les mêmes motifs, de Tamarin/Ministère de l’Intérieur, à savoir, qu’il n’y a pas de nation israélienne séparée d’une nation juive, que l’existence d’une nation israélienne n’a pas été prouvée par des critères objectifs, et que depuis l’arrêt Tamarin, aucune nationalité israélienne ne s’est développée en Israël sur le plan factuel ou juridique. ette décision, qui choque une partie de l’opinion publique israélienne, montre à quel point l’appareil juridique lui-même reste prisonnier de la définition religieuse de l’identité nationale, au détriment d’un projet de citoyenneté commune.
  • Je ne suis pas sûr que les juges qui établirent cette sentence - l’existence d’une nation israélienne n’a pas été prouvée par des critères objectifs - soient totalement sains d'esprit et aptes à l'exercice de leur fonction. Elle semble grotesque et ridicule tant elle nie la réalité empirique: celle d’un peuple d’hommes et de femmes, vivant, parlant, votant, priant (ou non), sous un même drapeau, sur une même terre. Et pourtant, pour ces juges à l’esprit partial dévié par des croyances d'un autre temps, cela ne semble pas suffir.
  • la méprise des Israéliens
  • Le problème des Israéliens aujourd'hui n’est pas le clivage de la religion. Ce que personne ne voit — ou ne veut voir — c’est qu’ils prêchent tous, à leur insu, pour la même paroisse. Bien que ce slogan appartienne historiquement aux partis religieux, à la question 'voulez-vous un pays juif ?', la réponse, à gauche comme à droite, croyante ou sceptique, est: 'oui'. Ce consensus massif ne relève plus d’un choix politique, mais d’un lien presque génétique — une 'force forte' nationale qui, comme dans le noyau d'un atome, empêche toute séparation sans implosion. (De cette question, j'en ai fait personnellement l'expérience ainsi que mon cheval de Troie pour pénétrer et découvrir le quiproquo.)
  • Ils continuent donc de se bouffer le nez sans comprendre pourquoi, bizarrement, le gouvernement ne tombe pas, pourquoi les soldats continuent de se battre avec ferveur, pourquoi les pilotes ne désobéissent plus, où comment la nation court vers son destin de combattante éternelle, libératrice de l’oppression nucléaire, son destin de Jeanne d’Arc du Moyen-Orient, en quelque sorte.
  • Le problème? Cette entente tacite ne peut mener qu’à une solution fasciste, soit autoritaire et discriminatoire. Et les gens qui supportent Israël, les amis et les Etats amis, ceux qui se souviennent de la Shoah et la considèrent comme un droit légitime autant qu’un passeport indéniable pour la liberté ne se rendent pas compte qu'ils ne défendent plus une minorité méritoire parce que discriminée par les nazis, mais une nation juive qui, même si elle a dorénavant le droit d'exister, évoque par sa seule définition, la différence, le séparatisme et tous les ingrédients propres aux plats déjà servis par les théocraties totalitaires qui foisonnent dans la région.
  • Israël est encore une démocratie, certes et elle pourra le rester tant que tous ses habitants seront convaincus du bien-fondé de sa raison d'être un pays juif. Mais je préfère un pays juif n’est pas une phrase anodine. Elle sous-entend, pour conserver une population majoritairement juive et un gouvernement juif, que les quotas de populations étrangères devront être réglementés, que les mariages ne pourront pas être trop mixtes, que le nombre des parlementaires juifs devra rester dominant, que celui des ministres aussi, ainsi que celui des généraux si toutefois, les non-juifs accédaient à ce niveau de commandement et puis que... que... que...
  • Cette phrase, je préfère un pays juif, rappelle quelque part: je préfère la race aryenne, un souvenir exécrable, semble-t-il.
  • Alors, si quelqu’un voulait se donner la peine d'éclairer ma lanterne, de me démontrer que j’ai tort, qu'Israël, tout en persistant dans l’idée d’une population juive dominante, ne deviendra pas un pays comme l’Iran, le Qatar ou l’Arabie Saoudite, je suis client. Pour l’instant, ce pays est bien parti, avec son énième conflit ( Mea Culpa ) pour continuer une croisade initiée il y a près de 80 ans et sacrifier ses fils au vent de la haine et de la désolation comme le faisait déjà l'Israël antique avec ses conflits identitaires contre les autorités des empires qui l'assujettissait. ( d'Israël à l'Etat d'Israël )
Mea Culpa
  • Lorsqu’une plaie suppure sans relâche, comme en témoigne l’interminable litanie des conflits ayant marqué l’histoire israélo-palestinienne, c’est que les conditions de sa guérison ne sont toujours pas réunies. Il ne suffit plus de panser les blessures en surface, c’est au plus profond du tissu sociétal et politique qu’il faut sonder les racines du mal.
  • les conflits
  • Guerre israélo-arabe de 1948-1949 (Première guerre israélo-arabe)
  • Crise du canal de Suez (1956)
  • Guerre des Six Jours (1967)
  • Guerre d'usure (1967-1970)
  • Guerre du Kippour (1973)
  • Opération Litani (1978)
  • Première guerre du Liban (1982-1985)
  • Conflit israélo-libanais de 2006
  • Première intifada (1987-1993)
  • Seconde intifada (2000-2005)
  • Marche du retour (2018-2019)
  • Opération Raisins de la colère (1996)
  • Opération Arc-en-ciel (2004)
  • Opération Jours de pénitence (2004)
  • Opération Pluies d'été (2006)
  • Guerre de Gaza (2008-2009)
  • Opération Pilier de défense (2012)
  • Guerre de Gaza (2014)
  • Crise israélo-palestinienne (2021)
  • Opération Aube naissante (2022)
  • Guerre Israël-Hamas (depuis 2023)
  • Tensions en Cisjordanie et attaques de colons (2023–2025)
  • Affrontement Israël-Iran (juin 2025) [conflit en cours/non résolu]
  • Abordage de la flottille pour Gaza (2010)
  • Blocus de la bande de Gaza (2007-présent)
  • L’examen de conscience est un exercice douloureux, souvent éludé, mais fondamental. À ce titre, il me semble important que chaque peuple — quels que soient ses héritages ou ses croyances — engage cette démarche avec lucidité et courage. Les communautés porteuses d’une mémoire à la fois glorieuse et blessée, comme le peuple juif, sont peut-être encore plus appelées à initier ce mouvement d’introspection, non dans le reniement, mais dans une volonté de clarification. Il ne s’agit nullement de nier les persécutions passées, ni de minimiser la réalité de l’antisémitisme ou des violences subies. Il s’agit de ne pas s’y réduire, de refuser l’enfermement dans une posture de victime perpétuelle. Les responsabilités historiques ne se dissolvent pas dans l’accusation systématique de l’autre — qu’il soit musulman, chrétien, allemand, ou journaliste — pas plus qu’elles ne s’éteignent dans la dénonciation du fascisme ou de l’antisionisme. Nombreux sont ceux, issus de groupes longtemps marginalisés, qui ont su embrasser les exigences de la citoyenneté tout en préservant leur identité. Barack Obama, Rachida Dati, Volodymyr Zelensky et d’autres ont démontré qu’il est possible de s’élever sans se retrancher, d’être minoritaire sans se victimiser. Il est temps, peut-être, de s’interroger sur la persistance d’un récit où l’on est toujours menacé — car lorsqu’une plainte traverse les siècles sans se tarir, c’est parfois le signe d’un mal que l’on n’a pas osé nommer en soi.
  • Lorsque, le 7 octobre 2023, une telle fureur s’abat sur Israël, nul ne saurait en minimiser l’atrocité ni la barbarie. Cette déferlante de violence, inexcusable et inhumaine, ne saurait être le fruit de l’esprit, mais plutôt l’œuvre de bêtes enragées, ivres de sang. Et pourtant, au-delà du crime, elle révèle un symptôme plus vaste : celui d’un échec cuisant, que nul ne peut continuer de nier. Car face à l’échec, les condamnations, aussi légitimes soient-elles, ne suffisent pas. Il faut avoir le courage d’envisager les causes, de se poser les questions qui dérangent — celles qui réveillent, celles qui soignent. Autrement, la plaie béante continuera d’engloutir la vie, jusqu’à l’épuisement des corps… et des âmes.
  • À l’heure où tombent, encore et toujours, des enfants, des proches, des innocents pris dans l’embrasement perpétuel des conflits, l’heure n’est plus aux slogans ni aux paravents. L’introspection, désormais, est une nécessité vitale. Il faut avoir le courage de se demander si la haine qui s’abat avec tant de constance sur les Juifs est toujours le fruit du seul arbitraire. Est-elle, dans son entièreté, gratuite et infondée ? Ou bien existe-t-il, au cœur du ressenti des peuples, des douleurs anciennes, des perceptions mal digérées, des réactions déformées par le temps… qui mériteraient d’être écoutées et comprises — non pour être validées, mais pour être dépassées ?
  • Les pogroms qui émaillèrent la fin du XIXe siècle ne trouvent pas uniquement racine dans un antisémitisme religieux séculaire. Ils furent souvent précipités par des tensions économiques profondes, des ressentiments sociaux et des rivalités de territoire ou de métier. En Europe de l’Est, certains conflits naquirent de relations marchandes déséquilibrées : des paysans surendettés auprès de commerçants juifs, ou encore des bailleurs d’arenda, parfois juifs eux aussi, exploitant durement la main-d'œuvre locale. Ces dynamiques, bien que complexes et spécifiques à leur époque, ont contribué à enflammer des colères populaires que d’autres ont su instrumentaliser. Lorsque l’on cherche à comprendre les origines de ces violences, on trouve bien sûr la haine religieuse, mais aussi des récits où les Juifs sont présentés non plus uniquement comme victimes, mais comme acteurs d’un système inégalitaire. Ainsi, en 1862, un pogrom éclata à Akkerman, dans l’actuelle Ukraine, fomenté par des Grecs, concurrents commerciaux directs des Juifs. À Odessa ce furent des marchands grecs qui, redoutant de perdre leur contrôle sur les banques et l’exportation, organisèrent les attaques.
  • Ces Juifs-là, dans leur position sociale et économique d’alors, n’ont sans doute guère œuvré à susciter la sympathie de leurs voisins ou de leurs employés. Cela n’en fait pas les coupables des violences qu’ils ont subies, mais force est de constater qu’une coexistence pacifique suppose, de part et d’autre, des gestes de rapprochement. Or, il est difficile de tisser des liens quand un groupe minoritaire, fût-ce pour préserver ses traditions ou sa sécurité, vit en retrait, séparé, et se distingue nettement par ses tenues, ses rites ou ses mœurs. Dans de tels contextes, la différence devient parfois un marqueur involontaire d’hostilité pour les autres, et c’est là que naît l’incompréhension, parfois l’animosité — non excusable, mais explicable.
    Gravure antisémite polonaise du xixe siècle
    Au même titre que l’on ne programmerait pas une rave de 4 000 participants à quelques kilomètres d’une enclave sous blocus, peuplée d’une population meurtrie et, par conséquent, farouchement hostile, certaines attitudes relèvent d’une forme d’inconscience.
    Ainsi, ce souvenir rapporté par un ami cher, évoquant son père emprisonné pour avoir affiché son sionisme dans la Roumanie soviétique, m’a profondément marqué. Il me contait ce fait avec une stupeur sincère, presque ingénue. « Mais être ouvertement sioniste en Roumanie soviétique était-ce réellement une posture à afficher sans crainte ? » lui demandai-je. Il me regarda comme s’il venait d’apercevoir E.T., puis me répondit avec aplomb : « Mais enfin, il n’était que sioniste. Il n’avait pas à être emprisonné ni à y mourir d’une crise cardiaque. »
    Cette désinvolture dans la stupéfaction, cette certitude tranquille d’être du bon côté de l’Histoire en tant que victime, conforta en moi l’idée qu’il existe, chez beaucoup de Juifs — et je m’inclus dans ce nous — une perte de discernement dès lors qu’il s’agit d’évaluer certains contextes historiques ou géopolitiques. Dans l’esprit de cet homme, son père était juif, donc légitimement sioniste, donc autorisé à l’exprimer pleinement — fût-ce au cœur d’un régime totalitaire. C’était là, sans qu’il le réalise, une forme d’outrecuidance pure : innocente, involontaire sans doute, mais symptomatique de ce travers qui nous habite parfois. Une certitude d’être dans son bon droit, quelles que soient les circonstances. Un mal discret, profond, enraciné, et d’autant plus difficile à déloger qu’il est porté, souvent, par la conviction de l’innocence.
  • Au-delà d’un certain seuil, l’outrecuidance cesse d’être seulement aveuglement : elle devient un danger. Lorsqu’un colon de Judée-Samarie affirme sur les ondes de France Info que « Dieu lui a donné cette terre » et que « les Palestiniens ne rêvent que de le tuer », ce n’est plus seulement une opinion — c’est un indicateur alarmant d’un détachement radical de toute réalité partagée. Il ne s’agit plus de foi intime, de recueillement ou de quête spirituelle, mais d’un glissement vers un absolutisme religieux qui frôle l’irrationnel, voire la pathologie.
    Certes, de telles paroles ne sont pas nouvelles chez certains groupes extrémistes, et peut-être s’est-on accoutumé à les entendre sans les questionner. Mais là où le déni devient systématique, où la conviction d’être persécuté annule toute remise en question, il devient légitime de s’interroger sur les facultés de discernement de ceux qui les professent — surtout lorsqu’ils détiennent pouvoir ou influence.
    Et lorsqu’en Cisjordanie, depuis le début des affrontements avec le Hamas, des colons abattent des Palestiniens sans être inquiétés, il faut se demander si cette violence impunie n’est pas encouragée, ou du moins tolérée, par une hiérarchie civile et militaire partageant les mêmes visions déconnectées. Là encore, c’est moins la foi que son instrumentalisation qui doit nous inquiéter.
  • Pour nombre d’êtres humains, l’outrecuidance n’est pas qu’un travers agaçant : elle agit comme une véritable torture psychologique. Elle génère frustration, jalousie, exclusion, jusqu’à cette forme de mépris muet qui, à force d’être refoulé, devient poison. Et lorsqu’elle traverse les siècles sans jamais se taire — lorsqu’un peuple, pendant deux millénaires, est désigné comme le meurtrier du Christ, jusqu’à ce que Vatican II vienne enfin lever ce fardeau théologique — alors il faut imaginer ce que cette stigmatisation a pu produire comme cicatrices inversées : non plus sur les victimes, mais dans le cœur de ceux qui les regardaient.
    C’est là le danger, sournois mais réel: croire que ces ressentis n’ont pas d’impact, qu’ils n’ont aucune puissance de destruction. Or, l’histoire nous enseigne l’inverse. Il suffit de songer à l’indicible de la Shoah. Ou, plus près de nous, à ce 7 octobre où des hommes, débordés de haine, sont entrés dans des maisons israéliennes pour y massacrer des civils — enfants, femmes, vieillards — à mains nues, comme s’ils vengeaient une blessure trop ancienne, trop profonde. Ceux qui ont connu ce que l’on appelle la torture mentale savent à quel point ces douleurs silencieuses, si elles fermentent assez longtemps, peuvent engendrer les pires folies.
  • Il serait salutaire, aujourd’hui, de rompre avec l’image d’arrogance et de prétention que certains attribuent encore au peuple juif — une représentation qui trouve parfois ses racines dans la transmission, à travers les âges, de récits anciens. La Torah, texte fondamental et remarquable de l’Antiquité, a traversé les siècles avec force… mais aussi avec sa part d’ombres. Lorsque le christianisme en a fait l’Ancien Testament et l’a diffusé à des milliards d’âmes par la force du dogme et du zèle missionnaire, certains de ses passages les plus violents, les plus implacables, ont façonné des imaginaires collectifs durables. Le Dieu de colère, les injonctions guerrières, les châtiments exemplaires ont fini, parfois, par déteindre sur l’image du peuple qui transmit ces textes.
    Cela pose une question légitime: est-ce bien le rôle d’une religion de nourrir, génération après génération, une parole sacrée sans toujours en interroger la portée symbolique, éthique ou politique? [histoire] Dans une époque où l’on investit des fortunes pour filtrer les discours toxiques sur les réseaux sociaux, ne serait-il pas temps, aussi, de questionner certaines formes de tradition lorsque, sorties de leur époque, elles sont mal comprises et nourrissent, malgré elles, des malentendus persistants?
  • Dès lors que l'on déleste l'administration d'un pays moderne comme Israël du lourd carcan de préceptes millénaires, qu'on reconnaît l'arrogance de certaines postures, les fautes, les péchés d'orgueil, les méfaits ou le mépris institutionnel, la rédemption devient accessible. Car lorsqu’un peuple assume ses torts et les blessures qu’ils ont infligées, lorsqu’il accepte d’en payer le prix — moral, symbolique, voire matériel — il ne s’affaiblit pas : il grandit. Il se donne alors la chance d’ouvrir, vraiment, les portes du changement et de la réconciliation. Sans pour autant pardonner la barbarie du Hamas et du terrorisme en général, n’oublions pas que "ne pas reconnaître ses propres failles, c’est laisser aux détracteurs le loisir de le faire".
  • N’oublions pas que dès la fin du XIXe siècle, toutes les tentatives de fonder un État juif se soldèrent par des échecs. [Israël:1890]
  • N’oublions pas que la communauté israélite établie en Palestine avant 1948 ne fut jamais souveraine sur ce territoire. [faux peuple:jamais souvereine]
  • N’oublions pas non plus que la Déclaration Balfour engageait expressément à préserver les droits civils et religieux des populations autochtones, condition sine qua non de son application.
  • N’oublions pas que le projet initial d’Israël était celui d’un État laïque [faux peuple:la trahison de Ben Gurion], et que l’évolution actuelle vers un pouvoir largement influencé par les intégrismes religieux s’éloigne dangereusement de cette promesse fondatrice.
  • N’oublions pas, enfin que les territoires occupés depuis 1967 l’étaient, à l’origine, en vue d’un échange favorisant la paix — non pour nourrir un impérialisme teinté de mystique territoriale.
  • Quelles que soient ces ombres portées, il demeure aujourd’hui inenvisageable de nier l’existence d’Israël. Qu’on le veuille ou non, l’État est là, consolidé, reconnu, vivant. Mais c’est précisément pour cela — pour ce qu’il est devenu — qu’on peut attendre de lui une parole d’apaisement, un geste d’amende honorable, comme celui que fit l’Église catholique avec Vatican II, portée par Jean-Paul II et le cardinal Lustiger.
    Reconnaître la Palestine, indemniser les familles expulsées ou lésées selon les préjudices subis, partager la ville de Jérusalem dans sa dimension plurimillénaire — voilà des actes qui, loin d’affaiblir Israël, l’élèveraient moralement. Car avant d’être Palestiniens, ces hommes et ces femmes furent Philistins, présents bien avant l’émergence du récit biblique. Une communauté persécutée ne devrait jamais, à son tour, devenir la cause de l’errance ou de l’humiliation d’un autre peuple.
    Ces gestes, s’ils devaient voir le jour, porteraient une parole rare en politique : celle des regrets profonds. Ils pourraient être le socle d’une paix durable, avec ces voisins de toujours dont on partage moins les frontières que le destin.
  • Car toute réconciliation véritable commence par la lucidité, puis par l’humilité. Il ne s’agit pas de renier son histoire, ni de désarmer sa mémoire, mais de comprendre que la vérité ne se partage qu’à condition d’abord d’être reconnue. Aucun peuple n’échappe à l’erreur, aucun État à la dérive, aucun récit collectif à ses zones d’ombre. Il y a des douleurs que l’on hérite, et d’autres que l’on inflige. Refuser d’en répondre revient à perpétuer leur cycle.
    Le courage politique n’est pas dans le silence armé, mais dans la parole déposée. Israël a désormais les moyens de s’imposer non par la crainte, mais par la grandeur. Et la grandeur ne réside pas dans la domination — elle réside dans la capacité à dire : j’ai failli, mais je me relève.
    Ainsi naissent les paix durables. Ainsi naissent les mémoires apaisées. Et peut-être alors, pour la première fois depuis des siècles, le mot justice pourra être murmuré des deux côtés du mur — sans colère, sans rancune… mais avec un soupçon d’espérance.
Le radicalisme du répit
  • Pendant que le tumulte se taisait, d’autres forces germèrent. Comme quoi, le calme est parfois camouflage, cet épisode en témoigne.
  • Le 7 octobre 2023, dans une sinistre coïncidence de l’Histoire, une attaque terroriste d’une violence inédite fauchait la quiétude illusoire d’Israël — exactement cinquante ans jour pour jour après la guerre de Kippour. Et si cette tragédie, malgré son prix exorbitant en vies humaines, avait empêché une autre forme d’effondrement? Une guerre — non pas contre un ennemi extérieur, mais contre soi-même. Car à l’heure où la nation israélienne se déchirait déjà sous l’effet d’un néo-radicalisme triomphant né des dernières élections, l’hypothèse d’une guerre civile, fratricide et sanglante, n’était plus de l’ordre du fantasme. Peut-être, alors, ce 7 octobre fut-il — par un renversement cruel — non le début du chaos, mais la suspension d’un autre.
  • Plus de sept décennies s'écoulèrent depuis les décombres de la Seconde Guerre mondiale et la naissance de l’État d’Israël. Et dans ce laps de temps, la peur séculaire du Juif pourchassé semble s’être, sinon dissipée, du moins déplacée. La puissance militaire, diplomatique et symbolique d’Israël offrit ce répit — physique, politique, morale — à cette chasse immémoriale, donnant inopinément du champ à la foi. La religion, libérée du réflexe de survie, se remit à prospérer, à irriguer les questionnements identitaires en sommeil.
    Dans la diaspora, la judéité — l'appartenance à la communeauté juive — elle-même se retrouva face à une étrange vacance. Que reste-t-il de la conscience d’être juif lorsque l'accusation et la menace sont levées? Lorsque le combat quotidien pour la survie ne donne plus corps à son appartenance, la question se pose avec acuité: suis-je encore juif, ou seulement descendant de ce que je ne vis plus? Et que vaut, dans ce contexte, ma judaïté — cette manière d’être juif au quotidien — si elle ne s’inscrit plus dans la lutte ou d’enracinement?
  • Ce questionnement, profond, intime, tira nombre de Juifs vers un besoin impérieux d'en faire davantage. Davantage que ces repas de fêtes où l’on se réunit, certes, mais sans parvenir à transmettre aux suivants autre chose qu’un décor — ni l’histoire, ni le sens. Davantage que ces injonctions à respecter le shabbat ou à manger casher, dénuées de fondement vécu, d’explication vivante. Alors, dans une volonté sincère de renouer avec quelque chose de plus profond, de plus authentique, beaucoup glissèrent — sans toujours s’en rendre compte — dans le piège tendu depuis des siècles par une forme pernitieuse du judaïsme: la négation pure et simple de leur propre Histoire.
    Car c’est bien cela, au fond, qui fut volé. L’Histoire — celle des Hommes, des tribus, des errances et des constructions concrètes — fut engloutie sous un millefeuille de fables, de prescriptions, d’interdits et de réinventions où la Torah fit figure de récit unique, indiscutable, mais bien trop éloigné de la vérité des origines. Ce n’est pas la foi qui est en cause ici, mais l’autorité de ceux qui en firent un rempart contre toute remise en question. Comme l’Église autrefois, avec ses vérités imposées à coup d’encycliques et d’anathèmes — exactement comme l’illustre avec une finesse brutale, le film "Au Nom de la Rose", où les dogmes se dressent comme des murailles contre la lumière.
  • Négation de l’Histoire d’Israël — car l'Israël antique a bien une histoire, une vraie, une charnelle, une enracinée. Et ce n’est pas celle de la Torah. On l’a d’ailleurs subtilement confondue, dans l’esprit des fidèles, avec le Talmud, à travers l’expression "Talmud-Torah", comme pour abolir le millénaire qui les sépare. Comme pour effacer que le Talmud, loin d’amplifier les récits anciens, s’efforce depuis sa rédaction de corriger les violences, les incongruités, les démesures parfois inhumaines du récit toranique. Mais rien de cela n’est enseigné aux fidèles. Rien n’est explicité à ceux qui cherchent — et qui croient trouver.
    Alors, dans cet aveuglement bienveillant, les parents de ces générations de confort ont voulu « transmettre »… sans connaître. En inscrivant leurs enfants à des cours de judaïsme, ils espéraient, dans une démarche sincère, que les rabbins sauraient leur dire pourquoi ils étaient juifs, et comment le rester. Sauf qu’au lieu d’apprendre l’histoire d’Israël, ils apprirent une religion. Non pas un legs, mais un dogme. Et sous couvert d’identité, ce qu’on leur a transmis fut surtout un récit travesti — et trop souvent, un mensonge sanctifié.
  • Un fait anodin, dira-t-on: quoi de plus naturel que d’offrir à sa progéniture une éducation religieuse, surtout lorsqu’on appartient à une minorité fière de ses racines? Rien, sans doute. Mais quand cet enseignement, au lieu d’éclairer, dérive vers un endoctrinement silencieux, alors tout change. Des figures comme Smotrich ou Ben Gvir en sont les fruits les plus visibles — produits d’une génération à qui l’on inculqua, au nom d’une orthodoxie dévoyée, non pas la foi, mais l’intolérance, non pas l’étude, mais le rejet.
    Et ils ne sont que l’arbre qui dissimule une inquiétante forêt: celle d’une société où beaucoup de parents, animés d’intentions sincères, confièrent leurs enfants à des mains qui n’éduquaient pas, mais programmaient. Qui n’enseignaient pas le doute, mais imposaient la doctrine. Résultat: une armée docile de haïsseurs, de discriminateurs, de militants fascisants parfois violents — dont certains ont les mains sales, et d’autres, les urnes pleines.
    Ce terreau idéologique, longtemps ignoré ou sous-estimé, n’est pas étranger aux tensions qui précédèrent l’attaque du 7 octobre 2023. Il est même, en grande partie, l’un des foyers internes d’une insurrection larvée, que les manifestations violentes ayant précédé cette tragédie avaient déjà rendu visible. Une furie en devenir, née de l’intérieur.
  • Un mal pour un bien, peut-être. Cette attaque, violente et inattendue, aura peut-être évité ce naufrage. Elle aura suspendu — momentanément ou non — une guerre fratricide en gestation, née des tensions provoquées par un radicalisme politique et religieux grandissant. Car l’ironie tragique de l’Histoire, ici encore, frappe fort: c’est par les coups venus de l’extérieur que l’unité d’Israël se ressaisit et par ceux des extrémismes religieux — les mêmes qui prétendent aujourd’hui incarner son salut — qu'elle risquait d'être compromise.
    Après tout, l’État d’Israël n’est-il pas né du cauchemar de la Shoah? Là où les conférences, les appels, les projets du XIXᵉ siècle échouèrent à convaincre les nations, les cendres de six millions de morts arrachèrent au monde le droit à l’existence d’un État juif. Ce rappel glaçant oblige: il montre que la survie fut trop souvent une réponse à l’horreur, et non l’aboutissement d’un consensus. Et il soulève une autre question, brûlante: combien de chocs faudra-t-il encore pour que l’unité d’Israël cesse d’être déclenchée par la haine des autres, et commence enfin à naître du respect de soi?
Les intouchables
  • Se fût-il agit d'un soldat qu'il serait, sans doute aucun, passé en cour martiale.
  • Fût-ce le méfait d'une véritable démocratie laïque, que le procès en "désobéissance civile ayant causé la mort" eût été inévitable.
  • Fût-ce la tragédie d'un capitaine de navire, que le mot mutinerie fût le premier à venir à l'esprit, suivi de son cortège de conséquences.
  • Fût-ce la folie d'un gourou de secte, qu'on aurait évoqué sur le champs l’incitation au suicide collectif.
  • Fût-ce le fait d’un dealer, il croupirait déjà dans une geôle sordide, mal vu même par ses co-détenus pour avoir mis en danger la vie d’enfants trop jeunes.
  • Mais il n'en est rien. Nous sommes en Israël, un pays qui se définit curieusement État de droit et dans lequel le chef d'une communauté orthodoxe, récusationniste de premier ordre, méprise la constitution, le parlement et ses décrets. Ses mésactions passent inaperçues, même lorsqu'elles enfreignent les lois ou le droit fondamental des citoyens. Malgré son incitation à la désobéissance et à la rébellion, ce rabbin Kanievsky, ne sera ni jugé ni puni. Il a pourtant clairement ordonné à ses gens, des semaines durant, de ne pas respecter les injonctions de l’État quant aux mesures de restriction relatives au virus Corona. Il a mis des milliers de personnes en danger dont certains d'ailleurs aujourd'hui, passés à meilleure vie, n'ont évidemment plus rien à craindre.
  • Je ne m'étendrai pas sur l’incapacité mentale induite par le fanatisme de ces fidèles innocents. Ils sont volontairement lobotomisé par une éducation sectaire et haineuse, limitée à l'étude de trois ou quatre vieux livres, alors que la culture universelle en comporte plusieurs milliards. Ces gens ne savent rien de notre monde, ne connaissent pas le nom des pays ni de leurs capitales, ne reconnaissent pas la science bien qu'ils ne se privent pas d'avoir un portable dans la poche, de prendre l'avion et donc d'en profiter hypocritement autant que nécessaire, lorsque ça les arrange.
  • Je ne m’étendrai pas non plus sur l'éducation volontairement limitée qui induit ce handicap intellectuel et qui distingue la progéniture de ces populations des autres enfants de la nation. Les outils pour affronter la vie sont différents, bien qu’il ne soit pas dit, évidemment, que ceux de la nation soient les meilleurs. Ils sont simplement choisis par un consensus démocratique. Ce qui pose problème n’est pas la nature de ces outils mais bien la différence qu'ils occasionnent et qui, entre ces deux populations, provoque l'inégalité et la distance. L’expérience des kibbutz fut pourtant éloquente quant à la faillite d’une éducation alternative. Les enfants étaient séparés des parents à l'âge tendre mais tous en sont finalement revenus car il est trop difficile de vivre dans un même monde, une même nation, une même ville sous le poids de la frustration permanente et cruelle de la différence. Les enfants en souffrent et finissent toujours par en subir les conséquences.
  • Cette différence est évidemment décuplée lorsque, pour une quelconque raison, ces enfants orthodoxes sortent de leur "ghetto" et se retrouvent au beau milieu de la population ambiante avec leur accoutrement voyant et franchement dissimilaire. Les enfants souffrent déjà atrocement lorsque leurs baskets ne sont pas au dernier cri, on peut donc imaginer la gêne de ces souffre-douleur. Alors est-ce bien le rôle d’un Etat de droit que de laisser des adultes fanatiques manipuler leurs enfants, déjà menacés par une consanguinité latente. D’aucuns se précipiteront pour brandir la liberté de croire... Mais il ne s’agit pas ici de son procès. La croyance est indispensable à tous. Elle fait partie de notre patrimoine génétique autant que les neurones qui l’héberge et elle n’est pas moins vitale que les globules de notre sang. Personnellement insensible à ce dieu insensible que d’aucuns et leurs livres qualifient de miséricordieux malgré l’ampleur des désastres de la vie, je crois seulement que les credo peuvent être nuancées et que certaines, en particulier celles qui mettent en danger la vie d’autrui, sont nocives et destructrices. Sous leurs airs de vieux sages au visage burinés, ces rabbins ignorants et grisés de pouvoir se révèlent, comme dans le cas présent, plus dangereux pour leur population que le virus lui-même.
  • Leur ignorance ne dérive pas du fait qu’ils ne savent rien, puisqu’il sont capables de vous réciter des versets entiers de leur lectures favorites, mais du fait qu’ils ne savent pas ce qu’il faut savoir. Ni pour diriger une communauté, ni pour mener peuple. En fait, ils ne sont utiles qu’aux pauvres bougres qui les suivent dans leur délire et desquels ils se servent pour flatter leur ego de faux savant. Ils se limitent à interpréter des textes assez vieux pour être largement dépassés. Textes qui jadis jouissaient d’une aura respectable et d’une valeur indiscutable, certes, mais qui aujourd’hui n’enseignent plus rien d’utile à l’humanité. Rien qui puisse faire avancer le monde, sauver les espèces, régler le climat qui part en vrille, assouvir la faim, la sécheresse ou la prochaine extinction des Hommes.
  • Prisonniers de leur credo et abêtis par ses méfait, ils ne se rendent pas bien compte de leurs dangers, voir de leur létalité. Les credo n'ont jamais fait de bien à quiconque. Cache-misère de la réalité, ils envoûtent et transportent vers un monde imaginaire duquel souvent, on ne sait plus sortir. Avec eux, d'aucuns fuient leur quotidien et la difficulté de la vie, d'autres la peur de la mort, d'autres encore leurs complexes. Mais le credo n'est pas une clinique. On en sort pas plus fort, plus vigoureux, plus courageux, plus riche, plus séduisant... on y croupit comme au fond d'une geôle dont le confort austère, avec l'habitude, devient paradisiaque. C'est le point de non retour. On s'y sent bien, on pense que les autres ont tort, on contraint sa progéniture à embrasser la cause, on se sectarise et on finit sa vie dans une illusion. Croire que le prince charmant va arriver, croire qu'on va s'en sortir, croire que la vie est meilleure après la mort, croire en un dieu aussi improbable qu'injuste, croire que la voisine va craquer pour toi, croire que tes enfants finiront par te parler, croire au père Noel... ne sont finalement que des constructions mentales qui ne font rien de mieux que l’ibuprofène sur une vulgaire grippe. Elles calment la douleur, les symptômes, mais ne soignent pas le mal. Si leurs effets avaient des vertus cachées, ils ne s'appelleraient pas "credo" mais plutôt "remèdes".
  • Par définition, la démocratie implique des décisions participatives face aux problèmes et aux crises. C’en est le principe indéfectible. Laisser, au sein même d’une des plus brillantes démocraties du monde, le droit de vie et de mort sur des milliers de personnes aux mains d’un nonagénaire qui croit à l’ouverture de la mer morte, fait donc preuve d’une absurdité incompréhensible et moquable. Une dictature idéologique enfouie au plus profond de ses viscères ne peut qu'augurer de mauvais présages quant aux principes fondamentaux de cette démocratie et à la menace qu'elle représente pour la stabilité de la nation toute entière.
  • Cerise sur le gateau, au bout de quelques semaines, une fois qu’il a uniformément semé le mal dans tous les recoins de sa communauté, ce même rabbin, qui se prend pour dieu mais que son dieu désavoue, a le culot de se contredire effrontément et d’expliquer à ses badeaux que la Torah interdit la négligence de sa propre santé et désigne comme "meurtrier" celui qui braverait ce précepte. Son Outrecuidance est d'autant plus honteuse puisque la communauté israélienne qu'il piétine, bafoue et contamine est aussi celle qui, par ses deniers, finance les milliers d'élèves qui ne font rien d'autre qu'étudier la Torah. Et ainsi, ce même État qui sait combattre des ennemis souvent féroce pour protéger sa population et ses frontières, est incapable de faire le ménage devant sa porte et laissera impuni ce délinquant imméritoire, libre donc d'imposer à nouveau et à sa guise, ses rites immoraux et assassins.
  • “Aie le courage d'utiliser ton propre entendement”. Emmanuel Kant.
Trahi par les miens
  • La patrie n'est pas la moindre des choses, spécialement pour un combattant. Elle lui octroie son identité, évoque ce qu'il est et, lui, il fait partie de sa vie et de son histoire, parle sa langue. Sur un champ de bataille, il agit en son nom. Elle lui octroie le droit de tuer pour elle, de la défendre et en sauvegarder l'honneur est un honneur. Une guerre, elle, est toujours trop longue. Dans la tête de ce soldat, elle ne finit jamais. Elle le hante la nuit et parfois le jour. Des images, des sons, des idées lui rappellent les moments les plus intenses.
  • Mais si elle ment, la patrie... Si elle ment à ses fils, que deviennent-ils? De vulgaires mercenaires qui combattent pour une cause biaisée? Même pas. Les mercenaires sont bien payés pour leurs faits d'armes. Non, ses fils deviennent de la chair à canon. Des bâtards qu’on sacrifie et dont la dignité saigne autant que leur plaies, avant leur plaies, puisqu'ils partent au combat déjà blessés par leur mère patrie. D’une blessure dans le dos. Plus pénétrante qu'une balle ou qu'un éclat. D’une trahison. Enterrer ses fils sans une raison valable et sans qu’ils sachent pourquoi, c’est les tuer plusieurs fois, une fois pour chaque mensonge. J'ai compris, bien trop tard, m'être battu pour une nation qui ne se connait pas. J’ai subi ce que subissent les soldats, j'ai souffert, vu des choses à ne pas voir, entendu des hurlements que j’entends encore, j’ai dû tuer, au prix de mourir un peu dedans, à chaque fois. De honte, aussi, d'avoir donné la mort. Ayant eu raison de ma raison, la violence des combats dérégla mon sens commun et depuis je vois tout à la lueur grisâtre et saisissante de la bassesse humaine. J’ai mis des années à m’endormir sans frémir, à me réveiller sans ces sueurs froides, sans ces images secouées par les bruits d’armes et de cris. Ces guerres maudites nous ont pourri la vie et le cœur, mais le pire, c’est l'humiliation. Celle d'avoir combattu pour de fausses valeurs, pour un Faux Peuple. Pour le mensonge et dans le mensonge. C’est la tromperie qui rend fou. Être envoyé à la boucherie par des ignorants est une offense indélébile. Je me serais battu de toute manière pour défendre une patrie, comme tout bon citoyen, mais pas pour le triomphe factice d'un passé misérable.
  • Depuis 1948, bien que mal né [mea culpa] [faux peuple], l'Etat d'Israël a ses propres citoyens. Les seuls et uniques citoyens israéliens de tous les temps qui sont les seuls et uniques fils de cette nation. Ils vivent en Israël, y payent des taxes, y combattent et lorsqu’ils ne meurent pas sur un champ de bataille ou ne passent pas le restant de leur vie estropiés par les guerres et les batailles successives, ils ont la vie dure, très dure. Une vie qui n’a rien à voir avec celle des Juifs du reste du monde qui, d'ailleurs, ne se bousculent pas au portillon, soit parce qu'ils sont parfaitement assimilés, soit justement pour échapper à cette rudesse. Alors, pas question de taire cette mascarade, cette trahison faite aux soldats qui tombent encore et toujours pour un passé à l'aura souillée par le mensonge de ce faux peuple, destinée bien amère pour qui croit vivre en héros.
  • Et puis mourir pour une cause vertueuse, passe, mais pour un État qui, d’une part, se prétend le rempart d'une population réprimée tout en laissant s'exprimer une radicalité religieuse qui regorge de citoyens oisifs, nuisibles et intouchables, et d’autre part met sur la même marche du podium les Juifs du monde et les fils de sa Nation, considérés apatrides par décret et par l'ADN de sa consitution, j’émets quelque réserve. J’ai surtout envie d’hurler leur bêtise, leur ignorance et la honte dont ses constituants et dirigeants devraient être mille fois morts.
  • Silences et mensonges d’état, coups de bluff stratégiques, ruses de guerre, subterfuges politiques, stratagèmes diplomatiques, mystifications et manipulations de tout ordre, l’histoire regorge d’événements majeurs tronqués, modifiés, simulés ou tout simplement effacés: les pseudos grandes victoires de Marignan et d’Austerlitz, la prétendue splendide prise de la Bastille, l’art de la simulation d’un Hannibal ou d’un Napoléon, les mensonges de la Seconde Guerre mondiale, ou la plus récente guerre d’Irak... On parle de tout sans jamais citer la Torah qui, la première, instaura, par le mensonge, un état de terreur psychologique, de crainte, soit de dieux, soit de l'enfer, sur plus de 100 générations, jusqu’à nos jours.
Pieux nombrilisme
  • Rien de particulièrement bouleversant dans une vie comme la mienne, mais disons que cet épisode me fit réagir. Peut-être était-ce le moment de parler, de vider mon sac sur une société, certes innocente par nature, mais pas toujours très nette et empreinte, à mes yeux, de travers perturbants ou devenus trop lourds à supporter. Comme une envie soudaine de m’exprimer et de régler mes comptes. D’écrire tout haut ce que je pense tout bas. De purger cet excès de bigotisme incohérent mais infatigable, d’hypocrisie et d’égoïsme qui déjà m’avait poussé, il y a huit ans, à fuir l’information. Celle qui vous raconte journellement la vie des autres, leurs malheurs, leurs guerres, leurs désastres. Je cessai donc d’écouter ou de voir toute forme de journal, écrit, radiophonique ou télévisé. J’avais envie de vivre loin de ce monde gâché et devenu incontrôlable, à l’abri de la voracité des journalistes qui souvent, pour gagner leur vie, entament celles d’autrui à coups de scoops funestes, poussant la liberté d’expression et le droit de savoir bien au-delà de la décence et parfois de l’offense. Je voulais du silence, de cette insaisissable paix qui fait défaut dans un monde agité où le temps vire au facultatif. La dernière nouvelle que j’entendis et qui défia ma patience déjà fort entamée, fut celle de l'unique fusée qui toucha terre en 2010, lors des attaques magistralement maîtrisées par le Dôme de Fer. Un journaliste interviewe le voisin de cette petite fille de 14 ans, tuée sur le coup par le missile. Lorsqu'il demande: et vous, vous n’avez pas subi de dommages?, le voisin lui répond Nous, grâce à Dieu, nous sommes indemnes.
  • Une secousse violente percuta mon visage, puis mon ventre, puis mon être tout entier. De quoi parlait-il donc? Il remerciait Dieu sur le cadavre d'une enfant? Je me sentis indigné. Comme si cette réplique m’était inconnue. Ce jour-là, ses mots envahirent tout l'espace, pesant chacun le poids du globe et cette réponse, quoiqu'anodine me resta plantée en travers du cerveau tel un harpon. Je m’imaginais cet homme face au journaliste, sur le pas de sa porte, regardant plein de gratitude les restes de la maison voisine. J’imaginais le corps inerte de cette petite fille,ddéchiré par les éclats ou les débris et j’entendais en boucle ces mots qui me semblaient d’un autre monde. Au lieu d’apaiser et guérir, ils exaltaient le machiavélisme d’une éducation pieuse selon laquelle Dieu est capable d'attirer les louanges des uns en détruisant la vie des autres, vieux réflexe biblique duquel on ne fait plus cas tant il est rabâché depuis des millénaires. Comme si cette petite fille ne faisait pas partie de la vie de ce voisin, de sa rue, de son quartier et de la vie de ses propres enfants. Comme si sa mort ne pouvait inspirer que louanges à ce Dieu qui l'aurait épargné. Qu’était-il arrivé à l’humanité ou bien avait-t-elle toujours été aussi laide? Que m’était-il arrivé à moi, pour que cela me perturbe brutalement juste aujourd’hui, en voiture sur une route nationale, la radio allumée, dans le contexte tellement serein d’une journée ensoleillée et invitante? C’était en 2011. Depuis, ce que je sais des actualités, je l’apprends par hasard et de force dans la gargote où je déjeune. J’entends parler des derniers attentats, de politique, de stratégie, de colère et désaccords. Là-bas, on se gave de mots attendus, de phrases toutes faites, d’idées communes, dites, redites, répétées. Sans oublier bien sûr ce Dieu qui, bien que pour certains toujours aussi décevant, continue d'être cité et remercié avec autant de lâcheté, la crainte de pourrir en enfer, sans doute. On n’hésite pas, lorsque l’occasion se présente, à le brandir sans retenue comme glaive et bouclier. Je n’hésite pas, à défaut de répondre, à me réciter silencieusement les mots de Mark Twain: Never argue with stupid people, they will drag you down to their level and then beat you with experience.(Ne discute jamais avec les gens stupides, ils t’abaisseront à leur niveau puis te frapperont avec expérience)
Credo
Le boomerang de la violence
  • Je défends l'égaré, le faible, et cette foule
    Qui, n'ayant jamais eu de point d'appui, s'écroule
    Et tombe folle au fond des noirs événements
    Etant les ignorants, ils sont les incléments
    Hélas ! combien de temps faudra-t-il vous redire
    À vous tous, que c'était à vous de les conduire
    Qu'il fallait leur donner leur part de la cité
    Que votre aveuglement produit leur cécité
    D'une tutelle avare on recueille les suites
    Et le mal qu'ils vous font, c'est vous qui le leur fîtes.
    Vous ne les avez pas guidés, pris par la main
    Et renseignés sur l'ombre et sur le vrai chemin
    Vous les avez laissés en proie au labyrinthe.
    Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte

    Victor Hugo

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  • Devant les chiffres évoqués par la FAO quant à la mortalité infantile due à la faim, difficile de comprendre ce que les auteurs bibliques entendaient réellement par "miséricorde".
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  • l'islam
  • Et si les régions les plus touchées par la mortalité infantile due à la faim sont majoritairement à population musulmane, il semble légitime de se demander si cette tendance à une natalité abondante malgré la détresse est lointainement héritée de l’injonction biblique de la Genèse (1, 28) — "Croissez et multipliez, remplissez la terre" — reprise ensuite par l’islam dans le hadith où le Prophète encourage à épouser "la femme affectueuse et prolifique" pour surpasser les autres peuples en nombre?
  • À l’inverse, la Chine communiste — détachée de tout dogme abrahamique — représente un exemple radical de logique acceptationniste: lorsque la surpopulation devient une menace, l’État tranche. Le contrôle des naissances — que l’on retrouve dès la Grèce antique — reste une réponse structurelle et proportionnée lorsqu’une nation souhaite préserver sa stabilité, son intégrité ou sa puissance. Aux antipodes de la pensée religieuse, de nombreux pays y ont recouru à diverses époques et de diverses manières, officielles ou populaires. Dans l’ère moderne, dès 1955, le gouvernement chinois lance une campagne d’ instructions pour le contrôle des naissances. À l'exception des zones habitées par les minorités nationales, il est nécessaire de faire connaître et populariser le contrôle de la fécondité pour promouvoir la limitation des naissances dans toutes les régions densément peuplées. Stérilisation et IVG deviennent accessibles sur simple demande de la femme, avec l'autorisation du mari. En 1957, est organisée une grande campagne anticonceptionnelle en Chine (meetings de masse, expositions éducatives, distribution de matériel anticonceptionnel). Le néo-malthusianisme de Ma Yinchu emprunte à Lénine en expliquant que l’industrialisation et la mécanisation, clés de la construction du socialisme, sont incompatibles avec une surcharge démographique excessive. En 1970, cette politique est réitérée après une période de ballottement. Les normes de procréation, clairement établies, se résument dans le slogan wan-xi-shao (tard, espacé, peu). Et les résultats attendus apparaissent.
  • Dans nos démocraties, on lit souvent que "Sans gaspillage alimentaire, le monde mangerait à sa faim", mais rarement des articles s’interrogeant sur l’influence néfaste d’injonctions religieuses archaïques — comme celles de la Torah ou de ses prolongements — sur les dynamiques démographiques contemporaines. Il est vrai que ce genre de propos dérange en ébranlant la sensibilité récusationniste et en troublant l’équilibre frileux du politiquement correct.
  • Got mit uns
  • La Torah, première grande œuvre de l’écrit, devient aussi — par effet pervers — une matrice utilisable, détournable, inspirante pour des idéologies rivales, contradictoires ou carrément hostiles [histoire]. Sans la disponibilité de ce document, le terrain de la discorde eût été moins probant, moins évident et moins invitant. Elle est comparable à ces lettres enflammées qu’on oublie d’avoir écrites — mais que le destinataire relit indéfiniment. Ou comme les clous, de cette parabole en langue anglaise, que l’on arrache d’une cloison de bois mais qui laissent à jamais la trace de leur blessure. On peut admettre que, sans la Torah, les hommes auraient sans doute inventé d’autres prétextes pour s’entre-tuer, mais c’est bien elle qui, historiquement, servit d’amorce, de matrice, de levier à bien des conflits et qui, en un retournement cruel, semble parfois faire ricochet sur ses propres fidèles — comme un boomerang textuel revenu frapper son point d’origine. Le ceinturon des soldats allemands, gravé du terrible "Got mit uns" — "Dieu avec nous" — en est une illustration glaçante.
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    Ce "Dieu avec nous", c’est celui d’Abraham — celui-là même qu’Hitler, déiste convaincu à défaut de se définir chrétien, invoquait, et contre lequel il retourna sa propre violence, frappant le peuple qui l’avait inventé. Ceux-là avaient consigné dans leur texte des passages de rejet, d’hostilité envers l’étranger — les goys — et le fil du destin, cruel, fit que cette logique d’exclusion revint les heurter de plein fouet. Au crédit du récit, les plaies divines infligées n'étaient que le fruit de l'imagination de ses auteurs. Mais leur violence mythique, répétée siècle après siècle, fit germer d’autres désastres, bien réels, dans l’histoire humaine.
  • Je ne sais pas si Dieu existe, mais s'il existe, j'espère qu'il a une bonne excuse! (Woody Allen)
Le mariage juif
  • Cher ami, je ne viendrai pas au mariage de ta fille. Je te prie de ne pas m’en tenir rigueur, ni de le considérer comme un manque de respect. Une fête "genus-separatist" va à l'encontre de mes convictions et représente une offense à ce que la Nature nous a donné de plus précieux, sa volonté. Le genre humain, par sa seule existence, rappelle que l’un et l’autre sont indispensables à la perpétuation de la vie. Les séparer — même symboliquement — revient à nier cette évidence, comme un affront discret mais réel à l’ordre naturel. "Chasse le naturel, il revient au galop", parce que rien ne résiste à la Nature. Tout ce qu’on érige contre elle s’effrite : le mur de Berlin a cédé devant la fraternité des peuples, le communisme devant l’instinct de compétition. Depuis la nuit des temps, les hommes et les femmes dansent ensemble pour célébrer, se regardent pour se comprendre, se mêlent pour se rassurer, s’accouplent pour donner la vie, se regroupent pour réchauffer leurs corps et leurs âmes. Tu sais que je fais partie de ceux qui accueillent l’univers tel qu’il se donne — sans condition, ni dénégation, ni combat. Je ne conteste pas les lois fondamentales : je m’en émerveille. Ce besoin inné de promiscuité fait partie de nos êtres et ne peut souffrir les leçons d’une poignée de Juifs trop haut perchés par le syndrome du peuple élu. Il n’a que faire de putschs sur les millénaires d’évolution. La Nature a décidé, que dans tous les cas, en toute circonstance, hommes et femmes se blottiront pour s’aimer, se reproduire et exister. Ainsi fut et ainsi sera certainement jusqu’à la fin.
  • Elle sonne faux dans ma tête, cette séparation. Surtout pour un mariage qui lui-même célèbre l’union des genres. Elle me choque, me gifle, me heurte. Depuis quand les joies devaient séparer les mères de leurs enfants, les maris de leurs épouses, les frères de leurs sœurs, les Valentin de leurs Valentine? Ne nous serine-t-elle pas que les guerres le font mieux que quiconque, les disputes aussi, les familles dévastées par l'argent ou la haine, les catastrophes naturelles, les trains en partance, les vacances terminées, la marine marchande, les déménagements... N’ajoutons pas des murs là où il faudrait des ponts. Alors c’est bon. J’ai ma dose d’au revoir, de saluts, de regards qui se perdent dans les distances impalpables, de signes de la main et de larmes qu’on n’ose pas sécher de peur d’oublier. Non, l’ami, les fêtes ne doivent pas séparer. Elles préfèrent la chaleur du présent à la promesse du lendemain, le parfum du toujours à l’attente du retour.
L'outrecuidance
  • On ne peut pas ignorer la constance historique indéniable des communautés israélites de vivre leur vie juive, sans restriction aucune, ou qu'elles se trouvent. Si l’on remonte aux premières traces de l'antisémitisme du XIXe en Europe centrale, on s’apercoit, comme le rapporte si bien cet article sur les shtetl — villages polonais — à forte majorité juive qui se développèrent dans le contexte des empires austro-hongrois et russe, et où les communautés juives tentaient de préserver leurs traditions tout en répondant à des conditions socio-politiques souvent hostiles:
  • ...Quels que soient les pourcentages, la vie est séparée : structure économique spécifique, langue différente, organisation communautaire propre, qu'elle soit religieuse ou politique. Tout concourt à créer une vie juive particulière, dans des quartiers délimités des grandes villes et surtout dans les petites villes. Cette vie juive se heurte en permanence à l'hostilité, voire aux pogroms. La pléthore des petits métiers — majorité de commerçants et d'artisans — crée la yidishe gas (la rue juive) et la mark platz (la place du marché), avec leur agitation tant décrite dans les souvenirs, leurs enseignes tant montrées sur les photos, leurs histoires tant présentes dans la littérature. La langue différente, quels que soient les débats linguistiques, fonde l'appartenance à la Communauté. Tout cela forge la Yiddishkeït. Les structures de représentation de la Communauté sont spécifiques sur le plan religieux, par définition, et le deviennent sur le plan politique au travers du débat sur l'autonomie culturelle et politique et la nécessité d'organiser séparément les masses juives.

  • Plus tard et surtout suite à la Shoah, les choses vont changer, la plupart des ghettos vont se disperser mais les communautés juives conserveront une conscience aiguë de leur identité, parfois perçue comme revendicatrice par les sociétés hôtes, et interprétée — à tort ou à raison — comme une forme d’outrecuidance.
  • Au début de notre ère, les premières communautés chrétiennes issues du judaïsme ont naturellement conservé les Écritures hébraïques comme fondement théologique. Puis, la Septante, ancienne version grecque du Pentateuque commença à servir fréquemment de référence et c'est vers la IVe siècle, que le canon chrétien de l’Ancien Testament se stabilisa, incluant le Pentateuque comme base incontournable. Dès lors, emmené par la vague du prosélytisme chrétien, ce texte s’étend au grand public chrétien, notamment via les Épîtres de Paul qui universalisent l’héritage d’Abraham à tous les croyants (Romains, Galates), ce qui, dans certaines lectures, peut brouiller les frontières entre élection et adoption.
  • Ainsi, le concept du peuple élu, réservé jusque-là aux seuls Israélites pratiquants, s’étend au grand public et, inévitablement, commence à aiguiser les jalousies, notamment sous l’impulsion des épîtres pauliniennes qui ouvrent cette élection symbolique à tous ceux qui embrassent la foi dans le Christ, brouillant les frontières entre héritage spirituel et identité ethnique. Si l’on y ajoute certaines lectures fortement accentuées de l’épisode de la trahison de Jésus par Judas — qui ont nourri des représentations hostiles — on comprend mieux comment des tensions latentes ont pu s’enflammer au fil des siècles.
  • De l’autre côté, certains cercles peuvent être tentés d’interpréter l’élection divine comme un privilège intangible, occultant l’humilité pourtant centrale dans la spiritualité hébraïque elle-même. Cette posture, perçue comme arrogante dans certains contextes, a parfois été instrumentalisée par les détracteurs pour alimenter le ressentiment collectif. Faire partie du peuple élu n’est pas rien, surtout si c'est inscrit noir sur blanc sur le livre des livres à la vérité incontestable selon l'interprétation humaine. Souvent perçus comme étrangers ou dépositaires d’un mystère ancestral, les Israélites payèrent le prix symbolique de cette notoriété scripturaire. Cette posture visible — souvent documentée dans la littérature ou l’iconographie — fut perçue, à tort ou à raison, comme une forme d’assurance dérangeante. Alors que d’autres minorités se fondaient dans la discrétion, certains juifs orthodoxes revendiquaient leur singularité culturelle et religieuse avec force, ce qui cristallisa des représentations sociales ambiguës. image indisponible
  • A quoi, par exemple, sert la Kippa que les Juifs pratiquants portent sur la tête, sinon à montrer à tous qu'ils sont Juifs:
  • Un peu, beaucoup, tout le temps ? La manière de porter la kippa relève, en fait, du degré de pratique religieuse. C'est une coutume qui a pris, au fil du temps, force d'obligation. Dans la Bible, il n'y a pas de mention qui imposerait une telle pratique. Théoriquement, selon la halakha (la loi juive), aucun homme ne peut marcher au-delà de deux mètres sans se couvrir la tête. Mais dans les faits, ce sont les juifs les plus pieux et les rabbins qui portent en permanence la kippa. C'est aussi une obligation incontournable pour entrer dans une synagogue, un cimetière juif, se rendre au mur des Lamentations à Jérusalem. En tant que telle, ce n'est pas la kippa qui est obligatoire, mais le fait de se couvrir la tête. Elle peut être remplacée par un chapeau, une casquette, voire un mouchoir noué sur le crâne. Symboliquement, la tête est le signe de la pensée, de l'imagination. Se la couvrir, c'est reconnaître et rappeler que Dieu est au-dessus de soi, précise le rabbin Moshe Lewin. Concrètement, le port de la kippa est le signe de l'humilité du croyant devant Dieu. (Liberation)
  • En dehors de son contexte liturgique ou communautaire, le port de la kippa peut parfois être perçu comme une affirmation identitaire visible, comparable — du point de vue sociologique — à d'autres marques d’appartenance à des groupes culturels ou spirituels. Dans le cas de la kippa, la provocation va encore plus loin car il ne s’agit pas d’une manifestation innocente ou temporelle. A supposer que dans un quartier déterminé, un commerçant juif prospère. Par définition, les gens qui réussissent, autochtones ou pas, créent déjà des jalousies. Dans le cas des Juifs, ce sera une raison supplémentaire de leur en vouloir et supposons encore, que la fille de ce commerçant tombe amoureuse du jeune voisin d’en face. Dans certains cas — et ce n’est pas l’apanage d’une seule communauté — des résistances culturelles ou religieuses peuvent surgir face à l’endogamie, ce qui, dans un contexte déjà fragile, renforce les tensions et alimente les malentendus. image indisponible
  • Évidemment, les choses ne sont jamais si simples, mais cet exemple illustre bien comment peuvent se détériorer les relations d’une population mixte. Alors c’est vrai, ça part du devoir instinctif de conservation de l’identité, de l’ethnie ou de la religion, mais ce n’est pas le meilleur moyen de tisser des liens et de s’intégrer. En terre étrangère, on est condamné au respect des mœurs, des lois et des coutumes locales, ce qui laisse entendre qu’on n'est pas naturellement invité à marquer son propre territoire, ce qui suppose un délicat équilibre entre intégration et affirmation identitaire — équilibre que toutes les diasporas doivent négocier, souvent dans la douleur.
  • Claude Vigée le dit si bien: Malheur à qui perd sa maison, sa besogne et son champ: il doit quêter sa subsistance à la table étrangère, et payer de sa liberté le refuge accordé. Ses pas toujours errants ne connaissent plus de patrie, le pain, le repos, le travail, l'air lui sont reprochés — encore heureux s'il peut sauver son importune vie !
  • Or, dans l’histoire, certaines diasporas — y compris juives — ont parfois négligé cette réalité fragile de l’accueil, oubliant que la visibilité sans enracinement peut susciter rejet ou malentendu. Pour célébrer leur culte, ils érigent parfois des synagogues visibles, et arborent des signes culturels ou religieux qui peuvent — dans certains contextes — être interprétés comme un affichage excessif. A Roma, comportati da romano (A Rome, comporte toi en Romain) disaient les régnants de l’ère romaine pour bien faire comprendre ce concept. Un principe que l’on retrouve dans la plupart des cultures antiques comme modernes, ils savaient de quoi ils parlaient. Mais pas qu'eux, le Talmud aussi le préconise en reprenant cette phrase de l'araméen qui date de la destruction du premier Temple: dina de malkhuta dina: La loi du gouvernant est la loi et qui, dans son sens large, incite à prêter allégeance, lorsqu'on est étranger, aux règles locales. Pas surprenant donc, que la froideur envers la communauté juive ne se fit plus attendre. Certains courants religieux ou critiques de l’époque perçurent dans cette posture collective — jugée arrogante par les puissances romaines — une des raisons symboliques ou spirituelles qui auraient précipité la destruction du deuxième Temple.
  • Il semble, en outre, que le sort s'acharne à tirer toujours les mêmes cartes à qui joue le même jeu. Malgré la création d’un État censé offrir une protection durable, certains choix politiques ou postures identitaires ( Le Faux Peuple ) contemporaines perpétuent les tensions, comme si les leçons du passé n’avaient pas suffi à contenir le cycle tragique de confrontation.
  • L’histoire semble animée d’une ironie cruelle : les peuples qui ne révisent pas leurs récits collectifs risquent de les revivre, en pire. Être porteur d’un héritage, c’est aussi porter le devoir de ne pas le brandir comme un bouclier, mais comme un miroir.
La Torah
  • image indisponible Bien qu’œuvre littéraire majeure dans l’histoire de l’humanité, la Torah, composée de cinq parties (en rose), est aujourd'hui un récit vidé de tout fondement historique ou archéologique. En outre, elle ne représente que la première partie de la Bible ou Tanakh et commence par une cosmogonie maintes fois utilisée dans l’Antiquité, comme celle de Sumer.
  • L’analyse de tessons de céramique découverts en Israël amène les chercheurs à réévaluer leurs théories sur le moment où les auteurs du Pentateuque auraient commencé à le composer. La découverte, dévoilée par une revue scientifique américaine, The Proceedings of the National Academy of Sciences, vient alimenter un débat de longue date portant sur le moment où la rédaction aurait commencé, à savoir avant ou après la destruction du Temple du Royaume de Juda en -586. À l’aide de technologies d’analyse d’écriture comparables à celles utilisées par les agences de services secrets et les banques pour analyser les signatures, une équipe de recherche de l’Université de Tel Aviv a analysé l’écriture manuelle d’un ensemble d’inscriptions trouvé sur ces fragments de céramique. Résultat, ces fragments dateraient de -600, et auraient été rédigés par au moins six auteurs différents. Il est donc probable que la composition du Pentateuque commença peu de temps avant la chute de Juda.
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  • le gap
  • Ce n'est que 800 ans plus tard, après la destruction du second Temple et avec la naissance du judaïsme rabbinique, que la Torah commencera à être commentée et expliquée avec plus de modération par des œuvres comme la Mishna qui, avec la Guémara, formera le Talmud. Plusieurs versions seront éditées au cours des 6 premiers siècles de l'ère chrétienne. Le judaïsme rabbinique et, depuis, toutes les institutions religieuses juives, ne présentent jamais l'étude de la Torah ou l'enseignement religieux, sans lui accoler le Talmud, la transformant ainsi en Tamud-Torah. Ce flou, volontairement maintenu dans l'esprit des fidèles, sert à camoufler la triste réalité de textes toraniques dont maints passages, d’une rare violence, arrivent à semer un trouble bouleversant chez les lecteurs.
  • intolérance
  • Cette chronologie est fondamentale pour comprendre que la Torah est donc restée pendant plusieurs siècles l'unique repère écrit des Israélites pratiquants. En effet, la composition des autres textes du Tanakh (la Bible) continue, selon les plus récentes mises à jour, jusqu’au IIème siècle avant J.-C. Cela implique donc une lecture émaillée d'incompréhensions ou d’interprétations subjectives mais surtout l’entretien, sans pare-feu, d’une haine prononcée pour les peuples étrangers, fomentée par les textes intransigeants précédemment indiqués et par l’intention soutenue de Dieu de punir les infidèles, soit par la mort soit par le “kherem”, que l’on pourrait traduire par “mise au ban”. Intolérance qui forgea l’esprit de nombreuses générations, provoqua la chute du Ier et du IIe temple pour aboutir, encore de nos jours, au fanatisme religieux que l’on connaît et qui, à en croire les événements actuels, risque même de mener l'Etat d'Israël vers une république ou dictature religieuse. (Photo: incitation à la rébellion contre l’état d'Israël en période de l’urgence sanitaire du Covid)
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    Le problème du fanatisme judaique est qu'il maintient des centaines de milliers d'âmes dans une ère primitive et donc révolue, et qu'il menace la stabilité et la liberté de tout un état ainsi que l'équilibre mental de multiples générations. Ce sujet sera traité plus longuement dans le chapitre Haredim relatif aux orthodoxes.
  • manipulations
  • Les Israélites n'attendirent pas la composition de la Torah pour établir les rites de la cacherout, du Chabbat ou pour célébrer les étapes saisonnières et agricoles qui rythmaient leur existence. Bien au contraire, ce sont les rédacteurs de la Torah et ensuite le judaïsme rabbinique qui les reprirent à leur compte, transformant, à volonté leur teneur et leur pureté. Pour mieux noyer le poisson, la commémoration des épopées non réellement vécues, parce qu’inventées de toute pièce dans le récit — comme la sortie d’Egypte ou le don de la Torah — fut associée aux fêtes déjà existantes, évitant ainsi de changer les habitudes. Ce choix reste incompris: peut-être était-ce pour s’assurer qu’elles seraient effectivement fêtées ou peut-être parce que les générations temporellement rapprochées de l’écriture savaient pertinemment que de tels événements n’avaient jamais eu lieu. Les fêtes originales perdurèrent donc avec leur pèlerinage à Jérusalem, mais en sus, la Torah glissa aussi la fausse mémoire d'événements non vécus. Comme quoi les fake news ne sont pas vraiment récentes
  • C’est de cette manière que Pessah, qui originellement traitait du renouveau printanier et de la moisson de l’orge, inauguration du cycle agricole annuel, devint aussi, au fil des versets, la commémoration de la libération des Israélites d'un esclavage inexistant (aucune trace d'esclavage dans l'Egypte antique), et fut plus communément nommée Sortie d’Egypte. Raison pour laquelle l’actuelle fête de Pessah, marquée par la fête des pains sans levain à cause du faux exode, n’a rien à voir avec le pèlerinage à Jérusalem initialement prévu pour les offrandes des fruits de l’agriculture. Elles ont pourtant été habilement entremêlées dans le texte, comme si, toutes deux, étaient originelles et célébraient de vrais événements.
  • Pour la fête de Shavuot, citée dans l’Exode exclusivement en tant que fête agricole telle qu’elle existait auparavant, la dénaturation fut opérée plus tard. Cette fête, d'origine païenne, célébrant le début des moissons, fut aussi reprise au compte de la Torah et ses rédacteurs en expliquent le protocole de long en large comme s’ils venaient de la créer. A l’origine, les fidèles devaient apporter en offrande au Temple les premiers fruits de la récolte et également deux miches de pain pétries avec la farine nouvelle. Aujourd’hui, comme par enchantement, Shavuot est associée au don de la Torah, lorsque Moïse reçoit les tables de la Loi sur mont Sinaï.
  • enjeux et concepts
  • Composition de la Torah à Jerusalem, naissance de la pensée scientifique à Athènes: deux visions contemporaines du monde et fondamentalement antinomiques qui ne peuvent se chevaucher temporellement et géographiquement sans être étroitement liées par l’exigence de s’opposer. D’un côté, la philosophie grecque qui cherche à comprendre les mécanismes du monde et de l’autre, une matrice identitaire désireuse d'imposer une vision créationniste. La Torah se devait donc de faire fort pour marquer les esprit et porter un coup mortel à l'hérésie du polythéisme qui hantait encore et toujours les populations israélites et judéennes à l'époque de sa composition et, plus tard, du judaïsme hellénistique.
  • Les rédacteurs vont en effet s’y coller et réussir un coup de maître. Les données sont simples, l’Univers ou le Monde, comme on le dénommait alors, ne démontre aucune complaisance envers les uns ou les autres. La vie n'est une sinécure pour personne, ses aléas la rendent imprévisible et capricieuse, cruelle à ses heures et plus souvent triste que joyeuse. Qui mieux qu’un peuple vilipendé, défait dans toutes ses batailles et déchu de ses droits pour le savoir? L'élite intellectuelle israélite, fanatique mais aussi philosophe, avait compris, sans nul doute possible, que si les prières et les supplications avaient suffi, si Dieu les avait entendues, calmant leur désarroi, leur destin eût été plus clément. Or, ce n'était pas le cas. Ils eurent donc largement le temps et l’opportunité d’appréhender l’éphémérité et la fragilité de la vie dans l’éternité d’une Nature indifférente et souvent aussi impitoyable que leurs ennemis. La composition et rédaction d’un texte de cette ampleur, première grande oeuvre littéraire de l'Histoire, devaient donc, pour ne pas être vouées à l’échec, tenir compte de cette fatalité et trouver les arguments convaincants pour justifier un tel laxisme divin et empêcher quiconque, surtout les Hellènes, de contester l’existence du dieu créateur. Mais y croyaient-ils vraiment eux-mêmes?
  • En s’inspirant des récits cosmogoniques préexistants, les rédacteurs de la Torah n’avaient donc pas pour but de conter réellement l’histoire du monde, comme certains aiment à le croire, puisqu'ils ne la connaissaient pas, mais d'établir un point de départ duquel construire ou accoler les histoires successives, elles-même, récupérées, en partie, dans les légendes populaires. La cosmogonie des Israélites, narrée dans la Genèse, premier livre du Pentateuque, avec la création de l’Homme à partir d’une sculpture d'argile, ne fut donc ni originelle, ni originale. La découverte des tablettes sumériennes, dans lesquelles une forme humaine est insufflée exactement comme le narre la Torah deux mille ans plus tard, aurait dû faire un tollé, mais on le sait, rien ne peut ébranler la foi aveugle des fidèles, bien sauvegardée, de surcroît, par le biais de confirmation . Il n'empêche que ce genre d’épisode déstabilisant pour les doctrines abrahamiques n’est plus aussi rare qu’on l’imagine. Dans ce sillon, le pape Jean Paul II déclare en 1996 que Le darwinisme est plus qu’une hypothèse. Il précise toutefois qu’il ne se réfère qu’au corps de l’Homme et que l’esprit, lui, reste d’origine divine. Une phrase qui, outre la tentative d’enrayer la perte de fidèles, dessaisit le dieu d’Abraham de la création physique des Hommes au profit... d’une guenon (ou presque) et remet en cause les inébranlables fondements de l’Ancien Testament.
  • Après une cosmogonie sciemment plagiée qui d'ailleurs ne s'étend que sur quelques lignes au tout début du texte car en soi sans importance, le réflexe des concepteurs, hérité probablement de la philosophie israélite existante fut, peut-être malgré eux, d’une intelligence et finesse à toute épreuve. D’une part, pour sa proximité à s'y méprendre avec l’actuelle réalité scientifique qui indique une origine unique de l’Univers et d’autre part, pour deux concepts majeurs, le Monothéisme Abstrait et l'Athéisme des Croyants, extraordinairement pointus et destinés à parfaire la doctrine. Voulus, accidentels, ou habilement hasardeux, nul ne le saura, mais quoi qu'il en soit, ces concepts se posèrent en inamovibles piliers idéologiques comme en exemple de pérennité d’une doctrine encore pratiquée bien que deux fois millénaire. Ma conviction est que ces concepts ne sont pas stochastiques et que leur mise au point fut le compendium de longues séances de réflexion dûment ciblées et destinées à asseoir cette longévité. Certains pourraient penser qu’il s’agit, au contraire, d’un heureux lancer de dés sur le tapis rouge sang d’un avenir incertain, et que le machiavélisme dont je les accuse ne réside que dans mon esprit par trop encombré de questions sans réponses. Dans les enquêtes policières, le commissaire finit toujours par dire qu’il ne croit pas aux coïncidences. Je ne le contredirai pas, car lorsqu’on invente ce genre de concepts, il ne s’agit plus de hasard mais d'une stratégie non-avouable: Elle visait l'appât du gain par l'asservissement des plus faibles, la protection de l'image de Dieu d’une surexposition aux critiques trop aisées et de l'inexorable usure que pourrait infliger le temps à des symboles concrets et palpables. Si je me trompais, si les rédacteurs n'avaient pas sciemment conçu ce mécanisme perfide, alors c’est au destin que je dirais... “Chapeau”. Mais je le répète, rien n'est moins sûr.
Le Judaïsme
  • Suite à la destruction du Premier Temple en -586 et à l'exil qui s'ensuivit, il semble que la Torah fut refondue et que la population qui retourna à Jérusalem ait pris du galon en terme de radicalité, Cela dit, elle était loin de représenter la majorité des exilés, l'autre partie s'étant éparpillée initiant ainsi la grande sage des Juifs du monde. L’idée de « peuple », jusque-là adossée à un lieu, à une royauté, à une terre, s’effrita au profit d'une diaspora qui prit alors le relais de l’unité, non plus en tant que nation, mais en tant que pratique. Et cette pratique devint d’autant plus puissante qu’elle s’appuyait sur un support inédit: la Torah — texte mobile indéniablement premier outil de marketing, copiable, portable, conçu précisément pour traverser l’exil et maintenir le lien basé sur l'expérience commune.
  • Ce fut là une innovation décisive. Car jamais un culte n’avait disposé d’un outil aussi reproductible, aussi normatif, aussi adaptable. Et ce texte, bien plus qu’une loi, devint une stratégie de survie. Lorsque, en l’an 70, les Romains détruisirent le Second Temple, ce ne fut pas la fin, mais une mutation: le culte israélite, désormais structuré par le judaïsme rabbinique naissant — venu expliquer et surtout réparer les travers de la Torah — s’autonomisa du lieu sacré, et donna naissance à une pratique codifiée que les Romains eux-mêmes finirent par nommer "religio" — c’est-à-dire, un système cohérent de croyances, de rites, de normes et de textes.
  • Le "judaïsme" au sens moderne — celui des synagogues, des rouleaux, des lois et des débats talmudiques — naît là, dans la perte des repères matériels les plus essentiels à la vie d'un peuple — la langue, le territoire et les mœurs, inaugurant ainsi la catégorie même de religion — le culte de qui veut où il veut — et anticipant les grandes constructions théologiques qui lui succéderont: le christianisme, né de ses marges, et l’islam, qui suivra les mêmes dynamiques scripturaires et normatives. Le judaïsme, en ce sens, n’est pas qu’une religion parmi d’autres: il en est la matrice originelle.
  • À ceux qui soutiendraient que le judaïsme n’a pas supplanté l’idée de peuple juif, une simple question suffit: pourquoi faudrait-il alors se convertir pour en faire partie? Depuis quand adhère-t-on à un peuple par mémorisation de prières, examen doctrinal et validation rabbinique? Si l’appartenance dépend d’un rituel codifié, évalué par un tribunal religieux, alors il ne s’agit plus d’un peuple au sens anthropologique, mais bien d’une confession régulée — preuve, s’il en fallait, que le judaïsme, dès sa naissance, érigea sa confusion en norme.
  • Quelle que soit son étymologie, le terme d’origine latine Religion implique, par définition, une croyance inconditionnelle en un dieu — voire en une trinité, comme c’est le cas dans le christianisme. Or, pour les Israélites, cette exigence dogmatique ne s’impose nullement. L’ouvrage Must a Jew Believe Anything, de Menachem Kellner, spécialiste du Talmud et de Maïmonide, ancien professeur à l’université de Haïfa et lui-même Israélite orthodoxe, l’affirme sans détour : les Juifs n’ont pas l’obligation de croire. Il rappelle que l’innovation théologique de Maïmonide au XIIe siècle, dans son essai des Treize articles de foi, visait justement à instaurer, face à la montée du dogmatisme chrétien, une doctrine centralisée dans le judaïsme. Malgré un accueil initial enthousiaste, cette tentative demeura sans véritable postérité : si certains penseurs concédèrent que le judaïsme pouvait s’articuler autour de dogmes, très peu entérinèrent leur autorité effective.
  • Par conséquent, si, par définition, un Chrétien ne peut se dire athée sans renier sa foi — puisqu’il doit croire en Dieu — il n’en va pas de même pour les Israélites. L’histoire regorge de figures juives illustres qui, tout en professant des positions ouvertement athées ou agnostiques, n’ont jamais renié leur judéité. Mieux encore, leur appartenance n’a jamais été réellement contestée. De Baruch Spinoza à Sigmund Freud, en passant par les anarchistes Samuel Schwartzbard et Emma Goldman, les socialistes Moses Hess ou Karl Marx avec sa philosophie matérialiste, les figures révolutionnaires comme Léon Trotsky ou Grigori Zinoviev, jusqu’aux fondateurs paradoxaux du sionisme tel Théodore Herzl ou Hersh Mendel — tous témoignent de cette dissociation unique entre foi et identité. Même certains chefs d’État israéliens, tels que Golda Meir, revendiquaient sans ambiguïté une posture laïque: interrogée sur sa foi, elle résumait d’un trait cette inversion si caractéristique du judaïsme moderne: "Je crois au peuple juif, et le peuple juif croit en Dieu".
  • Le terme dat (דת), utilisé en hébreu pour désigner la pratique israélite, ne recouvre pas exactement le sens que véhicule le mot religion dans les langues occidentales. Il dérive de la racine perse dadan (« donner »), dont est issu le mot indo-européen data — signifiant littéralement ce qui est donné, une donnée. Ce glissement sémantique souligne une différence fondamentale de conception: là où la religion chrétienne suppose une adhésion dogmatique à un corpus de croyances, dat désigne d’abord un ensemble de prescriptions reçues, à observer. Les divergences entre judaïsme et christianisme s’enracinent d’ailleurs dans leurs conditions de naissance respectives. Il est historiquement incontestable qu’il exista, à une époque ancienne, une communauté israélite considérée comme un peuple (*am*, en hébreu). Et cela va de soi: les systèmes religieux n’existaient pas encore comme catégories distinctes. Les peuples étaient sédentaires, les langues locales, le prosélytisme inexistant, et l’écriture trop peu répandue pour formaliser un système universel de règles. C’est précisément avec les Israélites que ce modèle bascule. Grâce à la composition de la Torah — premier dispositif scripturaire reproductible du genre — le culte devient exportable, les autels se décentralisent, la pratique s’étend à des villages éloignés du Temple de Jérusalem, puis à d’autres contrées et rend possible l’exercice du culte "prêt à prier".
  • L’israélitisme n’exprime donc pas, originellement, la pratique pure d’une religion au sens chrétien du terme — surgie ex nihilo, imposée parfois par la force, adossée à une foi obligatoire — mais plutôt la poursuite de rites populaires, enracinés dans une expérience communautaire localisée, incarnée, difficilement réductible à ce qu’un simple rouleau peut traduire en prescriptions, gestes et chaleur humaine. Où qu’ils vivent, quel que soit leur statut social ou leur éloignement du centre sacré, les Israélites portent dans leur mémoire rituelle la cacherout, les bougies du vendredi soir, et l’attente du Shabat marquée par l’apparition de la première étoile — autant de coutumes bien antérieures à la Torah, fruit d’une longue vie quotidienne collective étendue probablement sur plus de sept siècles. Mais cette sédimentation de pratiques n’est pas l’opposé d’une religion naissante. Le judaïsme rabbinique s’en est saisi, les a codifiées, rationalisées, réécrites, jusqu’à en faire des injonctions techniques. Avec les siècles, cette surenchère de prescriptions a fini par devenir inapplicable dans sa totalité, y compris pour les plus zélés. Et à mesure que l’obsession du détail l’emportait sur le geste premier, cette technicité — au-delà d’un certain seuil de minutie — bascula pour certains dans une véritable névrose comportementale, particulièrement visible chez les orthodoxes les plus stricts.
  • Dans les grandes lignes, les différences majeures avec le christianisme résident dans deux singularités du judaïsme: d’une part, la liberté de ne pas croire — liberté théologique rarement reconnue ailleurs — et d’autre part, la transmission par la mère, qui permet à un individu d’être juif sans nécessairement pratiquer, ni même adhérer. Cette transmission biologique renforce une appartenance identitaire au-delà du dogme. Il faut donc le rappeler: à l’origine, les Israélites n’avaient pas besoin de la Torah. Unis sur leur terre, liés par des rites vécus, un code scripturaire leur était inutile pour exister. C’est la Torah, en réalité, qui eut besoin d’eux — de leur histoire, de leurs figures, de leur errance — pour bâtir une épopée, une matrice symbolique, une cohérence ex post. Or, loin de rassembler, ce texte aux pulsions punitives s’échina surtout à diviser: distinguant sans relâche les fidèles des récalcitrants, les élus des perdus. Elle institua une logique binaire, excluante, qui fractura les siens. L’éternelle dialectique des acceptationnistes et des récusationnistes venait de trouver son théâtre.
  • l ne reste plus grand-chose du peuple originel, sinon la mémoire façonnée par l’écriture. Le judaïsme, tel qu’il s’est transmis, n’est pas l’émanation d’une foi universelle ni la continuation d’un État ancien, mais le produit remarquable d’une mise en récit — ajustée, affinée, consolidée au fil des siècles, jusqu’à devenir norme, loi, identité.
    Cette mémoire textuelle — parfois douce, souvent dure — a permis à une communauté dispersée de se penser encore comme une unité. Mais ce tour de force, au prix d’abandons et de recodages successifs, a aussi laissé des traces, des tensions entre croyance et appartenance, entre éthique et prescription, entre culture et théologie. Être juif, aujourd’hui, c’est souvent habiter cet écart.
    Et peut-être que la grandeur de cette tradition réside là: non dans une fidélité figée, mais dans une capacité spectaculaire d’adaptation, parfois à la limite de l’amnésie — comme si la survie exigeait de savoir oublier ce que l’on fut, pour mieux dire ce que l’on devient.
la Résilience du Judaïsme
  • le "Monothéisme Conceptualisé" et "l'Athéisme des Croyants" sont deux concepts fondamentaux du judaïsme — exprimés originellement dans la Bible (Ancien Testament ou Torah ou Pentateuque) — qui ont assuré sa pérennité.
  • le polythéisme

  • "Toutefois, des mérites réels se trouvent en toi, puisque tu as fait disparaître les Achêrot de ce pays, et que tu t’es appliqué, de cœur, à rechercher l’Eternel."
  • Ce verset est une louange qui contribua à faire disparaître le polythéisme, incarné par ces arbres Ashêrot, symbole des cultes interdits dont le nom, dans le texte original, ne devait même pas être prononcé. Le polythéisme semble donc très diffus chez les Israélites au moment de la naissance de la Torah, vers -600 et se perpétue apparemment encore trois siècles plus tard, période supposée de l’écriture de ce passage. Les prophètes de la Bible représentaient donc un courant religieux en rupture avec la tradition. Ainsi, les cultes polythéistes des anciens Israélites ont d'abord évolué vers la monolâtrie où Yahweh n’était que le dieu principal, pour ensuite aboutir à un monothéisme dans lequel il resta le seul. Mutation lente qui provoqua, tout au long de la saga judéo-israélite, les querelles et les conflits qui menèrent les autorités de l’époque à sévir par des punitions exemplaires comme les destructions du Temple de Jérusalem ou l’exil.
  • le monothéisme
  • L’émergence du monothéisme constitua une véritable rupture — à la fois spirituelle, politique et culturelle. Il devint rapidement une clé de voûte pour sceller une identité collective, structurer une vision du monde, offrir un récit unique au milieu des mythes enchevêtrés du Proche-Orient. Mais cette révolution ne naquit pas du vide.
    Elle puisa vraisemblablement aux sources plus anciennes des monolâtries assyrienne ou babylonienne, où des dieux dominants émergeaient sans effacer totalement les autres. La légende sumérienne de l’argile insufflée de vie, transmise de bouche en bouche durant deux millénaires, aurait traversé les âges jusqu’à imprégner les récits israélites les plus fondateurs.
    On songe aussi au culte d’Aton, ce dieu solaire que le pharaon Akhenaton imposa comme entité unique vers -1350, rompant avec le panthéon égyptien. Bien que ce culte s’éteignît avec son créateur, il n’est pas improbable que son souvenir ait continué de flotter dans l’inconscient spirituel des peuples voisins. D’autant qu’un siècle plus tard seulement, la stèle de Merenptah mentionne pour la première fois le nom d’Israël, dans le contexte d’une défaite datée de -1207.
    Enfin, il est possible que le monothéisme israélite ait surgi d’un autre terreau encore : celui de l’échec. Face aux guerres, aux famines, aux exils, face à l’incompréhensible persistance de la douleur, peut-être fallut-il réorganiser le rapport au divin autour d’un seul principe — un Dieu unique, parce que le chaos semblait trop vaste pour répondre à plusieurs. Un Dieu cohérent, parce que la souffrance humaine exigeait une loi lisible. Un Dieu solitaire, parce qu’un monde déchiré n’acceptait plus les voix contradictoires.
  • la conceptualisation du monothéisme
  • Les options étaient multiples. Pourtant, quelles qu’aient été les raisons profondes de ce choix, le monothéisme israélite l’emporta, notamment grâce à une singularité décisive : l’interdit de représentation.
    Ce geste n’a rien d’anodin. Là où les cultes précédents dessinaient, gravaient, sculptaient leurs dieux pour les rendre présents, tangibles, familiers — le Dieu d’Israël, lui, échappe à toute image. En choisissant l’abstraction, ce culte installe délibérément le mystère et la crainte. On est jugé, béni ou puni… mais sans jamais savoir à quoi ce Dieu ressemble. Tantôt miséricordieux, tantôt impitoyable, il reste hors de portée, comme les plafonds immenses des temples ou des tribunaux, construits pour suggérer, par l’architecture même, la souveraineté écrasante des principes supérieurs.
    Un dieu irreprésentable, c’est un dieu que l’on ne peut approcher, ni contester. Un dieu qu’il faut craindre — notion fondamentale chez les penseurs israélites. En témoigne jusqu’à aujourd’hui le terme hébraïque haredim (ceux qui craignent), qui désigne les juifs ultra-orthodoxes.
    Or, ce Dieu que l’on craint, on n’ose ni le critiquer, ni l’accuser, même lorsque ses « méfaits » — guerres, souffrances, injustices — deviennent visibles. On loue, on prie, on bénit. On ne blasphème pas. Le silence devient respect — et parfois déni.
    Alors que les dieux visibles pouvaient être bousculés, insultés, détruits — comme le furent, en 2001, les Bouddhas de Bâmiyân, ces statues monumentales dynamitées par les Talibans dans une falaise afghane — l’absence d’image protège. Elle évite le sacrilège matériel, mais elle interdit aussi toute confrontation directe. C’est là une arme redoutable du monothéisme: l’inaccessibilité comme légitimité absolue.
  • Le monothéisme conceptualisé est donc bien une raison maitresse de la longévité du judaïsme et des religions qui en découle.
  • l'Athéisme des Croyants
  • Si un athée se retrouve paralysé après un accident, il invoquera le hasard, la fatalité, la mécanique froide d’un monde sans providence. Il ne cherchera ni sens caché ni dessein supérieur — il acceptera l’absurde comme réponse.
    Mais dans une situation identique, le croyant, lui, trouvera refuge dans l’idée que Dieu l’a voulu ainsi. Non pas toujours comme punition — parfois comme épreuve, comme leçon, comme étape inscrite dans un plan que lui seul, ce Dieu, comprend.
    Or cette posture, si rassurante soit-elle, soulève une contradiction profonde : un Dieu que l’on ne questionne pas, que l’on absout d’avance, que l’on croit par réflexe plus que par relation, n’est-il pas, au fond, un Dieu sans visage, sans exigence, sans vérité ? Un dieu que l’on croit mais que l’on n’interroge jamais, n’est-il pas devenu, paradoxalement, inutile — présent par habitude, absent par principe?
    C’est cette tension qu’exprime l’« athéisme des croyants » : non pas un rejet de Dieu, mais l’instauration d’un rapport muet, unilatéral, où la foi sert à expliquer, à digérer, mais rarement à chercher. Une foi sans révolte. Une foi sans dialogue. Une foi sans foi.
  • Qu’ils soient croyants ou athées, tous doivent, face au malheur, plier. Accepter. Survivre. L’événement ne fait pas de tri : il frappe, et chacun, selon ses repères, tente de s’y inscrire. Chez les athées, cette soumission est sans équivoque. Elle procède d’un monde sans transcendance, où le hasard règne, où l’absurde suffit. Nul à prier, nul à remercier, nul à haïr. Juste la réalité brute, nue, inévitable.
    Chez les croyants, en revanche, cette même soumission s’enveloppe d’une autre étoffe : celle d’une providence supposée. Loin d’être allégée, elle se double d’une exigence : il faut donner du sens. Il faut croire que cette souffrance a été voulue — pour une raison inconnue, mais juste. Et dans cette quête d’explication, le malheur prend une autre densité : celle d’un jugement possible.
    Or, en pratique, rien ne distingue vraiment les deux situations. La nature reste muette, les lois physiques implacables, les accidents, les échecs, les maladies suivent leur cours. Seuls changent les mots — et le fardeau. Car là où l’athée peut simplement endurer, le croyant se sent parfois sommé de comprendre, de mériter, ou pire, d’expier. Comme si à l’injustice s’ajoutait une dette invisible.
  • Les « messagers » de Dieu, eux, n’ont pas déserté. Ils accourent, en nombre, avec leurs formules ritualisées — ces phrases qui sonnent comme des réponses, mais n’en sont pas. « Les voies du Seigneur sont impénétrables », affirment-ils, comme pour clore toute tentative de comprendre. Ou encore « Dieu est grand », manière de rappeler que tout, même le pire, échappe à la logique humaine.
    Mais que disent réellement ces slogans ? Sinon que toute explication est vaine, que tout jugement est interdit, que tout questionnement est déjà une faute. Alors que les plaies, les malheurs, les désastres — loin d’être signes divins — obéissent plus sûrement aux caprices de la nature, aux chaînes mécaniques du réel.
    Et ce refus de penser, masqué sous le vernis de la foi, n’est-il pas une forme de renoncement collectif ? Un aveu muet: on préfère une injustice sacrée à une absurdité profane. Car l’idée d’un Dieu injuste est peut-être moins dérangeante, pour certains, que celle d’un monde sans Dieu.
  • L'origine de ce concept fondamental du judaïsme — sans lequel cette tradition n’aurait sans doute jamais acquis sa crédibilité ni rayonné au-delà de ses frontières — se trouve dans le récit de la Genèse, avec la célèbre fable du Libre Arbitre. Une punition, en réalité: celle imposée à l’humanité après qu’Ève eut goûté au fruit défendu. Mais cette notion, si centrale, marque surtout une déchéance de la responsabilité divine. Désormais, le destin de l’Homme ne relève plus de Dieu, mais de l’Homme lui-même. Ainsi, le Créateur se retire du chaos qu’il a laissé advenir — il se rend intouchable, irréprochable, idéologiquement préservé.
    Ce retrait est capital. Il survient à un moment historique d’effondrement: la communauté est détruite, le Temple rasé, le roi aveuglé, le peuple humilié par l’exil. Ceux qui conçurent le judaïsme dans ces ruines — des hommes, avant d’être des prêtres — savaient qu’ils ne pouvaient rien contre la crudité de la Nature. Leur Dieu, fragile dans les faits, ne pouvait guère peser sur le réel. Il devenait alors urgent de le dégager de toute responsabilité, de le désolidariser du monde, afin qu’il reste une manne symbolique, morale… et financière.
    Face à l’intraitable puissance de la Nature, seul véritable acteur non-déterministe, la foi dut donc s’abriter dans un récit où Dieu n’est plus tenu pour responsable. Ce glissement, Spinoza en saisit l’intuition fulgurante lorsqu’il forgea la formule devenue sa signature: Deus sive Natura — Dieu, ou plutôt la Nature. Une manière de rappeler que ce qui gouverne le monde n’est pas un dessein, mais une loi impersonnelle — à laquelle même les dieux doivent, en silence, s’incliner.
  • Cela fait donc plus de deux millénaires et demi que les fidèles des grandes religions abrahamiques — judaïsme, christianisme, islam — vivent, sans le savoir, à la manière des athées. Victimes d’un récit fondateur habilement construit, parfois machiavélique, ils avancent dans le monde comme si Dieu gouvernait tout… alors même que tout prouve le contraire.
    Le paradoxe est là. Ce n’est pas tant leur crédulité qui interroge — après tout, les rituels, les prières, les dogmes apportent du réconfort, surtout aux âmes les plus ébranlées — non, ce qui sidère, c’est d’avoir traversé les siècles en s’entretuant pour des dieux de papyrus puis de papier. Des entités muettes, inactives, impassibles face aux carnages qu’on perpétuait en leur nom. Et de le faire encore.
    Peut-être est-il temps, enfin, de saluer les vrais lucides. Ces athées, ces fatalistes, ces “acceptationnistes”, persécutés, brûlés, réduits au silence pour avoir osé dire que le monde est ce qu’il est — sans ordre supérieur, sans dessein caché. Ceux-là méritent leur moment. Non comme vainqueurs, mais comme témoins de ce que l’on gagne à ne pas travestir l’absurde, et de ce que l’on perd à vouloir à tout prix lui imposer un sens.
Haredim
  • Les Haredim ou ceux qui craignent en français, sont une communauté religieuse orthodoxe composée de sectes diverses qui incarnent une conséquence particulièrement étrange et dangereuse du diktat de la Torah. Comme on peut l’observer sur la photo ci-dessous, prise lors d’une procession vers un lieu sacré, leurs clones humains, tous barbus et vêtus de noir et blanc, évoluent en masse, collés les uns aux autres, comme dans un troupeau. Incapables de décider quoi que ce soit par eux-mêmes, chacun de leur mouvement est dicté par un mimétisme grégaire lui-même guidé par les invectives d’un mâle dominant, en l'occurrence, un rabbin charismatique. Impossible, donc, de ne pas faire le rapprochement entre ce comportement et celui du monde animal, lorsque, après un passage de ce genre en un quelconque lieu, on constate le décor apocalyptique qu’ils laissent derrière eux, un sol jonché de restes de nourriture, de cannettes et bouteilles, de papiers et de détritus les plus divers.
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  • Cette population à part et séparatiste, est le fruit de l’interprétation par le judaïsme rabbinique des enseignements de la Torah. Ce mouvement jouissait, déjà au Ier siècle de notre ère, des Zélotes et de leurs Sicaires, ceux qui poussèrent aux révoltes et soulèvements contre les Romains et passèrent pour les héros du siège de Massada nonobstant leur appartenance à une mouvance culturelle extrémiste et fanatique. Le sectarisme qui caractérise le mouvement Haredi rend ses adeptes agressifs et souvent très violents envers les autres, tous considérés, même les Israélites, comme mécréants et blasphémateurs. Il n’est pas indifférent de souligner le caractère coercitif et antidémocratique de cette société orthodoxe qui s’immisce profondément dans la vie de ses membres, censure leurs lectures et leurs loisirs, codifie et surveille leurs normes vestimentaires, sanctionne leur conduite en public, intervient dans leur vie privée, règle leur vie sociale et économique, oblige tous ses jeunes, jusqu’à un âge très avancé, à passer leur temps dans des établissements religieux dont elle fixe minutieusement les programmes d’études qui n’accordent aucune place aux disciplines dites profanes, écarte de ses rangs les récalcitrants et les tièdes et excommunie les fauteurs de troubles menaçant l’intégrité du groupe. Ce jour-là, le jour de la photo, 45 fidèles sont morts suite aux mouvements de masse dont la densité, au départ, fait tomber quelques individus puis entraîne l'hécatombe et l’écroulement de certaines structures trop légères pour l'occasion. Incident qui, de plus, résulte de l'indiscipline de ces fidèles qui ont davantage confiance en Dieu que dans les avertissements des forces de police qui avaient prévenu de ce danger. Cela rappelle d'autres mouvements de foules aiguisés par le fanatisme religieux comme le Grand Pèlerinage de La Mecque, où chaque année, des morts et des blessés, piétinés par leurs semblables, sont à déplorer.
  • Les Haredim sont nombreux en Israël proportionnellement à la population laïque et influents au point de faire partie de la coalition parlementaire au pouvoir jusqu'en juin 2021. Mais il n'est pas dit qu'ils n'y reviennent pas. Selon un rapport de l'Institut Israélien pour la Démocratie publié en mai 2020, les Juifs ultra-orthodoxes représentaient 9.93 % de la population totale d'Israël en 2009. En 2040, ce chiffre devrait atteindre 20 %, puis 32 % en 2065. Il est donc fort probable que, statistiquement et si des mesures ne sont pas prises dans les plus brefs délais, les orthodoxes reprendront rapidement le pouvoir et pourraient transformer le pays en dictature religieuse. Petit bémol pourtant: vivant exclusivement de dons et d'aides sociales nationales et internationales et ne possédant (heureusement) aucune organisation militaire indépendante, cette communauté dépend toutefois de la population laïque. Cette dernière, en effet doit rester en mesure d'assurer sa survie à travers celle de l'État qui lui, disparaitrait du jour au lendemain sans son armée et une stratégie défensive adéquate. En fait, plus ils se multiplient et plus ils pèsent sur l'économie, se créant ainsi de nombreux ennemis parmi les contribuables, las de payer des taxes pour les entretenir. Affaire à suivre, donc...
  • La république est un mode d'organisation d'un pays dans lequel le pouvoir est exercé par des représentants de la population, généralement élus, et où le chef d'État n'est pas héréditaire et n'est pas le seul à détenir le pouvoir. Une république est typiquement antonyme d'une monarchie héréditaire, mais n'est pas toujours synonyme de démocratie. La république est en 2021 la forme de régime politique la plus répandue: sur 197 pays, 151 sont officiellement des républiques. On remarquera pourtant, que l'Institut Israélien pour la Démocratie publie un rapport annuel de 103 pages sur cette communauté, la traitant ainsi comme entité à part entière. A noter une fois de plus, que le recensement des ethnies ou des groupes sociaux ou religieux, qui aurait hérissé le poil d'honnêtes républicains, ne dérange absolument pas l’administration israélienne qui en effet, et certainement à dessein, n’est pas une république quoique démocratique. À croire qu’ils ont gardé, enfoui dans leur patrimoine génétique, l'habitude des discriminations subies dès leur apparition dans le pays de Canaan et ce, jusqu’à celles infligées par les Allemands pendant la Shoah. Le problème est que, désormais, ce sont eux qui les imposent, comptent les gens, les catégorisent, les étiquettent, les parquent dans des ghettos comme pour les pionniers marocains ou les plus récents éthiopiens... bref, tout ce qu'ils n’ont pas apprécié qu’on leur fasse. Tout ce qu’une république moderne refoulerait et proscrirait. Ce rapport donc, extrêmement détaillé, recueille toutes les caractéristiques et paramètres possibles d'une étude approfondie telle qu'on la pratique pour un État et non pour une simple communauté religieuse: recensement de la population, productivité, statut et prédictions démographiques, situation familiale des habitants, éducation primaire, secondaire et universitaire, niveau de vie, proportion des propriétaires immobiliers, taux de chômage, salaires mensuels, utilisation des ordinateurs, navigation sur internet, lieux de villégiatures, voyages et biens à l’étranger, oeuvres de bienfaisance et tutti quanti...
  • Pour mériter un pareil traitement et la transgression d’une certaine éthique dans la classification ethnique et religieuse des populations, deux possibilités: ou cette communauté représente un enjeu primordial pour l’état d'Israël et par conséquent son analyse millimétrée fait partie d’un suivi vital pour l’économie, ou, tout le contraire, elle représente une menace, celle d’une dictature religieuse qui entraînerait sa mort en tant que pays libre et enterrait le rêve des rescapés de la Shoah et de leurs descendants .
  • Leur culture
  • Leur culture est limitée à certains livres sacrés ou écrits et imprimés spécifiquement pour leur usage. Le réseau internet qu'ils utilisent est limité, mais bizarrement, puisque la technologie des smartphones est en opposition totale avec les fondements de leur doctrine, ils sont assez modernes, quand ça les arrange, pour les utiliser. L'impossibilité de fréquenter des femmes en dehors du mariage, quoique souvent enfreinte, les lois très restrictives concernant la pureté familiale et les nombreux interdits qui empêchent une sexualité normale les rendent sexuellement frustrés et exagérément agressifs. En outre, les mariages ne pouvant s'effectuer que par des entremetteurs au sein de leur communauté, le pourcentage des divorces est très élevé ainsi que celui des mariages consanguins et des maladies qui y sont liées. Le manque de culture générale ou productive amène donc rapidement un grand pourcentage de cette population à s'inscrire sur la liste des chômeurs et à continuer de peser sur l'économie.
  • Leur hypocrisie
  • Comme tous les membres de sectes, les Haredim devraient être convaincus du bien fondé des règles qui ordonnent et dictent leur comportement quotidien, hebdomadaire, mensuel ou annuel. Hors chez eux, ce n’est pas le cas vu que dans maints domaines, il s’évertuent à contourner et tromper la Halakha, cet ensemble de prescriptions, coutumes et traditions collectivement dénommées Loi juive. En voici un exemple très flagrant recueilli dans un article israélien du site HAI-PO titré: Les fils de la confusion sabbatique ont été installés sur la promenade Bat Galim à Haïfa ! .
  • Tout d’abord, parlons du titre: Les fils de la confusion sabbatique... (traduit mot à mot de l’hébreu). Confusion, car ces fils (dans le sens de ficelles) sont censés confondre la Halakha dans son précepte de ne faire aucun travail le jour de Shabbat. Les anciens, à ce propos établirent une liste de 39 travaux interdits dont l’un d’eux est l’exportation d'objets domestiques vers des tierces personnes. Or, il s’avère que ce déplacement d’objets à l’intérieur du domicile ou de ses extensions, telles que la cour ou le jardin, est autorisé. En tendant des fils entre les poteaux électriques, arbres ou autres mâts disponibles tout autour d’un quartier, d’une implantation ou d’un voisinage, une immense cour se crée autour des habitations et l’échange de biens domestiques peut alors s’effectuer sans crainte de violer le précepte — tout au moins, aux yeux et cerveau de ces religieux. Car penser que la Halakha, perçue à ce point comme le père Fouettard, n’y verrait que du feu, c’est un peu se tirer une balle dans le pied tout en arborant un pied de nez grand comme un mât, justement, à toute leur doctrine. Élire des Sages pour créer des préceptes qu’ils ne respecteront pas ou mieux, qu’ils contourneront comme de vulgaires interdictions de stationner, relève d’une hypocrisie de très haut vol et révèle, surtout, la véritable nature de leur credo et respect pour autrui. Pour autrui, oui, puisque ces êtres, qui se prennent réellement pour les élus de Dieu, ne tiennent pas compte, comme l’expliquent l’article en question et la photo ci-dessous, de la laideur et du dérangement que cause le spectacle de ces fils, tendus aussi bien dans les voisinages de banlieue que sur les promenades touristiques de la ville de Haïfa, en l'occurrence, mais pas que.
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  • Soit dit aussi que ce genre d’entourloupe du Shabbat (pour la différencier de celle du Dimanche...), ne s’applique pas exclusivement à ce domaine. Ces gens, au fil des siècles, sont passés maîtres dans l’auto-escroquerie et, ne serait-ce que pour cet exploit de bas étage, devraient être salués pour leur don de monte-en-l'air.
  • Leurs enfants
  • Chétifs, blèmes, frêles, leurs enfants sont maltraités. Certaines associations, bêtes noires de ce mouvement, s’occupent de la réinsertion dans la société, des adolescents ou moins jeunes qui désirent fuir ce dieu intrigant, seule autorité de cette secte, et voler de leurs propres ailes. En quittant le mouvement, ils ont besoin de soutien puisque bannis de leur famille et amis. On explique aux enfants des jeunes femmes qui s’enfuient, que leur mère brûlera en enfer pour s'être éloignée du droit chemin.
  • Les enfants harédim sont élevés comme des clones. Du point de vue vestimentaire, dans les habitudes à ne jamais perdre, dans les rites à respecter, rythmés par des cadences immuables. On leur apprend à dépendre d’un rabbin qui a réponse à tout. A ne rien faire sans l’informer. On les prive de l’enseignement de base dont ils auraient besoin pour vivre ou ne serait-ce que subsister dans une société normale. Il n’étudient que les livres sacrés et ne savent pas que Rome est la capitale de l’Italie. Ces enfants ne font pas de sport, discipline mal vue pour la dépravation qu’elle occasionne et surtout par sa mixité. Ces gosses sont robotisés et parfois abusés par des éducateurs peu scrupuleux.
  • La transmission du savoir et des préceptes se fait évidemment par les enfants, dès le plus jeune âge comme commandé par ce verset du Deutéronome Fais-les connaître à tes enfants et aux enfants de tes enfants dans lequel l'auteur explique : avec huit cents ans d’avance sur Charlemagne, un homme avait compris qu’il n’y avait pas de présent si celui-ci ne préparait pas le futur, et ce, dès l’âge de six ans. En effet, c’est très jeune qu’il faut transmettre, car, selon les Maximes des Pères, cela s’apparente à écrire sur une page vierge, ce qui est une garantie de pérennisation de l’enseignement. Sauf que l'intention généreuse de Charlemagne de sortir les enfants de l'analphabétisme n'a rien à voir avec le serinage d'enseignements ségrégationnistes dont le but de sortir les enfants de la société et les isoler dans un savoir limité et figé.
  • D'autres rites singuliers attendent ces enfants une fois mariés, comme celui de présenter à son rabbin la culotte de celle-ci si elle présente une tache douteuse. Le décisionnaire, en fonction de la couleur et de la taille de la tache, la déclarera pure ou impure, imposant ainsi la reprise ou non du compte des jours pour se tremper dans le bain rituel: c'est donc le rabin qui a le pouvoir d'autoriser ou non les relations sexuelles. Le rabbin sait donc exactement quand ses ouailles ont des rapports. C'est bien le mari qui va présenter la culotte de sa femme et non la femme elle-même puisque celle-ci n'a pas vraiment le droit de l'approcher. Pas mieux pour les femmes qui doivent se présenter au mikvé, le bain rituel, pour se purifier dudit cycle. Son nom est inscrit dans un registre qui lui aussi peut suggérer la fréquence des rapports avec son époux. Je ne m'attarderai pas sur la description d'autres rites, d'une part parce qu'ils font l'objet de volumes très épais qui dictent, heure par heure, la vie de ces personnes et d'autre part, parce que ce serait donner trop d'importance à qui d’importance et de respect, n'en réserve aucun à autrui ou à la société en général.
  • Certaines factions des Haredim peuvent être encore plus radicales. Les Neturei Karta en sont un exemple, qui se distinguent par leur antisionisme. Ils considèrent que l’État juif de l’Antiquité fut détruit par la volonté divine et que seul le Messie pourra le rétablir, ce qui ôte toute légitimité à l'actuel État d'Israël.
  • des femmes
  • Voici une vidéo de ce que les rabbins de ces sectes enseignent aux élèves des écoles religieuses, appelées Yeshiva ou encore Colel, dans une matière nommée Torah orale.

    La Torah orale n'a jamais été donnée au peuple d'Israël, c'est un mythe urbain inventé par les rabbins et son but est de leur donner le pouvoir, l'autorité et le contrôle sur les fidèles. (Dr Golan Broshi, spécialiste de la Bible et sociologue. (site en hébreu))

    La vidéo est en hébreu donc tout le monde ne pourra pas la comprendre mais je l'insère pour preuve. Suit la traduction de ce qui y est dit: oreilles sensibles, abstenez-vous de lire ou d'écouter, c'est d'une vulgarité et bassesse effarantes et absolument inimaginables.
    video retirée du net


    (Minute dans la vidéo et orateur)
    • 0:00 - Rabbi Yakir Bota
      Il est dit dans la Guemara: La femme n'est qu'un sac d'excrément et sa bouche est pleine de sang, souillée du sang de ses règles. Pourquoi un homme devrait-il être attiré par une femme?
    • 0:18 - Rabbi Its'hak Cohen
      Une femme est un pet plein d'excréments et de chaleur...
    • 0:28 - Rabbi Moshe Vaknin
      Il y a des femmes bouchées, ne vous étonnez pas que des hommes assassinent des femmes...
    • 0:33 - Grand Rabbin d'Israel Meir Lau
      Elles n'ont pas de contrôle de soi, trois verres de vin et elle perd le contrôle. Avec quatre verres, elle se fait même un âne au marché et n'est pas méticuleuse. Elle peut vouloir n'importe qui, dans la rue, au vu de tous, elle n'a aucun contrôle lorsqu'elle est saoule...
    • 0:58 - Rabbi Yehoshua Weizmann
      La femme a un besoin naturel de se mettre du parfum parce que naturellement, son odeur est moins bonne, oui, c'est ce que nos sages disent et l'homme, naturellement, n'a pas besoin de ça...
    • 1:10 - Rabbi Yigal Cohen
      Lorsqu'un homme sent le parfum, ça le perturbe dans sa tête...
    • 1:13 - Rabbi Yosef Kellner
      Je n'ai jamais entendu une telle chose, que les femmes soient spirituelles, quelles bêtises, c'est simplement faux...
    • 1h45 - Les cigognes de Breslav
      La femme n'a pas de cerveau, pas de connaissance...
    • 1:51 - Rabbi Yosef Kellner
      Lorsque j'enseignais dans une autre école je disais aux filles que si elles ne me tricotent rien, qu'elles n'entrent pas en classe, qu'elles fassent quelque chose de positif, qu'elles fabriquent au moins des Kippas...
    • 2:09 - Rabbi Menachem Edri
      Les femmes ne devraient pas monter dans le bus pour ne pas déranger les hommes. Qu'elles prennent un taxi...
    • 2:20 - Rabbi Meir Eliyahu
      Les femmes et les hommes sont interdits...
    • 2:25 - Rabbi Yossi Mizrahi
      Des tonnes de maquillage, maillot de bain, plage, 2h du matin dans les boîtes de nuit, saoules, elles s'étonnent qu'on les viole, sa vie est détruite puis elle doit avorter. Le jour du jugement, sa punition sera immense... 1000 jours de torture comme on a jamais imaginé...
    • 2:46 - Rabbi Baruch Gazhei
      Les femmes ont beaucoup de cancers du sein parce que tous les yeux sont braqués sur leur poitrine...
    • 15h00 - Rabbi Yossi Mizrahi
      Pourquoi Dieu a-t-il fait la virginité de la femme? Car lorsqu'elle la perd elle devient une chose usée et sa valeur, selon la volonté de Dieu, baisse de façon vertigineuse. Comme une bouteille de Coca. Fermée elle a sa valeur et tu peux la consommer, ouverte, qui va l'acheter et en boire?
    • 3:26 - Rabbi Eitan Baghdadi
      On la trouve, on la brûle sur place, avant, c'était comme ça, pas comme aujourd'hui qu'on la laisse faire...
    • 3:32 - Rabbi Ronen Shaulov
      Des enfants sont hospitalisés et meurent à cause des femmes qui ne ramassent pas leurs cheveux...
    • 3:49 - Rabbi Snir Guetta
      Qu'elle couvre ses bras, qu'elle ferme encore un bouton pour Dieu, ainsi elle fera fermer encore un service entier à l'hôpital...
    • 3:57 - Rabbi Zamir Cohen
      Il est interdit d'écouter la voix d'une femme qui n'est pas ton épouse ou ta fille...
    • 4:02 - Rabbi Its'hak Fenger
      Les cheveux d'une femme qui ne couvre pas sa tête nourrissent les démons qui viennent les sucer...
    • 4:09 - Rabbi Snir Guetta
      La femme qui montre ses cheveux et aime qu'on lui dise qu'elle est belle, porte le mal sur toute sa famille et dans sa maison...
    • 4:54 - Rabbi Yigal Cohen
      Une femme devrait tout couvrir...
    • 5:06 - Rabbi Snir Guetta
      Une femme devrait tout couvrir...
    • 5:25 - Rebbetzin Yaffa Shem Tov
      Il vaut mieux qu'une jolie fille meure plutôt que d'amener le mal sur un homme...
    • 6:08 - Joel Kreuss
      Il vaut mieux que ma fille meure si elle est trop jolie...
    • 6:19 - Grand Rabbin Its'hak Yosef
      Les femmes doivent rester esclaves, faire les travaux de la maison et c'est tout...
    • 6:32 - Rabbi Yossi Mizrahi
      Une femme n'est pas autorisée à prendre du poids...
    • 6:47 - Rabbi Eliezer Berland
      Une femme est un âne...
    • 6:55 - Rabbi Yoram Sri
      une femme est menteuse et donc inapte à témoigner...
    • 7:12 - Rabbi Michael Laitman
      Béni sois-tu qui ne m'a pas fait femme...
    • 7:36 - Rabbi Shlomo Karach
      Tu as envie d'avoir des règles toutes les deux semaines? Non, c'est dégueulasse. C'est pour ça que tu as le droit de prier et pas elles...
    • 7:49 - Rabbi Ravid Nagar
      On a injecté du sang de règles à des animaux, ils sont tous morts...
    • 7:56 - Rabbi Yossi Mizrahi
      Une femme n'est pas autorisée à s'approcher du vin et de la nourriture. Elle passe son impureté à la nourriture...
    • 8:21 - Rabbi Ravid Nagar
      Une femme qui arrose des plantes pendant ses règles peut les détruire...

  • Voilà, le niveau est particulièrement bas, à se demander si laisser des rabbins ou qui que ce soit, d'ailleurs, enseigner de pareilles abominations est légal et éthique. Pourquoi les autorités laissent faire? Pourquoi la religion doit se salir autant? Pourquoi les parents confient leurs enfants à ces bourreaux idiots et mentalement limités? Les questions seraient sans fin, je laisse mon lecteur les imaginer...
Antisémitisme
  • L’antisémitisme, comme toute forme de rejet, trouve ses racines dans un réflexe aussi ancien que l’humanité elle-même. Il n’a donc rien d’exceptionnel, relevant du même mécanisme que l’anti-américanisme des Européens, l’anti-islamisme du monde modéré, l’anti-indianisme des colonisateurs américains, l’anti-protestantisme des catholiques, l’anti-européanisme des Anglais et l’anti-tout de tous les autres. La haine naît sans doute du même terreau instinctif que l’amour et font tous deux partie d'un héritage émotionnel complexe que nous portons tous. Nul besoin de s’affoler, donc, ni de stigmatiser. Il est vrai que toute forme d’intolérance n’est pas forcément apparentée à une intelligence supérieure, mais, bien qu’elle reste l'apanage des sots, il faut reconnaître qu’il est extrêmement difficile d’apprécier toujours tout et tout le monde.
  • Ne nous méprenons pas non plus sur le comportement grégaire des humains. Il n’a rien d’altruiste. Bien au contraire. Il est plutôt l’expression même de l’égoïsme. Pas une seule particule qui compose l'être humain n’a la moindre propriété non ego-dirigée. Et comme le reste, le grégarisme n’a rien d’une passion effrénée pour les autres, mais reflète au contraire un besoin personnel de protection de la part des autres. Ainsi, personne ne dit je t’aime en en réalisant réellement le sens. Ni à sa mère, ni à son frère, ni à ses enfants, ni à une femme. Ce qu’on veut dire en fait, c’est j’ai besoin de toi. Ou en d’autres termes si tu disparais, qui va s’occuper de moi, qui va m’aimer, qui va s’amuser avec moi, qui va me donner l’impression que je sers à quelque chose ou avec qui je vais faire l’amour?. La plus belle chanson d’amour de tous les temps n’est-elle pas ce fameux Ne me quitte pas de Jacques Brel? Il n’a pas dit Je ne te quitte pas. Il ne va pas s’inquiéter de laisser une femme qui ne lui plait plus. Non, il s’inquiète d'être abandonné parce qu’il est convaincu qu’il ne retrouvera plus jamais le même cocktail de sensations, bonheur - fierté - beauté - compréhension - complétude et sexe, chez une autre femme. Mais son problème, ce n’est pas Elle. Il ne lui demande pas de rester pour son bien à elle, puisque son bien est de le quitter! Vouloir son bien, serait de la laisser partir, de lui souhaiter bonne chance, de lui dire restons en contact, invite moi à déjeuner dès que tu reformes un couple, j'adorerais rencontrer l'heureux élu et m'assurer de votre bonheur...
  • Eh bien le racisme, l’antisémitisme, la discrimination, le séparatisme, l’apartheid, la xénophobie, le nationalisme, le chauvinisme, l’autonomisme, le civisme, le patriotisme, le jingoïsme, le fanatisme, la partialité, l’esprit de corps ou de parti, l'intolérance, le sectarisme, le séidisme, le parti-pris, l’étroitesse, l’intransigeance, l’élitisme, l’esprit de clocher, l’exclusivisme, le mandarinat... sont autant de termes inventés pas les humains pour exprimer ce profond mépris des autres, marquer leur différence et leur conviction d’unicité. Pour nommer l'égocentrisme qui gouverne chacun de nous et que nous gérons souvent au plus mal.
  • Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cacher ses propres défauts n’est pas le meilleur moyen de les faire oublier. Bien au contraire. Si je rappelle, sans hostilité, que la notion de peuple élu, inscrite dans les textes fondateurs, a parfois engendré des modèles d’exclusivité que l’Histoire a reproduits ou caricaturés sous d’autres formes comme l’apartheid, par exemple, qui existait déjà en Inde avec les castes, ou encore en Israël où l'on perpétue la coutume du recensement ethnique et religieux, on va me reprocher de favoriser l’antisémitisme. La bienséance n'apprécie guère les empêcheurs de tourner en rond, et souligner le défaut d'une démocratie primitive héritée d’un passé trop lointain fait partie des médisances à éviter. Comme si trouver sa propre mère la plus douce, ses enfants les plus beaux et sa femme la meilleure épouse qui soit nous rendait plus humains ou plus aimables.
  • Ainsi, l’expression de la vérité et la reconnaissance de ses propres défauts implique le respect et dénote une clairvoyance qui permet, au contraire, d’éviter que le sujet ne devienne tabou ou ne constitue un argument supplémentaire d’accusation aux mains de ses détracteurs. Un peu comme lorsqu’un bedonnant rentre le ventre lorsqu’il croise un miroir. Tant qu’il niera son véritable aspect, il ne pourra s’en défaire. Son apparente minceur le confortera et l'empêchera de prendre le problème à bras-le-corps pour le combattre et ne plus avoir à le vivre au quotidien. Si on laisse les antisémites énumérer les erreurs des juifs à leur place, c’est là que ces derniers deviennent vulnérables et se positionnent en fautifs. En déclarant qu'ils sont conscients de leurs imperfections, de leurs fautes, des erreurs de leurs anciens, ils assurent l’opinion de leur équité, de leur souci de perfection. Ils communiquent que celles qui sont réparables seront modifiées et que celles qu'ils conservent, les imperfections, j'entends, sont ceux qu'ils jugent utiles à leur survie pour des raisons qui leur sont propres, à défaut d'être comprises.
  • L'antisémitisme en outre, ou toute autre forme de racisme, ne naît pas tout à fait par hasard. Sur les sentiments, on ne détient jamais toute la vérité et les origines d'une haine en font partie. Il faut admettre que certains versets de l'ancien testament — comme bien d’autres textes anciens — portent les stigmates d’une époque brutale, où l’identité se construisait contre l’autre. Lorsque Dieu s'adresse à Moise en ce termes:
  • quand l'Éternel, ton Dieu, te les aura livrés et que tu les auras vaincus, tu les frapperas d'anathème. Point de pacte avec eux, point de merci pour eux! Ne t'allie avec aucun d'eux: ta fille, ne la donne pas à son fils, et sa fille, n'en fais pas l'épouse du tien!

  • il devient ardu d’ignorer la charge symbolique et potentiellement dangereuse de telles invectives, surtout lorsqu'elles continuent de résonner dans des pratiques actuelles. L'anathème signifie un isolement, un éloignement des personnes ou groupes visés, un embargo. A travers la parole de son dieu, le texte incite donc à n'avoir aucun contact avec les peuplades voisines et, qu'on le veuille ou non, consciemment ou pas, les lecteurs de ces invectives en restent imprégnés et communiquent ce sentiment à leur progéniture.
  • Le proverbe dit:Qui sème le vent, on récolte la tempête, il est tellement éloquent sur le boomerang du désamour. Une communauté est facilement observée, jalousée voire méprisée à cause de son passé ou sa différence. Mais plus elle la réduit en s'efforçant de comprendre les autres et de se fondre dans la masse et moins elle risque d'être persécutée. Ça tombe sous le sens. Ils est impératif d'accepter l'immuable qui perpétue la distance et de le dissoudre en s’assumant, se rendant tolérables: les autres en deviendront d'autant plus tolérants.